2. Á contre temps : retour sur quelques
“évidences” de la critique en “fantastique”
par Roger Bozzetto (Université de Provence)
Depuis qu'il a été posé comme un “genre littéraire” le fantastique, ou du moins ce que l'on
désigne sous ce nom — et qui varie dans le temps et selon les critiques — a inspiré de
nombreuses théories. Elles portent sur l'appartenance ou non de tel texte au “genre” selon des
critères qui sont souvent différents . Ils peuvent se fonder sur la structure du texte et des
“effets” qu'il produit; sur la thématique qui lui est ou non propre ; sur le rapport entre le texte
et les attentes des lecteurs ; sur sa visée prise sous l'angle sociologique; sur son origine et son
éventuelle évolution ou tout simplement sur l'intérêt spécifique qu'il présente. Ce sont là des
points d'approche parfaitement estimables, dont certains ont produit des éclairages significatifs
sur le sujet.
De plus , en France au moins, une ligne critique est repérable qui débute par le texte de
Walter Scott “On the Supernatural in Fictitious Compositions; and particularly on the Works of
ETA Hoffmann” dont la seconde partie a servi de préface aux premières œuvres d'Hoffmann
traduites en France sous le titre “Sur Hoffmann et les compositions fantastiques”.1 La polémique
qui a lieu alors est analysée par PG Castex dans Le conte fantastique en France de Nodier à
Maupassant. On a moins remarqué que l'article de Nodier “Du fantastique en littérature” était
une manière de dépasser la querelle initiée — pour des raisons discutables — par Walter Scott.
Pourtant on considère l'article de N odier comme entamant en France une réflexion argumentée
et sereine sur “le fantastique” en littérature.
Par la suite, la littérature se réclamant du fantastique a connu des fortunes critiques
diverses , et il a fallu attendre le début des années 1950 pour que l'Université s'y intéresse
vraiment avec P.G. Castex. Puis que par la grâce d'un esprit libre, Roger Caillois, qui présente
une anthologie mondiale de ces textes, qui établit un corpus de références, ainsi qu'en
exhumant de Potocki Le manuscrit trouvé à Saragosse — qui servira de base et de référence à
l'approche structuraliste de Todorov. Depuis, les études se sont multipliées, on a mis en
perspective l'hésitation “todorovienne”, on s'est intéressé aux rapports de la folie et de la
littérature fantastique, aux effets de fantastique comme la “monstration” et la “sidération” 2. Les
rapports que la peinture, la photographie, le cinéma entretiennent avec les effets de fantastique
ont aussi été, quoique rarement, abordés (Bozzetto Du fantastique iconique ). Disons le : la
littérature et les arts produisant des effets de fantastique ont aujourd'hui pignon sur la rue
académique, et droit de cité dans les instances de légitimation, y compris universitaires. Reste
qu'un sentiment d'insatisfaction demeure devant ce qui pourrait apparaître comme une sorte de
ressassement critique plus que d'avancées critiques réelles. Il me semble donc i portant de
m
revenir sur un certain nombre d'évidences de la vulgate critique concernant le fantastique, qui
masquent peut-être des oublis, ou des dénis, lesquels bloquent peut-être une avancée critique
possible. Je me propose de revenir sur les textes fondateurs et sur les conséquences de leurs
choix.
1
David Roas a lui aussi remarqué cette utilisation de la seconde partie de l'essai de Scott comme préface aux textes
d'Hoffmann.
2
Denis Mellier, dans l'Ecriture et l'excès: fiction fantastique et poétique de la terreur, explicite la notion de
"monstration".
Bozzetto, Roger. “Á contre temps : retour sur quelques ‘évidences’ de la critique en ‘fantastique’.” EREA 5.2 8
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3. Onomastique : fantastique adjectival ou nominal ?
