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L’Atelier de Cartographie   1
                                                                            La recherche en biodiversité




LA RECHERCHE EN BIODIVERSITE : ANALYSE ET EXPLORATION
CARTOGRAPHIQUE DE LA BASE DE DONNES NATIONALE DES
ACTEURS, STRUCTURES ET PROJETS DE RECHERCHE SUR LA
BIODIVERSITE




                     Le siège de la F.B.B. à Paris (musée océanographique).




Les trois textes suivants sont issus du blog http://ateliercartographie.wordpress.com et ont été publiés
en février 2011. Il s’agit de posts de synthèse sur le travail d’analyse et de cartographie des
informations contenues dans la Base de Données de la Fondation pour la Recherche sur la
Biodiversité (FRB). J’ai mené ce travail en coopération avec Cédric Chavériat (que j’ai eu le plaisir
d’accueillir en formation de cartographie de l’information, le responsable de la base), Flora Pelegrin
(responsable du pôle Stratégie et Animation Scientifiques), Fatima Fadil (chargée de mission portail
et interfaces web) et Xavier Le Roux (directeur de la FRB). Ces trois posts contribuent à éclairer la
démarche et la méthode qui aboutit aux cartes présentes dans le rapport officiel de la Fondation et
publiquement accessible (http://www.fondationbiodiversite.fr/publications/rapports-et-expertises#bdd).
Loin d’être achevée, cette expérience exploratoire de grandes masses de données mérite d’être
poursuivie.



Franck GHITALLA.
L’Atelier de Cartographie   2
                                                                              La recherche en biodiversité




La recherche en biodiversité : exploration cartographique
d’une communauté d’acteurs (première partie)

                                                       1
La Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité ( ) (FRB) vient de rendre public son rapport sur la
« Base de Données Nationale des acteurs, structures et projets de recherche sur la biodiversité ».
J’en suis corédacteur à titre de « cartographe » en association étroite avec Cédric Chavériat (que j’ai
eu le plaisir d’accueillir en formation de cartographie de l’information, le responsable de la base), Flora
Pelegrin (responsable du pôle Stratégie et Animation Scientifiques), Fatima Fadil (chargée de
mission portail et interfaces web) et Xavier Le Roux (directeur de la FRB). Ce rapport est le résultat
d’un long travail d’analyse et de mise au format des données que gère la FRB depuis 2009 et le
déploiement public de la BDD constituent l’une des missions de la fondation.




Le territoire numérique que nous avons exploré et analysé est vaste et complexe : la BDD contient à
ce jour des informations sur plus de 4300 chercheurs français et 1200 étrangers qui publient dans des
journaux internationaux à comité de lecture et/ou participent à des projets de recherche financés sur
appels à projets compétitifs. Elle contient aussi des renseignements sur 342 laboratoires de recherche
français participant plus ou moins directement à la recherche sur la biodiversité, et 308 projets de
recherche financés depuis 2005 sur ce thème. Néanmoins, comme je l’espérai depuis le début de ce
partenariat avec la FRB, les cartographies ont contribué de façon significative à l’étude de questions
complexes pour un champ de recherches très pluridisciplinaire où le chimiste croise l’éthologue ou le
biologiste dans l’étude de biotopes qui s’étendent depuis les fonds marins, les milieux aquatiques
continentaux, les zones cultivées jusqu’aux déserts, sous l’angle de l’histoire comme de la génétique.




1
    http://www.fondationbiodiversite.fr/
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                                                                            La recherche en biodiversité




Quels sont donc leurs principaux objets et écosystèmes étudiés ? Comment les différentes disciplines
sont représentées au sein d’une telle communauté ? Comment s’organisent les réseaux de
collaborations entre laboratoires de recherche, entre acteurs individuels, ou entre disciplines au sein
d’une telle communauté et pourquoi ? Comme le souligne le rapport « Au fil de ce rapport se dessine
la géographie d’une communauté de recherche pluridisciplinaire, travaillant sur une large gamme
d’enjeux, et dont l’ampleur était jusqu’ici méconnue ». Et la troisième partie du rapport, intitulée «
Analyse des réseaux de collaborations » et où se concentrent les cartographies (au sens où je
l’entends dans l’Atelier), constitue, à ma connaissance, une contribution inédite pour un rapport
d’activité officiel dans l’analyse des données archivées par une grande institution de recherche.


La production cartographique. Le travail cartographique réalisé pour la FRB s’est déroulé sur plus
d’un an et a permis de capitaliser de nombreuses informations importantes dans la perspective d’un
déploiement de la méthode et des outils sur d’autres données ou d’autres bases (notamment dans les
organismes de recherche). J’ai notamment pu vérifier à quel point le déploiement d’un projet
cartographique d’ampleur dans une organisation entraîne un coût en termes d’investissement humain
: formation des acteurs, temps consacré au projet, difficultés techniques à surmonter. En particulier, il
apparaît indéniablement que les croisements des différentes dimensions de l’information dans une
BDD nécessaires à la production de cartographies multiples (et il en irait de même si les cartographies
avaient été produites à partir d’un fichier Excel avec ses lignes et ses colonnes) constitue un test
qualité de grande ampleur pour le système d’information interne à une organisation. C’est à mon
sens, un exemple frappant du statut des « SI » aujourd’hui, utilisés souvent pour archiver des
données et que l’on mobilise pour sortir deux ou trois fois dans l’année pour extraire des statistiques
générales et approximatives ou encore pour produire un tableau de données synthétique sur les
projets « en cours ». L’application d’une « couche cartographique » ne va pas de soi et, en tout état
de cause, ne supporte ni l’approximation des informations (par exemple la façon de labelliser des
objets ou de noter des affiliations) ni les « manques » ou les « trous ». Cela est vrai techniquement
(par exemple dans les dates associées aux données puisqu’il est possible de produire des vues
temporelles avec GEPHI) mais aussi et surtout en termes de communication publique : des acteurs,
des laboratoires ou des entités peuvent soit absentes de la carte soit présentes plusieurs fois parce
que les informations contenues dans le SI sont défaillantes et le regard des experts ou des acteurs
peut être sévère sur la carte quand elle contient trop d’approximations. Avec les « coupes
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                                                                             La recherche en biodiversité


transversales » qu’exercent les structures de graphes sur les BDD (comme une série de contrôles),
on aperçoit rapidement le niveau qualitatif des informations archivées et, au-delà, les capacités d’une
organisation à mobiliser son « système d’information » pour des applications externes.


C’est tout l’avantage, comme à la FRB, de placer la gestion de la BDD sous la responsabilité
d’acteurs ou de services tournés vers l’animation scientifique, la communication publique ou la gestion
des interfaces web, autrement dit dans des « lieux » ou des « fonctions » d’une organisation orientés
vers les usages et les services. Les travaux cartographiques qui y ont été déployés ont été couplés
dès le départ à des questions d’épistémologie des disciplines, de nature des réseaux de
collaborations entre laboratoires ou d’agrégation de compétences chez les chercheurs autour de
certaines problématiques. Les cartographies contenues dans le rapport ne constituent qu’une partie
seulement de la production. Elles témoignent cependant de la capacité de la Fondation de la
Recherche sur la Biodiversité à déployer maintenant sur ses propres données un système continu
d’observation, un observatoire effectif et régulier de ses propres archives qui lui permet ainsi de
monitorer les différentes dimensions de la recherche en biodiversité.


Les dimensions de l’information. Ce sont ces différentes dimensions de l’information contenues
dans la structure de données que le travail cartographique a pour objectif de traiter en les croisant. La
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méthode déployée est celle de VisIR ( ) en privilégiant notamment l’analyse des projets labellisés
et/ou financés par la fondation. Le modèle d’analyse utilisé permet de décrire le paysage de la
recherche en biodiversité en termes de structures (unités mixtes ou propres, institutions
administratives de rattachement, etc.), d’acteurs individuels (notamment parce qu’une partie
significative des informations présentes dans la base proviennent des fiches de renseignement
remplies par les chercheurs eux-mêmes), de thématiques (mots-clés notamment), de disciplines
scientifiques (distribuées sur deux niveaux de hiérarchie et que le dispositif cartographique à inciter à
fixer et à éclaircir), de localisation géographique des acteurs et des structures, d’objets d’étude
(terrains d’étude, taxons et écosystèmes étudiés).




