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L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é .
Mathilde Chevalier
- S P 4 S t r a t é g i e d e s m a r q u e s -
P i l o t e : A r n a u d B o n n e vi l l e
Les femmes, le vin et la segmentation du
marché.
- Et si le marketing féminin n'était plus en phase avec la réalité du marché vinicole ? -
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L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é .
Editorial .
« Lorsque je me présente j’aime spécifier que je suis fille et petite-fille de vignerons.
Originaire du petit village de Lugny au cœur du vignoble mâconnais, j’ai baigné dans le
monde de la vigne avec tous les avantages et les inconvénients que cela peut présenter.
Très vite, mon père me faisait gouter mon premier verre de vin et je crois bien que j’ai
toujours apprécié ce nectar. En grandissant je n’ai pas perdu cet ADN et c’est tout
naturellement que je me suis tournée vers le milieu du vin au cours de mes études en
communication. Aujourd’hui attachée de presse juniore dans les bureaux lyonnais de
l’agence Benson Marketing Group, je travaille chaque jour en collaboration avec celles et
ceux qui ont su faire évoluer la sphère vin ; une petite sphère où les valeurs de convivialité et
d’entraide règnent encore.
Je savais que mon mémoire porterait sur le marché de cette boisson qui m’est chère
mais c’est seulement en feuilletant des articles de presse que je me suis intéressée de plus prêt
à la cible féminine. Jeune femme, amoureuse de vin, consommatrice, (très légèrement
féministe), j’ai pris plaisir à écrire à ce sujet et j’espère que mes propos susciteront votre
intérêt. »
Mathilde Chevalier .
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L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é .
Sommaire
Introduction | Les femmes et le vin, une histoire qui dure............. 5
I. Du tabou historique à la consommatrice affirmée...........................................5
II. A la rescousse du marché vinicole. ...........................................................8
Partie I : Femmes ou génération Y : quelle cible pour
l’avenir ? .........................................................................................12
I. Zoom sur le marketing féminin dans le milieu du vin................................ 12
A. Qu’est-ce que le marketing féminin ........................................................12
B. Comment le marketing féminin s’est-il illustré dans le milieu vinicole ? . 14
C. Portrait de la consommatrice contemporaine.............................................. 17
II. Hypothèse 1 | Abandonner la segmentation de genre... ............................21
A. Mettre fin aux clichés ....................................................................................... 21
a) Les écueils sur le marketing féminin......................................... 21
b) Homme/Femmes, il y a-t-il vraiment une différence................. 22
B. Des tendances de consommations qui n’ont pas de sexe. ................................ 24
a) Un lifestyle où la gastronomie est reine. .................................. 24
b) Les petits packagings entrent en scène. ................................... 25
II. Hypothèse 2 | … Au profit d’une segmentation générationnelle. ..... 27
A. Portrait d’un jeune consommateur…................................................................ 27
a) Génération Y, quésaco ? .......................................................... 27
b) La génération Y et le vin. ......................................................... 29
B. … Qui a soif d’apprendre. ............................................................................... 32
a) Une consommation qui passe par l’apprentissage. ................. 32
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L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é .
b) Une génération encline à l’usage des nouvelles technologies
d’information et de communication. ................................................... 33
Partie II – Etude de terrain et préconisations | Les
petits producteurs à l’assaut de la génération Y. ......... 35
I. Contexte et résultats de notre étude terrain. .............................................. 35
A. Brève présentation de l’étude terrain. .............................................................. 35
B. Les chiffres significatifs de l’étude. ................................................................. 36
C. Nos hypothèses confirmées .............................................................................. 37
a) Bye-bye la segmentation de genre. .......................................... 37
b) Segmentation générationnelle : ce qu’il faut en retenir. ........ 39
II. Préconisations : Domaine « familiaux » : 3 conseils pour attirer la
génération Y ...................................................................................................................... 40
A. Adoptez une réelle identité de marque. ........................................................... 40
B. Vous avez des choses à dire sur la toile. .......................................................... 43
C. Ouvrez vos portes au grand public. ................................................................. 46
Bibliographie. …...…………………………………………………………………….48
Annexes (interviews professionnels/ questionnaire étude terrain) …..……..50
Remerciements. ……………………………………………………………………….61
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Introduction | Les femmes et le vin, une histoire qui dure.
« Bonnes études, d’où je me haussai à l’usage familier et discret du vin, non point
avalé goulûment, mais mesuré dans des verres étroits, absorbé à gorgées espacées,
réfléchies… »
Prisons et Paradis, 1932 - Colette.
C’est ainsi que Sidonie-Gabrielle Colette, plus communément appelée Colette, évoque
son initiation à la dégustation, genèse de son amour inconditionnel pour le vin. Romancière
des années 1930, elle fait pleinement partie des pionniers de la littérature qui ont su parler du
vin avec finesse. Au-delà de cela, elle fût l’une des rares femmes de lettres à évoquer l’art
divin de boire du vin. Elle en a d’ailleurs fait l’un des symboles de la libération des femmes,
cause pour laquelle elle a beaucoup œuvré. Mais ne vous y méprenez pas, l’amour entre les
femmes et le vin a pris naissance bien avant les années 1930. En introduction de ce mémoire,
nous étudierons d’abord le tabou historique, tombé pour laisser place à la consommatrice
affirmée (I). Puis nous verrons comment cette consommatrice, cible des marketeurs, a été
utilisée pour redresser un marché en crise (II).
I. Du tabou historique à la consommatrice affirmée.
La civilisation du vin est née en Grèce, une société très largement dominée par les
hommes où les femmes étaient explicitement exclues de la société. En public, seuls les
hommes étaient autorisés à boire ce nectar sacré, symbole de force, supériorité et domination.
Le vin faisait pleinement partie du sexisme de cette époque. Bien sûr, ceci est la version
« officielle ». En réalité les femmes ont de tout temps bu du vin et aimé cela. Parfois même,
elles étaient d’excellentes dégustatrices.
D’un point de vue historique, à l’époque des grecs, le vin était considéré comme le
sang de la vigne. Les hommes, qui partaient du principe qu’un sang en chasse un autre,
interdisaient aux femmes ayant leurs menstruations de pénétrer les chais au risque de faire
tourner le vin élevé dans les fûts.
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Cette interdiction ne se limitait d’ailleurs pas seulement à des croyances et morales
informelles. Dans certaines cités, comme celle de Milet (aujourd’hui site archéologique situé
en Turquie), il existait des édits, véritables actes législatifs émanant d’un magistrat, qui
interdisaient aux femmes de consommer du vin. La sanction était sévère puisque les femmes
prises sur le fait pouvaient être répudiées par leurs maris ou même être condamnées à mort.
Comme l’indique Ségolène Lefèvre, historienne de l’alimentation et auteur de Les
femmes et l’amour du vin, c’est à partir du Moyen-âge que les écrivains et poètes ont
commencé à mettre en scène des femmes buvant avec des hommes. J’en veux pour exemple
les Rubaiyat d’Omar Khayyam ou les poèmes d’Abu-Nuwas. L’interdiction pour les femmes
de boire du vin est donc tombée au cours du premier et du deuxième siècle après JC.
Dans les sociétés occidentales comme la nôtre, c’est surtout l’ivresse de la femme qui
a constitué un véritable tabou jusqu’à la fin du XXème
siècle. D’après le psychanalyste Freud
le tabou est en fait la prohibition implicite d’un comportement outrepassant gravement les
règles morales qui régissent la plupart des sociétés. D’après Bernard Pivot, auteur du
Dictionnaire amoureux du vin, l’état d’ébriété était systématiquement stigmatisé dès lors qu’il
concernait les femmes mais valorisé comme signe de virilité chez les hommes. Une femme
ivre allait à l’encontre de tous les fondements moraux de notre société. La femme, l’épouse, la
mère devait avoir de la tenue et être en possession de l’ensemble de ses moyens physiques et
intellectuels. L’ébriété de la femme était un état honteux, déshonorant, voire scandaleux. Les
femmes nées dans les années 1930 comme mes grand-mères ont grandi dans l’interdit et le
tabou de l’alcool. C’est seulement dans les années 1970 que la société a daigné prendre
conscience de la particularité liée à l’alcoolisme féminin. Encore aujourd’hui le tabou ne
semble pas définitivement levé. Les femmes nées dans les années 1990, c'est-à-dire les jeunes
filles de mon âge, sont soumises à deux visions de l’ébriété féminine. Deux visions qui
s’affrontent, même en 2015 :
- la vision dite « traditionnelle » qui correspond à la mauvaise image de la fille
« bourrée » qui se rattache au modèle de la domination masculine.
- La vision égalitaire qui se retrouve majoritairement en milieu urbain et qui est
généralement associée à la séduction et à la notion de désinhibition sexuelle.
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L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é .
A un tout autre niveau, la viticulture en elle-même a été un milieu ultra masculin des
siècles durant. Les hommes arguant de la dureté physique du métier de vigneron excluaient la
femme de la culture de la vigne. A cela s’ajoute le fait que pendant longtemps les vignes
représentaient un investissement colossal que seuls les aristocrates et les monastères
pouvaient s’offrir. Les grands domaines étaient aux mains de ces classes sociales et les
femmes n’étaient bien évidement pas autorisées à y travailler.
Pour autant, la gente féminine n’a pas attendu la libération de la femme pour boire et
apprécier le vin. Ce qui est nouveau dans la société actuelle c’est le fait que la femme achète
le vin, investit les métiers du vin et produit le nectar. De 1960 à aujourd’hui, la femmes est
passée de l’ombre à la lumière et en a profité pour s’inviter dans la sphère viticole. Cette
évolution s’explique essentiellement par trois facteurs sociaux plutôt évidents :
- L’émancipation sociale des femmes dans la société française : dans les années
1960, les femmes acquièrent leur autonomie vis-à-vis des hommes. Doucement
mais sûrement, le législateur œuvre pour l’émancipation de la femme, ce qui
implique des changements notoires dans le système social tel qu’il était établi
jusqu’alors. En 1965, la loi régissant le régime légal du mariage est modifiée.
Ainsi, la femme acquiert le droit d’exercer une activité professionnelle sans le
consentement de son mari. Dans le même temps, elle obtient également le droit
d’ouvrir son propre compte bancaire. Suite à cela, en 1970, la loi relative à
l’autorité parentale est modifiée. On ne parle plus de la « puissance paternelle »
qui mettait l’homme au centre pouvoir décisionnaire familial, mais « d’autorité
parentale conjointe ». Enfin, en 1983, la loi Roudy vient instaurer l’égalité entre
homme et femme dans le travail.
- La transmission familiale des domaines viticoles à des femmes : à partir des
années 1960, le nombre de femmes vigneronnes a considérablement augmenté
pour la simple et bonne raison qu’elles ont été amenées à gérer des domaines. De
façon délibérée lorsque la génération précédente léguait le domaine par héritage
(de son vivant ou non) ou de façon non préméditée lorsqu’un triste évènement
venait troubler la vie du domaine. A noter ici qu’il semblerait que la relève par des
femmes serait plus facilement acceptée en France que dans d’autres pays à
tradition viticole tels que l’Italie.
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Aujourd’hui les femmes exercent tous les métiers de la filière vin ; œnologues,
sommelières, cavistes, commerciales, marketteuses, communicantes,
vigneronnes… elles sont partout.
- L’évolution de la consommation de vin chez les femmes : l’émancipation sociale
des femmes a eu comme corolaire l’évolution de leur consommation de vin. La
femme est devenue un consommateur de vin à part entière, c’est indéniable.
Aujourd’hui 51% des consommateurs de vin (effervescents ou non) sont des
femmes. C’est de ce constat que découlera l’ensemble de mon propos.
En parallèle, d’autres raisons viennent expliquer l’engouement des femmes pour le
vin ; les tendances culinaires et les questions liées à l’équilibre alimentaire y sont pour
beaucoup. La femme préférera boire un verre de vin, alcool jugé moins nocif que la bière où
les alcools forts. En quelques mots, la femme a aujourd’hui sa place dans le monde du vin et
nous verrons à travers notre développement que le marketteur lui a conféré une place toute
particulière, notamment pour faire face à une crise du marché.
II. A la rescousse du marché vinicole.
La dimension culturelle et affective accordée au vin en a fait un produit
agroalimentaire totalement à part. Le marché du vin est caractérisé par une extrême
complexité qui lui est propre. La France, qui fait partie des pays les plus grands producteurs
au monde, n’a évidemment pas échappé à cette complexité.
Nous ne nous attarderons pas réellement sur les chiffres puisque là n’est pas le sujet
mais la consommation de vin en France a atteint son record dans les années 1950, époque à
laquelle le vin était considéré comme une boisson de table quotidienne. C’est à partir des
années 1985 que les consommateurs ont commencé à bouder le vin français, la demande
mondiale ayant chuté de 20% entre 1985 et 1995. Victime d’une baisse de la consommation
domestique et menacé par les vins du nouveau monde, le vin français se porte mal et l’on peut
parler d’une véritable crise. De 1985 à 2005, on peut considérer que le marché vinicole
français était malade ; retard face à la mondialisation du marché, inadaptation de l’offre au
regard de la demande, concurrence des vins du nouveaux Monde ainsi que des vins de pays
voisins tels que la Grèce, l’Espagne ou l’Italie… D’autre part, les acteurs vinicoles ont
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largement subi le contrepoids de campagnes massives menées contre l’alcoolisme et l’alcool
au volant. La loi française ne va pas dans le sens de ce marché pourtant de taille pour
l’économie du pays. Bref, rien ne va plus dans le paysage français et les producteurs restent
hermétiques au marketing.
En effet, le milieu vinicole français se caractérise par son retard en termes de
marketing et communication. Les protagonistes du vin, très attachés à l’aspect traditionnel de
cette boisson ont longtemps rechigné à faire appel aux communiquants et marketeurs. En
2000 les marques de boisson ont commencé à s’engouffrer dans le marketing sexué. Bien sûr,
le secteur du vin a encore fait la sourde oreille quelque temps avant de finalement ouvrir les
yeux et constater que les consommateurs avaient évolué. Tout d’un coup, le milieu du vin
français a pris conscience de l’intérêt que lui portaient les femmes, tant sur le marché français
qu’à l’échelle mondiale. Les femmes anglaises avaient fait entrer le vin dans la consommation
quotidienne en le consommant au pub, les coréennes et les japonaises buvaient du vin rouge,
les françaises aimaient accorder vin et met. Les femmes avaient joué un rôle moteur dans le
développement du vin et le marché français été passé à côté de tout ça ! En fait les acteurs du
marché ont pris conscience de cette réalité :
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Nul besoin de commenter cette pyramide, il est évident que les prérogatives
généralement attribuées aux femmes au sein des ménages sont celles qui font écho à l’achat
de vin. En réalité, pour 75% des foyers français le vin est acheté par les femmes.
Après cette prise de conscience, la sphère vin a dû intégrer ce bouleversement dans sa
stratégie de communication. Ainsi, en 2003 on a vu apparaître le premier corner de vin dédié
aux femmes dans un supermarché E. Leclerc à Cannes. Créé par Isabelle Forêt, journaliste et
auteur de Fémivin, ce corner est l’une des premières initiatives notables en termes de
marketing féminin sur le marché français. Notons qu’une fois de plus nous étions en retard sur
nos concurrents américains comme nous le fait remarqué Jeremy Benson, président de
l’agence Benson Marketing Group, que nous avons interviewé dans le cadre de ce mémoire.
Effectivement, le gender marketing a vu le jour avant les années 2000 dans le paysage
vinicole étasunien ; le milieu s’est féminisé en même temps que les autres produits de
consommation, les américains étant les number one du marketing sexué.
Quoi qu’il en soit, le marketing sexué (et plus précisément le marketing féminin), a
fait son entrée dans le paysage français au début des années 2000 et s’est très vite généralisé.
Le marketing féminin a largement contribué à la guérison du marché vinicole français
puisqu’il a contribué à relancer la consommation déclinante du secteur. Aujourd’hui la
consommation continue à croître, notamment portée par la demande russe et chinoise. Entre
2007 et 2013, la consommation de vin rouge en Chine a progressé de 175%. L’étude Vinexpo
2015 prévoit une croissance de 9% sur l’ensemble des Amériques et 14% pour les US d’ici
2017. En bref, les chiffres symbolisant la bonne santé économique du marché global ne
manquent pas.
Toutefois, vous n’êtes pas sans savoir que le marketing est cyclique et qu’une
tendance est, par définition, amenée à évoluer, voire disparaître. « Ni masculin, ni féminin,
juste humains ! », c’est ce qu’affirme Faith Popcorn, consultante spécialiste des nouvelles
tendances. A ses yeux l’heure est à la synthèse entre les valeurs masculines et féminines, que
ce soit pour le produit en lui-même ou pour le marketing. Elle en veut pour preuve la prise de
parole des consommateurs sur les réseaux sociaux. Ces derniers ont effectivement tendance à
exprimer leur mécontentement lorsqu’une marque abuse de stéréotypes. En parallèle, Thomas
Clément, digital strategist et fondateur de l’agence No Site, explique que le gender marketing
ne présente pas vraiment de risque lorsqu’il s’applique à un produit qui relève entièrement de
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la sphère intime comme par exemple du gel douche. Mais quand le produit est d’avantage
mixte, cela devient beaucoup plus délicat et le marketing sexué peut beaucoup plus vite
s’essouffler.
Ainsi, nous pouvons nous interroger sur la véracité de ces théories lorsqu’elles sont
appliquées au milieu du vin. Et si le marketing féminin n'était plus en phase avec la réalité
du marché vinicole ? Est-il désuet ? En d’autres termes, le marketing féminin n’a-t-il pas déjà
atteint ses limites ? Le marketeur ne doit-il pas s’adresser à une autre cible devenue
aujourd’hui plus pertinente ?
Nous essayerons d’apporter une réponse la plus nette possible à cette problématique et pour se
faire nous commencerons par poser deux hypothèses allant dans le sens de l’abandon du
gender marketing (Partie I). Puis, nous apporterons nos recommandations en s’appuyant sur
l’analyse d’une étude terrain menée dans le cadre de ce mémoire (Partie II).
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Partie 1ère
: Femmes ou génération Y : quelle cible pour
l’avenir ?