En tant qu'adjectif, le mot “fantastique” est attesté en français depuis 1580, en tant que quasi
synonyme d'imaginaire, chimérique, surnaturel, étrange, bizarre, extraordinaire, extravagant,
formidable, sensationnel etc. Il est le parfait équivalent de “fantastic” en anglais, qui est
l'adjectif correspondant au vocable nominal “fantasy”, lequel n'a pas d'équivalent en français
En tant que nom commun, le vocable “fantastique” est plus récent en français : à se
référer au Grand Robert, il date pourtant de 1738, et sera présent dans l'Encyclopédie. Depuis,
il est d'usage courant dans la langue, puisqu' aussi bien Defauconpret, le traducteur de l'article
de W.Scott, que Sartre, Malraux ou Caillois l'utilisent 3. On peut néanmoins remarquer que si
Jean Jacques Ampère est le premier à avoir accolé l'adjectif “fantastique” aux Contes
d'Hoffmann, il semble que ce soit dans la traduction du texte de Walter Scott “Sur Hoffmann et
les compositions fantastiques” que soit apparu pour l'une des premières fois la mention du
“genre FANTASTIQUE”, qui traduisait “fantastic mode” de W. Scott. (Hoffman 7)
Cette rivalité entre le merveilleux ancien et le”fantastique” d'Hoffmann sera au centre
de la réflexion, dans l'article fameux de Nodier, publié dans la Revue de Paris en 1830 : “Du
fantastique en littérature”. Bien que ce texte ne définisse pas le “genre fantastique” comme
différent du “merveilleux” il donne des indications pour que cette “littérature fantastique” qu'il
dessine en creux — mais en se référant aux romantiques allemands comme à certaines de ses
propres œuvres — soit perçue.
Merveilleux et fantastiques
Comme Castex le signale, en citant de nombreux critiques d'alors, ni le merveilleux chrétien, ni
les allégories classiques ne peuvent assouvir les demandes modernes de l'imagination. (6) Le
texte de Walter Scott présente l'usage du “merveilleux” comme une sorte de piment dont il ne
faut pas abuser dans les textes. Il doit “Être employé avec une extrême délicatesse”. Scott
montre comment s'en servir, en ses propres ouvrages et donne comme autre exemple Ondine
de La Motte Fouqué. Mais il fonde son argument sur les caractères des personnages, et malgré
la situation de cet “être fantastique” qu'est Ondine. En fait, Scott toise avec une certaine
hauteur les textes des frères Grimm ou de Musæus et il n'y voit qu'une utilisation latérale d' un
merveilleux folklorique plus ou moins bien recyclé.
En revanche, par contraste avec les auteurs de merveilleux folklorique, il fustige le
“fantastique” qu'il attribue à la perversion, par Hoffmann, d'une caractéristique propre aux
Allemands. Ce “fantastique” est en effet référé à l'Allemagne et au “goût des Allemands pour le
mystérieux”, au point que ce genre “ne pouvait exister que dans leur pays et dans leur langue”.
(7) Il y revient plus loin en qualifiant Hoffmann de ”Premier auteur célèbre qui ait introduit dans
sa composition le FANTASTIQUE, ou le grotesque surnaturel”. (15) Sur quels textes Scott
s'appuie–t-il ? Sur “Le majorat” et “L'homme au sable” (ici “le Sablier”) Pour le premier texte, il
présente une analyse des caractères moraux des personnages, pour conclure qu'Hoffmann qui
s'appuie sur Callot a “une imagination déréglée” (17) et qu'il aurait mieux fait de s'inspirer du
peintre anglais Hogarth. Quant à “L'homme au sable”, Scott en donne un résumé aberrant, qui
ne prend en compte que la psychologie des personnages. Par exemple que Nathanaël est
“fantasque et hypocondriaque” on y apprend que”son cœur s'éloigne par degrés de sa
compagne d'enfance, Clara” (21) laquelle est valorisée par Scott d'être “ferme, de simple bon
sens et de franche affection” alors que “Nathanaël est “à moitié fou” etc Scott conclut donc que
3
Jean Paul Sartre, Situations 1, Gallimard,."Le monde de l'art est fantastique en ce que les relations entre ses
éléments ne sont pas celles du réel; mais d'un fantastique essentiel, distinct des inventions de l'imaginaire"
(Sartre 124). “Tout le fantastique est rupture de l'ordre reconnu, irruption de l'inadmissible au sein de
l'inaltérable légalité quotidienne” (Malraux 310).
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4. ce texte montre bien son “horrible absurdité”. Il en déduit qu'il est “impossible de soumettre de
pareils contes à la critique” (22).