2
    http://www.slideshare.net/Ghitalla/cartographier-un-ple-de-comptitivit
L’Atelier de Cartographie   5
                                                                            La recherche en biodiversité




A partir de là, le travail de croisement peut commencer selon une procédure réglée et dont la
fondation a développé toute la connectique logicielle à titre pérenne :




Nous n’avons pas procédé à tous les croisements possibles, bien qu’ils soient nombreux étant donnée
la richesse des dimensions des données. En détail, le tableau suivant donne une idée du nombre de «
photographies » déployables sur le système continu de production de données qu’est la base de la
FRB :




Laboratoires et structures de recherche. On lira dans le rapport les analyses qu’en tire la FRB sur
le paysage de la recherche en biodiversité, notamment sur la richesse du réseau de collaborations
entre disciplines comme entre structures de recherche. En particulier, il s’agissait d’évaluer le degré
de coopération inter-régionale entre structures de recherche impliquées dans la participation
commune à des projets financés. La carte, évidemment, est anonymisée car il n’est pas question de
classer les institutions ou les laboratoires mais de visualiser de façon synthétique le tissu de
collaborations qui s’est construit en plusieurs appels à projets successifs depuis 2005.
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                                                                            La recherche en biodiversité




Quand elle intègre toutes les informations de la base, cette carte peut être mobilisée pour favoriser la
mise en réseaux des acteurs et permettre la mise à disposition de la communauté scientifique un outil
d’aide au montage de partenariats de recherche. En particulier, elle peut constituer un élément
important pour améliorer la mobilisation de l’expertise dans le domaine de la biodiversité, pour i)
répondre aux besoins des organisations nationales et internationales à l’interface sciences/sociétés
ou sciences/politiques (ipBes, IUCN, ministères, etc.), et ii) disposer d’un outil pour identifier des
experts dans le cadre de la gestion d’appels à projets. La vue produite correspond à une cartographie
type « réseaux sociaux » mais d’autres sont possibles à partir du même jeu de données (b :
géoréférencement des laboratoires et structures et vue circulaire associée, c : autre spatialisation
mais avec des calculs de « centralité » pour analyser les laboratoires ou structures jouant un rôle clé
en termes de partenariats scientifiques) :
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                                                                          La recherche en biodiversité


Au-delà des laboratoires et structures reliés entre eux par la participation commune à des projets
labellisés, se dessinent deux grands ensembles de données : les réseaux d’acteurs et de chercheurs
(reliés entre eux par des mots-clés ou des thématiques de recherche en partie communes) et la
“géographie” des disciplines dans laquelle prennent place les projets scientifiques et la recherche en
biodiversité.
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                                                                             La recherche en biodiversité


La recherche en biodiversité : des acteurs, des projets et
des thématiques (deuxième partie)

L’analyse des réseaux d’acteurs a constitué un terrain riche de données dans l’exploration de la Base
de la FRB. Il s’est agi d’un chantier stratégique car on touche là à l’une des missions essentielles de la
Fondation : la construction de projets de recherche communs entre chercheurs issus d’institutions
différentes et inscrits dans des laboratoires différents, dans un démarche interdisciplinaire de
mutualisation des moyens et des résultats et dans une perspective de co-construction avec les
acteurs de la société civile. A ce titre, le travail de longue haleine de la Fondation pour la Recherche
sur la Biodiversité ne laisse pas de me fasciner dans un paysage de la recherche académique
découpée verticalement en disciplines, laboratoires, institutions et/ou universités aujourd’hui
autonomes et jalouses de leurs spécificités et de leurs moyens humains et financiers. C’est en
explorant les relations que les acteurs entretiennent au niveau individuel que se mesure au mieux la
recherche sur la biodiversité comme l’agrégation d’une communauté : plus encore que les disciplines
ou les laboratoires, les connexions inter-personnelles constituent un marqueur (ou un niveau de
« granularité ») pertinent pour comprendre la géographie sociale qui gouverne l’émergence d’un
champ de recherche.




Les données contenues dans la base auraient pu être mobilisées pour tenter, une énième fois,
d’évaluer « l’excellence » scientifique des acteurs. Au contraire, dès le départ, l’étude s’est orientée
vers la recherche de ces indicateurs qui permettent de comprendre comment les connaissances sur la
biodiversité sont une production collective issue d’un vaste réseau d’acteurs coopérants, qui
s’agrègent autour d’objets d’étude comme les écosystèmes plus que par distribution en disciplines ou
en laboratoires. Pour y arriver, Cédric Chavériat, à la Fondation, a développé toute cette connectique
nécessaire à la circulation de l’information depuis la BDD jusqu’aux structures de graphes de façon
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                                                                            La recherche en biodiversité


pérenne, et donc jusqu’aux nombreuses cartographies produites. Dans un premier temps, il a fallu
« transformer les liens acteur-projet en liens acteur-acteur, en considérant que la participation de
différents acteurs à un même projet génère des liens entre tous ces acteurs » comme le précise le
rapport. Les liens entre acteurs ont été enrichis ensuite en fonction du nombre de projets communs et,
enfin, différents processus de traitement de l’information liée aux acteurs dans le BDD (profil,
disciplines, mots-clés associés, terrain de recherche…) ont été mis en place pour faire varier la
structure de graphe en fonction de différents paramètres. Toute cette connectique BDD-FRB / GEPHI
a permis, par exemple, de colorer les nœuds ou de faire varier leur taille en fonction de paramètre
comme la présence de mots-clés commun dans les domaines de recherche ou des projets auxquels
sont associés les acteurs.




Les graphes acteurs-acteurs (reliés les projets) ont été les premiers à être produits : ils comprennent
1655 individus différents participant à 185 projets (issus de plusieurs Appels A Projets, AAP) pour
lesquels les consortia sont connus et renseignés dans la base. Hormis quelques groupes isolés du
reste de la structure générale, la grande majorité des acteurs sont connectés entre eux, de proche en
proche, dans une géographie très clutérisée (et habituelle en matière de cartographie des sciences,
qu’il s’agisse d’articles ou de revues). La recherche en biodiversité apparaît donc constituée comme
un continuum de « noyaux denses de compétences ». Bien qu’anonymisés dans le rapport, les
graphes laissent apercevoir le rôle important que jouent certains individus à l’articulation de plusieurs
clusters et dont le rôle est capital pour assurer à cet espace son unité comme le montre la vue
centrale de l’exemple plus haut où ils apparaissent sous forme de nœuds rouge dont la grosseur varie
en fonction de leur score de « centralité ». A droite, la vue ne laisse apparaître en rouge (rôle de
premier plan) et en vert (rôle de second plan) que les acteurs en position centrale participant à
plusieurs projets et ayant des thématiques de recherche complémentaires mais différentes.


Ces graphes, typiques des réseaux sociaux, ont servi de base à l’étude des autres dimensions de
l’information contenues dans la base. La FRB fournit régulièrement un travail conséquent de remise à
jour des données en les enrichissant systématiquement : la Fondation dispose ainsi de profils
« acteurs » à jour et, donc, d’un puissant outil d’analyse qui peut servir maintenant d’aide à la
mobilisation d’experts et à la formation de consortiums de recherche. En particulier, le croisement de
différentes sources d’information constitue un moteur essentiel de renseignement des informations
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                                                                               La recherche en biodiversité


(alors mobilisable pour enrichir les capacités descriptives des nœuds du graphe). En dehors des
projets dépendant des Appels à Projets (AAP) gérés par la FRB, quatre autres sources d’information
sont utilisées à ce jour par la Fondation pour l’enrichissement des informations « acteurs » :


Les organismes français de recherche membres fondateurs de la FRB. Fin 2010 ces organismes
(BRGM, Cemagref, CIRAD, CNRS, Ifremer, INRA, IRD, MNHN) ont transmis à la FRB des listes
d’acteurs relevant de leur organisme et qu’ils considéraient comme pertinents pour la base de
données nationale. Parmi les acteurs identifiés, 2099 acteurs n’étaient pas déjà présents dans la
base. La validation de ces acteurs supplémentaires, par recherche bibliographique, est en cours.
Des recherches internet. L’équipe FRB peut incorporer des acteurs dans la base de données après
recherche sur internet et identification de laboratoires ou d’équipes de recherche dans le domaine de
la biodiversité, suivi d’un processus de validation par recherche bibliographique.
Des recherches bibliographiques. Ceci permet de valider si un acteur ne faisant pas partie d’un
projet de recherche biodiversité et pré-identifié par un organisme de recherche ou la FRB est à
prendre en compte ou non dans la base, en fonction de publications qu’il a ou pas sur le thème
biodiversité (depuis 2005). Les acteurs peuvent aussi être directement identifiés par recherche
bibliographique. L’établissement d’un profil bibliographique étant particulièrement laborieux pour
l’ensemble du champ biodiversité, cette approche n’est réalisée à ce stade que pour des thèmes
particuliers (par exemple celui des scénarios de la biodiversité, en cours).
Enquête auprès des chercheurs. Chaque personne dont les informations sont entrées dans la base
de données est ensuite contactée par mail pour l’informer que nous stockons des informations la
concernant et lui permettre de faire valoir son droit d’accès, de rectification ou d’opposition,
conformément à la loi informatique et libertés de 1978. L’acteur peut compléter et corriger les
informations le concernant, ou signaler des modifications à effectuer sur les structures ou projets qui
lui sont rattachés. Il peut aussi quantifier la part de la biodiversité dans ses travaux de recherche. Il
peut enfin donner les autorisations d’utilisations de la totalité ou d’une partie des données le
concernant.
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                                                                               La recherche en biodiversité


L’ensemble de ces informations vient donc nourrir, in fine, les graphes d’acteurs. On peut ainsi croiser
les graphes acteurs-acteurs (reliés par les projets) à des batteries de mots-clés significatifs décrivant
soit le champ disciplinaire auxquels appartiennent les acteurs, soit les thématiques abordées dans les
projets, soit encore les objets, les terrains sur lesquels ils travaillent de concert. Parmi toutes ces
variables, plusieurs ont été testées et l’une s’est révélée particulièrement intéressante : la
« géographie » des écosystèmes sur lesquels travaillent les acteurs.