Afin de replacer notre étude dans son contexte il a fallu tout d’abord contextualiser notre
sujet et ainsi replacer le marketing féminin dans le milieu du vin (I). Notre propos portera
majoritairement sur la situation française, bien qu’il nous arrivera d’élargir notre vision,
surtout en direction du marché américain, un marché très prometteur qui nous a été présenté
par Jeremy Benson et Adrienne Stillman, tous deux américains. Après avoir posé les
fondations de notre réflexion, nous serons amenés à détailler deux hypothèses qui induiront
des réponses à notre problématique. Nous nous demanderons d’abord si le marketing féminin
comporte des limites (II) puis nous serons amenés à nous demander s’il ne serait pas plus
judicieux d’adopter un marketing mixte qui ciblerait la génération Y (III).
I. Zoom sur le marketing féminin dans le milieu du vin.
Notre propos débutera par la définition générale du marketing féminin (A), puis nous
étudierons la manière dont ce dernier s’est illustré dans le milieu vinicole jusqu’à présent (B).
Enfin, nous dresserons un portrait détaillé de la consommatrice de vin contemporaine (C).
A. Qu’est-ce que le marketing féminin ?
Nul besoin de vous expliquer qu’en marketing il existe une règle d’or : la
segmentation. Or, le genre est une segmentation toute trouvée dont les marketeurs se sont bien
évidemment emparés. En outre, ce type de segmentation présente un avantage non
négligeable : il entraîne d’avantage d’achats.
Le marketing féminisé est l’une des deux options découlant du marketing sexué aussi
appelé « gender markerting » ; une pratique qui nous vient des Etats-Unis et qui consiste à
adapter la politique marketing en fonction du sexe de la cible. Pour faire simple, le marketing
féminisé c’est l’art de s’adresser aux femmes, s’adapter à ses goûts et ses aspirations. Cette
segmentation repose sur la répartition des rôles entre hommes et femmes et leurs différences
en termes de comportement d’achat. Une femme n’a pas la même sensibilité, la même
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perception qu’un homme. Les marketeurs et scientifiques estiment qu’elle n’analyse pas
l’information de la même façon.
Cette segmentation reste constante chez les marques et s’applique à pratiquement tous
les secteurs, excepté celui du travail. La question de l’égalité entre les hommes et les femmes
au travail étant une question encore beaucoup trop sensible, les marques qui touchent de près
ou de loin l’univers du travail préfèrent généralement adopter des codes esthétiques neutres.
Cela évite d’avoir à faire à des bad buzz comme cela a été le cas pour la marque de fluo
Stabilo en mars 2014 avec le lancement du Stabilo « Néon », spécialement conçu pour les
femmes. L’objet a généré la colère des féministes et la marque s’est trouvée bien
embarrassée : Communication de crise et excuses sur les réseaux sociaux ont donc été de
rigueur.
Le marketing sexué est en perpétuelle évolution puisque les différences sociales et
culturelles entre hommes et femmes le sont elles aussi. A notre époque, il ne s’agit pas de se
contenter de mesures simplites comme créer un packaging rose ou bleu. Le marketing féminin
ou « marketing to woman » se doit d’être subtil comme le rappellent Lisa Jonhson et Andrea
Learned dans leur ouvrage Don’t think pink qui résume les aspirations de consommation des
femmes.
En France, le marketing féminin, ou plus généralement le marketing sexué, est en
retard (bien que ce retard semble se combler). Notre douce France, patrie de l’égalité, s’est
longtemps refusé de différencier les consommateurs selon leur genre. Le marketing sexué est
resté très timide jusqu’à la fin des années 1990. C’est seulement en 2005 qu’est paru le
premier recueil d’études portant sur les différences hommes/femmes dans leurs modes de vie
et leurs valeurs, le Marketing Book de TNS. Depuis ce type de marketing semble pleinement
assumé par les marques. Pourtant d’après le magazine spécialisé Stratégies, les professionnels
avaient émis l’hypothèse de l’essoufflement de ce modèle suite aux violents débats autour du
mariage pour tous. Le marketing sexué aurait pu tomber en désuétude mais il n’en est rien
puisque le marketing gender est toujours aussi prisé. Effectivement, dans le secteur du vin, le
marketing féminin est encore très présent.
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B. Comment le marketing féminin s’est-il illustré dans le milieu vinicole ?
Au vu de l’historique que nous avons développé en introduction de propos, il est
inutile de préciser qu’en termes de marketing de genre, c’est le marketing féminin qui s’est
naturellement appliqué au milieu hyper masculin du vin. Les marketeurs n’ont pas eu besoin
d’avoir recours au marketing masculin.
Comme l’explique Sandra Painbéni, professeur de Marketing du secteur vinicole, on
peut considérer que le marketing féminin dans le secteur du vin s’est illustré par deux canaux
principaux :
- L’adaptation des propriétés organoleptiques des vins (marketing implicite) :
les marketeurs ont travaillé avec les producteurs pour élaborer des vins qui
correspondent aux goûts des femmes (qu’ils estimaient différents de ceux des
hommes). Le plus souvent les vins marketés sont des vins blancs, rosés ou des vins
effervescents. Il arrive que des vins rouges soient marketés mais c’est beaucoup
plus rare. Au niveau du nez, les producteurs tentent de faire des vins aux arômes
fruités d’une intensité légère à moyenne. En bouche, les vins doivent avoir des
tannins faibles ou moyens, un corps léger à moyen et une saveur fruitée.
Le fruit est un élément très important dans le marketing féminin. D’ailleurs
le rosé-pamplemousse a connu un succès commercial inégalé puisqu’en 2013, 35
millions de cols avaient été vendus. Les études avaient montré que les femmes en
été friandes. Pour autant, l’été 2015 a prouvé que le phénomène commençait à
s’essouffler.
Nous verrons que les marketeurs qui s’appuient encore sur la théorie selon
laquelle les femmes aiment les vins légers et fruités vivent dans le passé en
s’appuyant sur des comportements de consommation qui étaient ceux des années
1970-1980.
- Le travail des packagings (marketing explicite) : Généralement l’étiquette est
beaucoup plus épurée et simplifiée. Le nombre d’informations sur l’étiquette est
limité, la police de caractère stylisée, et les couleurs choisies avec précautions pour
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s’adapter à la finesse de la femme. En outre, plus récemment, les marques de vins
(effervescents ou non) ont adopté des codes ludiques et girly.
Bien sûr le secteur du vin n’as pas échappé au cliché « les filles aiment le rose ». Les
étiquettes roses ont fleuri dans les rayons et certaines marques ont surfé sur la vague rose,
c’est d’ailleurs le cas de la Maison Louise Mousset avec la cuvée « R Osé », issue d’une
stratégie marketing expérientielle qui réunissait bien des clichés.
Les marketeurs n’ont heureusement pas cantonné les goûts de la femme à la couleur
rose puisqu’ils ont aussi beaucoup emprunté les codes de la mode, du luxe et la haute couture.
En outre, la communication qui accompagne la féminisation de l’univers du vin s’approche de
la ligne éditoriale de la presse féminine délivrant des « modes d’emploi » et des didactiques
de consommation. Cela s’est notamment traduit par le design de bouteilles dont la forme
ressemblait à celui d’une bouteille de parfum, par des Bag in Box en forme de sac à main ou
encore par la création de séries limitées en collaboration avec de grands couturiers
(notamment pour les grandes marques de Champagnes).
Cette étiquette de Lulu B., vin de pays AOC illustre
l’utilisation des codes girly. D’ailleurs c’est plutôt explicite ;
robe rouge, chaussures à talons aiguilles, sac. La totale ! En
outre, la marque qui a commercialisé cette cuvée au Canada et
aux Etats-Unis a aussi appliqué ces codes à sa communication
via son site Internet et ses réseaux sociaux.
Pour le Festival de Cannes 2011, Piper-
Heidsieck a sorti ce Champagne black Cancan dont
le packaging a été designé par Jean-Paul Gaultier.
Inspirations : univers du cabaret, univers du
sexy et du glamour, matière latex, bas résille.
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En définitive, le marketeur a proposé à la cible femme, en quête d’expérience, un
instant basé sur ses propres codes, son propre univers qui est propice au storytelling. En
alliant les codes du vin et celui d’univers étrangers tels que la bijouterie, le parfum ou encore
la haute couture, le marketing a répondu aux attentes des femmes qui étaient en quête de
nouvelles expériences, de moments à partager. Mais est-ce une caractéristique propre aux
femmes ou cela s’applique-il aussi aux jeunes ? Nous le verrons plus tard… En attendant, il
est opportun de dresser un portrait précis de la consommatrice de vin.
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C. Portrait de la consommatrice contemporaine.
Andrew Jefford, journaliste pour de revues anglaises telles que Decanter, estime
qu’établir un portrait-robot synthétique des consommateurs de vin ne peut être une fin en soi
puisqu’il est impossible de parler d’un consommateur unique. Nous rejoignons son propos
mais il nous a semblé essentiel d’essayer de définir les contours de la consommatrice actuelle
afin de mieux comprendre les enjeux du marketing féminin. Ainsi, il est important de préciser
que le portrait de la consommatrice décomplexée que nous allons dresser est largement inspiré
de l’étude Vinexpo « Les femmes et le vins » parue en 2011. Pour rappel Vinexpo est le plus
grand salon professionnel au monde pour les opérateurs du secteur des vins et spiritueux.
L’enquête a été réalisée auprès de 10 492 femmes majeures issues de 5 Etats ; l’Allemagne,
les Etats-Unis, la Chine, le Royaume-Uni et la France. Nous dresserons un portrait
synthétique composé de 5 points.
 En termes de goûts, quelles sont les préférences des femmes ?
Une étude a été menée par l’entreprise Vitibox en 2011 sur 250 hommes et 250
femmes. La société souhaitait lancer une box spécialement conçue pour les femmes, ainsi, elle
a voulu en savoir plus sur les goûts des femmes. Le résultat a été plutôt étonnant. En effet les
goûts des femmes sont vraiment proches de ceux des hommes et nous reviendrons dessus
dans une prochaine partie.
Tout d’abord, le vin préféré des femmes est le vin rouge, contrairement aux idées
reçues. 51% des femmes préfèrent le rouge, 26,4% le blanc et 15,7% le rosé. Notons toutefois
que les femmes sont quand même considérées comme un moteur de la consommation de rosé
au niveau mondial. En 2009 seulement 6% estimaient préférer le vin rosé ; une augmentation
de 160% en 2 ans qui s’explique par l’engouement des 18-30 ans pour cette boisson. La
préférence pour vin rouge atteint des chiffres record aux Etats-Unis où 78,6% des femmes
craquent pour ce nectar
 A quel moment et à quelle fréquence la femme consomme-t- elle du vin ?
45% des françaises avouent consommer du vin au moins une fois par semaine
mais ce qui est important de retenir c’est qu’elles privilégient la convivialité puisque 68,9%
des femmes pensent que la meilleure occasion pour boire du vin est la soirée entre amis. Ce
chiffre en perpétuelle augmentation montre que la femme est véritablement une
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consommatrice occasionnelle. Petite particularité française notable : 17,9% des femmes
consomment du vin à l’apéritif, un point commun avec les jeunes qui privilégient de plus en
plus ce moment.
 Comment choisit-elle son vin au moment de l’achat ?
En France, 70% des femmes estiment que c’est l’origine du vin qui constitue le
critère de choix premier alors qu’aux USA c’est le cépage qui détermine le choix de
Mesdames. Le prix n’arrive qu’en troisième position alors qu’il y a seulement 6 ans, en 2009,
c’était le premier critère de choix. Notons tout de même que les jeunes filles de 18-30 ans
restent très attachées au prix. Une différence générationnelle que l’on retrouve aussi à propos
de la sensibilité au packaging. Les 18-30 ans y sont largement plus sensibles que les autres
tranches d’âge.
La femme achète plus facilement chez un caviste ou en grande surface que sur le
Net. Dans tous les cas de figures la consommatrice apprécie un conseil personnalisé. En
France seulement un tiers des acheteuses déclarent ne pas avoir besoin de conseil pour choisir
leur vin. Selon une étude menée en 2013 pour Les Sommelières (site de vente de vin en ligne
dédié aux femmes), ces dernières aiment les conseils simples, qui prennent en compte leurs
goûts en matière culinaire. L’élitisme les fait fuir ; elles souhaitent des conseils avec des mots
simples et bannissent le jargon trop complexe. Notons aussi que 60% des françaises
aimeraient d’avantage d’informations vin dans la presse féminine. Enfin, les femmes préfèrent
les recommandations de personnes de confiance aux notes accordées à un vin par les
journalistes et professionnels.
 Comment peut-on caractériser la consommatrice de vin contemporaine ?
Bien que 70% des femmes s’avouent néophytes, elles ne se considèrent
absolument pas inférieures aux hommes en ce qui concerne le vin. En France, 58% des
femmes estiment connaître le vin aussi bien que les hommes. Un chiffre déjà élevé mais qui
reste faible par rapport à celui de nos amies américaines qui sont 67% à affirmer connaître le
vin aussi bien que leurs compagnons. En outre, petit message implicite passé à tous les
hommes en quête de l’amour : 2/3 des femmes dans le monde considèrent le vin comme un
élément essentiel lors d’un rendez-vous amoureux.
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D’autre part, 80% des femmes consomment du vin parce qu’elles aiment son goût
et seulement 3,6% des consommatrices estiment que c’est une boisson masculine.
Nous pouvons alors considérer que la femme contemporaine est une consommatrice
de vin totalement décomplexée, moderne et libérée des tabous historiques. Pour autant, il y a
une petite faille dans cette confiance en soi ; Vitibox, avant le lancement de « My vitibox,
mariage du palais », avait constaté que moins d’un tiers des consommatrices savaient associer
leurs mets et leurs vins mais que 80% d’entre elles aimeraient apprendre à le faire.
 Comment faut-il s’adresser à cette consommatrice assumée ?
Il est difficile de répondre à cette question puisqu’il n’y a pas de science exacte en
la matière. Les études ont d’ailleurs montré que les femmes ne souhaitent pas être traitées
différemment et qu’elles adhèrent largement aux codes masculins. En outre, Adrienne
Stillman, de l’agence Benson Marketing Group, nous a précisé que sur Internet et les réseaux
sociaux, la stratégie pour entrer en interaction avec le consommateur était la même, que la
cible soit un homme ou une femme. C’est le message qui va différer. Pour autant certaines
spécificités de la cible féminine méritent d’être mises en exergue.
La femme a besoin d’être rassurée, notamment à travers les mentions de
l’étiquette auxquelles elle porte beaucoup d’attention. Les femmes, qui sont à la recherche
d’authenticité, vont être facilement rassurées par un nom de château, de propriétaire ou par
une idée d’association avec un plat. Il faut savoir qu’une femme achète toujours une bouteille
avec l’idée d’accompagner une collation. Attention tout de même, comme nous l’a indiqué
Jeremy Benson, les femmes veulent se sentir informées sans condescendance ! Galatée
Faivre, fondatrice de l’agence I.d Vin, s’appuie sur trois principes clés pour construire les
campagnes de ses clients qui souhaitent s’adresser aux femmes :
- La globalité : la femme est un ensemble de différentes vies (la mère, l’épouse, la
femme active, la sportive, la fashionista, etc.). Pour s’adresser aux femmes, il faut
prendre en compte cette réalité et cibler une de ces « vies », un de ces aspects.
- La perfection : la cible féminine est plus exigeante que la cible masculine. Pour
elle chaque détail à son importance. L’esthétique du produit occupe une place
importante mais l’origine et le respect de l’environnement sont des critères qui
compte aussi aux yeux des femmes.
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- Le transgénérationel : les femmes présentent la caractéristique de beaucoup
communiquer transversalement, de génération en génération. Ainsi s’adresser à
une mère c’est aussi s’adresser à sa fille. En outre, la femme occupe le rôle de
relais entre deux générations ; très souvent c’est la femme qui éduque les enfants à
l’art de recevoir, donc implicitement à la culture du vin.
Enfin, Une étude Kantar Media « Portraits de femmes » réalisées en juillet 2013 a
montré que les femmes ont su s’adapter à la révolution 2.0 ; elles ont assimilé les réseaux
sociaux et elles se sont saisies de la tendance. D’après Adrienne Stillman, spécialiste des
réseaux sociaux, les femmes sont actives sur toutes les plateformes et prennent possession de
certains réseaux sociaux, Pinterest en est l’exemple parfait. Aujourd’hui, les femmes attendent
d’une marque qu’elle communique directement avec elles. La clé du succès pour les
touchers ? Raconter l’histoire du vignoble ou de la marque en investissant les réseaux sociaux
pour rentrer en conversation avec ces consommatrices à la recherche d’une relations
privilégiée et directe.
En faisant ce tour d’horizon du marketing féminin dans le milieu vinicole on peut
avoir peur que ce ne soit qu’une tendance mise en place par les marketeurs qui va finir par
s’épuiser petit à petit. En outre, en observant les caractéristiques de la consommatrice, on
pourrait trouver des points communs avec d’autres cibles telles que les jeunes. Ce qui nous
amène à nous demander si ce n’est pas le moment d’abandonner ce marketing féminin au
profit d’un autre type de marketing et une autre cible. Et si le marketing féminin n'était plus
en phase avec la réalité du marché vinicole ? Limites et pertinence de cette cible dans la
société actuelle, voilà le contenu de la suite de notre développement.
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I. Hypothèse 1 | Abandonner la segmentation de genre…
Après avoir interviewé Jeremy Benson, PDG de l’agence de communication et
marketing spécialisée vins et spiritueux Benson Marketing Group, ainsi qu’Adrienne
Stillman, employée de cette même agence et spécialisée en stratégie des marques et
community management, nous avons pu déterminer deux limites principales à la cible
féminine telle qu’elle est aujourd’hui exploitée par les marketeurs. Tout d’abord, il est temps
de mettre fin aux clichés qui collent à la peau de ces consommatrices (A). Puis, nous avons
constaté que les nouvelles tendances sur le marché du vin sont des tendances mixtes (B).
A. Mettre fin aux clichés.
Nous montrerons en exergue les écueils que comporte le marketing féminin (a),
autrement les dangers liés à l’utilisation de ce type de marketing. Puis nous démontrerons que
la segmentation entre homme et femme n’est pas des plus pertinentes (b), au moins dans le
secteur vinicole.
a) Les écueils du marketing féminin.
Comme le soulève Jeremy Benson, le principal danger avec le marketing féminin c’est
de tomber dans des clichés sociétaux idiots et de s’attirer les foudres de consommatrices et/ou
féministes vexés. C’est le danger majeur du « marketing to women », que ce soit dans le
secteur du vin ou dans n’importe quel autre domaine d’ailleurs.