Le vocable nominal “fantastique” est ici volontairement dévalorisé, car Scott l'applique
moins aux textes d' Hoffmann qu' à la personne d' Hoffmann. Scott au nom d'un traitement
harmonieux du “merveilleux” — qu'il se fait fort de représenter— condamne les contes
d'Hoffmann au nom d'un “fantastique” et d'un “grotesque” le tout formant une “absurdité” qui
est par lui rattachée, non à une analyse correcte des textes, dont le résumé est tendancieux au
possible, mais au fait qu'Hoffmann est lui même en proie à des délires, des bizarreries et
proche de la démence. Il en profite donc pour dénigrer Hoffmann, ce qui ouvrira une
polémique, car JJ Ampère ne récuse pas l'allusion à la bizarrerie des personnages hoffmanniens
ni à l'utilisation du “délire tranquille des fous”. Bien au contraire, mais il le porte au crédit de
Hoffmann, capable de susciter sans quitter le monde du quotidien, d'aborder à “un ordre de
faits placé à la limite de l'extraordinaire et de l'impossible”. (7)
Nodier, dans son article, tente une sorte de synthèse. D'une part, comme Scott, il se
réfère aux mythes anciens, pour montrer qu'il faut tenter de s'y ressourcer, mais pour créer du
neuf, car leur vitalité s'est épuisée : il pressent le besoin d'un renouveau, et non comme Scott
d'un simple replâtrage. Alors certes, il se réfère aux mythes anciens , mais pour les réhabiliter
dans leur fonction dynamique, et surtout pour remonter à la source de leur efficacité ancienne :
à savoir le sommeil, les rêves, les cauchemars. Nodier n'oppose d'ailleurs pas “merveilleux” à
“fantastique”: il utilise les deux termes comme en alternance. Je veux dit-il “Composer contes
de fées […] j'intitulerai ces contes “histoires fantastiques”. (332) Comme exemples de ce
renouveau nécessaire il fait référence aux œuvres d' auteurs modernes comme “Tieck, Museus
et Hoffmann […] fontaine de jouvence de l'imaginaire” et non de simples”folkloristes” comme
l'assurait Scott.
En fait Nodier est parfaitement à même de distinguer le merveilleux de ce qui ne l'est
pas : il écrit aussi bien Trilby que Smarra . Cependant il laisse planer quelques ambiguïtés, sans
doute parce que la différenciation entre l'adjectif et le substantif “fantastique” n'avait pas
encore produit tous ses effets. Dans ses Mélanges de littérature et de critique (Renduel II
1820), il propose un compte rendu d'une réédition de De l'Allemagne et parle à propos de la
Lénore de Burger et de La fiancée de Corinthe de Goethe de “ l'horrible merveilleux de la
situation “ ajoutant que voilà : “ Un mélange si confus d'impressions qu'on ne peut le comparer
qu'à ces songes extravagants où l'âme pressée de sensations également vives qui ne cessent
de se succéder et de se confondre, doute si elle éprouve de l'horreur ou du plaisir” (351). Il
n'utilise pas ici le terme de “fantastique”, bien que la description qu'il donne ici soit
parfaitement reconnaissable pour nous . Cela peut s'expliquer par la date : “fantastique” en tant
que nom commun ne sera employé couramment dans l' acception nouvelle que plus tard, après
1828 et les traductions des contes d'Hoffmann. Même alors d'ailleurs certains emploieront
indifféremment “le merveilleux” et “le fantastique”. Mais déjà en 1820 une ligne de partage
s'ébauchait pour Nodier. Et c'est ce que le texte de 1830 tente de théoriser.. On se souviendra
aussi que le fantastique des auteurs romantiques est encore très proche des merveilleux, : il
n'est que de se reporter au Vase d'Or d'Hoffmann, à Ondine de La Motte–Fouqué, ou même,
plus tard, à Arria Marcella de Gautier pour prendre des exemples parlants, où une confusion
géographique entre les deux domaines du “merveilleux” et du “fantastique” est visible, et peut-
être même recherchée.