En termes descriptifs, cette carte est d’une autre nature que celle des laboratoires, souvent de
grosses structures à fort effectifs rassemblant des chercheurs travaillant sur des thèmes qui peuvent
être très différents (sans parler, comme je l’ai maintes fois expérimenté auparavant, du fait que les
cartographies de laboratoires qui reposent par exemple sur les informations contenus dans leurs sites
web ou les documents officiels qu’ils produisent me semblent assez artificiels et généraux, souvent
tournés vers des objectifs de communication institutionnelle). La carte acteurs-écosystèmes révèle au
contraire un vaste réseau d’affinités thématiques qui transcende aussi bien les appartenances
institutionnelles que disciplinaires : des clusters d’acteurs (vers la gauche de la carte) travaillent sur la
biodiversité marine (les mots clés vont de la « haute mer » aux «estuaires », et incluent aussi « socio-
écosystème», traduisant sans doute l’historique de l’approche écosystémique utilisée dans la
L’Atelier de Cartographie   12
                                                                               La recherche en biodiversité


communauté marine) tandis que les mots clés « récif corallien » et « Île» sont localisés ensemble à
proximité du cluster marin, mais pas en son sein, traduisant une spécificité partielle des acteurs
travaillant sur ces milieux. Des clusters d’acteurs (vers le bas de la carte) travaillent sur la biodiversité
des eaux douces (les mots clés sont ici « rivière», «dulçaquicole», ou « hydrosystème») tandis que
d’autres acteurs (vers le centre de la carte) sur les « zones urbaines », les « sites pollués » ou les «
friches industrielles », bien qu’il soit difficile d’identifier un cluster précis pour ces acteurs. Dans la
partie haute de la carte, des clusters d’acteurs travaillent sur différents types d’écosystèmes terrestres
(forêt tropicale, forêt tempérée, prairie, montagne, agro-écosystème…), dans une déclinaison
systématique des biotopes placés aujourd’hui sous l’observation des scientifiques. Il me semble
évident aujourd’hui que l’on pourrait tirer de cette cartographie, en la scénarisant, un instrument
pédagogique des plus efficaces pour faire découvrir toute la richesse de la recherche en biodiversité.


Cette approche par les acteurs, au-delà des écosystèmes, permet en retour de qualifier de façon fine
la géographie thématique des laboratoires (ou leurs « spécialités » à partir des terrains réel occupés
par les chercheurs). On peut ainsi croiser les disciplines auxquels se réfèrent les acteurs avec la carte
des laboratoires pour apercevoir les réseaux transversaux réels d’où émergent des objets communs
de recherche. C’est ce type de connectique analytique qu’a développé Cédric Chavériat, notamment à
partir de procédures qui permettent pour chaque laboratoire identifié de calculer le nombre relatif de
chercheurs par disciplines ou objets d’étude et, ainsi, de faire varier les vues produites sous GEPHI
3
( ). Dans les deux vues ci-dessous (produites dans le rapport final), si la grosseur des nœuds des
laboratoires dépend du nombre de participations à des projets labellisés par la FRB, les couleurs en
termes de dégradés et d’intensité dépendent des objets d’étude réels des chercheurs et de leur
nombre respectif :




3
    http://gephi.org
L’Atelier de Cartographie   13
                                                                          La recherche en biodiversité




Les variations de vues rendues possibles par le croisement de variables sont en réalité
impressionnantes, et le travail d’exploration n’a fait que commencer. Une certitude cependant : ces
variations ne sont déployables que si les données sont issues d’un long travail de vérification
manuelle et si elles admettent de nombreuses dimensions, souvent issues de plusieurs sources
d’information. Deux conditions sine-qua-non de cartographies de l’information pertinentes.
L’Atelier de Cartographie   14
                                                                              La recherche en biodiversité




La recherche en biodiversité                                   :       la   géographie               des
disciplines (troisième partie)

                                      “Il se peut bien – et encore, ce serait à examiner – qu’une science
                                           naisse d’une autre; mais jamais une science ne peut naître de
                                   l’absence d’une autre, ni de l’échec, ni même de l’obstacle rencontré
                                         par une autre” (p.140), FOUCAULT, M., Les mots et les choses,
                                                                                         Gallimard, 1966.




L’exploration cartographique de la base de données de la Fondation pour la Recherche sur la
Biodiversité ne s’est pas achevée, ni même focalisée, sur la seule géographie des acteurs et des
laboratoires. Bien qu’importantes pour leurs enjeux institutionnels et politiques, les cartographies des
structures de recherche et de leurs domaines respectifs de compétences comptent moins, pour un
néophyte comme moi, que les cartographies des disciplines. Car les cartographies de disciplines ou
des « sciences » constituent des instruments privilégiés d’interrogation en épistémologie des
sciences, comme celles que produisent aujourd’hui des chercheurs comme Richard Klavans
4                          5
( ) ou Loët Leydesdorff ( ). Elles renseignent, à grande échelle, sur cette « tectonique » des
connaissances scientifiques où figurent de grands ensembles connus mais aussi des domaines
émergents. Traditionnellement, elles sont calculées à partir de l’analyse de millions de publications
                                                                   6             7
indexées dans des bases éditeurs comme le Web of Science ( ) ou Scopus ( ), en incluant différents
niveaux d’analyse comme celui des revues ou encore des descripteurs de contenus comme
les Subject Categories. Méthodologiquement, le travail collaboratif mené avec Cédric Chavériat,
Xavier Leroux et Flora Pelegrin sur les disciplines de la biodiversité s’inscrit dans cette tradition de la
« cartographie des sciences » et elle s’est accompagnée du même type de questionnement ou
d’objectifs : la « recherche sur la biodiversité » constitue-t-elle un espace original et autonome dans le
paysage des connaissances ? Cette géographie admet-elle des sous-parties originales et distinctes ?
Quels sont les liens qui les unissent ou, à l’inverse, les éléments qui les distinguent ? En somme : est-
il envisageable de produire une sorte de « boussole thématique » qui permettrait de naviguer dans
l’espace de la recherche sur la biodiversité et d’en apercevoir les grands traits d’un seul coup d’œil ou
d’y situer un champ de recherche précis ?


                                             8
Certes, le rapport sur la base de données ( ) contient déjà des éléments significatifs la « recherche en
biodiversité » comme l’évolution du nombre de publications référencées dans le Web of Science sous


4
  http://mapofscience.com/
5
  http://www.leydesdorff.net/
6
  http://thomsonreuters.com/products_services/science/science_products/a-z/web_of_science/
7
  http://www.info.sciverse.com/scopus
8
  http://www.fondationbiodiversite.fr/publications/rapports-et-expertises#bdd
L’Atelier de Cartographie   15
                                                                            La recherche en biodiversité


la rubrique « biodiversité » ou encore les estimations réalisés par la fondation sur le temps/chercheurs
alloués sur des champs de recherche qui en relèvent.




Cependant, ces éléments ne renseignent pas sur la façon dont les disciplines s’agrègent dans le
domaine de la biodiversité, si elles s’associent ou non en ensembles cohérents (pour un spécialiste
comme pour un néophyte) ou, même, s’il est simplement possible d’en dessiner une géographie
interprétable. En somme, que peut nous apprendre transformation de la liste ou de l’arborescence des
disciplines sur la biodiversité en matrice de graphe où les objets sont liés par la dynamique propre des
projets labellisés ?