A titre d’exemple, le célèbre distributeur de vin Nicolas avait, en 2006 fait un flop en
publiant un magazine nommé « Pour Elles » qui était censé refléter la perception des femmes.
Le magazine rassemblait tous les clichés possibles et imaginables ; couverture rose fuchsia
avec une photo d’une chaussure dont le talon est un pied en verre à vin, titres racoleurs et
psycho-test « Pour quel vin êtes-vous faites ? ». Autant dire que le distributeur n’a pas
rencontré un franc succès avec ce magazine.
En fait, le problème majeur réside dans le fait que la cible féminine est perçue comme
un groupe homogène dont les membres ont toutes les mêmes goûts. Les femmes sont girly
et/ou fashionistas et recherchent des vins au goût accessible. Alors qu’en matière de vin, les
préférences se fondent majoritairement sur la subjectivité de chaque dégustatrice. Chaque
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individu apprécie (ou pas) un vin en fonction de sa propre sensibilité et de son expérience
antérieure. Chaque vin est unique, chaque individu est unique. Le vin n’est pas masculin, ni
féminin, il est humain. Sandra Painbéni est d’accord pour affirmer « qu’il n’y a pas lieu
d’opérer une distinction, par une stratégie de segmentation et ciblage par le sexe ».
Ainsi, le risque évoqué par l’enseignante en marketing réside dans le fait que le marketing
vienne à déformer l’essence même du vin français et que l’on se retrouve avec des vins Hello
Kitty (comme cela a été le cas sur le marché asiatique en 2013) dans nos étals.
D’autre part, on commence à constater une certaine récurrence des codes utilisés pour les
offres lancées sur le marché français, et cela tant au niveau des particularités organoleptiques
qu’au niveau des packagings. Si l’on voulait faire un peu de sarcasme on pourrait dire que la
cible féminine semble lassée de voir du rose et de boire du rosé au goût fruité. Il est temps de
se renouveler et peut être même d’arrêter de faire une distinction entre hommes et femmes !
b) Hommes/femmes : il y a-t-il vraiment une différence ?
Bien évidement il y existe une différence biologique incontestable entre femmes et
hommes ; pour la même consommation d’alcool, une femme aura généralement un pic
d’alcoolémie plus élevé et mettra plus longtemps à l’éliminer qu’un homme. Mais malgré ces
différences entre chromosomes X et Y, il semblerait que des études ait démontré qu’il n’y
avait nul besoin de créer des produits à destination unique des femmes.
Il s’avère que la proportion de consommateurs réguliers est beaucoup plus importante
chez les hommes que chez les femmes ; effectivement les femmes ont d’avantage tendance à
privilégier l’aspect convivial du vin et elles apparaissent comme plus sensibles aux risques
liés à l’alcool. Pour autant, force est de constater que les habitudes des consommations des
genres se sont rapprochées. Sous l’influence du nouveau monde, il y a eu une véritable
mutation du mode de consommation du vin et aujourd’hui il n’y a plus vraiment de modèle
féminin ou masculin. Avant les hommes avaient une consommation dite « automatique »,
naturelle, quotidienne dans le registre du besoin et non pas du plaisir. Alors que de nos jours
femmes et hommes boivent le vin pour (presque toutes) les mêmes occasions. Boire du vin
fait désormais écho à la notion de loisir ; c’est une consommation occasionnelle, consciente,
écologique et hédoniste qui s’applique à tout le monde, homme comme femme.
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Revenons sur l’étude menée par Vitibox en 2011 ; elle avait montré qu’en termes de goût
les hommes et les femmes sont égaux. Les femmes préfèrent le vin rouge, tout comme les
hommes, et elles sont 68% à préférer les vins aux tanins souples, comme une grosse majorité
des consommateurs hommes. Ainsi il semblerait que la distinction hommes/femmes n’est pas
si pertinente. Les nouvelles tendances vinicoles vont-elles dans le sens de cette dernière
hypothèse ?
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B. Des tendances de consommations qui n’ont pas de sexe.
A travers l’étude des nouvelles tendances qui impactent le marché du vin, nous
déterminerons un lifestyle contemporain où la gastronomie est prépondérante (a), puis nous
ferons un rapide zoom sur l’apparition de nouveaux types de packagings (b).
a) Un lifestyle où la gastronomie est reine.
Depuis le début des années 2000 le model sociétal a évolué, la crise économique a eu
des conséquences sur nos modes de vie et les attentes du consommateur s’en sont retrouvées
modifiées. Le vin n’a pas échappé à la règle puisque les buveurs ont de nouvelles aspirations.
Dans les marchés mûrs, comme celui de la France, la consommation de vin par tête est en
baisse mais cela ne signifie pas que le consommateur se désintéresse du vin, loin de là. Au
contraire. On veut consommer moins mais mieux. Une grande majorité des français veulent
des produits meilleurs pour la santé, fabriqués localement dans le respect de l’environnement.
La consommation citoyenne et responsable est de rigueur, et cela s’applique de manière
générale mais aussi à la consommation du vin. Ce nouveau mode de vie, ou lifestyle, sous-
entend que la qualité est privilégiée à la quantité. Le consommateur français est même prêt à
acheter des vins plus chers ; entre 2008 et 2014 son budget d’achat a augmenté de 25,9 euros.
Notons que cette tendance s’applique à l’ensemble de la population ; elle ne se limite pas aux
femmes, les hommes aussi font de plus en plus attention à ce qu’ils consomment.
En outre, l’alimentation est l’un des postes les plus importants dans ce nouveau
mode de vie. L’alimentation est avant tout culturelle, notamment en France où le moment du
repas est sacré. Le fooding, un mouvement dont le nom a été inventé en 1999, a apporté une
vision différente de la cuisine en s’affranchissant des traditions. En 15 ans la gastronomie
s’est démocratisée et c’est aujourd’hui le sujet de conversation préféré des français. Cette
révolution n’a pas touché que la France puisque la tendance s’est développée à l’échelle
mondiale. Comme nous le suggère Adrienne Stillman, il n’y a qu’à jeter un coup d’œil sur le
fameux réseau social de photos Instagram pour se rendre compte de l’ampleur qu’a pris la
gastronomie dans nos vies. 1 300 000 résultats pour le #PornFood !
Mais dans quelles mesures cette tendance a-t-elle eu un impact sur le marché du vin ?
La démocratisation de la gastronomie a eu comme corolaire l’engouement pour les accords
met/vin. Aujourd’hui gastronomie et vin sont indissociables. J’en veux pour preuve le nombre
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de blogs, de magazines, d’évènements professionnels ou grand public qui lient gastronomie et
vin. Les cours d’œnologie procurent des conseils pour choisir son vin en fonction de ce qu’il
y a dans son assiette, les offres œnotouristiques autour de la gastronomie se multiplient, les
conseils de consommation d’un vin donnent la plupart du temps des idées de recettes…, bref
la gastronomie est une tendance très impactante sur le marché du vin ce qui fait
qu’aujourd’hui 64% des consommateurs déclarent choisir leur vin en fonction de ce qu’ils
vont manger. Une tendance de l’accord met/vin qui concerne autant les hommes que les
femmes et qui nous éloigne une fois de plus de la tendance du marketing féminin.
b) Les petits packagings entrent en scène.
Une nouvelle tendance risque de conquérir le cœur des français dans les années, voire les
mois à venir ; une tendance qui a déjà conquis les consommateurs américains, femmes et
hommes. Nous parlons ici du verre de vin prêt-à-boire. En d’autres termes, nous faisons
référence à du vin conditionné dans des verres en plastique scellé de 18,7 centilitres.
En France quelques châteaux de côte de Provence et de Bordeaux se sont lancés en 2010
sans grand succès mais nous pourrions imaginer que le marché va se développé à l’avenir au
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vu du succès remporté par ce verre Outre-Atlantique. D’après le Figaro, aux Etats-Unis le
marché de ce petit packaging se développe plus vite que celui de la bouteille de 75cl. C’est
une nouvelle façon de boire son vin ; à la pause de midi au bureau. En outre, ce verre est
mieux perçu que la cannette qui a une image plutôt cheap. En mars 2015 le verre était déjà
distribué dans 1200 points de vente aux Etats-Unis et le marché pesait 253,6 millions de
dollars aux Etats-Unis. L’article du Figaro sur lequel nous nous sommes appuyés précise
même que ce type de conditionnement commence à envahir le marché anglais alors nous
aurions de bonne raison de penser que les français ne font pas tarder à se laisser séduire. Nous
tenterons de le vérifier à travers notre étude terrain dans la seconde partie de notre réflexion.
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II. Hypothèse 2 | …Au profit d’une segmentation générationnelle.
Comme nous venons de le démontrer, il semblerait que la cible femme ait perdu de sa
pertinence et que le moment est venu de s’adresser à une autre cible. Ainsi, en s’appuyant sur
un corpus documentaire étoffé ainsi que sur les réponses apportées par Jeremy Benson et
Adrienne Stillman, nous supposerons qu’il est aujourd’hui plus pertinent d’adopter un
marketing mixte qui répondra aux attentes des jeunes consommateurs qui constituent la
génération Y. Nous dresserons le portrait type de ce consommateur (A) qui se caractérise par
sa soif d’apprendre (B).
A. Portrait d’un jeune consommateur…
Il nous faudra d’abord définir la notion de génération Y (a) pour ensuite étudier les
comportements de consommation des membres de cette génération face au vin (b).
a) Génération Y, quésaco ?
Un nombre incalculable d’études et de théories relatives à la génération Y ont été
publiées. Il a alors été difficile de définir brièvement la génération Y et ses spécificités. Voici
ce que nous devons en retenir pour notre étude.
Les sociologues désignent par « Génération Y » l’ensemble des individus nés entre
1980 et le milieu des années 1990. Ils parlent d’une génération ultra-connectée à laquelle ils
attribuent de multiples dénominations ; Yers, GenY, Millenials, Digital Natives ou encore Net
Generation. Les sociologues mettent l’accent sur le fait que les membres de la génération Y,
dont je fais partie intégrante, ont grandi à l’ère où l’ordinateur personnel s’est développé ainsi
que le jeu vidéo et l’Internet tel qu’on les connaît et utilise aujourd’hui.
D’un point de vue purement sociologique, la génération Y peut être considérée comme
une génération en pleine construction identitaire. Les jeunes de cette génération tendent à
détruire les modèles et codes établis par les générations précédentes via des méthodes dites
« disruptives ». De ce point de vue, les sociologues sont parfois amenés à comparer
génération Y et génération mai 68 puisqu’elles présentent toutes deux la caractéristique
d’avoir une volonté de changer et d’envisager de nouvelles perspectives, notamment sociales.
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Le jeune de la génération Y préférera réfléchir à de nouvelles alternatives plutôt que de suivre
« bêtement » les codes et règles préétablis.
Cette tendance à tout remettre en cause se traduit dans la manière de consommer de
cette génération ainsi que dans sa sensibilité au marketing. Les consommateurs de la
génération Y sont très attachés à la notion de transparence ; les marques doivent montrer patte
blanche pour gagner la confiance des Yers. Les publicitaires, forcés de gagner la confiance de
ces consommateurs, ont dû repenser leurs méthodes de communication puisque les valeurs de
la génération Y ne sont absolument plus en phase avec les méthodes publicitaires dites
classiques. Les millénials ont largement conscience du pouvoir qu’ils ont face aux marques et
rejettent le marketing dit « de masse ». Indirectement c’est cette nouvelle génération qui
façonne les marques contemporaines.
Logiquement de nouvelles formes de marketing ont vu le jour, on parle notamment de
« l’opt’in », théorisé par Seth Godin, ce type de marketing repose sur le fait qu’il faille
demander l’autorisation au consommateur avant de s’adresser à lui. Les jeunes refusent toutes
sortes de marketing intrusif, ainsi le « permission marketing » a pour objectif premier de
créer une relation d’échange et d’interactivité entre la marque et le consommateur, le plus
souvent à travers Internet et les réseaux sociaux.
Ce qui nous amène à préciser que les médias traditionnels sont en perte de vitesse en
raison de leur non-pertinence aux yeux des Millénials. Selon les données d’une étude publiée
en juin 2015 par Kantar Media, les seuls budgets publicitaires en augmentation sur le premier
semestre 2015, sont ceux consacrés aux médias sociaux (+7% en 6mois) et à la télévision
(seulement +3%). Les budgets consacrés aux médias dits « traditionnels » tels que la presse,
la radio, l’affiche et le cinéma sont en perdition. Un phénomène qui s’explique notamment par
le fait que ces médias traditionnels s’adressent à une cible trop large et impersonnelle.
Cette génération aux attentes nouvelles a modifié le paysage du marketing et notre
manière de consommer. Pour autant, nous pouvons nous demander si c’est le cas dans le
milieu du vin. Les jeunes consomment-ils du vin, et de quelle manière ? C’est une question
qu’il faut se poser avant de pouvoir s’adresser à cette cible.
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b) La génération Y et le vin.
Si l’on s’en tient à de tristes préjugés pessimistes nous pourrions penser que les jeunes
de la génération Y ne sont adeptes que d’alcools forts et de bières. Pour autant, plusieurs
études ont démontré que les 18-35 ans s’intéressent fortement au milieu du vin et que leurs
consommation n’est pas celle que l’on imagine au premier abord. Bien sûr, le « binge
drinking » (consommation excessive de grandes quantités d’alcools sur un court laps de temps
dans le but d’atteindre un état d’ébriété très rapidement) est encore un fléau qui touche nos
sociétés occidentales, notamment au Royaume-Uni. Pour autant, depuis quelques années, les
jeunes se montrent de plus en plus curieux et s’intéressent à la dégustation de ce nectar qu’est
le vin. Ils ont même une certaine culture relative à cet univers, notamment à travers la
connaissance de cépages et d’appellations. Marie- Paule Casanova, qui gère les relations
publiques du célèbre salon des vins des Vignerons Indépendants de France estime que depuis
environ 10 ans, 35% des visiteurs sont des jeunes qui ont entre 18 et 35 ans. Dans une
interview pour Le Point, elle précise que ce sont des jeunes « installés » qui ont en moyenne
25 ans, qui possèdent un travail, un appartement et un(e) concubin(e). Ils se rendent sur le
salon essentiellement pour s’informer, être en contact avec les vignerons et récolter des
informations relatives au travail de la vigne, aux régions viticoles et aux méthodes de
vinification. Bien sûr, ce ne sont pas les jeunes qui achètent le plus mais il ne faut pas négliger
leur pouvoir d’achat ; les jeunes consacrent un budget très important aux sorties et boissons.
Aujourd’hui 81% des jeunes entre 18 et 35 ans consomment du vin, une moyenne
supérieure à la moyenne européenne. Qu’en est-il de la différence homme/ femme ? Notons
que les filles s’alcoolisent de plus en plus mais sortent plus précocement des « cycles de
consommation excessive » qui prennent place à l’adolescence. En outre, il ressort que les
filles ont plus facilement un ressentiment négatif que les garçons après avoir été dans un état
d’ébriété. Ce qui est important de souligner pour notre étude, c’est le fait que l’écart
homme/femme (en termes de consommation) chez les jeunes diminue progressivement et
pourrait être en voie de disparaître définitivement. Cela nous conforte largement dans l’idée
que la distinction homme/femme est de moins en moins pertinente.
D’autre part, nous pouvons noter une évolution récente dans la manière de consommer
des jeunes. Aujourd’hui les jeunes qui consomment du vin sont des consommateurs dits
occasionnels qui préfère garder le vin pour les grandes occasions. Bien que le repas soit
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encore considéré comme le moment privilégié pour ouvrir une bouteille de vin, fait nouveau,
les jeunes aiment consommer du vin à l’apéritif. L’apéritif représente 15% de leur
consommation de vin alors que cela ne représente que 5% de la consommation des plus de 65
ans. La consommation des jeunes est moins régulière mais plus conviviale. L’enquête INRA
de 2000 a montré que le nombre de consommateurs réguliers dépasse celui de consommateurs
occasionnels à partir de la tranche d’âge 40 ans et +.
Qu’en est-il outre atlantique, chez les Millennials étasuniens ? Précisions qu’ils
représentent un marché tout simplement gigantesque puisqu’ils sont plus de 77 millions. Ce
qu’ils recherchent ? Avant tout des vins à un prix abordable, 10 dollars ou moins. Pour autant
ces jeunes veulent des vins de qualité qu’ils achètent en supermarchés. Les américains ne
semblent pas être des connaisseurs d’appellations et cela ne semble pas influencer leur choix.
Ce qu’ils aiment et qui marque les tendances actuellement ce sont les vins aux arômes de
fruits et les vins effervescents. Cette génération de jeunes américains semble être en attente
d’une éducation au vin, un phénomène aussi applicable aux consommateurs français comme
nous le verrons plus tard. Pour autant les américains ne sont pas prêts à faire beaucoup
d’efforts pour avoir accès à cet apprentissage. C’est aux marketeurs de trouver des solutions
simples et efficaces pour éduquer à la consommation de vin. Dans tous les cas, la génération
Y de la démographie américaine promet de beaux jours au marché du vin, et Jeremy Benson
nous l’a confirmé. D’après lui, rien que par sa taille cette cible est une véritable promesse.
Revenons en France… La consommation de vin chez les jeunes concerne tous les
milieux sociaux à partir du moment où l’individu rentre dans la vie active. La culture du vin
ne semble pas être réservée aux personnes issues de milieux aisés. Pourtant derrière le vin,
ainsi que tous les autres alcools d’ailleurs, se cache une notion de représentation sociale qui
pourrait se résumer par l’adage « Dis moi ce que tu bois, je te dirais qui tu es ». Aux yeux
des jeunes le vin est une boisson qui marque le passage à l’âge adulte, véritable symbole
d’émancipation et de maturité. Ne vous méprenez pas, le vin n’est plus synonyme de richesse
et de réussite dans l’esprit des jeunes. Le vin a un aspect valorisant qui procure aux jeunes le
sentiment d’être raffiné, cultivé et hédoniste. Un désir que le marketeur doit s’approprier afin
d’adapter son univers de marque. C’est ce qu’a fait la célèbre marque de Champagne
française Moët & Chandon pour conquérir le cœur des millénials aux Etats Unis (une
campagne réussie que j’aurai plaisir a exposé lors de ma soutenance orale pour illustrer mon
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propos). Bien sûr, la culture du vin chez les jeunes varie en fonction d’où ils vivent.