Retour amont
Ce qui frappe, lorsqu'on lit les textes des critiques ultérieurs, c'est de voir à quel point
les théories sur le fantastique ont sélectionné certains aspects, et négligé d'autres pistes
possibles, qu'il est curieux de voir encore inexploitées de nos jours. Que ce soit chez Jean
Jacques Ampère, chez Duvergier de Hauranne, ou chez Walter Scott, les textes d' Hoffmann
sont décrits avec des qualificatifs qui présentent des points communs : “bouffonnerie et
extravagance” “scènes étranges qui font à la fois frissonner et rire” (Ampère); “grotesque”
(Duvergier) “bizarre et burlesque”;”transformations les plus extravagantes”;
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5. absurdité”;”grotesque surnaturel” “images bizarres et extravagantes”; “confusion du surnaturel
et de l'absurde”( Walter Scott).4
Curieusement, les critiques ultérieurs ont oublié ces remarques sur le caractère
bouffon, l'aspect extravagant, le grotesque des textes présentés alors comme “fantastiques”. Ils
ont éliminé de leurs tablettes toutes les remarques de Scott, qui posaient problème. Or tout
dans ce texte est-il a mettre sur le compte de la jalousie d'auteur ? Sur la préservation de parts
de marché ? N'y a–t-il rien à en retirer ? D'autant que les critiques du Globe, favorables à
Hoffmann utilisaient des termes proches, bien que dans une perspective différente. La vulgate
critique n'a plus tard retenu que “l'incertitude intellectuelle” présentée pendant longtemps
comme une fin en soi du texte, et le seul “effet de fantastique” reconnu comme tel, avant que
l'on s'intéresse aux effets de “monstration” et de “sidération”. Et sans prendre en compte le
“grotesque”, qui effectivement pose problème.
Ceci entraîne deux types de remarques. La première, c'est qu' anticipant la remarque
de Roland Barthes sur l'aspect “pluriel” de tout texte, les premiers critiques ont été sensibles
chez Hoffmann — quitte à s'en plaindre et à le lui reprocher comme le fait Scott— à l'aspect de
fatrasie, à la bigarrure, au mélange des tons5. Voyez dans Le vase d'or les situations
“grotesques” du héros enfermé dans une bouteille, ou sa maladresse sur le marché, le côté
“merveilleux” de Serpentine, l'aspect romantique de l'amour pour l'élu et l'arrivée en Atlantide.
Que devient devant ce texte notre perception unilatérale et simpliste du “fantastique” lié à
l'horreur, la sidération ou l'hésitation ? Pourquoi cette piste du “pluriel” a-t-elle été perdue?
Quelle en est la raison ?
Il me semble que la critique française du genre a été influencée par une théorie
ultérieure émise par Edgar Poe, de l'unicité de visée du texte de la nouvelle en tant que genre:
“Un artiste habile construit un conte. Il ne façonne pas ses idées pour qu'elles s'accordent avec
ses épisodes,mais après avoir soigneusement conçu le type d'effet unique à produire, il
inventera alors des épisodes”. (1002)
Au nom de cette idée qui n'est en rien théorisée ni argumentée, on n'acceptera comme
fantastique— si l'on en croit Todorov— qu'un texte qui crée à la fin, pour le lecteur implicite, un
effet d'incertitude. Un ouvrage comme Le Moine, qui contient des épisodes que l'on peut référer
au “fantastique d'hésitation”— l'histoire de la nonne sanglante— n'est donc pas un texte
fantastique à ses yeux, puisque le diable intervient à la fin et, comme un détective de roman
d'énigme, explique tout.
On pourrait argumenter autrement, et soutenir que le texte du Moine est construit par
l'empilement de plusieurs strates qui ont une efficacité propre, mais qui se confortent dans la,
création d'effets. Ces couches proposent des scènes où joue le “fantastique d'hésitation”, et
celles-ci servent évidemment à conditionner la lecture. Mais il s'y trouve aussi des scènes
“d'épouvante” par excès (pensons à Antonia violée dans le cimetière souterrain) ainsi que des
“scènes de sidération”, comme l'illustre la fin du roman avec le corps d'Ambrosio qui agonise
sept jours — en une parodie de Genèse — son corps encore palpitant mangé par les crabes et
les oiseaux de mer. Cette hybridité concourt à donner au texte sa qualité fantastique propre liée
à l'horreur. Il en irait de même du Dracula de Stoker où diverses strates s'articulent et
produisent des effets divers.
La seconde remarque porte sur le mélange des genres. La théorie de l'effet unique tend
à valoriser une lecture portant sur la structure du texte, qui serait orientée vers un seul type
d'effets. Or d'une part les effets de grotesque, de bizarre, d'extravagant sont présents non
seulement chez Hoffmann mais aussi chez Poe lui même : pensons à la manière dont il conçoit
4
Jean Jacques Ampère et Duvergier de Hauranne cités par Castex.