L’objectif, ici, n’a pas été de produire une carte générale des sciences, ni même d’y situer la
recherche en biodiversité (ce que l’on peut faire à partir de grandes bases comme le WoS), mais
seulement de remonter « en abstraction » (depuis le niveau granulaire des acteurs) vers la façon dont
s’agencent les grands continents de la connaissance scientifique et de sa distribution en disciplines à
travers notre analyse des projets labellisés par la Fondation. Là aussi, c’est à partir des informations
archivées par la Fondation sur les projets que se sont effectués les différents niveaux d’intégration
L’Atelier de Cartographie        16
                                                                             La recherche en biodiversité


des données accumulées à travers les Appels A Projets (AAP) successifs depuis 2005. En son
principe, la méthode paraît simple : les acteurs sont associés à des disciplines dans leur profil de
compétences, ces acteurs sont liés entre eux par la participation à des projets communs, ce qui
permet, in fine, de comprendre comment 96 disciplines identifiées par la FRB sont liées entre elles à
travers plus de 180 projets labellisés et financés auxquels participent près de 1700 chercheurs.




Cette carte qui figure dans le rapport permet de visualiser, sous ses grandes lignes, la distribution des
disciplines, regroupées en 9 familles, dont trois sont statistiquement les plus représentées (le
« cœur » de la recherche en biodiversité : « Ecologie », « Classes et classifications du vivant »,
« Biologie cellulaire et moléculaire »). Hormis cet agrégat central de disciplines souvent associées à
des chercheurs et de façon simultanée (l’épaisseur des liens entre les nœuds étant pondérés en
fonction de degrés de co-occurrences des disciplines), la carte contient quelques éléments curieux
                                                9
pour un néophyte comme la « Cladistique » ( ) (ou l’étude de la classification des êtres vivants, selon
                                                                                              10
leurs relations de parenté, dans un cadre évolutionniste) ou encore « Evo-devo » ( ) (génétique
                                                                             11
évolutive   du   développement)    sans      oublier   la   « Mammalogie »   ( )   (étudier        les origines,
le comportement, le régime alimentaire, la diversité génétique et la dynamique des populations des
mammifères) que je ne connaissais pas.


D’autres vues ont été produites, notamment pour mesurer la richesse des liens qui unissent les
disciplines autour des liens intenses qui forment le « cœur » de la recherche sur la biodiversité. Au-



9
  http://fr.wikipedia.org/wiki/Cladistique
10
   http://fr.wikipedia.org/wiki/Evo-devo
11
   http://fr.wikipedia.org/wiki/Mammalogie
L’Atelier de Cartographie   17
                                                                           La recherche en biodiversité


delà de l’écologie, de la biologie cellulaire et moléculaire et des classifications du vivant, de
nombreuses relations secondaires existent :




La respatialisation des données avec Gephi (forceatlas2) a permis de produire d’autres vues dont une
a été retenue pour produire la carte des disciplines dans sa version « poster » imprimable :
L’Atelier de Cartographie   18
                                                                        La recherche en biodiversité




Si on l’examine de près, la topologie des disciplines qui se dessine laisse apercevoir combien la
« recherche en biodiversité » semble traversée par plusieurs dynamiques transversales et je crois y
apercevoir un certain ordre. Par exemple, on peut s’en rendre compte en réduisant la vue et en
conservant que les titres des catégories :




Ou encore en colorant les zones de la carte en fonction de la concentration des couleurs dans les
nœuds et les liens qui les relient :
L’Atelier de Cartographie   19
                                                                                 La recherche en biodiversité




Cette vue synthétique tient plus du schéma plus que de la projection de graphe et fournit à mon
sens (à titre d’esquisse de « boussole ») des informations secondaires importantes. Ici, ce n’est plus
seulement un « cœur » dense de trois grands domaines disciplinaires qui est présenté mais quelque-
chose comme la topologie (particulière à la biodiversité) des connaissances produites dans un
domaine pluridisciplinaire. La bi-partition y est manifeste de gauche à droite, entre la « biologie »
(j’aurais tendance à dire « sciences du vivant et de la nature ») et les SHS (au sens large : l’homme et
l’univers tels qu’ils sont produits culturellement, historiquement et géographiquement). Si l’on en
revient à la carte générale (donc à une structure de graphe qui est fondamentalement affaire de liens)
et que l’on s’y promène en partant des deux disciplines les plus éloignées l’une de l’autre sur un plan
horizontal (la « Thérapeutique » à gauche, « Langues et Littérature » de l’autre) on peut se rendre
compte que le graphe contient comme une déclinaison des disciplines qui, de proche en proche et
telles qu’elles sont liées dans des projets effectifs menés par les chercheurs, nous fait passer (et sans
hiérarchie puisque les liens sont non dirigés) de l’univers des « corps » biologiques (substrat naturel
de la biodiversité) à l’univers abstrait et contingent de la culture et de ses productions (ici, la littérature
mais en passant aussi par d’autres productions comme l’agriculture, les sciences de l’ingénieur ou les
biotechnologies que l’on peut regrouper sous le label de « services éco-systémiques »). Dans ce type
de parcours, de gauche à droite et inversement, l’Ecologie et la Biologie des Populations constituent,
non plus un cœur dense, mais des disciplines-pivot.




Mais une autre lecture cardinale est possible, et très complémentaire. Sur le schéma, les deux
ensembles majeurs que sont la « Biologie » et les « Sciences de la société » sont reliés via une ligne
de fracture dont « l’Ecologie » et la « Biologie des populations » sont encore le pivot : vers le haut, se
profilent un ensemble de disciplines qui traitent de « l’environnement » au sens large, tel qu’il est
produit, cultivé, exploité (sciences et techniques) ou tel qu’il impose aussi ses contraintes
L’Atelier de Cartographie   20
                                                                            La recherche en biodiversité


(bioclimatologie). Mais la distribution des disciplines, dans la moitié supérieure de la carte, ne me
semble pas aléatoire : de part et d’autre d’une ligne verticale, Ecologie/Botanique/Climatologie, on
trouvera (sans surprise) d’un côté les disciplines qui étudient « l’environnement » sous l’angle de la
culture (Ecologie urbaine, Aménagement de l’Espace et Urbanisme, Histoire, Sciences politiques…)
et, de l’autre côté, les disciplines qui étudient l’environnement sous l’angle de ses rapports au vivant
(Ecotoxicologie, Biotechnologie végétale, Endocrinologie et Métabolisme…).




Dans la partie inférieure de la carte, la distribution obéit aux mêmes principes, mais au regard des
espèces vivantes qu’il faut décrire, inventorier, analyser en tant que telles mais aussi dans leurs
relations réciproques à titre de systèmes (ou « d’écosystèmes »). En bas, à gauche, un ensemble
gouverné par la biologie des interactions (Virologie, Parasitologie, Biotechnologies animales…) et, à
droite, l’ensemble complémentaire des disciplines qui étudient les espèces vivantes (animales et
végétales) sous l’angle de leur production historique (Sciences forestières, Agriculture, Sciences
Vétérinaires, Bio-ingénierie…).


L’interprétation que je livre ici souffre évidemment de limites : je ne suis pas un expert du domaine
(malgré mon « stage » dans les données de la FRB) et, plus encore, le support numérique comme ici
mon blog ne donne qu’un aperçu général de patterns visuels et logiques qui méritent d’être explorés à
partir d’un poster affiché sur un mur. De plus, un algorithme comme Forceatlas2 admet des limites
malgré sa pertinence en matière de recherche de patterns visuels et statistiques. Cependant, s’il vous
prend comme moi d’arpenter le poster imprimé, vous vous apercevrez à quel point la distribution
spatiale des disciplines semble gouvernée par un ordre de plus en plus perceptible, au point d’essayer
d’en dessiner la logique comme je l’ai fait :
L’Atelier de Cartographie   21
                                                                             La recherche en biodiversité




C’est ma « boussole thématique », limitée à ma simple expérience de cartographe et d’analyste des
données de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité. Elle mériterait d’être testée et discutée
et je regrette que les « spécialistes » en Information Scientifique et Technique passent autant de
temps à calculer de ridicules indicateurs individuels de « visibilité » à partir des seules publications,
dont une partie seulement est indexée, dans un seul catalogue, et sur les seules citations
rétrospectives. L’exploration des fonds documentaires et des données archivées dans les organismes
de recherche et de formation contiennent pourtant bien des objets plus riches à explorer. Ce premier
travail exploratoire laisse apercevoir la diversité et la complémentarité des disciplines scientifiques et
des chercheurs engagés aujourd’hui dans la « recherche sur la biodiversité ». Je comprends que la
carte que nous avons produite avec Cédric Chavériat apparaisse quelque peu complexe mais, à
l’évidence, et au-delà de notre travail, c’est bien la recherche sur la biodiversité elle-même qui
apparaît comme riche et complexe. Et cette vaste diffraction des disciplines scientifiques naît d’une
lumière unique, celle de la question de la vie :


« La biodiversité est la vie, le public s’en rend compte et attend nos connaissances pour vivre
différemment, en harmonie avec la biosphère », Patrick Duncan, Président de la FRB.