L’Histoire, les paysages, l’art de la dégustation et la gastronomie constitue le « socle
universel » de la culture vinicole. En France et Belgique par exemple, le vin conserve cette
image élitiste et rustique alors que les jeunes américains, eux, ne retiennent que l’aspect classe
et sophistiqué.
Notons aussi que le vin est relié à des aspirations générationnelles beaucoup plus
larges, telles que le retour au naturel, la modernité, le design, le néo traditionnel ou encore le
raffinement rustique. Des aspirations que l’on qualifierait de « bobos » dans le langage
courant. La représentation sociale n’est donc pas le seul argument dont le marketeur peut
arguer pour conquérir cette nouvelle génération en quête de transparence. Le vin possède des
atouts indéniables ; les jeunes considèrent que c’est un alcool plus sain que la bière ou les
alcools forts. En d’autres termes, le vin a une image de produit bienfaisant pour notre santé et
les Yers considèrent que ce nectar doit être consommé de manière raisonnable pour être en
accord avec un mode vie sain et une alimentation saine.
Enfin, last but not least, le vin a une image tendance aux yeux des jeunes. Selon le baromètre
IFOP de Vin & Société, une étude parue en 2014, 37% des 18 – 24 ans estiment que le vin est
une boisson tendance qui constitue un véritable levier pour construire leur avenir. L’étude a
d’ailleurs montré que plus les interviewés sont jeunes, plus ils adhèrent à cette idée. Alors,
finalement, les « vieux » ringardiseraient-ils le vin ? Il faut bien avouer que les jeunes de la
« génération loi Evin » sont, eux aussi, victimes de préjugés tenaces. Pour eux, le vin doit
rester avant tout un produit traditionnel et culturel. Par exemple, les français de moins de 35
ans semblent rejeter toute tentative de modernisation qui renvoie à une quelconque image
industrielle. Les étiquettes colorées n’ont aucun impact sur cette catégorie de consommateur.
Alors il nous faudra trouver d’autres méthodes pour rajeunir l’image du vin sans pour autant
toucher à l’essence même du produit. Le vin doit rester authentique, c’est le marketing et la
communication qui doit évoluer pour séduire cette génération. Les marketeurs doivent
prendre conscience que le premier frein à la consommation des jeunes reste le prix et qu’après
vient le frein lié à l’aspect élitiste du vin (vocabulaire snob et pompeux). Enfin, le troisième
frein correspond à la difficulté que les jeunes ont à choisir leur vin, puis à le déguster dans les
règles de l’art. D’où ce besoin d’être éduqué…
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B. … Qui a soif d’apprendre.
Nous venons de voir que les jeunes sont ouverts à la consommation de vin, qu’ils s’y
intéressent mais qu’ils restent néanmoins un peu « perdus » face à cet univers spécifique qui
s’est longtemps voulu élitiste. Ainsi, nous supposerons que pour conquérir les Yers il faut tout
d’abord les éduquer (a), ce qui semble être facilité par le fait que cette génération est enclin à
l’usage des nouvelles technologies d’information et de communication (b).
a) Une consommation qui passe par l’apprentissage.
Le baromètre 2014 de l’agence SoWine, un baromètre qui décrit chaque année le
rapport des français au vin, faisait remarquer que 67% des jeunes s’avouaient néophytes (Un
chiffre énorme qui fait échos aux 70% des femmes se considérant comme novices en la
matière). Pour autant l’une des valeurs fondatrice de cette génération correspond à ce que l’on
pourrait appeler la quête de sens. Cette génération qui remet tout en cause est en quête de
tradition, de vérité et d’authenticité.
Il semblerait que les jeunes soient plus curieux que leurs aînés ; ils s’orienteraient plus
facilement vers une bouteille qu’ils ne connaissent pas et délaisseraient les étiquettes célèbres.
Les nouveaux consommateurs sont en quête de plaisir, de sensations et de découverte mais il
faut bien l’avouer : ils n’y connaissent rien et auraient bien besoin de leçons. 77% estiment
qu’il est difficile de choisir son vin. Ainsi la sphère vin, composée de producteurs, de
marketeurs, de cavistes, de journalistes spécialisés, doit accompagner ce consommateur qui
monte en puissance et qui assurera la santé de ce marché dans les décennies à venir. Parler à
ces jeunes c’est parler aux seniors de demain. En effet, le consommateur emporte son
comportement en vieillissant. Il a été démontré qu’il n’y a pas de changement notable des
achats lorsque le consommateur arrive à la retraite. Il faut créer des repères durables.
Les initiatives allant dans ce sens-là commencent à fleurir et il semblerait que ce soit
la bonne stratégie. Par exemple, la bloggeuse Sarah Kadhiri qui vient de mettre en place le
blog Wine With Me, semble vouloir partager sa passion avec ces jeunes en quête de savoir.
Tout d’abord elle a fait le choix de ne sélectionner que des vins de petits producteurs
familiaux et locaux dont le prix de vente est inférieur à 20€, ce qui correspond au budget
généralement accordé par les Yers. D’autre part, elle propose à ses visiteurs une rubrique
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« découverte » où chaque semaine elle publie un article qui initie l’internaute à l’art de la
dégustation. Elle utilise judicieusement un vocabulaire simple et décomplexé afin d’intéresser
la cible que nous venons de décrire. Les Yers n’adhèrent pas à l’image sophistiquée de la
dégustation œnologique et Sarah Kadhiri l’a bien compris.
D’autre part, la pédagogie sur les lieux de vente commence à se développer mais ce
n’est que la genèse du processus et il faut que cela continue. L’attrait des jeunes pour cette
boisson se symbolise aussi par le développement des cours et des clubs œnologiques dans les
universités. La pédagogie c’est la clé de voûte du marketing ciblant la génération Y.
Les jeunes sont sensibles à l’Histoire de France, la géographie, l’art et la culture qui se
cachent derrière l’univers du vin. Comme le dit si bien Jean-Baptise Noé, professeur et
historien de l’alimentation et du vin, « donnons à notre jeunesse la capacité de s’émouvoir de
la beauté des paysages de vignes (…) permettons aux générations qui viennent, de trembler
d’émotion en trempant leurs lèvres dans un vieux millésime ». Ce que sous-entend l’historien
c’est que cette pédagogie ne peut pas seulement être l’œuvre des acteurs du milieu vinicole.
L’Etat, et plus exactement le législateur, doit aller dans le même sens et jouer un rôle positif
dans l’éducation au vin. Les lois ne doivent plus associer le vin à une image négative de
drogue mais elles doivent apprendre à boire avec éducation et modération. Il y a encore
beaucoup de travail à ce niveau mais là n’est pas notre préoccupation pour notre étude. Nous
devons plutôt nous demander quels sont les moyens à utiliser pour éduquer ces jeunes.
b) Une génération encline à l’usage des nouvelles technologies
d’information et communication (NTIC)
La génération Y qui est en quête de savoirs et de découvertes s’est appropriée un
nouveau rapport à la technologie qui facilite cette recherche d’informations. La catégorie des
15-24 ans a fait d’Internet un véritable outil social. D’après l’étude Lightspeed GMI, les
jeunes de la génération Y consultent Facebook et Twitter directement après s’être réveillés –
c’est la première chose qu’ils font avant même de déjeuner. Cette culture numérique
s’explique notamment par le fait que les jeunes vivent constamment avec les outils
numériques ; tablettes, smartphones et ordinateurs ne sont jamais éteints et restent toujours à
proximité. D’autre part, on remarque que les jeunes français sont actifs dans leur démarche de
recherche d’informations (à l’inverse des consommateurs américains qui ne sont pas prêts à
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faire beaucoup d’efforts pour en savoir plus sur le vin). La génération Y connaît les outils,
maîtrise parfaitement Internet et les réseaux sociaux. Le Yer va personnaliser son usage des
outils proposés par les NTIC. Nous pouvons parler de conso-acteur.
Enfin, les chiffres montrent que les « Twittos » s’intéressent beaucoup à l’art et la
culture. Une étude qui comparait les utilisateurs réguliers de Twitter aux non-utilisateurs
indiquait que 43% des « Twittos » étaient sensibles à ce domaine contre seulement 16% des
autres. Un chiffre que les marketeurs du vin devraient prendre en considération puisque on
peut estimer que le vin fait partie intégrante de la culture française.
Ainsi, cette caractéristique de la génération Y semble être en parfaite cohérence avec
les aspirations de ces jeunes consommateurs de vins : les jeunes veulent de l’information et ils
savent comment l’obtenir. La pièce manquante du puzzle est la fourniture de ces informations,
de cette pédagogie. C’est ici que réside le travail des marketeurs vinicoles.
Pour résumer cette seconde hypothèse en quelques mots, nous pouvons dire que la
génération Y est une génération à part entière qui demande un traitement spécifique. Cela ne
fait pas de doute. Mais la question à laquelle doit répondre notre étude est la suivante : est-il
vraiment d’avantage pertinent de s’adresser à cette génération plutôt qu’aux femmes ? Si oui,
quelle est la meilleure méthode pour s’adresser à ces jeunes aux aspirations nouvelles ?
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Partie II – Etude de terrain et préconisations | Les
petits producteurs à l’assaut de la génération Y.
Afin de confronter nos hypothèses à la réalité du marché et aux réelles attentes des
consommateurs nous avons fait le choix de nous adresser directement à ces derniers. Nous
avons alors réalisé une étude terrain qui s’est traduit par un sondage. Ainsi nous vous
présenterons le contexte et les résultats de cette étude (I) pour ensuite conclure avec nos
préconisations déclinées en trois temps (II).
I. Contexte et résultats de notre étude terrain.
Pour mieux comprendre les résultats de notre étude et lui donner une certaine crédibilité, il
est nécessaire de vous la présenter en quelques mots (A). Puis nous vous présenterons les
chiffres clés de cette étude (B) pour ensuite confirmer nos hypothèses à l’appui des résultats
(C).
A. Brève présentation de l’étude terrain.
L’étude est un questionnaire composé de 34 questions dont 12 qui sont réservés aux
interrogés ayant moins de 30ans, afin de questionner précisément les membres de la
génération Y. L’étude a été soumise aux sondés via une Google form posté via mes réseaux
sociaux privés (afin que le résultat ne soient pas faussé par mes contacts professionnels qui
sont pour la plupart spécialisés dans le vin). 85 personnes ont répondu à ce questionnaire ; un
tiers étaient des hommes. D’autre part, 15% des sondés avaient plus de 30 ans tandis que 85%
avaient entre 18 et 30ans. Tous les sondés sont français, ainsi il nous faudra nuancer nos
propos et limiter nos préconisations au marché français puisque ce qui est vrai en France n’est
pas forcément vrai dans un autre pays ou sur un autre continent. Les sondés ont répondu
anonymement et après analyse des réponses nous pouvons affirmer que les hypothèses que
nous avions émises précédemment étaient fondées.
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B. Les chiffres significatifs de l’étude.
Voici un bref résumé des résultats de notre étude. Nous avons sélectionné les chiffres
qui nous paraissent essentiels et faisant écho aux affirmations contenues par nos hypothèses.
Les consommateurs actuels sont effectivement des consommateurs qui privilégient la
qualité à la quantité puisque 81% préfèrent consommer un vin de grande qualité
occasionnellement, plutôt qu’un vin de qualité moyenne plus régulièrement. En outre, les
consommateurs associent sans conteste le vin à la gastronomie puisque 70% affirment
considérer comme inenvisageable de déguster un repas gastronomique sans vin. Presqu’un
tiers aimeraient que des accords met/vin figurent sur toutes les étiquettes et 50% avouent y
jeter un coup d’œil. Notons qu’ici il n’y aucun différence entre hommes et femmes ; les
genres semblent parfaitement égaux en la matière.
Notons toutefois que 66% des interrogés préfèrent se rendre à un cours d’œnologie
classique plutôt qu’à un cours d’œnologie où l’on peut apprendre à accorder met et vin. Cela
voudrait donc dire que, par-dessus tout, le consommateur est curieux de découvrir le vin à
proprement parler. Comme supposé, le consommateur est un néophyte curieux. 70% déclarent
connaître que moyennement les vins et apprécier les conseils d’un professionnel tandis que
20% déclarent ne rien y connaître en vin mais voudraient en savoir plus en la matière.
L’information est donc de rigueur. En outre, 65% choisissent un vin qu’ils connaissent déjà
pour être sûr de ne pas être déçu : le manque de connaissance crée une certaine peur chez le
consommateur qui ne veut s’aventurer vers quelque chose d’inconnu.
50% estiment qu’il n’y a pas besoin d’occasion particulière pour déguster du vin : ce
qui montre que le consommateur, bien qu’il consomme à intervalles espacés, est ouvert à des
instants de consommation nouveau, auxquels on ne pense pas forcément. La fête entre amis,
les anniversaires ne sont pas les seuls moments où le vin est consommé. Il faut que le
marketeur pense à ces instants de consommation. C’est d’ailleurs la stratégie à adopter pour
développer les packagings tels que le verre de vin prêt-à-consommer. Bien qu’un tiers des
interrogés affirment être certains de ne jamais acheter ce type de conditionnement, 50%
d’entre eux sont indécis et sont des cibles à conquérir.
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C. Nos hypothèses confirmées.
Les chiffres tirés de notre étude terrain viennent seulement confortés ceux sur lesquels
s’appuyaient nos hypothèses. Effectivement, la cible féminine n’est plus pertinente de nos
jours (a). Toutefois l’étude nous dévoile des éléments que nous n’avions pas évoqués jusque
là (b).
a. Bye-bye la segmentation de genre.
S’il y a bien un chiffre que l’on doit retenir de cette étude, un chiffre qui nous permet
de répondre sans conteste à notre problématique, c’est celui-ci : 100% ! Oui, 100% des
interrogés hommes se déclarent prêts à acheter une bouteille marketée à des femmes. Ce qui
démontre le manque de pertinence de la segmentation de genre. Aujourd’hui, d’après les
hommes interrogés, ce qui compte c’est ce qu’il y a dans la bouteille, peu importent les
préjugés qui peuvent émergés de l’étiquette. Les consommateurs actuels sont avertis des
méthodes de marketing et ne se laissent plus influencer par le gender marketing aujourd’hui
considéré, au moins sur le marché du vin, comme réducteur et dépassé. Si l’on se place du
côté des femmes, nous nous apercevons qu’une étiquette qui leur est destinée n’est pas
efficace puisque 71% d’entre elles affirment y faire attention mais cela ne détermine en rien
leur choix.
Attention ! Ici nous préférons nuancer notre propos. Effectivement, ces affirmations
s’appliquent au marché français car les consommateurs français sont habitués à des
packagings féminins que nous pourrions qualifier de « raisonnables ». Ainsi, les hommes
affirment sans détour pouvoir acheter une bouteille aux couleurs féminines. Pour autant, aux
Etats-Unis, où les marketeurs n’ont guère de limites, il arrive que des bouteilles soient
marketées pour les femmes et présentent des codes ou des noms extrêmement girly, comme la
cuvée « Skinny Girl ». Or, dans ce cas-là, les études ont montré que la cible masculine
n’achètera absolument pas la bouteille. Nous pouvons alors conclure qu’en France, les
hommes sont insensibles au marketing féminin parce que ce dernier reste « raisonnable ».
Mais nous avons un autre chiffre qui prouve que le marketing féminin n’est plus en
phase avec la réalité du marché. 44% des couples déclarent avoir les mêmes goûts en termes
de vin et ainsi acheter les mêmes bouteilles. Notre hypothèse est confirmée, il n’y a pas de
différence notable entre hommes et femmes. D’autant plus que 22% des interrogés ont déclaré
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que, bien que n’ayant pas les mêmes préférences que leur conjoint, l’un des deux faisaient une
concession au moment de l’achat du vin. L’achat est donc plus un achat à deux qu’un achat
« égoïste » où la femme pensera qu’à ses propres goûts et à ses envies. Bien sûr, il ne faut pas
oublier que grand nombre de consommateurs sont célibataires mais il est quand même
important d’avoir cette précision sur les habitudes de consommations en couple.
Ces chiffres sont des éléments de réponses que nous considérons essentiels. Ils nous
permettent d’affirmer que le marketing féminin est dépassé. Combinés aux chiffres avancés
pour illustrer nos hypothèses, les résultats de notre étude montrent que les femmes ont les
mêmes goûts que les hommes. Il n’y a plus de doutes à avoir, à nos yeux le marketing féminin
ne répond plus aux attentes du marché et la segmentation de genre doit être abandonnée au
profit d’une segmentation générationnelle. D’autant plus que notre étude nous a apporté des
informations supplémentaires relatives aux jeunes de la génération Y.
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b. Segmentation générationnelle : ce qu’il faut en retenir.
Tout d’abord, bonne nouvelle ! 85% des jeunes de plus de 18 ans interrogés estiment
qu’ils seront des amateurs de vin dans les années à venir. En outre, 67% adhèrent au lifestyle
« consommer moins mais mieux », ce qui nous donne des pistes non négligeables pour
adapter la communication qui leur est destinée.
Les chiffres de l’étude confirment les tendances évoquées : les jeunes ont vraiment
envie d’en savoir plus sur le vin. 93% se considèrent comme curieux lorsqu’il s’agit de vin et
65% affirment être à la recherche de nouvelles expériences dans le domaine du vin.
Toutefois, notre étude révèle des aspects que nous n’avions pas évoqués et qui sont
très intéressants ! Seulement 6% des interrogés se renseignent sur Internet lorsqu’ils veulent
plus d’informations sur un sujet vinicole ou sur un vin, un producteur ou un cépage. 86%
d’entre eux préfèrent un conseil en direct auprès d’un vigneron, un caviste ou sommelier. Un
chiffre à garder en tête !
Autre fait intéressant ; 57% des jeunes affirment qu’ils ne likeraient par une page
Facebook d’un domaine ou d’une marque vinicole si cela leur était proposé. Un chiffre qui
nous surprend au vu de l’importance des réseaux sociaux dans la vie des jeunes de la
génération Y.
Enfin, il est important de noter que 80% des jeunes affirment s’être déjà rendu dans un
domaine viticole et 71% des sondés accepteraient de se rendre aux porte ouvertes d’un
domaine dans le but d’y acheter du vin. Ces chiffres sont très importants puisqu’ils montrent
que les jeunes s’intéressent à des domaines de petites tailles et non pas seulement aux grandes
marques de négoces. D’ailleurs, 50% des interrogés estiment qu’une grande marque à la
notoriété mondiale aurait plus de difficultés à les séduire (d’un point de vue marketing), qu’un
petit producteur local.