5
“La plupart des contes de Hoffmann n'ont rien de fantastique[…] et devraient plutôt être appelés contes capricieux ou
fantasques” (Gautier).
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6. “Bérénice” comme un passage à la limite du “mauvais goût”6. Malgré le titre explicite de son
recueil Tales of Grotesque and Arabesque la critique ne s'est absolument pas intéressée à
l'aspect “grotesque” de ses contes, y privilégiant l'aspect symbolique, puis le côté fantastique.
Pourtant “Hop Frog”, ou “Le masque de la mort rouge”, indépendamment de la mise en scène
de fantasmes qu'on pourrait sans doute y lire, sont construit dans la perspective d'un grotesque
évident, où le comique ou l'humour noir côtoie l'horreur. On peut aussi lire dans cette optique
“L'homme dont il ne restait rien” . Ajoutons, pour mémoire que Poe a commencé à écrire ses
contes “fantastiques” en parodiant les auteurs anglais du Blackwood's Magazine, comme il
l'avoue en se mettant ironiquement en scène sous le nom de Zenobia Snobbs dans “Comment
écrire un article pour le Blackwood's”. En somme,pour Poe, la théorie de l'effet unique
n'impliquait pas que l'on dût abandonner la pluralité des tons dans le texte, et l'effet final
pouvait être un effet extrêmement troublant, et peu réductible au simplisme d'une
interprétation univoque.
Grotesque, absurde, fantastique
La notion esthétique de “grotesque” a une histoire dont on peut suivre les linéaments dans
l'ouvrage de Dominique Iehl, et ceci aussi bien en peinture q u'en littérature — où nous nous
situerons. (Iehl) Notion située “à la frontière de notions très mobiles elles-mêmes” (3). Ces
“frontières” mobiles du grotesque touchent à la fois au sublime, au monstrueux,au satirique, à
l'absurde, et évidemment au fantastique. Mais la critique du fantastique privilégiant— sans
doute par souci didactique, ou pédagogique, à moins que ce ne soit par facilité— la recherche
de l'effet unique, a unilatéralement choisi dans les textes une “dominante”, qui excluait les
autres strates composant le texte.
Par exemple, on a vu chez Swift uniquement le côté satirique et, depuis André Breton,
l'humour noir : le côté grotesque est éliminé. On n'a pas assez remarqué, malgré Hugo, le côté
grotesque à l'œuvre chez Shakespeare, dans l'alternance de certaines scènes d'Hamlet, par
exemple. On a, de façon définitive, classé Le nez de Gogol dans le registre du fantastique, alors
que sa dimension grotesque est patente. Il en va de même du Double de Dostoievski, avec cet
arbitraire du texte qui fait engendrer par son héros un sosie homonyme, dans le cadre d'une
parturition nocturne hallucinée, lequel devient son bourreau, dans le cadre de scènes comiques
et tragiques à la fois.
Il en va de même de certains textes de Kafka. Non seulement par ce que l'on a dit de la
réception qui était faite à ses bonnes feuilles par ses auditeurs, à savoir le rire devant le
comique des situations, mais encore à une lecture sans préjugé des textes eux mêmes. “La
métamorphose” ou “La colonie pénitentiaire” sont deux exemples flagrants de situations certes
présentées comme “normales”, y compris de la part des autres personnages, mais que le
lecteur reconnaît comme insensées. Certains critiques ont décidé de les qualifier d'”absurdes”,
d'autres de “fantastiques”, sans voir que la concomitance de ces deux qualificatifs pouvait en
fait en dessiner un espace d'accueil , et qu'on pouvait alors parler d'un “fantastique grotesque”,
où l'horreur et l'absurde seraient représentées ensemble. Ces textes renverraient à “une forme
d'impuissance à traduire le tragique”(Iehl p 121) ce qui créerait ces effets nouveaux de
fantastique.
Ceci étant, le fantastique des romantiques français, à la différence de certains textes
d'Hoffmann ou de Poe n'a rien de grotesque, il flirte avec le merveilleux comme on le voit chez
Gautier .De même “Le Horlà” de Maupassant n'a rien de grotesque : il nous affronte à une
épouvante sans nom et sans forme. Et on pourrait se poser la question pour Lovecraft
(Duperray).