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La recherche en biodiversite

  • 1. L’Atelier de Cartographie 1 La recherche en biodiversité LA RECHERCHE EN BIODIVERSITE : ANALYSE ET EXPLORATION CARTOGRAPHIQUE DE LA BASE DE DONNES NATIONALE DES ACTEURS, STRUCTURES ET PROJETS DE RECHERCHE SUR LA BIODIVERSITE Le siège de la F.B.B. à Paris (musée océanographique). Les trois textes suivants sont issus du blog http://ateliercartographie.wordpress.com et ont été publiés en février 2011. Il s’agit de posts de synthèse sur le travail d’analyse et de cartographie des informations contenues dans la Base de Données de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité (FRB). J’ai mené ce travail en coopération avec Cédric Chavériat (que j’ai eu le plaisir d’accueillir en formation de cartographie de l’information, le responsable de la base), Flora Pelegrin (responsable du pôle Stratégie et Animation Scientifiques), Fatima Fadil (chargée de mission portail et interfaces web) et Xavier Le Roux (directeur de la FRB). Ces trois posts contribuent à éclairer la démarche et la méthode qui aboutit aux cartes présentes dans le rapport officiel de la Fondation et publiquement accessible (http://www.fondationbiodiversite.fr/publications/rapports-et-expertises#bdd). Loin d’être achevée, cette expérience exploratoire de grandes masses de données mérite d’être poursuivie. Franck GHITALLA.
  • 2. L’Atelier de Cartographie 2 La recherche en biodiversité La recherche en biodiversité : exploration cartographique d’une communauté d’acteurs (première partie) 1 La Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité ( ) (FRB) vient de rendre public son rapport sur la « Base de Données Nationale des acteurs, structures et projets de recherche sur la biodiversité ». J’en suis corédacteur à titre de « cartographe » en association étroite avec Cédric Chavériat (que j’ai eu le plaisir d’accueillir en formation de cartographie de l’information, le responsable de la base), Flora Pelegrin (responsable du pôle Stratégie et Animation Scientifiques), Fatima Fadil (chargée de mission portail et interfaces web) et Xavier Le Roux (directeur de la FRB). Ce rapport est le résultat d’un long travail d’analyse et de mise au format des données que gère la FRB depuis 2009 et le déploiement public de la BDD constituent l’une des missions de la fondation. Le territoire numérique que nous avons exploré et analysé est vaste et complexe : la BDD contient à ce jour des informations sur plus de 4300 chercheurs français et 1200 étrangers qui publient dans des journaux internationaux à comité de lecture et/ou participent à des projets de recherche financés sur appels à projets compétitifs. Elle contient aussi des renseignements sur 342 laboratoires de recherche français participant plus ou moins directement à la recherche sur la biodiversité, et 308 projets de recherche financés depuis 2005 sur ce thème. Néanmoins, comme je l’espérai depuis le début de ce partenariat avec la FRB, les cartographies ont contribué de façon significative à l’étude de questions complexes pour un champ de recherches très pluridisciplinaire où le chimiste croise l’éthologue ou le biologiste dans l’étude de biotopes qui s’étendent depuis les fonds marins, les milieux aquatiques continentaux, les zones cultivées jusqu’aux déserts, sous l’angle de l’histoire comme de la génétique. 1 http://www.fondationbiodiversite.fr/
  • 3. L’Atelier de Cartographie 3 La recherche en biodiversité Quels sont donc leurs principaux objets et écosystèmes étudiés ? Comment les différentes disciplines sont représentées au sein d’une telle communauté ? Comment s’organisent les réseaux de collaborations entre laboratoires de recherche, entre acteurs individuels, ou entre disciplines au sein d’une telle communauté et pourquoi ? Comme le souligne le rapport « Au fil de ce rapport se dessine la géographie d’une communauté de recherche pluridisciplinaire, travaillant sur une large gamme d’enjeux, et dont l’ampleur était jusqu’ici méconnue ». Et la troisième partie du rapport, intitulée « Analyse des réseaux de collaborations » et où se concentrent les cartographies (au sens où je l’entends dans l’Atelier), constitue, à ma connaissance, une contribution inédite pour un rapport d’activité officiel dans l’analyse des données archivées par une grande institution de recherche. La production cartographique. Le travail cartographique réalisé pour la FRB s’est déroulé sur plus d’un an et a permis de capitaliser de nombreuses informations importantes dans la perspective d’un déploiement de la méthode et des outils sur d’autres données ou d’autres bases (notamment dans les organismes de recherche). J’ai notamment pu vérifier à quel point le déploiement d’un projet cartographique d’ampleur dans une organisation entraîne un coût en termes d’investissement humain : formation des acteurs, temps consacré au projet, difficultés techniques à surmonter. En particulier, il apparaît indéniablement que les croisements des différentes dimensions de l’information dans une BDD nécessaires à la production de cartographies multiples (et il en irait de même si les cartographies avaient été produites à partir d’un fichier Excel avec ses lignes et ses colonnes) constitue un test qualité de grande ampleur pour le système d’information interne à une organisation. C’est à mon sens, un exemple frappant du statut des « SI » aujourd’hui, utilisés souvent pour archiver des données et que l’on mobilise pour sortir deux ou trois fois dans l’année pour extraire des statistiques générales et approximatives ou encore pour produire un tableau de données synthétique sur les projets « en cours ». L’application d’une « couche cartographique » ne va pas de soi et, en tout état de cause, ne supporte ni l’approximation des informations (par exemple la façon de labelliser des objets ou de noter des affiliations) ni les « manques » ou les « trous ». Cela est vrai techniquement (par exemple dans les dates associées aux données puisqu’il est possible de produire des vues temporelles avec GEPHI) mais aussi et surtout en termes de communication publique : des acteurs, des laboratoires ou des entités peuvent soit absentes de la carte soit présentes plusieurs fois parce que les informations contenues dans le SI sont défaillantes et le regard des experts ou des acteurs peut être sévère sur la carte quand elle contient trop d’approximations. Avec les « coupes
  • 4. L’Atelier de Cartographie 4 La recherche en biodiversité transversales » qu’exercent les structures de graphes sur les BDD (comme une série de contrôles), on aperçoit rapidement le niveau qualitatif des informations archivées et, au-delà, les capacités d’une organisation à mobiliser son « système d’information » pour des applications externes. C’est tout l’avantage, comme à la FRB, de placer la gestion de la BDD sous la responsabilité d’acteurs ou de services tournés vers l’animation scientifique, la communication publique ou la gestion des interfaces web, autrement dit dans des « lieux » ou des « fonctions » d’une organisation orientés vers les usages et les services. Les travaux cartographiques qui y ont été déployés ont été couplés dès le départ à des questions d’épistémologie des disciplines, de nature des réseaux de collaborations entre laboratoires ou d’agrégation de compétences chez les chercheurs autour de certaines problématiques. Les cartographies contenues dans le rapport ne constituent qu’une partie seulement de la production. Elles témoignent cependant de la capacité de la Fondation de la Recherche sur la Biodiversité à déployer maintenant sur ses propres données un système continu d’observation, un observatoire effectif et régulier de ses propres archives qui lui permet ainsi de monitorer les différentes dimensions de la recherche en biodiversité. Les dimensions de l’information. Ce sont ces différentes dimensions de l’information contenues dans la structure de données que le travail cartographique a pour objectif de traiter en les croisant. La 2 méthode déployée est celle de VisIR ( ) en privilégiant notamment l’analyse des projets labellisés et/ou financés par la fondation. Le modèle d’analyse utilisé permet de décrire le paysage de la recherche en biodiversité en termes de structures (unités mixtes ou propres, institutions administratives de rattachement, etc.), d’acteurs individuels (notamment parce qu’une partie significative des informations présentes dans la base proviennent des fiches de renseignement remplies par les chercheurs eux-mêmes), de thématiques (mots-clés notamment), de disciplines scientifiques (distribuées sur deux niveaux de hiérarchie et que le dispositif cartographique à inciter à fixer et à éclaircir), de localisation géographique des acteurs et des structures, d’objets d’étude (terrains d’étude, taxons et écosystèmes étudiés). 2 http://www.slideshare.net/Ghitalla/cartographier-un-ple-de-comptitivit