En observant ces chiffres nous nous sommes rendus compte que les petits domaines
viticoles français avaient leurs carte à jouer ; longtemps restés dans l’ombre des grandes
appellations ou des grands noms de la viticulture, il est temps pour les petits domaines de
prendre le train du marketing et de la communication en route pour tenter de séduire et
fidéliser les jeunes de la génération Y. Nos préconisations iront dans ce sens !
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II. Préconisations : Domaines familiaux : 3 conseils pour attirer la
génération Y.
Tout au long de notre réflexion nous avons suivi un cheminement qui nous amené à
conclure que la segmentation de genre n’était plus adaptée aux attentes du marché. Les
acteurs du milieu vinicole doivent dorénavant préférer une segmentation générationnelle qui
permettra de cibler les membres de la génération Y. Une cible qui assurera un avenir heureux
pour les producteurs puisque se seront des consommateurs réguliers dont les habitudes
perdureront dans le temps.
Or, il s’avère que l’étude de terrain a dévoilé que les jeunes de cette génération ont une
préférence pour les producteurs locaux, de petites tailles. Ainsi, il nous semble opportun de
conclure notre propos en livrant des recommandations en les orientant de manière à ce
qu’elles soient bénéfiques aux domaines de petite taille que nous qualifierons de domaines
« familiaux ». Pour des professionnels du marketing et de la communication ces
recommandations peuvent peut-être paraître simplistes mais il faut garder en tête que
beaucoup de domaines viticoles sont totalement novices dans ces domaines. Souvent par
manque de budget, le marketing a été mis de côté, ce qui fait qu’aujourd’hui ces domaines
familiaux sont très largement en retard. Nous conseillerons alors à ces acteurs d’adopter une
réelle identité de marque (A), de prendre la parole sur Internet (B) et d’ouvrir leurs portes au
grand public (C).
A. Adoptez une réelle identité de marque.
En 20 ans beaucoup de petits producteurs ont fait des efforts en termes de qualité du
vin mais ces efforts ne sont pas récompensés car ils ne sont pas, ou mal, communiqués auprès
du grand public. Nombreux sont les petits domaines qui conservent une image trop
traditionnelle, voire ringarde. Par conséquent ces petites structures sont « mangées » par les
géants du milieu qui possèdent d’énormes budgets consacrés à l’innovation et au marketing. Il
est grand temps pour les petits producteurs de se différencier sur le marché et nous pensons
que cela n’est possible qu’à travers une marque ! Bien sûr nous ne parlons pas de consacrer un
budget faramineux au marketing mais il faut savoir que de petites choses peuvent être
réalisées pour rajeunir l’image d’un domaine et attirer une nouvelle clientèle.
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Tout d’abord, comme toute marque, le domaine doit se doter d’une véritable identité,
élément incontournable aujourd’hui, même dans le domaine du vin ! Premier travail ; établir
une plateforme de marque qui sera en fait une synthèse des valeurs que souhaite dégager le
producteur local. Attention ici à ne pas se perdre. Beaucoup sont ceux qui souhaitent
s’attribuer une image « haut de gamme » ou « traditionnelle ». Or si ce n’est pas le cas en
réalité, mieux vaut bannir ce type de messages. Le consommateur n’est pas dupe, il se rendra
compte que l’image que vous renvoyez n’est pas la bonne. D’autant plus que les jeunes de la
génération Y aiment avoir une relation de confiance avec les marques qu’ils consomment. Si
vous leur mentez, ils ne vous considéreront plus. Votre but n’est pas de ressembler aux grands
châteaux bordelais ou aux maisons champenoises. Au contraire, vous devez renvoyer une
image différenciante qui attirera le jeune consommateur curieux. Par exemple, si vous êtes
dans une démarche écologique (par exemple, certifié Haute Valeur Environnementale) il est
important de la retranscrire dans votre plateforme de marque ; le buveur contemporain
s’intéresse aux questions d’écologie et de consommation responsable. Par contre, ne
communiquez pas sur ces valeurs écologiques avant que vous ayez été certifié ou reconnu
comme tel sinon le consommateur pensera que vous lui avez menti et que vos convictions
environnementales ne sont que de la poudre aux yeux pour vendre votre vin.
Une fois cette plateforme de marque définie il faudra la retranscrire graphiquement à
travers une charte graphique qui sera votre UNIQUE référence. Trop souvent les domaines de
petite taille ne prêtent pas attention à ces « détails » identitaires, pourtant ils sont essentiels.
Aujourd’hui le consommateur est bombardé d’informations et il ne les retiendra que s’il
rencontre le même logo et les mêmes codes couleurs à plusieurs reprises. Le mot d’ordre ici
est : co-hé-rence. Tous vos moyens de communication doivent porter votre logo et votre
baseline si vous en avez une ; publicité, habillages de bouteilles, site Internet, réseaux
sociaux, fiches techniques, communiqué de presse, revue de presse, signalétique et même
signature e-mail. Il doit y avoir une unité qui, au fil du temps rentrera dans l’inconscient du
consommateur. Attention, il faut aussi une unité entre les membres du domaine ; toutes les
personnes qui travaillent pour et avec le domaine doivent utiliser les mêmes outils et avoir le
même discours. Sinon le consommateur sera perdu.
Enfin, les projets que nous avons pu réalisé avec des domaines viticoles de petite
taille nous ont permis de tirer un enseignement : l’offre doit être claire. Le consommateur, et
plus particulièrement les jeunes, sont déjà suffisamment perdus lorsqu’ils achètent du vin, ce
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n’est pas la peine de leur compliquer la tâche. Au contraire, vous devez l’aiguiller, lui montrer
le chemin. Mais comment clarifier mon offre si j’ai plusieurs cuvées, plusieurs appellations,
plusieurs tranches de prix ? A nos yeux, la solution la plus efficace est de créer des gammes
simples et lisibles. Souvent nous conseillons une gamme dite « abordable » avec des prix qui
ne dépassent pas les 15€/bouteille et une gamme plus « qualitative » avec vos cuvées les plus
prestigieuses. Ainsi le jeune consommateur pourra répondre à sa curiosité en achetant une
bouteille de la première gamme et lorsqu’il reviendra vers vous, qu’il sera en confiance, son
achat se tournera vers la gamme plus qualitative. Une gamme peut bien évidemment
comporter plusieurs appellations différentes mais attention à ne pas perdre le consommateur
entre AOC, lieux-dits et cépages. Vous devez choisir un seul de ces éléments qui sera la
colonne vertébrale de votre gamme. Par exemple : Une gamme de 6 cuvées, toutes de la
même appellation mais produites sur des lieux-dits différents. Ici vil faudra mettre en avant
les lieux-dits et non pas l’appellation. Attention, les gammes doivent être cohérentes et il ne
doit pas y avoir d’interférence d’une gamme à l’autre : vous devez trouver un moyen de les
distinguer en un regard. Les étiquettes doivent absolument être différenciantes sinon vous
allez perdre le consommateur.
De même, créez des fiches techniques afin de guider le consommateur à travers vos
gammes. Utilisez les couleurs du domaine, oubliez le langage trop technique qui n’apprendra
rien de concret au consommateur. Préférez des fiches techniques au design séduisant,
comportant des conseils de consommation et de conservation, des idées d’accords met/vin ou
encore une carte schématique qui situe votre vignoble et les appellations que vous
commercialisez. N’oubliez pas que le consommateur vient parfois de loin pour visiter votre
région et acheter vos produits : il est important de l’informer et de le guider.
Une fois votre identité définie, il est important de la retranscrire sur la toile. Ce n’est
parce que vous êtes un domaine de petite taille que vous n’avez rien à raconter, bien au
contraire.
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B. Vous avez des choses à dire sur la toile.
Vous avez créé un site Internet il y a dix ans parce que l’on vous a dit que c’était la
mode et qu’il fallait en avoir un mais vous ne l’avez jamais alimenté ? Vous avez tors ! Trop
de vignobles de petites tailles ne saisissent pas leur chance sur la toile. En surfant sur Internet
on se rend vite compte que trop de domaines possèdent encore un site au design peu attractif,
rempli de clichés dont le monde viticole veut aujourd’hui se débarrasser.
Instinctivement, vers quel site iriez-vous en premier ?
C. Aller à la rencontre du consommateur.
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Soyons honnêtes, le second site est beaucoup plus attractif que le premier alors que les
informations y sont presque les mêmes. Le site Internet est un lieu où vous pouvez prendre
librement la parole et vous adressez à un consommateur qui recherche de l’information. Un
consommateur qui a accepté que vous preniez la parole puisqu’il est venu de lui-même sur
votre site. Alors, voici quelques conseils pour un site Internet efficace qui remplira cette
mission d’information :
- Définissez un nombre limiter de « rubriques » principales : 6 au maximum, sinon
l’internaute se lassera et ne trouvera pas ses réponses aussi facilement qu’il le
souhaite. La home page doit être la plus lisible et épurée possible.
- Utilisez des visuels valorisants. Eviter les couleurs sombres et les clichés cheap qui
pourraient renvoyer une image ringarde et négative du domaine. Il vaut mieux un
petit nombre de visuels de qualité plutôt que beaucoup de visuels sans grand intérêt
esthétique.
- N’oubliez pas que l’internaute est à la recherche d’informations dans un domaine
qu’il avoue ne pas très bien connaître. Ainsi, utilisez un champ lexical simple et
décontracté, faites des textes courts et n’hésitez pas à donner des conseils à
l’internaute. Par exemple : température de service d’un vin ou des conseils
pratiques pour déguster dans les meilleures conditions.
- N’oubliez pas de l’inviter à venir vous rendre visite, notamment avec un onglet
contact qui lui procure toutes les informations nécessaires pour se rendre au
domaine. Mais aussi avec des informations relatives à la vie du domaine ; les
évènements que vous organisez, des photos de la vigne au fil des saisons, etc.
- Faites le lien avec vos réseaux sociaux : permettez à l’internaute de partage vos
articles et faites des rappels grâce à des liens qui renvoient sur votre page
Facebook. N’oubliez pas que les réseaux sociaux font partie intégrante de la vie
des jeunes…
En résumé, lorsque vous pensez votre site Internet, placez le consommateur au cœur du
processus et de la stratégie. Pourquoi se rend-t-il sur mon site ? Que cherche –t-il ? A quoi
mon site peut-il lui servir ? En combien de clic pourra-t-il trouver l’information souhaitée ?
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Concernant vos réseaux sociaux, si vous n’en avez pas, nous vous conseillons de
privilégier une page Facebook dont l’utilisation sera plus en phase avec votre activité que des
réseaux tels que Twitter ou Pinterest. Lancez-vous sur Facebook avant de vous lancez ailleurs.
Bien que notre étude nous ait montré que très peu de jeunes sont prêts à liker une page d’un
domaine, il est important de les inciter à garder le lien avec vous et Facebook est un bon
moyen. Nous conseillons souvent à nos clients de partager des infos un peu plus
« décontractées » que celles diffusées sur les autres médias. On parle d’une « communication
de proximité ». Notre étude a montré que ce que veulent prioritairement les consommateurs ce
sont des informations de type commerciales et des conseils de consommation. Attention à ne
pas être centré sur vous et votre marque ! Le monde viticole est un monde de partage,
d’entraide et de convivialité et cela doit se ressentir à travers vos réseaux sociaux. N’hésitez
pas à parler d’autres domaines, de vins que vous avez pu déguster, d’évènements autres que
ceux qui vous concernent directement. Evidemment votre page doit aussi (et même
principalement) relayer les informations liées aux actions que vous menez au quotidien ! Le
but ultime étant d’attirer le fan à vous rencontrer au domaine ou sur des salons prévus à cet
effet.
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  • 1. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 1 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Mathilde Chevalier - S P 4 S t r a t é g i e d e s m a r q u e s - P i l o t e : A r n a u d B o n n e vi l l e Les femmes, le vin et la segmentation du marché. - Et si le marketing féminin n'était plus en phase avec la réalité du marché vinicole ? -
  • 2. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 2 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Editorial . « Lorsque je me présente j’aime spécifier que je suis fille et petite-fille de vignerons. Originaire du petit village de Lugny au cœur du vignoble mâconnais, j’ai baigné dans le monde de la vigne avec tous les avantages et les inconvénients que cela peut présenter. Très vite, mon père me faisait gouter mon premier verre de vin et je crois bien que j’ai toujours apprécié ce nectar. En grandissant je n’ai pas perdu cet ADN et c’est tout naturellement que je me suis tournée vers le milieu du vin au cours de mes études en communication. Aujourd’hui attachée de presse juniore dans les bureaux lyonnais de l’agence Benson Marketing Group, je travaille chaque jour en collaboration avec celles et ceux qui ont su faire évoluer la sphère vin ; une petite sphère où les valeurs de convivialité et d’entraide règnent encore. Je savais que mon mémoire porterait sur le marché de cette boisson qui m’est chère mais c’est seulement en feuilletant des articles de presse que je me suis intéressée de plus prêt à la cible féminine. Jeune femme, amoureuse de vin, consommatrice, (très légèrement féministe), j’ai pris plaisir à écrire à ce sujet et j’espère que mes propos susciteront votre intérêt. » Mathilde Chevalier .
  • 3. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 3 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Sommaire Introduction | Les femmes et le vin, une histoire qui dure............. 5 I. Du tabou historique à la consommatrice affirmée...........................................5 II. A la rescousse du marché vinicole. ...........................................................8 Partie I : Femmes ou génération Y : quelle cible pour l’avenir ? .........................................................................................12 I. Zoom sur le marketing féminin dans le milieu du vin................................ 12 A. Qu’est-ce que le marketing féminin ........................................................12 B. Comment le marketing féminin s’est-il illustré dans le milieu vinicole ? . 14 C. Portrait de la consommatrice contemporaine.............................................. 17 II. Hypothèse 1 | Abandonner la segmentation de genre... ............................21 A. Mettre fin aux clichés ....................................................................................... 21 a) Les écueils sur le marketing féminin......................................... 21 b) Homme/Femmes, il y a-t-il vraiment une différence................. 22 B. Des tendances de consommations qui n’ont pas de sexe. ................................ 24 a) Un lifestyle où la gastronomie est reine. .................................. 24 b) Les petits packagings entrent en scène. ................................... 25 II. Hypothèse 2 | … Au profit d’une segmentation générationnelle. ..... 27 A. Portrait d’un jeune consommateur…................................................................ 27 a) Génération Y, quésaco ? .......................................................... 27 b) La génération Y et le vin. ......................................................... 29 B. … Qui a soif d’apprendre. ............................................................................... 32 a) Une consommation qui passe par l’apprentissage. ................. 32
  • 4. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 4 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . b) Une génération encline à l’usage des nouvelles technologies d’information et de communication. ................................................... 33 Partie II – Etude de terrain et préconisations | Les petits producteurs à l’assaut de la génération Y. ......... 35 I. Contexte et résultats de notre étude terrain. .............................................. 35 A. Brève présentation de l’étude terrain. .............................................................. 35 B. Les chiffres significatifs de l’étude. ................................................................. 36 C. Nos hypothèses confirmées .............................................................................. 37 a) Bye-bye la segmentation de genre. .......................................... 37 b) Segmentation générationnelle : ce qu’il faut en retenir. ........ 39 II. Préconisations : Domaine « familiaux » : 3 conseils pour attirer la génération Y ...................................................................................................................... 40 A. Adoptez une réelle identité de marque. ........................................................... 40 B. Vous avez des choses à dire sur la toile. .......................................................... 43 C. Ouvrez vos portes au grand public. ................................................................. 46 Bibliographie. …...…………………………………………………………………….48 Annexes (interviews professionnels/ questionnaire étude terrain) …..……..50 Remerciements. ……………………………………………………………………….61
  • 5. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 5 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Introduction | Les femmes et le vin, une histoire qui dure. « Bonnes études, d’où je me haussai à l’usage familier et discret du vin, non point avalé goulûment, mais mesuré dans des verres étroits, absorbé à gorgées espacées, réfléchies… » Prisons et Paradis, 1932 - Colette. C’est ainsi que Sidonie-Gabrielle Colette, plus communément appelée Colette, évoque son initiation à la dégustation, genèse de son amour inconditionnel pour le vin. Romancière des années 1930, elle fait pleinement partie des pionniers de la littérature qui ont su parler du vin avec finesse. Au-delà de cela, elle fût l’une des rares femmes de lettres à évoquer l’art divin de boire du vin. Elle en a d’ailleurs fait l’un des symboles de la libération des femmes, cause pour laquelle elle a beaucoup œuvré. Mais ne vous y méprenez pas, l’amour entre les femmes et le vin a pris naissance bien avant les années 1930. En introduction de ce mémoire, nous étudierons d’abord le tabou historique, tombé pour laisser place à la consommatrice affirmée (I). Puis nous verrons comment cette consommatrice, cible des marketeurs, a été utilisée pour redresser un marché en crise (II). I. Du tabou historique à la consommatrice affirmée. La civilisation du vin est née en Grèce, une société très largement dominée par les hommes où les femmes étaient explicitement exclues de la société. En public, seuls les hommes étaient autorisés à boire ce nectar sacré, symbole de force, supériorité et domination. Le vin faisait pleinement partie du sexisme de cette époque. Bien sûr, ceci est la version « officielle ». En réalité les femmes ont de tout temps bu du vin et aimé cela. Parfois même, elles étaient d’excellentes dégustatrices. D’un point de vue historique, à l’époque des grecs, le vin était considéré comme le sang de la vigne. Les hommes, qui partaient du principe qu’un sang en chasse un autre, interdisaient aux femmes ayant leurs menstruations de pénétrer les chais au risque de faire tourner le vin élevé dans les fûts.