6
“Que les contes dont je parle soient à la limite du mauvais goût, cela importe peu […] Pour ce qui est de
"Berenice", j'avoue que ce conte touche aux limites du mauvais goût” (Poe, cité par Lemonnier, 145). Ajoutons
que la version originale comportait une scène encore plus douteuse, qu'il a supprimée lors de la publication en
recueil
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7. Il convient donc de s 'interroger sur la notion de grotesque afin de saisir en quoi et
pourquoi elle peut s'intégrer à la création d' effets de fantastique. Si l'on se réfère à l'origine du
vocable on privilégiera l' aspect descriptif relié à s origine, qui provient des dessins sur les
on
parois chaotiques de grottes ce qui produit des effets de bizarrerie qui vise à un certain
comique au premier degré dans les représentations. On peut trouver cet aspect chez Hoffmann.
Par exemple dans Le vase d'or neuvième veille, lorsqu' Anselme après boire prend le sous
directeur pour un hibou. Ou lorsque Nathanaël, dans “L'homme au sable” fait sa cour à
Olympia, la poupée mécanique, interprétant ses rares paroles répétées en boucle pour la
profondeur d'une pensée. Chez Poe, dans “Petite conversation avec une momie”. Parfois cet
aspect comique au premier degré est renvoyé à de l'horreur. Dans le texte de Poe “La vérité
dans le cas de Mr Valdemar”, la situation, qui met en scène un cadavre qui du fond de son
sommeil hypnotique hurle “je vous dis que je suis mort” est à la fois comique et horrible,
d'autant que l'éveil du cadavre donne lieu une putréfaction accélérée.
De fait il existe, depuis un demi siècle, de nombreuses interprétations du grotesque, et
certaines recoupent par endroit les territoires définis “fantastiques” par les théoriciens. Iehl cite
en particulier W. Kayser pour qui le “grotesque” “surgit dans le sentiment effrayant que la
réalité se dérobe et nous devient étrangère” (13), ce qui rappelle l' “inquiétante étrangeté” de
Freud, dont on s'est inspiré pour décrire les effets de fantastique. La différence entre les deux
notions me paraît être qu'en fin de compte, la dérive propre au grotesque terminée, le monde
reprend son aspect normal, comme la place de appendice nasal sur le héros du Nez. Par contre,
l'effet fantastique laisse par son passage, ou après celui-ci, l'univers du lecteur, implicite ou
autre, devant un trouble, une horreur ou une terreur sans nom. C'est ainsi qu'après des effets
de grotesque dus à la situation du cadavre que l'on hypnotise au moment du transit dans “La
vérité dans le cas de Mr Valdemar”, l'éveil et la putréfaction créent des effets d'horreur
fantastique. Il en va de même dans le cas de “La Métamorphose”: la situation est effectivement
absurde ce qui crée des effets de grotesque par la réaction des personnages secondaires qui
font “comme si” rien ne s'était passé que de bénin, malgré tout. L'effet de fantastique résulte
alors de cette impossibilité de prendre en compte la monstruosité du présent, laquelle résulte
de la désagrégation des normes de la réalité, ce qui renvoie à la dimension d' une horreur
“métaphysique”. Il me semble qu'il serait bon de revoir les interférences des différentes notions
à l'aide de quoi on tente de percevoir l'originalité— sinon le sens— de certains textes, trop tôt
et trop facilement enfermés dans un carcan définitoire. Ceci est encore plus vrai lorsqu'il s'agit
de se référer à des cultures autres que l'occidentale.
Fantastique et “real maravilloso”
On se trouve souvent mal à l'aise lorsqu'on tente de rendre compte des textes d'une culture
avec les instruments critiques issus d'une autre tradition. Ainsi, on a pu se poser la question
d'un “fantastique chinois” : seules certaines caractéristiques— l'utilisation du rêve par
exemple— peuvent le rapprocher des textes fantastiques romantiques d'un Gautier. Pour le dire
autrement l'espace sémantique du “fantastique” européen ne recouvre qu'une infime partie des
textes chinois mettant en scène la Surnature.