  • 5. L’Atelier de Cartographie 5 La recherche en biodiversité A partir de là, le travail de croisement peut commencer selon une procédure réglée et dont la fondation a développé toute la connectique logicielle à titre pérenne : Nous n’avons pas procédé à tous les croisements possibles, bien qu’ils soient nombreux étant donnée la richesse des dimensions des données. En détail, le tableau suivant donne une idée du nombre de « photographies » déployables sur le système continu de production de données qu’est la base de la FRB : Laboratoires et structures de recherche. On lira dans le rapport les analyses qu’en tire la FRB sur le paysage de la recherche en biodiversité, notamment sur la richesse du réseau de collaborations entre disciplines comme entre structures de recherche. En particulier, il s’agissait d’évaluer le degré de coopération inter-régionale entre structures de recherche impliquées dans la participation commune à des projets financés. La carte, évidemment, est anonymisée car il n’est pas question de classer les institutions ou les laboratoires mais de visualiser de façon synthétique le tissu de collaborations qui s’est construit en plusieurs appels à projets successifs depuis 2005.
  • 6. L’Atelier de Cartographie 6 La recherche en biodiversité Quand elle intègre toutes les informations de la base, cette carte peut être mobilisée pour favoriser la mise en réseaux des acteurs et permettre la mise à disposition de la communauté scientifique un outil d’aide au montage de partenariats de recherche. En particulier, elle peut constituer un élément important pour améliorer la mobilisation de l’expertise dans le domaine de la biodiversité, pour i) répondre aux besoins des organisations nationales et internationales à l’interface sciences/sociétés ou sciences/politiques (ipBes, IUCN, ministères, etc.), et ii) disposer d’un outil pour identifier des experts dans le cadre de la gestion d’appels à projets. La vue produite correspond à une cartographie type « réseaux sociaux » mais d’autres sont possibles à partir du même jeu de données (b : géoréférencement des laboratoires et structures et vue circulaire associée, c : autre spatialisation mais avec des calculs de « centralité » pour analyser les laboratoires ou structures jouant un rôle clé en termes de partenariats scientifiques) :
  • 7. L’Atelier de Cartographie 7 La recherche en biodiversité Au-delà des laboratoires et structures reliés entre eux par la participation commune à des projets labellisés, se dessinent deux grands ensembles de données : les réseaux d’acteurs et de chercheurs (reliés entre eux par des mots-clés ou des thématiques de recherche en partie communes) et la “géographie” des disciplines dans laquelle prennent place les projets scientifiques et la recherche en biodiversité.
  • 8. L’Atelier de Cartographie 8 La recherche en biodiversité La recherche en biodiversité : des acteurs, des projets et des thématiques (deuxième partie) L’analyse des réseaux d’acteurs a constitué un terrain riche de données dans l’exploration de la Base de la FRB. Il s’est agi d’un chantier stratégique car on touche là à l’une des missions essentielles de la Fondation : la construction de projets de recherche communs entre chercheurs issus d’institutions différentes et inscrits dans des laboratoires différents, dans un démarche interdisciplinaire de mutualisation des moyens et des résultats et dans une perspective de co-construction avec les acteurs de la société civile. A ce titre, le travail de longue haleine de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité ne laisse pas de me fasciner dans un paysage de la recherche académique découpée verticalement en disciplines, laboratoires, institutions et/ou universités aujourd’hui autonomes et jalouses de leurs spécificités et de leurs moyens humains et financiers. C’est en explorant les relations que les acteurs entretiennent au niveau individuel que se mesure au mieux la recherche sur la biodiversité comme l’agrégation d’une communauté : plus encore que les disciplines ou les laboratoires, les connexions inter-personnelles constituent un marqueur (ou un niveau de « granularité ») pertinent pour comprendre la géographie sociale qui gouverne l’émergence d’un champ de recherche. Les données contenues dans la base auraient pu être mobilisées pour tenter, une énième fois, d’évaluer « l’excellence » scientifique des acteurs. Au contraire, dès le départ, l’étude s’est orientée vers la recherche de ces indicateurs qui permettent de comprendre comment les connaissances sur la biodiversité sont une production collective issue d’un vaste réseau d’acteurs coopérants, qui s’agrègent autour d’objets d’étude comme les écosystèmes plus que par distribution en disciplines ou en laboratoires. Pour y arriver, Cédric Chavériat, à la Fondation, a développé toute cette connectique nécessaire à la circulation de l’information depuis la BDD jusqu’aux structures de graphes de façon
  • 9. L’Atelier de Cartographie 9 La recherche en biodiversité pérenne, et donc jusqu’aux nombreuses cartographies produites. Dans un premier temps, il a fallu « transformer les liens acteur-projet en liens acteur-acteur, en considérant que la participation de différents acteurs à un même projet génère des liens entre tous ces acteurs » comme le précise le rapport. Les liens entre acteurs ont été enrichis ensuite en fonction du nombre de projets communs et, enfin, différents processus de traitement de l’information liée aux acteurs dans le BDD (profil, disciplines, mots-clés associés, terrain de recherche…) ont été mis en place pour faire varier la structure de graphe en fonction de différents paramètres. Toute cette connectique BDD-FRB / GEPHI a permis, par exemple, de colorer les nœuds ou de faire varier leur taille en fonction de paramètre comme la présence de mots-clés commun dans les domaines de recherche ou des projets auxquels sont associés les acteurs. Les graphes acteurs-acteurs (reliés les projets) ont été les premiers à être produits : ils comprennent 1655 individus différents participant à 185 projets (issus de plusieurs Appels A Projets, AAP) pour lesquels les consortia sont connus et renseignés dans la base. Hormis quelques groupes isolés du reste de la structure générale, la grande majorité des acteurs sont connectés entre eux, de proche en proche, dans une géographie très clutérisée (et habituelle en matière de cartographie des sciences, qu’il s’agisse d’articles ou de revues). La recherche en biodiversité apparaît donc constituée comme un continuum de « noyaux denses de compétences ». Bien qu’anonymisés dans le rapport, les graphes laissent apercevoir le rôle important que jouent certains individus à l’articulation de plusieurs clusters et dont le rôle est capital pour assurer à cet espace son unité comme le montre la vue centrale de l’exemple plus haut où ils apparaissent sous forme de nœuds rouge dont la grosseur varie en fonction de leur score de « centralité ». A droite, la vue ne laisse apparaître en rouge (rôle de premier plan) et en vert (rôle de second plan) que les acteurs en position centrale participant à plusieurs projets et ayant des thématiques de recherche complémentaires mais différentes. Ces graphes, typiques des réseaux sociaux, ont servi de base à l’étude des autres dimensions de l’information contenues dans la base. La FRB fournit régulièrement un travail conséquent de remise à jour des données en les enrichissant systématiquement : la Fondation dispose ainsi de profils « acteurs » à jour et, donc, d’un puissant outil d’analyse qui peut servir maintenant d’aide à la mobilisation d’experts et à la formation de consortiums de recherche. En particulier, le croisement de différentes sources d’information constitue un moteur essentiel de renseignement des informations
  • 10. L’Atelier de Cartographie 10 La recherche en biodiversité (alors mobilisable pour enrichir les capacités descriptives des nœuds du graphe). En dehors des projets dépendant des Appels à Projets (AAP) gérés par la FRB, quatre autres sources d’information sont utilisées à ce jour par la Fondation pour l’enrichissement des informations « acteurs » : Les organismes français de recherche membres fondateurs de la FRB. Fin 2010 ces organismes (BRGM, Cemagref, CIRAD, CNRS, Ifremer, INRA, IRD, MNHN) ont transmis à la FRB des listes d’acteurs relevant de leur organisme et qu’ils considéraient comme pertinents pour la base de données nationale. Parmi les acteurs identifiés, 2099 acteurs n’étaient pas déjà présents dans la base. La validation de ces acteurs supplémentaires, par recherche bibliographique, est en cours. Des recherches internet. L’équipe FRB peut incorporer des acteurs dans la base de données après recherche sur internet et identification de laboratoires ou d’équipes de recherche dans le domaine de la biodiversité, suivi d’un processus de validation par recherche bibliographique. Des recherches bibliographiques. Ceci permet de valider si un acteur ne faisant pas partie d’un projet de recherche biodiversité et pré-identifié par un organisme de recherche ou la FRB est à prendre en compte ou non dans la base, en fonction de publications qu’il a ou pas sur le thème biodiversité (depuis 2005). Les acteurs peuvent aussi être directement identifiés par recherche bibliographique. L’établissement d’un profil bibliographique étant particulièrement laborieux pour l’ensemble du champ biodiversité, cette approche n’est réalisée à ce stade que pour des thèmes particuliers (par exemple celui des scénarios de la biodiversité, en cours). Enquête auprès des chercheurs. Chaque personne dont les informations sont entrées dans la base de données est ensuite contactée par mail pour l’informer que nous stockons des informations la concernant et lui permettre de faire valoir son droit d’accès, de rectification ou d’opposition, conformément à la loi informatique et libertés de 1978. L’acteur peut compléter et corriger les informations le concernant, ou signaler des modifications à effectuer sur les structures ou projets qui lui sont rattachés. Il peut aussi quantifier la part de la biodiversité dans ses travaux de recherche. Il peut enfin donner les autorisations d’utilisations de la totalité ou d’une partie des données le concernant.