  • 6. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 6 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Cette interdiction ne se limitait d’ailleurs pas seulement à des croyances et morales informelles. Dans certaines cités, comme celle de Milet (aujourd’hui site archéologique situé en Turquie), il existait des édits, véritables actes législatifs émanant d’un magistrat, qui interdisaient aux femmes de consommer du vin. La sanction était sévère puisque les femmes prises sur le fait pouvaient être répudiées par leurs maris ou même être condamnées à mort. Comme l’indique Ségolène Lefèvre, historienne de l’alimentation et auteur de Les femmes et l’amour du vin, c’est à partir du Moyen-âge que les écrivains et poètes ont commencé à mettre en scène des femmes buvant avec des hommes. J’en veux pour exemple les Rubaiyat d’Omar Khayyam ou les poèmes d’Abu-Nuwas. L’interdiction pour les femmes de boire du vin est donc tombée au cours du premier et du deuxième siècle après JC. Dans les sociétés occidentales comme la nôtre, c’est surtout l’ivresse de la femme qui a constitué un véritable tabou jusqu’à la fin du XXème siècle. D’après le psychanalyste Freud le tabou est en fait la prohibition implicite d’un comportement outrepassant gravement les règles morales qui régissent la plupart des sociétés. D’après Bernard Pivot, auteur du Dictionnaire amoureux du vin, l’état d’ébriété était systématiquement stigmatisé dès lors qu’il concernait les femmes mais valorisé comme signe de virilité chez les hommes. Une femme ivre allait à l’encontre de tous les fondements moraux de notre société. La femme, l’épouse, la mère devait avoir de la tenue et être en possession de l’ensemble de ses moyens physiques et intellectuels. L’ébriété de la femme était un état honteux, déshonorant, voire scandaleux. Les femmes nées dans les années 1930 comme mes grand-mères ont grandi dans l’interdit et le tabou de l’alcool. C’est seulement dans les années 1970 que la société a daigné prendre conscience de la particularité liée à l’alcoolisme féminin. Encore aujourd’hui le tabou ne semble pas définitivement levé. Les femmes nées dans les années 1990, c'est-à-dire les jeunes filles de mon âge, sont soumises à deux visions de l’ébriété féminine. Deux visions qui s’affrontent, même en 2015 : - la vision dite « traditionnelle » qui correspond à la mauvaise image de la fille « bourrée » qui se rattache au modèle de la domination masculine. - La vision égalitaire qui se retrouve majoritairement en milieu urbain et qui est généralement associée à la séduction et à la notion de désinhibition sexuelle.
  • 7. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 7 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . A un tout autre niveau, la viticulture en elle-même a été un milieu ultra masculin des siècles durant. Les hommes arguant de la dureté physique du métier de vigneron excluaient la femme de la culture de la vigne. A cela s’ajoute le fait que pendant longtemps les vignes représentaient un investissement colossal que seuls les aristocrates et les monastères pouvaient s’offrir. Les grands domaines étaient aux mains de ces classes sociales et les femmes n’étaient bien évidement pas autorisées à y travailler. Pour autant, la gente féminine n’a pas attendu la libération de la femme pour boire et apprécier le vin. Ce qui est nouveau dans la société actuelle c’est le fait que la femme achète le vin, investit les métiers du vin et produit le nectar. De 1960 à aujourd’hui, la femmes est passée de l’ombre à la lumière et en a profité pour s’inviter dans la sphère viticole. Cette évolution s’explique essentiellement par trois facteurs sociaux plutôt évidents : - L’émancipation sociale des femmes dans la société française : dans les années 1960, les femmes acquièrent leur autonomie vis-à-vis des hommes. Doucement mais sûrement, le législateur œuvre pour l’émancipation de la femme, ce qui implique des changements notoires dans le système social tel qu’il était établi jusqu’alors. En 1965, la loi régissant le régime légal du mariage est modifiée. Ainsi, la femme acquiert le droit d’exercer une activité professionnelle sans le consentement de son mari. Dans le même temps, elle obtient également le droit d’ouvrir son propre compte bancaire. Suite à cela, en 1970, la loi relative à l’autorité parentale est modifiée. On ne parle plus de la « puissance paternelle » qui mettait l’homme au centre pouvoir décisionnaire familial, mais « d’autorité parentale conjointe ». Enfin, en 1983, la loi Roudy vient instaurer l’égalité entre homme et femme dans le travail. - La transmission familiale des domaines viticoles à des femmes : à partir des années 1960, le nombre de femmes vigneronnes a considérablement augmenté pour la simple et bonne raison qu’elles ont été amenées à gérer des domaines. De façon délibérée lorsque la génération précédente léguait le domaine par héritage (de son vivant ou non) ou de façon non préméditée lorsqu’un triste évènement venait troubler la vie du domaine. A noter ici qu’il semblerait que la relève par des femmes serait plus facilement acceptée en France que dans d’autres pays à tradition viticole tels que l’Italie.
  • 8. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 8 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Aujourd’hui les femmes exercent tous les métiers de la filière vin ; œnologues, sommelières, cavistes, commerciales, marketteuses, communicantes, vigneronnes… elles sont partout. - L’évolution de la consommation de vin chez les femmes : l’émancipation sociale des femmes a eu comme corolaire l’évolution de leur consommation de vin. La femme est devenue un consommateur de vin à part entière, c’est indéniable. Aujourd’hui 51% des consommateurs de vin (effervescents ou non) sont des femmes. C’est de ce constat que découlera l’ensemble de mon propos. En parallèle, d’autres raisons viennent expliquer l’engouement des femmes pour le vin ; les tendances culinaires et les questions liées à l’équilibre alimentaire y sont pour beaucoup. La femme préférera boire un verre de vin, alcool jugé moins nocif que la bière où les alcools forts. En quelques mots, la femme a aujourd’hui sa place dans le monde du vin et nous verrons à travers notre développement que le marketteur lui a conféré une place toute particulière, notamment pour faire face à une crise du marché. II. A la rescousse du marché vinicole. La dimension culturelle et affective accordée au vin en a fait un produit agroalimentaire totalement à part. Le marché du vin est caractérisé par une extrême complexité qui lui est propre. La France, qui fait partie des pays les plus grands producteurs au monde, n’a évidemment pas échappé à cette complexité. Nous ne nous attarderons pas réellement sur les chiffres puisque là n’est pas le sujet mais la consommation de vin en France a atteint son record dans les années 1950, époque à laquelle le vin était considéré comme une boisson de table quotidienne. C’est à partir des années 1985 que les consommateurs ont commencé à bouder le vin français, la demande mondiale ayant chuté de 20% entre 1985 et 1995. Victime d’une baisse de la consommation domestique et menacé par les vins du nouveau monde, le vin français se porte mal et l’on peut parler d’une véritable crise. De 1985 à 2005, on peut considérer que le marché vinicole français était malade ; retard face à la mondialisation du marché, inadaptation de l’offre au regard de la demande, concurrence des vins du nouveaux Monde ainsi que des vins de pays voisins tels que la Grèce, l’Espagne ou l’Italie… D’autre part, les acteurs vinicoles ont
  • 9. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 9 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . largement subi le contrepoids de campagnes massives menées contre l’alcoolisme et l’alcool au volant. La loi française ne va pas dans le sens de ce marché pourtant de taille pour l’économie du pays. Bref, rien ne va plus dans le paysage français et les producteurs restent hermétiques au marketing. En effet, le milieu vinicole français se caractérise par son retard en termes de marketing et communication. Les protagonistes du vin, très attachés à l’aspect traditionnel de cette boisson ont longtemps rechigné à faire appel aux communiquants et marketeurs. En 2000 les marques de boisson ont commencé à s’engouffrer dans le marketing sexué. Bien sûr, le secteur du vin a encore fait la sourde oreille quelque temps avant de finalement ouvrir les yeux et constater que les consommateurs avaient évolué. Tout d’un coup, le milieu du vin français a pris conscience de l’intérêt que lui portaient les femmes, tant sur le marché français qu’à l’échelle mondiale. Les femmes anglaises avaient fait entrer le vin dans la consommation quotidienne en le consommant au pub, les coréennes et les japonaises buvaient du vin rouge, les françaises aimaient accorder vin et met. Les femmes avaient joué un rôle moteur dans le développement du vin et le marché français été passé à côté de tout ça ! En fait les acteurs du marché ont pris conscience de cette réalité :
  • 10. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 10 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Nul besoin de commenter cette pyramide, il est évident que les prérogatives généralement attribuées aux femmes au sein des ménages sont celles qui font écho à l’achat de vin. En réalité, pour 75% des foyers français le vin est acheté par les femmes. Après cette prise de conscience, la sphère vin a dû intégrer ce bouleversement dans sa stratégie de communication. Ainsi, en 2003 on a vu apparaître le premier corner de vin dédié aux femmes dans un supermarché E. Leclerc à Cannes. Créé par Isabelle Forêt, journaliste et auteur de Fémivin, ce corner est l’une des premières initiatives notables en termes de marketing féminin sur le marché français. Notons qu’une fois de plus nous étions en retard sur nos concurrents américains comme nous le fait remarqué Jeremy Benson, président de l’agence Benson Marketing Group, que nous avons interviewé dans le cadre de ce mémoire. Effectivement, le gender marketing a vu le jour avant les années 2000 dans le paysage vinicole étasunien ; le milieu s’est féminisé en même temps que les autres produits de consommation, les américains étant les number one du marketing sexué. Quoi qu’il en soit, le marketing sexué (et plus précisément le marketing féminin), a fait son entrée dans le paysage français au début des années 2000 et s’est très vite généralisé. Le marketing féminin a largement contribué à la guérison du marché vinicole français puisqu’il a contribué à relancer la consommation déclinante du secteur. Aujourd’hui la consommation continue à croître, notamment portée par la demande russe et chinoise. Entre 2007 et 2013, la consommation de vin rouge en Chine a progressé de 175%. L’étude Vinexpo 2015 prévoit une croissance de 9% sur l’ensemble des Amériques et 14% pour les US d’ici 2017. En bref, les chiffres symbolisant la bonne santé économique du marché global ne manquent pas. Toutefois, vous n’êtes pas sans savoir que le marketing est cyclique et qu’une tendance est, par définition, amenée à évoluer, voire disparaître. « Ni masculin, ni féminin, juste humains ! », c’est ce qu’affirme Faith Popcorn, consultante spécialiste des nouvelles tendances. A ses yeux l’heure est à la synthèse entre les valeurs masculines et féminines, que ce soit pour le produit en lui-même ou pour le marketing. Elle en veut pour preuve la prise de parole des consommateurs sur les réseaux sociaux. Ces derniers ont effectivement tendance à exprimer leur mécontentement lorsqu’une marque abuse de stéréotypes. En parallèle, Thomas Clément, digital strategist et fondateur de l’agence No Site, explique que le gender marketing ne présente pas vraiment de risque lorsqu’il s’applique à un produit qui relève entièrement de
  • 11. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 11 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . la sphère intime comme par exemple du gel douche. Mais quand le produit est d’avantage mixte, cela devient beaucoup plus délicat et le marketing sexué peut beaucoup plus vite s’essouffler. Ainsi, nous pouvons nous interroger sur la véracité de ces théories lorsqu’elles sont appliquées au milieu du vin. Et si le marketing féminin n'était plus en phase avec la réalité du marché vinicole ? Est-il désuet ? En d’autres termes, le marketing féminin n’a-t-il pas déjà atteint ses limites ? Le marketeur ne doit-il pas s’adresser à une autre cible devenue aujourd’hui plus pertinente ? Nous essayerons d’apporter une réponse la plus nette possible à cette problématique et pour se faire nous commencerons par poser deux hypothèses allant dans le sens de l’abandon du gender marketing (Partie I). Puis, nous apporterons nos recommandations en s’appuyant sur l’analyse d’une étude terrain menée dans le cadre de ce mémoire (Partie II).
  • 12. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 12 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Partie 1ère : Femmes ou génération Y : quelle cible pour l’avenir ? Afin de replacer notre étude dans son contexte il a fallu tout d’abord contextualiser notre sujet et ainsi replacer le marketing féminin dans le milieu du vin (I). Notre propos portera majoritairement sur la situation française, bien qu’il nous arrivera d’élargir notre vision, surtout en direction du marché américain, un marché très prometteur qui nous a été présenté par Jeremy Benson et Adrienne Stillman, tous deux américains. Après avoir posé les fondations de notre réflexion, nous serons amenés à détailler deux hypothèses qui induiront des réponses à notre problématique. Nous nous demanderons d’abord si le marketing féminin comporte des limites (II) puis nous serons amenés à nous demander s’il ne serait pas plus judicieux d’adopter un marketing mixte qui ciblerait la génération Y (III). I. Zoom sur le marketing féminin dans le milieu du vin. Notre propos débutera par la définition générale du marketing féminin (A), puis nous étudierons la manière dont ce dernier s’est illustré dans le milieu vinicole jusqu’à présent (B). Enfin, nous dresserons un portrait détaillé de la consommatrice de vin contemporaine (C). A. Qu’est-ce que le marketing féminin ? Nul besoin de vous expliquer qu’en marketing il existe une règle d’or : la segmentation. Or, le genre est une segmentation toute trouvée dont les marketeurs se sont bien évidemment emparés. En outre, ce type de segmentation présente un avantage non négligeable : il entraîne d’avantage d’achats. Le marketing féminisé est l’une des deux options découlant du marketing sexué aussi appelé « gender markerting » ; une pratique qui nous vient des Etats-Unis et qui consiste à adapter la politique marketing en fonction du sexe de la cible. Pour faire simple, le marketing féminisé c’est l’art de s’adresser aux femmes, s’adapter à ses goûts et ses aspirations. Cette segmentation repose sur la répartition des rôles entre hommes et femmes et leurs différences en termes de comportement d’achat. Une femme n’a pas la même sensibilité, la même
  • 13. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 13 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . perception qu’un homme. Les marketeurs et scientifiques estiment qu’elle n’analyse pas l’information de la même façon. Cette segmentation reste constante chez les marques et s’applique à pratiquement tous les secteurs, excepté celui du travail. La question de l’égalité entre les hommes et les femmes au travail étant une question encore beaucoup trop sensible, les marques qui touchent de près ou de loin l’univers du travail préfèrent généralement adopter des codes esthétiques neutres. Cela évite d’avoir à faire à des bad buzz comme cela a été le cas pour la marque de fluo Stabilo en mars 2014 avec le lancement du Stabilo « Néon », spécialement conçu pour les femmes. L’objet a généré la colère des féministes et la marque s’est trouvée bien embarrassée : Communication de crise et excuses sur les réseaux sociaux ont donc été de rigueur. Le marketing sexué est en perpétuelle évolution puisque les différences sociales et culturelles entre hommes et femmes le sont elles aussi. A notre époque, il ne s’agit pas de se contenter de mesures simplites comme créer un packaging rose ou bleu. Le marketing féminin ou « marketing to woman » se doit d’être subtil comme le rappellent Lisa Jonhson et Andrea Learned dans leur ouvrage Don’t think pink qui résume les aspirations de consommation des femmes. En France, le marketing féminin, ou plus généralement le marketing sexué, est en retard (bien que ce retard semble se combler). Notre douce France, patrie de l’égalité, s’est longtemps refusé de différencier les consommateurs selon leur genre. Le marketing sexué est resté très timide jusqu’à la fin des années 1990. C’est seulement en 2005 qu’est paru le premier recueil d’études portant sur les différences hommes/femmes dans leurs modes de vie et leurs valeurs, le Marketing Book de TNS. Depuis ce type de marketing semble pleinement assumé par les marques. Pourtant d’après le magazine spécialisé Stratégies, les professionnels avaient émis l’hypothèse de l’essoufflement de ce modèle suite aux violents débats autour du mariage pour tous. Le marketing sexué aurait pu tomber en désuétude mais il n’en est rien puisque le marketing gender est toujours aussi prisé. Effectivement, dans le secteur du vin, le marketing féminin est encore très présent.
  • 14. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 14 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . B. Comment le marketing féminin s’est-il illustré dans le milieu vinicole ? Au vu de l’historique que nous avons développé en introduction de propos, il est inutile de préciser qu’en termes de marketing de genre, c’est le marketing féminin qui s’est naturellement appliqué au milieu hyper masculin du vin. Les marketeurs n’ont pas eu besoin d’avoir recours au marketing masculin. Comme l’explique Sandra Painbéni, professeur de Marketing du secteur vinicole, on peut considérer que le marketing féminin dans le secteur du vin s’est illustré par deux canaux principaux : - L’adaptation des propriétés organoleptiques des vins (marketing implicite) : les marketeurs ont travaillé avec les producteurs pour élaborer des vins qui correspondent aux goûts des femmes (qu’ils estimaient différents de ceux des hommes). Le plus souvent les vins marketés sont des vins blancs, rosés ou des vins effervescents. Il arrive que des vins rouges soient marketés mais c’est beaucoup plus rare. Au niveau du nez, les producteurs tentent de faire des vins aux arômes fruités d’une intensité légère à moyenne. En bouche, les vins doivent avoir des tannins faibles ou moyens, un corps léger à moyen et une saveur fruitée. Le fruit est un élément très important dans le marketing féminin. D’ailleurs le rosé-pamplemousse a connu un succès commercial inégalé puisqu’en 2013, 35 millions de cols avaient été vendus. Les études avaient montré que les femmes en été friandes. Pour autant, l’été 2015 a prouvé que le phénomène commençait à s’essouffler. Nous verrons que les marketeurs qui s’appuient encore sur la théorie selon laquelle les femmes aiment les vins légers et fruités vivent dans le passé en s’appuyant sur des comportements de consommation qui étaient ceux des années 1970-1980. - Le travail des packagings (marketing explicite) : Généralement l’étiquette est beaucoup plus épurée et simplifiée. Le nombre d’informations sur l’étiquette est limité, la police de caractère stylisée, et les couleurs choisies avec précautions pour
  • 15. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 15 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . s’adapter à la finesse de la femme. En outre, plus récemment, les marques de vins (effervescents ou non) ont adopté des codes ludiques et girly. Bien sûr le secteur du vin n’as pas échappé au cliché « les filles aiment le rose ». Les étiquettes roses ont fleuri dans les rayons et certaines marques ont surfé sur la vague rose, c’est d’ailleurs le cas de la Maison Louise Mousset avec la cuvée « R Osé », issue d’une stratégie marketing expérientielle qui réunissait bien des clichés. Les marketeurs n’ont heureusement pas cantonné les goûts de la femme à la couleur rose puisqu’ils ont aussi beaucoup emprunté les codes de la mode, du luxe et la haute couture. En outre, la communication qui accompagne la féminisation de l’univers du vin s’approche de la ligne éditoriale de la presse féminine délivrant des « modes d’emploi » et des didactiques de consommation. Cela s’est notamment traduit par le design de bouteilles dont la forme ressemblait à celui d’une bouteille de parfum, par des Bag in Box en forme de sac à main ou encore par la création de séries limitées en collaboration avec de grands couturiers (notamment pour les grandes marques de Champagnes). Cette étiquette de Lulu B., vin de pays AOC illustre l’utilisation des codes girly. D’ailleurs c’est plutôt explicite ; robe rouge, chaussures à talons aiguilles, sac. La totale ! En outre, la marque qui a commercialisé cette cuvée au Canada et aux Etats-Unis a aussi appliqué ces codes à sa communication via son site Internet et ses réseaux sociaux. Pour le Festival de Cannes 2011, Piper- Heidsieck a sorti ce Champagne black Cancan dont le packaging a été designé par Jean-Paul Gaultier. Inspirations : univers du cabaret, univers du sexy et du glamour, matière latex, bas résille.