On peut de façon tout aussi valide se poser la question du fantastique hispano-
américain. On peut le faire en distinguant les textes argentins et uruguayens d'une part, et ceux
du Mexique et de la Colombie d'autre part. Les textes d'écrivains du “cône Sud”— Borges,
Cortazar, Silvina Ocampo, Bioy Casares— se réfèrent au “fantastique”. En témoigne leur
ouvrage commun L'Antologia de la literature fantastica(1940), et aussi la préface que donne
Borges au texte qu'il déclare”fantastique” de Bioy Casares La invencion de Morel ( 1941). Mais
on notera que les textes de l'antologia couvrent un vaste domaine qui va des mythes indous
aux voyages d'Alexandra David-Neel au Tibet, et que La invencion de Morel relèverait plutôt de
la science-fiction.
A se référer aux textes, rares sont les récits de Borges qui produisent des effets de
fantastique . On est plutôt séduit par l'aspect baroque des mondes et des situations. Pensons à
“Tlon Uqbar Orbis Tertius” qui invente un univers aux règles de fonctionnement différentes des
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8. nôtres aussi bien au plan des faits (aucun “hronir” ne surgit dans notre univers) qu'au plan des
idées philosophiques qui le sous-tendent pour les habitants. L'image d'une bibliothèque infinie
est de même type : le plaisir provoqué relève du “pathos métaphysique” propre à la science-
fiction (ou encore à la théologie, qui est selon Borges, l'une des branches du fantastique). En
fait Borges joue avec des idées plus qu'il ne vise des émotions. On a pu parler d'un fantastique
métaphysique, sans vraiment le définir.
Parmi les textes de Cortazar, certains relèvent d'un fantastique à coloration
occidentale: pensons à “Les armes secrètes” où un événement ne cesse de hanter un lieu et
une personne, à “l'Idole des Cyclades”, qui voit la résurgence d'une déité s'emparant de l'esprit
d'un mortel, ou encore de “Circé”. Dans ce texte, la sorte de malédiction qui pèse sur Délia
(anagramme ironique d'idéal) conduit à une terreur inexprimable, et pour certains à la mort
plutôt que la confrontation à l'indicible.
Mais devant certains de ses textes, la question se pose. Dans “Axolotl” nous n'avons
aucune explication, ni surnaturelle, ni rationnelle de l'échange de personnalités entre le
personnage et l'axolotl. L'arbitraire du texte s'avoue d'ailleurs à la fin car on ne sait qui a écrit le
récit. Il en va de même dans “La nuit face au ciel”, où nous apprenons à la fin que c'est un
sacrifié aztèque qui rêve d'un accident de moto dans les siècles à venir (Cortazar).
Les textes de Silvina Ocampo mettent en scène avec habileté un arbitraire que le texte
impose avec insouciance, comme si les références au monde du quotidien en arrière fond
suffisaient à justifier les événements qui se produisent. Prenons “ Une maison en sucre”, la vie
d'une femme est possédée par une autre : elle en meurt. Cette réalité posée est présentée
comme allant de soi, le narrateur ne se pose pas plus de questions que le narrateur de “La
métamorphose” ou que celui de “Circé”. Les événements les plus contraires à notre expériences
sont présentés avec distanciation, par des narrateurs comme anesthésiés par l'espèce de fatum
enclos dans la réalité même.
Cet arbitraire du texte, on le retrouve dans Les hortenses de Félisberto Hernandez, où
des textes comme “La maison inondée” ou “Le crocodile” présentent des événements les plus
bizarres comme signe d'une normalité “autre”, sans les motiver, simplement en les assumant,
ou encore en les faisant assumer par un personnage et/ou un narrateur.
C'est encore ce que l'on retrouve dans le premier recueil de nouvelles de Gabriel Garcia
Marquez, Des yeux de chien bleu. On y retrouve les mêmes caractéristiques d'impossible
assumé, sans que, comme dans le fantastique européen, il on y produise une rhétorique qui
provoquerait 'hésitation, la sidération ou de l'épouvante. Les choses sont ainsi, elles n'ont pas à
être questionnées. La réalité semble être perçue de façon double mais non contradictoire. D'une
part notre conception de la réalité du quotidien, et cela demeure dans ces textes. Dans “La
troisième résignation”, le mort est enterré, on lui apporte des fleurs etc. Mais, dans sa tombe, il
continue de grandir, de vieillir, il accomplit sa vie de mort. On n'en saura pas plus, mais cela
n'engendre ni peur, ni sidération. Une sorte de rencontre avec une “surréalité” ?
Toutes nos tentatives pour enfermer ces textes dans les notions européennes de
“fantastique” me semblent vouées à l'échec — sauf à ajouter des qualificatifs: “fantastique
métaphysique” pour l'un,”fantastique magique” pour d'autres, ou encore, pourquoi pas,
“fantastique surréel” . C'est sans doute pour éviter ce qui est une sorte de “récupération” que
les écrivains sud américains ont créé la notion de “real maravilloso”. Il me semble que des
comparaisons entre les notions européennes de “fantastique” —entendu au sens large et en
prenant en compte l'hétérogénéité des textes englobés sous cette notion — et les textes
présentés sous les notions dérivées du “real maravilloso” pourraient permettre de retrouver un
rajeunissement nécessaire des théories en vogue.
Le propre des généralisations est de rassembler sous une sorte d'hypostase générique
des textes dont chacun visait son but propre, indépendamment des autres et parfois même de
toute préoccupation générique. Cette démarche classificatoire est sans doute nécessaire à un
certain moment de la recherche critique. Mais il ne faut pas oublier que ce qui est valide pour
les objets du monde, les pierres, les arbres, les animaux etc, est entaché de subjectivité
Bozzetto, Roger. “Á contre temps : retour sur quelques ‘évidences’ de la critique en ‘fantastique’.” EREA 5.214
(automne 2007): 8-16. <www.e-rea.org>
9. lorsqu'il s'agit de classer les artefacts humains, surtout lorsque, comme les textes ils sont
doublement imbibés de symbolisme. Celui de la langue d'abord, et celui des cultures différentes
ensuite, sans parler des stratégies de légitimation propres à chaque époque pour chaque
culture, qui créent et valorisent certaines approches, certains textes plutôt que d'autres.
C'est pourquoi, l'universalité des concepts critiques, qui est peut-être un idéal, doit
prendre en compte, pour être élaborée de manière utile, l'hétérogénéité des textes, des
cultures, des époques et des théories. Il me semble qu'avant d'aboutir, et comme un échelon
médian, il est nécessaire de bien définir les notions historiques du champ, ainsi que leurs règles
de combinaison éventuelles. La notion de “fantastique” pour prendre un exemple gagnerait à
être précisée selon les textes étudiés, la langue, la culture, l'époque et le contexte social et
symbolique.
Non seulement il existe un “fantastique aux effets d'ambiguïté”, mais cette ambiguïté
ne prend pas les mêmes formes dans “La Vénus d'Ille” et dans “Les armes secrètes”. Le
“fantastique aux effets d'horreur” est différent selon que l'on songe au “Horla” de 1887 ou à
Carrie de Stephen King. Le “fantastique aux effets de grotesque” est lui aussi différent si l'on se
réfère à “La métamorphose” ou à “l'Homme au sable”. Les effets des textes reconnus comme
“fantastiques” en Italie, chez Buzzati par exemple, sont proches de l'allégorie, même si celle-ci
apparaît peu claire. Mais cette suspension du sens, qui laisse planer un trouble comme dans
“Panique à la Scala”, ou “Douce Nuit”, est semblable et différente des textes de Silvina Ocampo,
à quoi on peut les comparer pourtant. On pourrait s'interroger aussi sur l'importance des arrière
fonds religieux : les effets de fantastique sont–ils semblable ou différents selon que les écrivains
sont d'obédience catholique ou protestante ou autre?
La conclusion provisoire à titrer de ces quelques remarques semble être que l'important
est de s'attacher aux textes et à leur fonctionnement, en relation chaque fois avec les divers
contextes (idéologiques, politiques, esthétiques) dans lesquels ils sont écrits. Le but sera de
mettre au clair quels types d'effets de fantastique ils produisent, ensuite de voir comment
mettre ces effets en rapport avec ces contextes, enfin d'opérer de façon valide des
rapprochements éventuels, de similitude ou de différenciation avec d'autres textes réputés
fantastiques à divers titres, ou grotesques, ou appartenant au “real maravilloso” ou encore aux
divers “réalismes”. C'est dire le travail qui reste à faire.
Ouvrages cités
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