  • 11. L’Atelier de Cartographie 11 La recherche en biodiversité L’ensemble de ces informations vient donc nourrir, in fine, les graphes d’acteurs. On peut ainsi croiser les graphes acteurs-acteurs (reliés par les projets) à des batteries de mots-clés significatifs décrivant soit le champ disciplinaire auxquels appartiennent les acteurs, soit les thématiques abordées dans les projets, soit encore les objets, les terrains sur lesquels ils travaillent de concert. Parmi toutes ces variables, plusieurs ont été testées et l’une s’est révélée particulièrement intéressante : la « géographie » des écosystèmes sur lesquels travaillent les acteurs. En termes descriptifs, cette carte est d’une autre nature que celle des laboratoires, souvent de grosses structures à fort effectifs rassemblant des chercheurs travaillant sur des thèmes qui peuvent être très différents (sans parler, comme je l’ai maintes fois expérimenté auparavant, du fait que les cartographies de laboratoires qui reposent par exemple sur les informations contenus dans leurs sites web ou les documents officiels qu’ils produisent me semblent assez artificiels et généraux, souvent tournés vers des objectifs de communication institutionnelle). La carte acteurs-écosystèmes révèle au contraire un vaste réseau d’affinités thématiques qui transcende aussi bien les appartenances institutionnelles que disciplinaires : des clusters d’acteurs (vers la gauche de la carte) travaillent sur la biodiversité marine (les mots clés vont de la « haute mer » aux «estuaires », et incluent aussi « socio- écosystème», traduisant sans doute l’historique de l’approche écosystémique utilisée dans la
  • 12. L’Atelier de Cartographie 12 La recherche en biodiversité communauté marine) tandis que les mots clés « récif corallien » et « Île» sont localisés ensemble à proximité du cluster marin, mais pas en son sein, traduisant une spécificité partielle des acteurs travaillant sur ces milieux. Des clusters d’acteurs (vers le bas de la carte) travaillent sur la biodiversité des eaux douces (les mots clés sont ici « rivière», «dulçaquicole», ou « hydrosystème») tandis que d’autres acteurs (vers le centre de la carte) sur les « zones urbaines », les « sites pollués » ou les « friches industrielles », bien qu’il soit difficile d’identifier un cluster précis pour ces acteurs. Dans la partie haute de la carte, des clusters d’acteurs travaillent sur différents types d’écosystèmes terrestres (forêt tropicale, forêt tempérée, prairie, montagne, agro-écosystème…), dans une déclinaison systématique des biotopes placés aujourd’hui sous l’observation des scientifiques. Il me semble évident aujourd’hui que l’on pourrait tirer de cette cartographie, en la scénarisant, un instrument pédagogique des plus efficaces pour faire découvrir toute la richesse de la recherche en biodiversité. Cette approche par les acteurs, au-delà des écosystèmes, permet en retour de qualifier de façon fine la géographie thématique des laboratoires (ou leurs « spécialités » à partir des terrains réel occupés par les chercheurs). On peut ainsi croiser les disciplines auxquels se réfèrent les acteurs avec la carte des laboratoires pour apercevoir les réseaux transversaux réels d’où émergent des objets communs de recherche. C’est ce type de connectique analytique qu’a développé Cédric Chavériat, notamment à partir de procédures qui permettent pour chaque laboratoire identifié de calculer le nombre relatif de chercheurs par disciplines ou objets d’étude et, ainsi, de faire varier les vues produites sous GEPHI 3 ( ). Dans les deux vues ci-dessous (produites dans le rapport final), si la grosseur des nœuds des laboratoires dépend du nombre de participations à des projets labellisés par la FRB, les couleurs en termes de dégradés et d’intensité dépendent des objets d’étude réels des chercheurs et de leur nombre respectif : 3 http://gephi.org
  • 13. L’Atelier de Cartographie 13 La recherche en biodiversité Les variations de vues rendues possibles par le croisement de variables sont en réalité impressionnantes, et le travail d’exploration n’a fait que commencer. Une certitude cependant : ces variations ne sont déployables que si les données sont issues d’un long travail de vérification manuelle et si elles admettent de nombreuses dimensions, souvent issues de plusieurs sources d’information. Deux conditions sine-qua-non de cartographies de l’information pertinentes.
  • 14. L’Atelier de Cartographie 14 La recherche en biodiversité La recherche en biodiversité : la géographie des disciplines (troisième partie) “Il se peut bien – et encore, ce serait à examiner – qu’une science naisse d’une autre; mais jamais une science ne peut naître de l’absence d’une autre, ni de l’échec, ni même de l’obstacle rencontré par une autre” (p.140), FOUCAULT, M., Les mots et les choses, Gallimard, 1966. L’exploration cartographique de la base de données de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité ne s’est pas achevée, ni même focalisée, sur la seule géographie des acteurs et des laboratoires. Bien qu’importantes pour leurs enjeux institutionnels et politiques, les cartographies des structures de recherche et de leurs domaines respectifs de compétences comptent moins, pour un néophyte comme moi, que les cartographies des disciplines. Car les cartographies de disciplines ou des « sciences » constituent des instruments privilégiés d’interrogation en épistémologie des sciences, comme celles que produisent aujourd’hui des chercheurs comme Richard Klavans 4 5 ( ) ou Loët Leydesdorff ( ). Elles renseignent, à grande échelle, sur cette « tectonique » des connaissances scientifiques où figurent de grands ensembles connus mais aussi des domaines émergents. Traditionnellement, elles sont calculées à partir de l’analyse de millions de publications 6 7 indexées dans des bases éditeurs comme le Web of Science ( ) ou Scopus ( ), en incluant différents niveaux d’analyse comme celui des revues ou encore des descripteurs de contenus comme les Subject Categories. Méthodologiquement, le travail collaboratif mené avec Cédric Chavériat, Xavier Leroux et Flora Pelegrin sur les disciplines de la biodiversité s’inscrit dans cette tradition de la « cartographie des sciences » et elle s’est accompagnée du même type de questionnement ou d’objectifs : la « recherche sur la biodiversité » constitue-t-elle un espace original et autonome dans le paysage des connaissances ? Cette géographie admet-elle des sous-parties originales et distinctes ? Quels sont les liens qui les unissent ou, à l’inverse, les éléments qui les distinguent ? En somme : est- il envisageable de produire une sorte de « boussole thématique » qui permettrait de naviguer dans l’espace de la recherche sur la biodiversité et d’en apercevoir les grands traits d’un seul coup d’œil ou d’y situer un champ de recherche précis ? 8 Certes, le rapport sur la base de données ( ) contient déjà des éléments significatifs la « recherche en biodiversité » comme l’évolution du nombre de publications référencées dans le Web of Science sous 4 http://mapofscience.com/ 5 http://www.leydesdorff.net/ 6 http://thomsonreuters.com/products_services/science/science_products/a-z/web_of_science/ 7 http://www.info.sciverse.com/scopus 8 http://www.fondationbiodiversite.fr/publications/rapports-et-expertises#bdd
  • 15. L’Atelier de Cartographie 15 La recherche en biodiversité la rubrique « biodiversité » ou encore les estimations réalisés par la fondation sur le temps/chercheurs alloués sur des champs de recherche qui en relèvent. Cependant, ces éléments ne renseignent pas sur la façon dont les disciplines s’agrègent dans le domaine de la biodiversité, si elles s’associent ou non en ensembles cohérents (pour un spécialiste comme pour un néophyte) ou, même, s’il est simplement possible d’en dessiner une géographie interprétable. En somme, que peut nous apprendre transformation de la liste ou de l’arborescence des disciplines sur la biodiversité en matrice de graphe où les objets sont liés par la dynamique propre des projets labellisés ? L’objectif, ici, n’a pas été de produire une carte générale des sciences, ni même d’y situer la recherche en biodiversité (ce que l’on peut faire à partir de grandes bases comme le WoS), mais seulement de remonter « en abstraction » (depuis le niveau granulaire des acteurs) vers la façon dont s’agencent les grands continents de la connaissance scientifique et de sa distribution en disciplines à travers notre analyse des projets labellisés par la Fondation. Là aussi, c’est à partir des informations archivées par la Fondation sur les projets que se sont effectués les différents niveaux d’intégration