  • 16. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 16 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . En définitive, le marketeur a proposé à la cible femme, en quête d’expérience, un instant basé sur ses propres codes, son propre univers qui est propice au storytelling. En alliant les codes du vin et celui d’univers étrangers tels que la bijouterie, le parfum ou encore la haute couture, le marketing a répondu aux attentes des femmes qui étaient en quête de nouvelles expériences, de moments à partager. Mais est-ce une caractéristique propre aux femmes ou cela s’applique-il aussi aux jeunes ? Nous le verrons plus tard… En attendant, il est opportun de dresser un portrait précis de la consommatrice de vin.
  • 17. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 17 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . C. Portrait de la consommatrice contemporaine. Andrew Jefford, journaliste pour de revues anglaises telles que Decanter, estime qu’établir un portrait-robot synthétique des consommateurs de vin ne peut être une fin en soi puisqu’il est impossible de parler d’un consommateur unique. Nous rejoignons son propos mais il nous a semblé essentiel d’essayer de définir les contours de la consommatrice actuelle afin de mieux comprendre les enjeux du marketing féminin. Ainsi, il est important de préciser que le portrait de la consommatrice décomplexée que nous allons dresser est largement inspiré de l’étude Vinexpo « Les femmes et le vins » parue en 2011. Pour rappel Vinexpo est le plus grand salon professionnel au monde pour les opérateurs du secteur des vins et spiritueux. L’enquête a été réalisée auprès de 10 492 femmes majeures issues de 5 Etats ; l’Allemagne, les Etats-Unis, la Chine, le Royaume-Uni et la France. Nous dresserons un portrait synthétique composé de 5 points.  En termes de goûts, quelles sont les préférences des femmes ? Une étude a été menée par l’entreprise Vitibox en 2011 sur 250 hommes et 250 femmes. La société souhaitait lancer une box spécialement conçue pour les femmes, ainsi, elle a voulu en savoir plus sur les goûts des femmes. Le résultat a été plutôt étonnant. En effet les goûts des femmes sont vraiment proches de ceux des hommes et nous reviendrons dessus dans une prochaine partie. Tout d’abord, le vin préféré des femmes est le vin rouge, contrairement aux idées reçues. 51% des femmes préfèrent le rouge, 26,4% le blanc et 15,7% le rosé. Notons toutefois que les femmes sont quand même considérées comme un moteur de la consommation de rosé au niveau mondial. En 2009 seulement 6% estimaient préférer le vin rosé ; une augmentation de 160% en 2 ans qui s’explique par l’engouement des 18-30 ans pour cette boisson. La préférence pour vin rouge atteint des chiffres record aux Etats-Unis où 78,6% des femmes craquent pour ce nectar  A quel moment et à quelle fréquence la femme consomme-t- elle du vin ? 45% des françaises avouent consommer du vin au moins une fois par semaine mais ce qui est important de retenir c’est qu’elles privilégient la convivialité puisque 68,9% des femmes pensent que la meilleure occasion pour boire du vin est la soirée entre amis. Ce chiffre en perpétuelle augmentation montre que la femme est véritablement une
  • 18. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 18 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . consommatrice occasionnelle. Petite particularité française notable : 17,9% des femmes consomment du vin à l’apéritif, un point commun avec les jeunes qui privilégient de plus en plus ce moment.  Comment choisit-elle son vin au moment de l’achat ? En France, 70% des femmes estiment que c’est l’origine du vin qui constitue le critère de choix premier alors qu’aux USA c’est le cépage qui détermine le choix de Mesdames. Le prix n’arrive qu’en troisième position alors qu’il y a seulement 6 ans, en 2009, c’était le premier critère de choix. Notons tout de même que les jeunes filles de 18-30 ans restent très attachées au prix. Une différence générationnelle que l’on retrouve aussi à propos de la sensibilité au packaging. Les 18-30 ans y sont largement plus sensibles que les autres tranches d’âge. La femme achète plus facilement chez un caviste ou en grande surface que sur le Net. Dans tous les cas de figures la consommatrice apprécie un conseil personnalisé. En France seulement un tiers des acheteuses déclarent ne pas avoir besoin de conseil pour choisir leur vin. Selon une étude menée en 2013 pour Les Sommelières (site de vente de vin en ligne dédié aux femmes), ces dernières aiment les conseils simples, qui prennent en compte leurs goûts en matière culinaire. L’élitisme les fait fuir ; elles souhaitent des conseils avec des mots simples et bannissent le jargon trop complexe. Notons aussi que 60% des françaises aimeraient d’avantage d’informations vin dans la presse féminine. Enfin, les femmes préfèrent les recommandations de personnes de confiance aux notes accordées à un vin par les journalistes et professionnels.  Comment peut-on caractériser la consommatrice de vin contemporaine ? Bien que 70% des femmes s’avouent néophytes, elles ne se considèrent absolument pas inférieures aux hommes en ce qui concerne le vin. En France, 58% des femmes estiment connaître le vin aussi bien que les hommes. Un chiffre déjà élevé mais qui reste faible par rapport à celui de nos amies américaines qui sont 67% à affirmer connaître le vin aussi bien que leurs compagnons. En outre, petit message implicite passé à tous les hommes en quête de l’amour : 2/3 des femmes dans le monde considèrent le vin comme un élément essentiel lors d’un rendez-vous amoureux.
  • 19. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 19 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . D’autre part, 80% des femmes consomment du vin parce qu’elles aiment son goût et seulement 3,6% des consommatrices estiment que c’est une boisson masculine. Nous pouvons alors considérer que la femme contemporaine est une consommatrice de vin totalement décomplexée, moderne et libérée des tabous historiques. Pour autant, il y a une petite faille dans cette confiance en soi ; Vitibox, avant le lancement de « My vitibox, mariage du palais », avait constaté que moins d’un tiers des consommatrices savaient associer leurs mets et leurs vins mais que 80% d’entre elles aimeraient apprendre à le faire.  Comment faut-il s’adresser à cette consommatrice assumée ? Il est difficile de répondre à cette question puisqu’il n’y a pas de science exacte en la matière. Les études ont d’ailleurs montré que les femmes ne souhaitent pas être traitées différemment et qu’elles adhèrent largement aux codes masculins. En outre, Adrienne Stillman, de l’agence Benson Marketing Group, nous a précisé que sur Internet et les réseaux sociaux, la stratégie pour entrer en interaction avec le consommateur était la même, que la cible soit un homme ou une femme. C’est le message qui va différer. Pour autant certaines spécificités de la cible féminine méritent d’être mises en exergue. La femme a besoin d’être rassurée, notamment à travers les mentions de l’étiquette auxquelles elle porte beaucoup d’attention. Les femmes, qui sont à la recherche d’authenticité, vont être facilement rassurées par un nom de château, de propriétaire ou par une idée d’association avec un plat. Il faut savoir qu’une femme achète toujours une bouteille avec l’idée d’accompagner une collation. Attention tout de même, comme nous l’a indiqué Jeremy Benson, les femmes veulent se sentir informées sans condescendance ! Galatée Faivre, fondatrice de l’agence I.d Vin, s’appuie sur trois principes clés pour construire les campagnes de ses clients qui souhaitent s’adresser aux femmes : - La globalité : la femme est un ensemble de différentes vies (la mère, l’épouse, la femme active, la sportive, la fashionista, etc.). Pour s’adresser aux femmes, il faut prendre en compte cette réalité et cibler une de ces « vies », un de ces aspects. - La perfection : la cible féminine est plus exigeante que la cible masculine. Pour elle chaque détail à son importance. L’esthétique du produit occupe une place importante mais l’origine et le respect de l’environnement sont des critères qui compte aussi aux yeux des femmes.
  • 20. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 20 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . - Le transgénérationel : les femmes présentent la caractéristique de beaucoup communiquer transversalement, de génération en génération. Ainsi s’adresser à une mère c’est aussi s’adresser à sa fille. En outre, la femme occupe le rôle de relais entre deux générations ; très souvent c’est la femme qui éduque les enfants à l’art de recevoir, donc implicitement à la culture du vin. Enfin, Une étude Kantar Media « Portraits de femmes » réalisées en juillet 2013 a montré que les femmes ont su s’adapter à la révolution 2.0 ; elles ont assimilé les réseaux sociaux et elles se sont saisies de la tendance. D’après Adrienne Stillman, spécialiste des réseaux sociaux, les femmes sont actives sur toutes les plateformes et prennent possession de certains réseaux sociaux, Pinterest en est l’exemple parfait. Aujourd’hui, les femmes attendent d’une marque qu’elle communique directement avec elles. La clé du succès pour les touchers ? Raconter l’histoire du vignoble ou de la marque en investissant les réseaux sociaux pour rentrer en conversation avec ces consommatrices à la recherche d’une relations privilégiée et directe. En faisant ce tour d’horizon du marketing féminin dans le milieu vinicole on peut avoir peur que ce ne soit qu’une tendance mise en place par les marketeurs qui va finir par s’épuiser petit à petit. En outre, en observant les caractéristiques de la consommatrice, on pourrait trouver des points communs avec d’autres cibles telles que les jeunes. Ce qui nous amène à nous demander si ce n’est pas le moment d’abandonner ce marketing féminin au profit d’un autre type de marketing et une autre cible. Et si le marketing féminin n'était plus en phase avec la réalité du marché vinicole ? Limites et pertinence de cette cible dans la société actuelle, voilà le contenu de la suite de notre développement.
  • 21. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 21 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . I. Hypothèse 1 | Abandonner la segmentation de genre… Après avoir interviewé Jeremy Benson, PDG de l’agence de communication et marketing spécialisée vins et spiritueux Benson Marketing Group, ainsi qu’Adrienne Stillman, employée de cette même agence et spécialisée en stratégie des marques et community management, nous avons pu déterminer deux limites principales à la cible féminine telle qu’elle est aujourd’hui exploitée par les marketeurs. Tout d’abord, il est temps de mettre fin aux clichés qui collent à la peau de ces consommatrices (A). Puis, nous avons constaté que les nouvelles tendances sur le marché du vin sont des tendances mixtes (B). A. Mettre fin aux clichés. Nous montrerons en exergue les écueils que comporte le marketing féminin (a), autrement les dangers liés à l’utilisation de ce type de marketing. Puis nous démontrerons que la segmentation entre homme et femme n’est pas des plus pertinentes (b), au moins dans le secteur vinicole. a) Les écueils du marketing féminin. Comme le soulève Jeremy Benson, le principal danger avec le marketing féminin c’est de tomber dans des clichés sociétaux idiots et de s’attirer les foudres de consommatrices et/ou féministes vexés. C’est le danger majeur du « marketing to women », que ce soit dans le secteur du vin ou dans n’importe quel autre domaine d’ailleurs. A titre d’exemple, le célèbre distributeur de vin Nicolas avait, en 2006 fait un flop en publiant un magazine nommé « Pour Elles » qui était censé refléter la perception des femmes. Le magazine rassemblait tous les clichés possibles et imaginables ; couverture rose fuchsia avec une photo d’une chaussure dont le talon est un pied en verre à vin, titres racoleurs et psycho-test « Pour quel vin êtes-vous faites ? ». Autant dire que le distributeur n’a pas rencontré un franc succès avec ce magazine. En fait, le problème majeur réside dans le fait que la cible féminine est perçue comme un groupe homogène dont les membres ont toutes les mêmes goûts. Les femmes sont girly et/ou fashionistas et recherchent des vins au goût accessible. Alors qu’en matière de vin, les préférences se fondent majoritairement sur la subjectivité de chaque dégustatrice. Chaque
  • 22. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 22 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . individu apprécie (ou pas) un vin en fonction de sa propre sensibilité et de son expérience antérieure. Chaque vin est unique, chaque individu est unique. Le vin n’est pas masculin, ni féminin, il est humain. Sandra Painbéni est d’accord pour affirmer « qu’il n’y a pas lieu d’opérer une distinction, par une stratégie de segmentation et ciblage par le sexe ». Ainsi, le risque évoqué par l’enseignante en marketing réside dans le fait que le marketing vienne à déformer l’essence même du vin français et que l’on se retrouve avec des vins Hello Kitty (comme cela a été le cas sur le marché asiatique en 2013) dans nos étals. D’autre part, on commence à constater une certaine récurrence des codes utilisés pour les offres lancées sur le marché français, et cela tant au niveau des particularités organoleptiques qu’au niveau des packagings. Si l’on voulait faire un peu de sarcasme on pourrait dire que la cible féminine semble lassée de voir du rose et de boire du rosé au goût fruité. Il est temps de se renouveler et peut être même d’arrêter de faire une distinction entre hommes et femmes ! b) Hommes/femmes : il y a-t-il vraiment une différence ? Bien évidement il y existe une différence biologique incontestable entre femmes et hommes ; pour la même consommation d’alcool, une femme aura généralement un pic d’alcoolémie plus élevé et mettra plus longtemps à l’éliminer qu’un homme. Mais malgré ces différences entre chromosomes X et Y, il semblerait que des études ait démontré qu’il n’y avait nul besoin de créer des produits à destination unique des femmes. Il s’avère que la proportion de consommateurs réguliers est beaucoup plus importante chez les hommes que chez les femmes ; effectivement les femmes ont d’avantage tendance à privilégier l’aspect convivial du vin et elles apparaissent comme plus sensibles aux risques liés à l’alcool. Pour autant, force est de constater que les habitudes des consommations des genres se sont rapprochées. Sous l’influence du nouveau monde, il y a eu une véritable mutation du mode de consommation du vin et aujourd’hui il n’y a plus vraiment de modèle féminin ou masculin. Avant les hommes avaient une consommation dite « automatique », naturelle, quotidienne dans le registre du besoin et non pas du plaisir. Alors que de nos jours femmes et hommes boivent le vin pour (presque toutes) les mêmes occasions. Boire du vin fait désormais écho à la notion de loisir ; c’est une consommation occasionnelle, consciente, écologique et hédoniste qui s’applique à tout le monde, homme comme femme.
  • 23. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 23 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Revenons sur l’étude menée par Vitibox en 2011 ; elle avait montré qu’en termes de goût les hommes et les femmes sont égaux. Les femmes préfèrent le vin rouge, tout comme les hommes, et elles sont 68% à préférer les vins aux tanins souples, comme une grosse majorité des consommateurs hommes. Ainsi il semblerait que la distinction hommes/femmes n’est pas si pertinente. Les nouvelles tendances vinicoles vont-elles dans le sens de cette dernière hypothèse ?
  • 24. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 24 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . B. Des tendances de consommations qui n’ont pas de sexe. A travers l’étude des nouvelles tendances qui impactent le marché du vin, nous déterminerons un lifestyle contemporain où la gastronomie est prépondérante (a), puis nous ferons un rapide zoom sur l’apparition de nouveaux types de packagings (b). a) Un lifestyle où la gastronomie est reine. Depuis le début des années 2000 le model sociétal a évolué, la crise économique a eu des conséquences sur nos modes de vie et les attentes du consommateur s’en sont retrouvées modifiées. Le vin n’a pas échappé à la règle puisque les buveurs ont de nouvelles aspirations. Dans les marchés mûrs, comme celui de la France, la consommation de vin par tête est en baisse mais cela ne signifie pas que le consommateur se désintéresse du vin, loin de là. Au contraire. On veut consommer moins mais mieux. Une grande majorité des français veulent des produits meilleurs pour la santé, fabriqués localement dans le respect de l’environnement. La consommation citoyenne et responsable est de rigueur, et cela s’applique de manière générale mais aussi à la consommation du vin. Ce nouveau mode de vie, ou lifestyle, sous- entend que la qualité est privilégiée à la quantité. Le consommateur français est même prêt à acheter des vins plus chers ; entre 2008 et 2014 son budget d’achat a augmenté de 25,9 euros. Notons que cette tendance s’applique à l’ensemble de la population ; elle ne se limite pas aux femmes, les hommes aussi font de plus en plus attention à ce qu’ils consomment. En outre, l’alimentation est l’un des postes les plus importants dans ce nouveau mode de vie. L’alimentation est avant tout culturelle, notamment en France où le moment du repas est sacré. Le fooding, un mouvement dont le nom a été inventé en 1999, a apporté une vision différente de la cuisine en s’affranchissant des traditions. En 15 ans la gastronomie s’est démocratisée et c’est aujourd’hui le sujet de conversation préféré des français. Cette révolution n’a pas touché que la France puisque la tendance s’est développée à l’échelle mondiale. Comme nous le suggère Adrienne Stillman, il n’y a qu’à jeter un coup d’œil sur le fameux réseau social de photos Instagram pour se rendre compte de l’ampleur qu’a pris la gastronomie dans nos vies. 1 300 000 résultats pour le #PornFood ! Mais dans quelles mesures cette tendance a-t-elle eu un impact sur le marché du vin ? La démocratisation de la gastronomie a eu comme corolaire l’engouement pour les accords met/vin. Aujourd’hui gastronomie et vin sont indissociables. J’en veux pour preuve le nombre
  • 25. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 25 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . de blogs, de magazines, d’évènements professionnels ou grand public qui lient gastronomie et vin. Les cours d’œnologie procurent des conseils pour choisir son vin en fonction de ce qu’il y a dans son assiette, les offres œnotouristiques autour de la gastronomie se multiplient, les conseils de consommation d’un vin donnent la plupart du temps des idées de recettes…, bref la gastronomie est une tendance très impactante sur le marché du vin ce qui fait qu’aujourd’hui 64% des consommateurs déclarent choisir leur vin en fonction de ce qu’ils vont manger. Une tendance de l’accord met/vin qui concerne autant les hommes que les femmes et qui nous éloigne une fois de plus de la tendance du marketing féminin. b) Les petits packagings entrent en scène. Une nouvelle tendance risque de conquérir le cœur des français dans les années, voire les mois à venir ; une tendance qui a déjà conquis les consommateurs américains, femmes et hommes. Nous parlons ici du verre de vin prêt-à-boire. En d’autres termes, nous faisons référence à du vin conditionné dans des verres en plastique scellé de 18,7 centilitres. En France quelques châteaux de côte de Provence et de Bordeaux se sont lancés en 2010 sans grand succès mais nous pourrions imaginer que le marché va se développé à l’avenir au
  • 26. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 26 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . vu du succès remporté par ce verre Outre-Atlantique. D’après le Figaro, aux Etats-Unis le marché de ce petit packaging se développe plus vite que celui de la bouteille de 75cl. C’est une nouvelle façon de boire son vin ; à la pause de midi au bureau. En outre, ce verre est mieux perçu que la cannette qui a une image plutôt cheap. En mars 2015 le verre était déjà distribué dans 1200 points de vente aux Etats-Unis et le marché pesait 253,6 millions de dollars aux Etats-Unis. L’article du Figaro sur lequel nous nous sommes appuyés précise même que ce type de conditionnement commence à envahir le marché anglais alors nous aurions de bonne raison de penser que les français ne font pas tarder à se laisser séduire. Nous tenterons de le vérifier à travers notre étude terrain dans la seconde partie de notre réflexion.
