La valorisation du foncier ferroviaire obéit-elle à des règles propres ?
1. e foncier ferroviaire est
devenu au fil des dernières
décennies une ressource essentielle
pour les grandes opérations d’urba-
nisme (Paris Rive Gauche, Euralille,
Batignolles,BordeauxSaint-Jean…).Le
potentielcontinuedefairerêver.Dans
le secteur dit « Paris Nord Europe »,
triangle formé par la Porte de la
Villette, la Porte de Clignancourt et
les gares de l’Est et du Nord, soit un
périmètre de renouvellement urbain
de600 ha,75 hadefoncierferroviaire
sont considérés comme mutables.
Dans un genre un peu différent mais
toujours en Île-de-France, il est inté-
ressant d’envisager les abords des
futures gares du Grand Paris Express
sousl’angledelavalorisationfoncière.
Uneétudeconduiteen2011 et2012 par
laSociétéduGrandParis,laDRIEAet
l’urbanistePhilippe Panerai,citéepar
l’Observatoire régional du foncier1
, a
concluquelefonciermobilisabledans
un rayon de 800 m autour des gares
représentait un potentiel théorique
de 4000 ha nets. Selon cette étude,
250 000 à400 000 logements(10 000 à
15 000 par an pendant 25 ans) pour-
raient y être construits, ainsi que 13 à
22 millionsdem2
deplancherpourles
locaux d’activités économiques et les
équipements de proximité. Combien
seront effectivement réalisés ?
Ici, à l’enjeu de renouvellement ou de
développementurbains’ajouteceluide
tirer les bénéfices sociaux d’un inves-
tissement public colossal dans une
infrastructure de transport majeure.
1 Le foncier du Grand Paris, comment le
mobiliser ? Juin 2014, p.14
Dossier
Le foncier ferroviaire a ses
particularités : la présence d’une
gare, des coûts techniques de
libération relativement élevés et,
bien sûr, un propriétaire attitré,
aujourd’hui SNCF, en font partie.
Sans remettre en cause les lois
du marché, elles ne sont pas
sans effet sur le processus de
valorisation, financière mais aussi
urbaine, de ce foncier.
Par Laurent Escobar,
directeur associé du bureau
d’études Adéquation
« GARE » À L’EXCÈS
D’OPTIMISME
Une partie de ce potentiel se situe
sur les gares elles-mêmes ou sur des
emprises ferroviaires, notamment
aux interconnexions du réseau avec
les lignes de RER. La réutilisation
du foncier ferroviaire peut donc être
liée,commedanslecasduGrandParis
Express, à la création d’une gare. Elle
donne de la valeur au quartier en per-
mettant son accessibilité, sans pour
autant que son coût pèse sur le bilan
del’aménagement.Maislemêmeeffet
joue quand la gare pré-existe à l’amé-
nagement de fonciers voisins.
Cettevaleurn’esttoutefoisperçueque
tardivement par les investisseurs et il
fautattendreledémarragedestravaux
pour voir les prix commencer à aug-
menter.Laperspectived’uneplus-value
foncièrequasicertainemaisàunterme
difficileàconnaîtreadepossibleseffets
pervers.L’aménageuretlepropriétaire
des terrains peuvent être amenés, par
excès d’optimisme, à surestimer leurs
recettes, au moins dans les premières
phases. Pour retrouver l’équilibre, ils
devront densifier les projets avec le
risque de dépasser les capacités d’ab-
sorptiondumarchéetdeproposerdes
produitsmoinsdésirables,notamment
en logement.
Lavalorisationfoncièredusimplefait
delagareestdoncenpratiquedifficile
àexploiter.Lorsdesacréationen2010,
la Société du Grand Paris (SGP) « s’est
vu attribuer par le législateur des com-
pétences d'aménagement. L’idée initiale
était de lui permettre de récupérer la
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La valorisation du foncier
ferroviaire obéit-elle à des
règles propres ?