  • 16. L’Atelier de Cartographie 16 La recherche en biodiversité des données accumulées à travers les Appels A Projets (AAP) successifs depuis 2005. En son principe, la méthode paraît simple : les acteurs sont associés à des disciplines dans leur profil de compétences, ces acteurs sont liés entre eux par la participation à des projets communs, ce qui permet, in fine, de comprendre comment 96 disciplines identifiées par la FRB sont liées entre elles à travers plus de 180 projets labellisés et financés auxquels participent près de 1700 chercheurs. Cette carte qui figure dans le rapport permet de visualiser, sous ses grandes lignes, la distribution des disciplines, regroupées en 9 familles, dont trois sont statistiquement les plus représentées (le « cœur » de la recherche en biodiversité : « Ecologie », « Classes et classifications du vivant », « Biologie cellulaire et moléculaire »). Hormis cet agrégat central de disciplines souvent associées à des chercheurs et de façon simultanée (l’épaisseur des liens entre les nœuds étant pondérés en fonction de degrés de co-occurrences des disciplines), la carte contient quelques éléments curieux 9 pour un néophyte comme la « Cladistique » ( ) (ou l’étude de la classification des êtres vivants, selon 10 leurs relations de parenté, dans un cadre évolutionniste) ou encore « Evo-devo » ( ) (génétique 11 évolutive du développement) sans oublier la « Mammalogie » ( ) (étudier les origines, le comportement, le régime alimentaire, la diversité génétique et la dynamique des populations des mammifères) que je ne connaissais pas. D’autres vues ont été produites, notamment pour mesurer la richesse des liens qui unissent les disciplines autour des liens intenses qui forment le « cœur » de la recherche sur la biodiversité. Au- 9 http://fr.wikipedia.org/wiki/Cladistique 10 http://fr.wikipedia.org/wiki/Evo-devo 11 http://fr.wikipedia.org/wiki/Mammalogie
  • 17. L’Atelier de Cartographie 17 La recherche en biodiversité delà de l’écologie, de la biologie cellulaire et moléculaire et des classifications du vivant, de nombreuses relations secondaires existent : La respatialisation des données avec Gephi (forceatlas2) a permis de produire d’autres vues dont une a été retenue pour produire la carte des disciplines dans sa version « poster » imprimable :
  • 18. L’Atelier de Cartographie 18 La recherche en biodiversité Si on l’examine de près, la topologie des disciplines qui se dessine laisse apercevoir combien la « recherche en biodiversité » semble traversée par plusieurs dynamiques transversales et je crois y apercevoir un certain ordre. Par exemple, on peut s’en rendre compte en réduisant la vue et en conservant que les titres des catégories : Ou encore en colorant les zones de la carte en fonction de la concentration des couleurs dans les nœuds et les liens qui les relient :
  • 19. L’Atelier de Cartographie 19 La recherche en biodiversité Cette vue synthétique tient plus du schéma plus que de la projection de graphe et fournit à mon sens (à titre d’esquisse de « boussole ») des informations secondaires importantes. Ici, ce n’est plus seulement un « cœur » dense de trois grands domaines disciplinaires qui est présenté mais quelque- chose comme la topologie (particulière à la biodiversité) des connaissances produites dans un domaine pluridisciplinaire. La bi-partition y est manifeste de gauche à droite, entre la « biologie » (j’aurais tendance à dire « sciences du vivant et de la nature ») et les SHS (au sens large : l’homme et l’univers tels qu’ils sont produits culturellement, historiquement et géographiquement). Si l’on en revient à la carte générale (donc à une structure de graphe qui est fondamentalement affaire de liens) et que l’on s’y promène en partant des deux disciplines les plus éloignées l’une de l’autre sur un plan horizontal (la « Thérapeutique » à gauche, « Langues et Littérature » de l’autre) on peut se rendre compte que le graphe contient comme une déclinaison des disciplines qui, de proche en proche et telles qu’elles sont liées dans des projets effectifs menés par les chercheurs, nous fait passer (et sans hiérarchie puisque les liens sont non dirigés) de l’univers des « corps » biologiques (substrat naturel de la biodiversité) à l’univers abstrait et contingent de la culture et de ses productions (ici, la littérature mais en passant aussi par d’autres productions comme l’agriculture, les sciences de l’ingénieur ou les biotechnologies que l’on peut regrouper sous le label de « services éco-systémiques »). Dans ce type de parcours, de gauche à droite et inversement, l’Ecologie et la Biologie des Populations constituent, non plus un cœur dense, mais des disciplines-pivot. Mais une autre lecture cardinale est possible, et très complémentaire. Sur le schéma, les deux ensembles majeurs que sont la « Biologie » et les « Sciences de la société » sont reliés via une ligne de fracture dont « l’Ecologie » et la « Biologie des populations » sont encore le pivot : vers le haut, se profilent un ensemble de disciplines qui traitent de « l’environnement » au sens large, tel qu’il est produit, cultivé, exploité (sciences et techniques) ou tel qu’il impose aussi ses contraintes
  • 20. L’Atelier de Cartographie 20 La recherche en biodiversité (bioclimatologie). Mais la distribution des disciplines, dans la moitié supérieure de la carte, ne me semble pas aléatoire : de part et d’autre d’une ligne verticale, Ecologie/Botanique/Climatologie, on trouvera (sans surprise) d’un côté les disciplines qui étudient « l’environnement » sous l’angle de la culture (Ecologie urbaine, Aménagement de l’Espace et Urbanisme, Histoire, Sciences politiques…) et, de l’autre côté, les disciplines qui étudient l’environnement sous l’angle de ses rapports au vivant (Ecotoxicologie, Biotechnologie végétale, Endocrinologie et Métabolisme…). Dans la partie inférieure de la carte, la distribution obéit aux mêmes principes, mais au regard des espèces vivantes qu’il faut décrire, inventorier, analyser en tant que telles mais aussi dans leurs relations réciproques à titre de systèmes (ou « d’écosystèmes »). En bas, à gauche, un ensemble gouverné par la biologie des interactions (Virologie, Parasitologie, Biotechnologies animales…) et, à droite, l’ensemble complémentaire des disciplines qui étudient les espèces vivantes (animales et végétales) sous l’angle de leur production historique (Sciences forestières, Agriculture, Sciences Vétérinaires, Bio-ingénierie…). L’interprétation que je livre ici souffre évidemment de limites : je ne suis pas un expert du domaine (malgré mon « stage » dans les données de la FRB) et, plus encore, le support numérique comme ici mon blog ne donne qu’un aperçu général de patterns visuels et logiques qui méritent d’être explorés à partir d’un poster affiché sur un mur. De plus, un algorithme comme Forceatlas2 admet des limites malgré sa pertinence en matière de recherche de patterns visuels et statistiques. Cependant, s’il vous prend comme moi d’arpenter le poster imprimé, vous vous apercevrez à quel point la distribution spatiale des disciplines semble gouvernée par un ordre de plus en plus perceptible, au point d’essayer d’en dessiner la logique comme je l’ai fait :
  • 21. L’Atelier de Cartographie 21 La recherche en biodiversité C’est ma « boussole thématique », limitée à ma simple expérience de cartographe et d’analyste des données de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité. Elle mériterait d’être testée et discutée et je regrette que les « spécialistes » en Information Scientifique et Technique passent autant de temps à calculer de ridicules indicateurs individuels de « visibilité » à partir des seules publications, dont une partie seulement est indexée, dans un seul catalogue, et sur les seules citations rétrospectives. L’exploration des fonds documentaires et des données archivées dans les organismes de recherche et de formation contiennent pourtant bien des objets plus riches à explorer. Ce premier travail exploratoire laisse apercevoir la diversité et la complémentarité des disciplines scientifiques et des chercheurs engagés aujourd’hui dans la « recherche sur la biodiversité ». Je comprends que la carte que nous avons produite avec Cédric Chavériat apparaisse quelque peu complexe mais, à l’évidence, et au-delà de notre travail, c’est bien la recherche sur la biodiversité elle-même qui apparaît comme riche et complexe. Et cette vaste diffraction des disciplines scientifiques naît d’une lumière unique, celle de la question de la vie : « La biodiversité est la vie, le public s’en rend compte et attend nos connaissances pour vivre différemment, en harmonie avec la biosphère », Patrick Duncan, Président de la FRB.