  • 27. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 27 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . II. Hypothèse 2 | …Au profit d’une segmentation générationnelle. Comme nous venons de le démontrer, il semblerait que la cible femme ait perdu de sa pertinence et que le moment est venu de s’adresser à une autre cible. Ainsi, en s’appuyant sur un corpus documentaire étoffé ainsi que sur les réponses apportées par Jeremy Benson et Adrienne Stillman, nous supposerons qu’il est aujourd’hui plus pertinent d’adopter un marketing mixte qui répondra aux attentes des jeunes consommateurs qui constituent la génération Y. Nous dresserons le portrait type de ce consommateur (A) qui se caractérise par sa soif d’apprendre (B). A. Portrait d’un jeune consommateur… Il nous faudra d’abord définir la notion de génération Y (a) pour ensuite étudier les comportements de consommation des membres de cette génération face au vin (b). a) Génération Y, quésaco ? Un nombre incalculable d’études et de théories relatives à la génération Y ont été publiées. Il a alors été difficile de définir brièvement la génération Y et ses spécificités. Voici ce que nous devons en retenir pour notre étude. Les sociologues désignent par « Génération Y » l’ensemble des individus nés entre 1980 et le milieu des années 1990. Ils parlent d’une génération ultra-connectée à laquelle ils attribuent de multiples dénominations ; Yers, GenY, Millenials, Digital Natives ou encore Net Generation. Les sociologues mettent l’accent sur le fait que les membres de la génération Y, dont je fais partie intégrante, ont grandi à l’ère où l’ordinateur personnel s’est développé ainsi que le jeu vidéo et l’Internet tel qu’on les connaît et utilise aujourd’hui. D’un point de vue purement sociologique, la génération Y peut être considérée comme une génération en pleine construction identitaire. Les jeunes de cette génération tendent à détruire les modèles et codes établis par les générations précédentes via des méthodes dites « disruptives ». De ce point de vue, les sociologues sont parfois amenés à comparer génération Y et génération mai 68 puisqu’elles présentent toutes deux la caractéristique d’avoir une volonté de changer et d’envisager de nouvelles perspectives, notamment sociales.
  • 28. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 28 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Le jeune de la génération Y préférera réfléchir à de nouvelles alternatives plutôt que de suivre « bêtement » les codes et règles préétablis. Cette tendance à tout remettre en cause se traduit dans la manière de consommer de cette génération ainsi que dans sa sensibilité au marketing. Les consommateurs de la génération Y sont très attachés à la notion de transparence ; les marques doivent montrer patte blanche pour gagner la confiance des Yers. Les publicitaires, forcés de gagner la confiance de ces consommateurs, ont dû repenser leurs méthodes de communication puisque les valeurs de la génération Y ne sont absolument plus en phase avec les méthodes publicitaires dites classiques. Les millénials ont largement conscience du pouvoir qu’ils ont face aux marques et rejettent le marketing dit « de masse ». Indirectement c’est cette nouvelle génération qui façonne les marques contemporaines. Logiquement de nouvelles formes de marketing ont vu le jour, on parle notamment de « l’opt’in », théorisé par Seth Godin, ce type de marketing repose sur le fait qu’il faille demander l’autorisation au consommateur avant de s’adresser à lui. Les jeunes refusent toutes sortes de marketing intrusif, ainsi le « permission marketing » a pour objectif premier de créer une relation d’échange et d’interactivité entre la marque et le consommateur, le plus souvent à travers Internet et les réseaux sociaux. Ce qui nous amène à préciser que les médias traditionnels sont en perte de vitesse en raison de leur non-pertinence aux yeux des Millénials. Selon les données d’une étude publiée en juin 2015 par Kantar Media, les seuls budgets publicitaires en augmentation sur le premier semestre 2015, sont ceux consacrés aux médias sociaux (+7% en 6mois) et à la télévision (seulement +3%). Les budgets consacrés aux médias dits « traditionnels » tels que la presse, la radio, l’affiche et le cinéma sont en perdition. Un phénomène qui s’explique notamment par le fait que ces médias traditionnels s’adressent à une cible trop large et impersonnelle. Cette génération aux attentes nouvelles a modifié le paysage du marketing et notre manière de consommer. Pour autant, nous pouvons nous demander si c’est le cas dans le milieu du vin. Les jeunes consomment-ils du vin, et de quelle manière ? C’est une question qu’il faut se poser avant de pouvoir s’adresser à cette cible.
  • 29. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 29 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . b) La génération Y et le vin. Si l’on s’en tient à de tristes préjugés pessimistes nous pourrions penser que les jeunes de la génération Y ne sont adeptes que d’alcools forts et de bières. Pour autant, plusieurs études ont démontré que les 18-35 ans s’intéressent fortement au milieu du vin et que leurs consommation n’est pas celle que l’on imagine au premier abord. Bien sûr, le « binge drinking » (consommation excessive de grandes quantités d’alcools sur un court laps de temps dans le but d’atteindre un état d’ébriété très rapidement) est encore un fléau qui touche nos sociétés occidentales, notamment au Royaume-Uni. Pour autant, depuis quelques années, les jeunes se montrent de plus en plus curieux et s’intéressent à la dégustation de ce nectar qu’est le vin. Ils ont même une certaine culture relative à cet univers, notamment à travers la connaissance de cépages et d’appellations. Marie- Paule Casanova, qui gère les relations publiques du célèbre salon des vins des Vignerons Indépendants de France estime que depuis environ 10 ans, 35% des visiteurs sont des jeunes qui ont entre 18 et 35 ans. Dans une interview pour Le Point, elle précise que ce sont des jeunes « installés » qui ont en moyenne 25 ans, qui possèdent un travail, un appartement et un(e) concubin(e). Ils se rendent sur le salon essentiellement pour s’informer, être en contact avec les vignerons et récolter des informations relatives au travail de la vigne, aux régions viticoles et aux méthodes de vinification. Bien sûr, ce ne sont pas les jeunes qui achètent le plus mais il ne faut pas négliger leur pouvoir d’achat ; les jeunes consacrent un budget très important aux sorties et boissons. Aujourd’hui 81% des jeunes entre 18 et 35 ans consomment du vin, une moyenne supérieure à la moyenne européenne. Qu’en est-il de la différence homme/ femme ? Notons que les filles s’alcoolisent de plus en plus mais sortent plus précocement des « cycles de consommation excessive » qui prennent place à l’adolescence. En outre, il ressort que les filles ont plus facilement un ressentiment négatif que les garçons après avoir été dans un état d’ébriété. Ce qui est important de souligner pour notre étude, c’est le fait que l’écart homme/femme (en termes de consommation) chez les jeunes diminue progressivement et pourrait être en voie de disparaître définitivement. Cela nous conforte largement dans l’idée que la distinction homme/femme est de moins en moins pertinente. D’autre part, nous pouvons noter une évolution récente dans la manière de consommer des jeunes. Aujourd’hui les jeunes qui consomment du vin sont des consommateurs dits occasionnels qui préfère garder le vin pour les grandes occasions. Bien que le repas soit
  • 30. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 30 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . encore considéré comme le moment privilégié pour ouvrir une bouteille de vin, fait nouveau, les jeunes aiment consommer du vin à l’apéritif. L’apéritif représente 15% de leur consommation de vin alors que cela ne représente que 5% de la consommation des plus de 65 ans. La consommation des jeunes est moins régulière mais plus conviviale. L’enquête INRA de 2000 a montré que le nombre de consommateurs réguliers dépasse celui de consommateurs occasionnels à partir de la tranche d’âge 40 ans et +. Qu’en est-il outre atlantique, chez les Millennials étasuniens ? Précisions qu’ils représentent un marché tout simplement gigantesque puisqu’ils sont plus de 77 millions. Ce qu’ils recherchent ? Avant tout des vins à un prix abordable, 10 dollars ou moins. Pour autant ces jeunes veulent des vins de qualité qu’ils achètent en supermarchés. Les américains ne semblent pas être des connaisseurs d’appellations et cela ne semble pas influencer leur choix. Ce qu’ils aiment et qui marque les tendances actuellement ce sont les vins aux arômes de fruits et les vins effervescents. Cette génération de jeunes américains semble être en attente d’une éducation au vin, un phénomène aussi applicable aux consommateurs français comme nous le verrons plus tard. Pour autant les américains ne sont pas prêts à faire beaucoup d’efforts pour avoir accès à cet apprentissage. C’est aux marketeurs de trouver des solutions simples et efficaces pour éduquer à la consommation de vin. Dans tous les cas, la génération Y de la démographie américaine promet de beaux jours au marché du vin, et Jeremy Benson nous l’a confirmé. D’après lui, rien que par sa taille cette cible est une véritable promesse. Revenons en France… La consommation de vin chez les jeunes concerne tous les milieux sociaux à partir du moment où l’individu rentre dans la vie active. La culture du vin ne semble pas être réservée aux personnes issues de milieux aisés. Pourtant derrière le vin, ainsi que tous les autres alcools d’ailleurs, se cache une notion de représentation sociale qui pourrait se résumer par l’adage « Dis moi ce que tu bois, je te dirais qui tu es ». Aux yeux des jeunes le vin est une boisson qui marque le passage à l’âge adulte, véritable symbole d’émancipation et de maturité. Ne vous méprenez pas, le vin n’est plus synonyme de richesse et de réussite dans l’esprit des jeunes. Le vin a un aspect valorisant qui procure aux jeunes le sentiment d’être raffiné, cultivé et hédoniste. Un désir que le marketeur doit s’approprier afin d’adapter son univers de marque. C’est ce qu’a fait la célèbre marque de Champagne française Moët & Chandon pour conquérir le cœur des millénials aux Etats Unis (une campagne réussie que j’aurai plaisir a exposé lors de ma soutenance orale pour illustrer mon
  • 31. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 31 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . propos). Bien sûr, la culture du vin chez les jeunes varie en fonction d’où ils vivent. L’Histoire, les paysages, l’art de la dégustation et la gastronomie constitue le « socle universel » de la culture vinicole. En France et Belgique par exemple, le vin conserve cette image élitiste et rustique alors que les jeunes américains, eux, ne retiennent que l’aspect classe et sophistiqué. Notons aussi que le vin est relié à des aspirations générationnelles beaucoup plus larges, telles que le retour au naturel, la modernité, le design, le néo traditionnel ou encore le raffinement rustique. Des aspirations que l’on qualifierait de « bobos » dans le langage courant. La représentation sociale n’est donc pas le seul argument dont le marketeur peut arguer pour conquérir cette nouvelle génération en quête de transparence. Le vin possède des atouts indéniables ; les jeunes considèrent que c’est un alcool plus sain que la bière ou les alcools forts. En d’autres termes, le vin a une image de produit bienfaisant pour notre santé et les Yers considèrent que ce nectar doit être consommé de manière raisonnable pour être en accord avec un mode vie sain et une alimentation saine. Enfin, last but not least, le vin a une image tendance aux yeux des jeunes. Selon le baromètre IFOP de Vin & Société, une étude parue en 2014, 37% des 18 – 24 ans estiment que le vin est une boisson tendance qui constitue un véritable levier pour construire leur avenir. L’étude a d’ailleurs montré que plus les interviewés sont jeunes, plus ils adhèrent à cette idée. Alors, finalement, les « vieux » ringardiseraient-ils le vin ? Il faut bien avouer que les jeunes de la « génération loi Evin » sont, eux aussi, victimes de préjugés tenaces. Pour eux, le vin doit rester avant tout un produit traditionnel et culturel. Par exemple, les français de moins de 35 ans semblent rejeter toute tentative de modernisation qui renvoie à une quelconque image industrielle. Les étiquettes colorées n’ont aucun impact sur cette catégorie de consommateur. Alors il nous faudra trouver d’autres méthodes pour rajeunir l’image du vin sans pour autant toucher à l’essence même du produit. Le vin doit rester authentique, c’est le marketing et la communication qui doit évoluer pour séduire cette génération. Les marketeurs doivent prendre conscience que le premier frein à la consommation des jeunes reste le prix et qu’après vient le frein lié à l’aspect élitiste du vin (vocabulaire snob et pompeux). Enfin, le troisième frein correspond à la difficulté que les jeunes ont à choisir leur vin, puis à le déguster dans les règles de l’art. D’où ce besoin d’être éduqué…
  • 32. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 32 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . B. … Qui a soif d’apprendre. Nous venons de voir que les jeunes sont ouverts à la consommation de vin, qu’ils s’y intéressent mais qu’ils restent néanmoins un peu « perdus » face à cet univers spécifique qui s’est longtemps voulu élitiste. Ainsi, nous supposerons que pour conquérir les Yers il faut tout d’abord les éduquer (a), ce qui semble être facilité par le fait que cette génération est enclin à l’usage des nouvelles technologies d’information et de communication (b). a) Une consommation qui passe par l’apprentissage. Le baromètre 2014 de l’agence SoWine, un baromètre qui décrit chaque année le rapport des français au vin, faisait remarquer que 67% des jeunes s’avouaient néophytes (Un chiffre énorme qui fait échos aux 70% des femmes se considérant comme novices en la matière). Pour autant l’une des valeurs fondatrice de cette génération correspond à ce que l’on pourrait appeler la quête de sens. Cette génération qui remet tout en cause est en quête de tradition, de vérité et d’authenticité. Il semblerait que les jeunes soient plus curieux que leurs aînés ; ils s’orienteraient plus facilement vers une bouteille qu’ils ne connaissent pas et délaisseraient les étiquettes célèbres. Les nouveaux consommateurs sont en quête de plaisir, de sensations et de découverte mais il faut bien l’avouer : ils n’y connaissent rien et auraient bien besoin de leçons. 77% estiment qu’il est difficile de choisir son vin. Ainsi la sphère vin, composée de producteurs, de marketeurs, de cavistes, de journalistes spécialisés, doit accompagner ce consommateur qui monte en puissance et qui assurera la santé de ce marché dans les décennies à venir. Parler à ces jeunes c’est parler aux seniors de demain. En effet, le consommateur emporte son comportement en vieillissant. Il a été démontré qu’il n’y a pas de changement notable des achats lorsque le consommateur arrive à la retraite. Il faut créer des repères durables. Les initiatives allant dans ce sens-là commencent à fleurir et il semblerait que ce soit la bonne stratégie. Par exemple, la bloggeuse Sarah Kadhiri qui vient de mettre en place le blog Wine With Me, semble vouloir partager sa passion avec ces jeunes en quête de savoir. Tout d’abord elle a fait le choix de ne sélectionner que des vins de petits producteurs familiaux et locaux dont le prix de vente est inférieur à 20€, ce qui correspond au budget généralement accordé par les Yers. D’autre part, elle propose à ses visiteurs une rubrique
  • 33. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 33 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . « découverte » où chaque semaine elle publie un article qui initie l’internaute à l’art de la dégustation. Elle utilise judicieusement un vocabulaire simple et décomplexé afin d’intéresser la cible que nous venons de décrire. Les Yers n’adhèrent pas à l’image sophistiquée de la dégustation œnologique et Sarah Kadhiri l’a bien compris. D’autre part, la pédagogie sur les lieux de vente commence à se développer mais ce n’est que la genèse du processus et il faut que cela continue. L’attrait des jeunes pour cette boisson se symbolise aussi par le développement des cours et des clubs œnologiques dans les universités. La pédagogie c’est la clé de voûte du marketing ciblant la génération Y. Les jeunes sont sensibles à l’Histoire de France, la géographie, l’art et la culture qui se cachent derrière l’univers du vin. Comme le dit si bien Jean-Baptise Noé, professeur et historien de l’alimentation et du vin, « donnons à notre jeunesse la capacité de s’émouvoir de la beauté des paysages de vignes (…) permettons aux générations qui viennent, de trembler d’émotion en trempant leurs lèvres dans un vieux millésime ». Ce que sous-entend l’historien c’est que cette pédagogie ne peut pas seulement être l’œuvre des acteurs du milieu vinicole. L’Etat, et plus exactement le législateur, doit aller dans le même sens et jouer un rôle positif dans l’éducation au vin. Les lois ne doivent plus associer le vin à une image négative de drogue mais elles doivent apprendre à boire avec éducation et modération. Il y a encore beaucoup de travail à ce niveau mais là n’est pas notre préoccupation pour notre étude. Nous devons plutôt nous demander quels sont les moyens à utiliser pour éduquer ces jeunes. b) Une génération encline à l’usage des nouvelles technologies d’information et communication (NTIC) La génération Y qui est en quête de savoirs et de découvertes s’est appropriée un nouveau rapport à la technologie qui facilite cette recherche d’informations. La catégorie des 15-24 ans a fait d’Internet un véritable outil social. D’après l’étude Lightspeed GMI, les jeunes de la génération Y consultent Facebook et Twitter directement après s’être réveillés – c’est la première chose qu’ils font avant même de déjeuner. Cette culture numérique s’explique notamment par le fait que les jeunes vivent constamment avec les outils numériques ; tablettes, smartphones et ordinateurs ne sont jamais éteints et restent toujours à proximité. D’autre part, on remarque que les jeunes français sont actifs dans leur démarche de recherche d’informations (à l’inverse des consommateurs américains qui ne sont pas prêts à
  • 34. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 34 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . faire beaucoup d’efforts pour en savoir plus sur le vin). La génération Y connaît les outils, maîtrise parfaitement Internet et les réseaux sociaux. