1. « Knowledge
Management »
Par Nabil GHARIB
Dans un monde extrêmement compétitif, les
connaissances et l’expérience accumulées
chez les membres de l’entreprise, sous forme
de technologie, de savoir, de savoir faire, de
stratégies ou autres, deviennent des
ressources de première importance. Bien que
difficile à quantifier cette
masse de connaissances et
expériences internes, elles
représentent une
composante essentielle du
potentiel d’une entreprise. En
effet, ce sont ces
connaissances qui vont
générer les compétences de
demain qui feront à terme la
différence avec les
concurrents. Dés lors, on comprend l’intérêt de
sauvegarder ce potentiel et de chercher à
l’exploiter au mieux. (1).
Le Knowledge management ou le management
des connaissances est un concept qui a
révolutionné la gestion de l’entreprise et a
devenu le facteur déterminant de sa
performance. Selon Gérard Donnadieu, (2) « le
Knowledge Management est l’échange et la
validation des connaissances nouvelles. C’est
aussi la façon d’organiser l’extraction des
connaissances actionnables (utilisables) au
sein d’un répertoire immense et proliférant de
savoirs. ». Le Knowledge management est un
ensemble des méthodes et des techniques
permettant d’identifier, d’analyser, d’organiser,
de stocker et de fournir des connaissances aux
membres de l’organisation,
en particulier les savoirs
crées par l’entreprise elle-même
(recherche et
développement) au acquis
de l’extérieur (intelligence
économique). C’est un
ensemble de processus de
valorisation de l’activité et de
la compétence de
l’entreprise, s’appuyant sur la circulation et la
capitalisation des connaissances générées par l
‘utilisation des nouvelles technologies de
l’information.
L’objectif du Knowledge Management est de
manager tous les flux de connaissances tacites
ou explicites, individuels ou collectifs, pour les
combiner dans les activités et processus
professionnels afin de créer une valeur.
Egalement, Il vise à formaliser et échanger les
savoirs spécifiques à la firme, fournir les
informations utiles au moment opportun et
2. capitaliser les informations de manière
organisée afin de les pérenniser. (3)
1-L’Evolution du Knowledge management :
Au cours des 15 dernières années, les attentes
des entreprises par rapport au Knowledge
Management ont évolué, et ce, en passant par
trois générations :
- Les démarches Knowledge Management
de première génération tendent
principalement vers la capitalisation de
connaissances explicités (règles, modes
opératoires, etc.) dans le but d’en faciliter la
réutilisation et gagner ainsi
en productivité. Ces
démarches ont été
dominées par les
technologies et la
modélisation des
processus. Cependant on
s’aperçoit vite que le
contenu stocké dans les bases ne rend pas
assez compte du contexte et que rien ne
remplace finalement la relation directe avec la
personne qui a vécu telle situation. On note
également que les « idées » ou certaines
« pratiques » naissantes résistent assez mal à
la « mise en boîte ».
- Les démarches Knowledge Management
de la 2e génération cherchent donc
également à créer et optimiser des réseaux
humains de connaissance. Si l’on veut motiver
des personnes à partager leurs savoirs et
savoir-faire, il faut prendre en compte des
facteurs culturels et humains : confiance, sens,
réciprocité, etc. et non pas uniquement des
outils ou des procédures. L’entreprise
traditionnelle est souvent trop vaste et trop
hiérarchisée pour que soient réunies les
conditions favorables à l’échange de
connaissance.
- Les démarches Knowledge Management
de 3e génération cherchent à recréer des
communautés transversales, au sein
desquelles les échanges de pratiques se font
sans formalisme hiérarchique, et où
l’apprentissage est intense.
Ces trois étapes on permet
de vivre le Knowledge
Management comme un
cycle permettant :
d’exploiter des
connaissances
existantes,
de capitaliser et transférer les savoirs
pour les générations futures,
d’innover et de créer des connaissances
nouvelles.
2-La capitalisation des connaissances :
La capitalisation des connaissances est l’une
des voies les plus efficaces pour progresser
dans un mode ultra-compétitif et turbulent, elle
permet de faire une différence radicale par
rapport au concurrent. Capitaliser les
connaissances c’est extraire de la
3. connaissance stratégique par un travail
spécifique d’identification pour restituer une
connaissance transférable, appropriable et
réutilisable. Elle implique que l’on constitue un
capital qui sera en suite valorisé. Comme il est
impossible de capitaliser toutes les
connaissances de l’entreprise, on ne devra
considérer que les connaissances qui seront
jugées stratégiques.
Pour capitaliser ses connaissances, l’entreprise
doit déterminer ses connaissances
stratégiques, par rapport à
une orientation de service,
une contrainte, une
particularité, ou une difficulté
perçue dans le
fonctionnement (turn-over…),
lister ces connaissances, en
suite, elle devra déterminer
les cibles visées ainsi que les
personnes qui détiennent ces
connaissances, et préciser exactement la forme
sur laquelle elles sont conservées. (4)
3-Processus de capitalisation des
connaissances :
Le processus de capitalisation des
connaissances dans l’entreprise comprend
plusieurs étapes centrées sur la notion de
connaissances stratégiques :
le repérage ou l’identification des sources
de connaissances : il s’agit de déterminer
où se trouve ou qui possède l’information,
dans le domaine qui a été reconnu comme
critique pour l’entreprise,
leur formalisation, leur organisation et leur
stockage,
leur distribution, se fera par des techniques
de réseau (intranet ou internet)
et leur maintenance. il s’agit de mettre à
jour, de compléter de maintenir le système.
(5)
Evidemment le développement d’un système
de capitalisation des connaissances, n’est pas
une chose facile, il faut combiner des aspects
techniques, des aspects humaines et aspects
d’organisation.
4-Le transfert d’expertise :
En vue d’éviter les pertes de
savoir résultant du départ de
personnel critique (le papy
boom, les départs à la retraite,
le turnover) les entreprises
doivent capitaliser et
transférer les connaissances implicites et
explicites. Pour cela, le transfert d’expertise
devient une nécessité car il permet de
développer les potentiels humains en
permanence. L’entreprise doit permettre aux
individus de savoir à quelle porte frapper pour
obtenir telle ou telle information, le
comportement à adopter dans telle ou telle
situation. L’objectif est de permettre aux
individus d’agir avec plus de sécurité et de
liberté.
4. En principe, le transfert d’expertise concerne le
savoir faire acquis par les experts de
l’entreprise, il est défini comme un ensemble
de connaissances aptes à se transformer en
action quand le besoin s’en fait sentir. Aussi, il
doit intégrer la capacité de l’individu à agir et
interagir avec environnement où les situations
sont souvent dissemblables, à faire face à des
situations inconnues que la connaissance ou la
logique seuls ne peuvent résoudre. C’est un
savoir faire qui couvre plusieurs dimensions :
(son usage, son utilité, sa capacité à être
partagé, sa valeur et sa rareté).
Le savoir faire au sein d’une
entreprise peut être décomposé
en quatre classes de
connaissances :
-un savoir faire banalisé : qu’est
une connaissance acquise par
l’expérience, mais qui ne revêt
pas un caractère
d’exceptionnalité, c’est un savoir faire qui peut
être maitrisé ou connu par l’ensemble des
entreprises du secteur.
-un savoir faire stabilisé : est une connaissance
suffisante pour être modélisable dans l’action.
c’est un savoir faire reproductible sans
contrainte majeure.
-un savoir faire proactif : repose toujours sur
une base de connaissance modélisable dans
l’action, mais enrichie des compétences qui
permettent de faire face à des situations non
décrites ou pour laquelle il n’y a pas
d’antériorité, c’est un savoir qui permet à
l’entreprise d’améliorer sa propre connaissance
du sujet et ainsi d’en repousser les limites. Par
ailleurs, il permet d’anticiper ou de mettre en
action une solution novatrice autorisant l’action
dans un contexte incertain.
-un savoir faire unique : c’est un savoir faire
rare et présente une grande valeur pour
l’entreprise. On l’assimile à la compétence clé
pour l’entreprise qui la possède. (6)
5-Les avantages du Knowledge
Management :
L’adoption de la politique du
Knowledge Management au
sein de l’entreprise contribue à
la réalisation des objectifs
suivants :
-Créer la synergie entre les
membres de l’entreprise, surtout
les anciens et les nouvelles
récurés,
-Valoriser le capital intellectuel de l’entreprise,
-Mettre en place les pratiques de collaboration
entre les collaborateurs,
-Encourager le transfert du savoir faire (Know
How),
-Favoriser la prise des décisions et le
raisonnement.
6-Les limites du Knowledge management :
Le Knowledge Management reste un concept
nouveau pour les entreprises qui trouvent des
difficultés à quantifier son retour
5. d’investissement, une deuxième limite est que
trop de formalisation paralyse l’innovation, si
l’organisation fige le transfert des
connaissances dans le cadre des procédures
trop formelle, elle interdira à l’individu et au
groupe d’explorer les brèches ouvertes par
l’événement inattendu (the Eureka Factor) (7).
La troisième limite est la mise en évidence
dans le cas où l’information ou la connaissance
est peu formalisable. En effet, nous pouvons
constater des différents degrés de
formalisation. Nous prendrons pour exemple
l’importance des différentes pratiques
gestuelles et des savoirs
informels qui sont
considérables. Leur
consignation sous forme de
procédures fixées et
réutilisables n’est pas
forcément possible ni
souhaitable. Une autre
limite intéressante consiste à se demander
jusqu’où l’expérience peut réellement se
transmettre. En effet, la connaissance des
conséquences de nos actes est une chose
mais seule la réitération personnelle de
l’expérience joue un rôle véritable
d’enseignement. Le cas échéant, il n’y aurait
plus de conflit intergénérationnel entre
professeurs et élèves. L’erreur est ainsi source
d’enseignement et il est donc en partie illusoire
d’imaginer qu’une codification parfaite des
expériences passées suffit à garantir leur
application. La gestion des connaissances par
l’intranet suppose une codification du savoir,
mobilisant essentiellement des connaissances
explicites. (8).
Ainsi, la connaissance codifiée peut être
transmise très facilement par l’intranet, dont le
rôle est unanimement reconnu dans la
littérature mais ces technologies ne peuvent en
aucun cas remplacer le face-à-face qui est
souvent un pré-requis indispensable pour la
gestion des connaissances tacites.
Une dernière limite soulevée par Métais et
Moingeon (2001) consiste à dire que la solution
technique offerte par l’intranet, notamment, ne
permet pas de gérer la
totalité des connaissances.
En effet, une confiance
excessive dans le système
d’information peut entraîner
une perte partielle du sens
de la réalité, conduisant les
individus à considérer qu’ils maîtrisent de
manière exhaustive toute la connaissance.
7-Les méthodes de Knowledge
management
Les mécanismes et les méthodologies de
transfert ou de gestion des connaissances
choisis par les entreprises peuvent être très
divers et sont plus souvent complémentaires
que concurrents. Les méthodologies que nous
allons présenter se regroupent en quatre
catégories :
Les méthodes de formalisation des
retours d’expérience
6. La méthode REX ou retour d’expérience :
REX (retour d’expérience) est une méthode de
conservation de la connaissance dont l’objectif
est de permettre la maîtrise du cycle de retours
d’expériences à travers le système de gestion
de l’expérience de l’entreprise (SGEE). Le
SGEE repose sur deux processus : le premier
capte l’expérience produite, le second fournit
les éléments de cette connaissance. Entre ces
deux processus, intervient le stockage qui
constitue la véritable mémoire de l’entreprise.
Cette mémoire est disponible sur une base de
données contenant tous les
éléments d’expériences dont la
structuration s’obtient à partir
de procédures codifiées. La
consultation s’effectue en
langage libre permettant ainsi
de retrouver les
expérimentations accumulées.
Elles se présentent sous la
forme de dossiers
d’informations ordonnés par domaines de
pertinence et complétés de la documentation
adéquate. Cette méthode est utilisée par EDF
et l’Aérospatiale (gestion de l’expérience du
Concorde et des Airbus).
CAPEX (Capitalisation de l’expérience)
Méthode de capitalisation pour les PME (10 à
2000 salariés). Le savoir-faire fait l’objet d’une
retranscription par notes de synthèse
thématiques datées, qui sont enregistrées sur
une base de données capitalisant les
différentes expériences réalisées. La
formalisation de l’expérience s’obtient en
procédant par les étapes suivantes :
Identifier clairement les savoirs
stratégiques (ou compétences-clés) ;
Procéder au recensement des savoirs à
capitaliser identifiés par grands
domaines ;
La connaissance, une fois formalisée par
écrit, fait l’objet d’une analyse de
faisabilité pédagogique afin d’estimer sa
« valeur transférable ou reproductible ».
C’est l’étape de la
formalisation du transfert
des connaissances en
fonction des besoins des
utilisateurs potentiels.
La mise en oeuvre de cette
méthodologie nécessite le
recours à un consultant
spécialisé dans le domaine du
management des connaissances et les
méthodologies de modélisation du système de
connaissance de l’entreprise
La méthode MEREX ou mise en règle de
l’expérience :
MEREX (Mise En Règle de l’expérience) est
une méthode de capitalisation de l’expérience
mise au point par Jean-Claude Corbel en 1995,
à la suite d’un benchmark avec l’Aérospatiale,
pour l’amélioration des processus de
l’ingénierie des véhicules de Renault.
7. Dans un contexte de processus industriel,
capitaliser l’expérience acquise d’un projet à
l’autre est un gain de temps et d’argent
considérable, à condition cependant que le
système soit suffisamment simple d’utilisation
pour simplifier la vie des acteurs au lieu de la
compliquer encore davantage.
Les méthodologies de modélisation du
système de connaissance de
l’entreprise
La méthode MKSM :
MKSM (Method for Knowledge Système
Management) se donne pour
finalité d’observer et de
maîtriser le système de
connaissance dans sa
globalité et dans sa
complexité ; pour cela trois
points de vue indissociables
sont définis :
1. point de vue ontologique
ou structurel : le système est
vu comme un ensemble d’objets ;
2. point de vue phénoménologique ou
fonctionnel : le système est vu comme
agissant, « faisant quelque chose » ;
3. point de vue génétique ou évolutif : le
système est vu dans son évolution au cours du
temps et en accord avec son projet.
Cette méthode est soutenue par trois concepts
fondamentaux :
1er Concept : L’objet à connaître n’est qu’une
partie au sein d’un plus grand tout ; il doit
d’abord être perçu dans sa relation
fonctionnelle avec son environnement, sans
soucier, dans un premier temps, d’établir une
image fidèle et exhaustive de sa structure
interne, dont l’existence et l’unicité ne seront
jamais tenues pour acquises définitivement ;
2eme Concept : l’objet doit être connu dès sa
phase de conception, et non pas seulement au
moment de son analyse, ce qui revient à le
représenter comme objet signifiant et
fonctionnant ;
3eme Concept : Le système
d’information doit être
approché comme un modèle
systémique de l’organisation ;
il constitue un niveau
intermédiaire organisant la
correspondance entre un
système de décision et un
système opérant.
La méthode KADS II :
KADS (Knowledge Analysis and
Design/Support) est une méthode de
modélisation du système de connaissance de
l’entreprise mise au point par Joost BREUKER
et Bob WIELINGA de l’université d’Amsterdam,
en 1985. Cette méthode a évolué en 1990 pour
devenir « Common KADS » (Kads II).
La méthode « Common KADS » a pour objectif
une modélisation de résolution de problème de
l’entreprise centré sur l’analyse du processus et
8. du flux d’acquisition des connaissances. Cette
méthode va, par exemple, analyser la façon par
laquelle un expert va apporter une solution à un
problème et formalisera cette résolution.
Les méthodes de formalisation des
savoirs non formalisés
Les deux catégories de méthodes présentées
auparavant assistent les professionnels dans le
processus d’explicitation des savoirs, dans le
but d’alimenter un réservoir de connaissance,
autrement dit la mémoire organisationnelle
contenant des éléments explicites de
connaissance.
Il convient pour compléter ces
méthodologies d’aborder
l’interaction non explicite entre
les professionnels.
Les FAQs :
L’acronyme FAQ signifie en
anglais Frequently Asked
Questions, en français Foires
Aux Questions ne sont ni des foires ni des
forums, mais un texte écrit par un auteur-expert,
structuré en une liste très ordonnée de
questions-réponses.
L’idée sous-jacente est de renverser
complètement le dispositif de transfert de
connaissances entre experts et individus, en
repartant des questions les plus souvent
posées par ces derniers.
Le benchmarking :
Le benchmarking est un processus
systématique d’évaluation des produits, des
services et des procédés des concurrents les
plus sérieux ou des entreprises reconnues
comme leaders, dans le but d’une amélioration
de ses propres performances. La collecte
d’informations se fait par échange ouvert et
réciproque.
Chevron Corporation, compagnie pétrolière
nord-américaine, définit les meilleures pratiques
(Best Practices) comme « toute pratique, savoir
ou savoir-faire qui a démontré
son efficacité ou sa valeur dans
une partie de l’entreprise et qui
est applicable à une autre partie
de l’entreprise ». Ces bonnes
pratiques ne doivent pas
forcément être d’origine interne
à la maison.
8-Comment réussir la
démarche Knowledge
Management
Pour réussir la démarche de Knowledge
Management, l’entreprise doit adopter les
activités suivantes :
-Créer une vision globale de Knowledge
Management au sein de l’entreprise ;
-Se concentrer sur les avantages et les impacts
du Knowledge Management ;
- Créer un capital intellectuel de
l’entreprise ;
- Evaluer les pratiques du Knowledge
Management des employés ;
9. - Favoriser le partage et l’échange des
idées ;
- Mettre en place une infrastructure pour
améliorer les pratiques de Knowledge
Management entre les collaborateurs ;
- Mettre en place une entité chargée du
Knowledge Management ;
- Organiser des tables rondes sur le
Knowledge Management ;
- Communiquer sur les avantages et les
réalisations du Knowledge
Management ;
- Récompenser
l’innovation et les
recherches
concernant le
Knowledge
Management.
9-Cas Pratique :
Le knowlege Management au sein du
Groupe OCP :
En vue de faire face à la perte des bonnes
pratiques et des expériences cumulées depuis
le démarrage des industries chimiques de Safi
au milieu des années 1960, Maroc Phosphore
Safi, filiale du Groupe OCP , a mené à bien une
opération novatrice en s’appuyant sur le
concept du « Knowledge Management ».
De la capitalisation des bonnes
pratiques au transfert d’expertise
Les connaissances et les expériences
cumulées par les entreprises sont considérées
comme étant leur principale richesse. Ces
connaissances se déclinent généralement à
travers les technologies utilisées, les processus
de production, les savoirs procéduraux, les
savoir-faire des équipes et des collaborateurs,
les stratégies adoptées, etc. Elles constituent,
de ce fait, le capital immatériel de l’entreprise et
un élément essentiel de sa mémoire collective.
Comme toute entreprise d’envergure
internationale, le Groupe OCP se préoccupe en
permanence de la pérennité de ses savoir-faire
névralgiques et des
expériences cumulées dans
les différents domaines
d’activités, notamment dans
ses métiers de base. Dans
bien des cas, ce sont les
collaborateurs qui en
deviennent les principaux
dépositaires au prix d’un long processus
d’acquisition et de développement lié à
l’exercice de leur activité professionnelle au
quotidien. Non formalisées, voire même à la
perte totale.
A partir de la fin des années 1990, les
industries chimiques de Safi se sont trouvées
confrontées à la problématique des départs à la
retraite représentant 40% des effectifs en
activité. C’est dans ce contexte très particulier
qu’une nouvelle entité baptisée « Projet
Transfert d’expertise » a été crée.
10. L’une des premières missions que cette entité a
dû mener à bien, en liaison avec les différents
acteurs concernés dans les entités
opérationnelles, a concerné la problématique
de la relève.
Mobilisant plusieurs équipes de responsables
et collaborateurs, la démarche a consisté à
aider les agents identifiés comme étant des
« experts » à
formaliser leurs
pratiques
professionnelles et
leurs
connaissances des
installations, en vue de les transmettre aux
jeunes recrues.
Pour le cas du Groupe OCP, des expériences
pilotes ont été initiées, en matière notamment
de transfert d’expertise des anciens vers les
jeunes, et ont concerné aussi bien les sites
miniers (à Youssoufia notamment)
qu’industriels (à Safi). L’expérience menée au
niveau du site de Safi est sans doute la plus
avancées et mérite donc d’être partagée.
Dans un premier temps, un vaste programme
de formation aux techniques de transfert
d’expertise ciblant tous les agents seniors, a
été lancé en liaison avec le service formation et
perfectionnement de Safi. Ce programme
d’envergure a touché prés de 700 agents de
maitrise et ouvriers travaillant dans les
différents services de la plateforme industrielle
du site.
La mise en oeuvre du transfert d’expertise à
proprement parler s’est déroulée par la suite en
deux étapes :
- d’une part, l’élaboration d’un recueil des
connaissances des personnes formées
sur Cdrom, qui a été utilisé dans la
formation initiale des niveaux
embauchés ;
- et d’autre part,
le
déroulement
effectif du
transfert
d’expertise
sur le terrain entre les séniors et
apprentis.
Suite au lancement du transfert d’expertise,
Maroc Phosphore Safi s’est engagé dans
l’expérimentation d’un système informatique de
capitalisation et de valorisation des
connaissances « on line » sur une légende
production d’acide phosphorique.
Tout comme la démarche précédente, il s’agit
de faire face au risque de perte des bonnes
pratiques et des expériences lié aux départs
prévisionnels à la retraite, mais également
d’asseoir une bonne maîtrise du métier de
l’entreprise qu’est la conduite des procédés
( mise en oeuvre des opérations de fabrication
des produits finis).
Le domaine de la conduite des procédés se
caractérise, à l’OCP, par un manque de
capitalisation et de mise en commun des
11. expériences et des bonnes pratiques, et un
transfert de compétences peu structuré en
direction des nouveaux embauchés.
En vue de pallier à ces lacunes et progresser
dans la voie du Management des
Connaissances, l’OCP a mis en place un
système informatique de Valorisation des
Connaissances Industrielles « VAINCT » dans
la conduite du procédé Rhône-Poulenc, au
niveau d’une ligne de production d’acide
phosphorique.
Il s’agit d’une application industrielle du
Knowledge Management, développée en
collaboration avec la
Direction des systèmes
d’information. Le serveur de
connaissances permet une
capitalisation structurée et
continue des savoir-faire
individuels et collectifs, des
expériences et des bonnes
pratiques, ce qui suscitera la création d’une
expérience collective et la constitution d’un
référentiel de conduite du procédé.
Le système « VAINCT » permet de valoriser
l’expérience des agents en collectant leurs
connaissances et leurs solutions aux problèmes
rencontrés dans une base de données enrichie
au fur et à mesure. Comme cette remontée
d’information est accessible à tout le monde,
cet outil apporte en pratique une aide à la prise
de décisions et particulièrement en cas
d’incident.
Les démarches de transfert d’expertise et de
capitalisation de connaissances menées au
niveau du site de Safi constituent des actions
essentielles d’anticipation des départs des
experts. L’instauration d’une démarche de
management de la connaissance au sein du
Groupe reste néanmoins un vaste chantier qui,
par son implication sur l’organisation du travail,
doit faire l’objet d’une réflexion globale et
concertée entre les différentes entités du
Groupe.
C’est dans cet objectif qu’un groupe de travail,
réunissant plusieurs compétences du Groupe, a
été constitué en 2005, à
l’initiative de la Direction des
Ressources Humaines, suite
à la première réflexion
Knowledge Management en
2003, ce groupe de travail a
pour vocation de canaliser la
réflexion et de susciter
l’initiative dans ce domaine.
Cette approche permettra notamment, comme
l’espèrent ses promoteurs, de sauvegarder
l’expertise et le savoir faire cumulés des
années durant par l’entreprise dans des métiers
spécifiques et stratégiques, tel la géologie et
minéralurgie etc.
Conclusion :
L’objectif du Knowledge Management est de
mettre en place un contexte favorisant le
partage des savoirs et savoir-faire. L’entreprise
devient un lieu d’échanges, de rencontres, de
12. mixité des logiques et une communauté de
pratiques. Une initiative Knowledge
Management doit toujours venir de l’intérieur du
Management et non de l’extérieur.
Le rôle du Knowledge Manager est de faire
émerger les connaissances d’un savoir-faire
intériorisé et de les faire circuler lors des
réunions organisées. De façon générale sa
mission principale est de développer la culture
Knowledge Management. Pour cela, le
Knowledge Manager doit faire prouve d’un
savoir faire basé sur le leadership, un goût pour
les relations humaines, et qu’il instaure un
climat de confidence dans son réseau, la façon
dont il organise les choses s’agence avec
cohérence et efficacité.
Outillé des technologies de la
communication : mails,
visioconférences, mais surtout
l’intranet et les outils de travail
collaboratif, le Knowledge
Manager vise à faciliter les
échanges entre les membres de
l’entreprise. Pour justifier son raison d’être, le
Knowledge Manager cherche à mesurer l’effet
de la gestion des connaissances dans
l’entreprise, à travers les retours d’expérience
et les témoignages sur l’efficacité réalisée via
l’échange des informations ce qui permet
d’éviter facilement les erreurs communes «
Learning by doing ».
Bref, le Knowledge Management, selon Jean-
François Ballay l’un des pionniers en France de
la gestion de la connaissance, participe au
changement des mentalités et au
développement de l’économie des savoirs, c’est
un révélateur de l’état de santé de l’entreprise.
Si on suit une logique comptable et financière,
on ampute l’entreprise d’une richesse
primordiales : « le capital humain- l’intelligence,
la créativité, les connaissances ».C’est la
même idée à l’échelle de la nation : si on réduit
les budgets pour la culture et la recherche, on
suicide son pays.
Bibliographie :
1. Bruno Barjou : savoir transmettre son
expérience et son savoir faire.
2. Gérard Dannadieu : le management des
connaissances : Mythe ou réalité ?
3. Thomas H.Davenport :
some principles of
Knowledge Management,
1995
4. J.P.A Barthès :
capitalisation des
connaissances et
intelligence artificielle
5. Michel Grundstein : développer un système à
base de connaissance : un effort de
coopération pour construire en commun un
objet inconnu. CP21. Paris.Nov 94
6. Jean-Yves Bûck : connaissances, changeons
de paradigme.
7. Roy Rowan :The Intuitive Manager
8. Michel Durampart : les enjeux du Knowledge
Management entre processus organisationnel
et dispositif managérial.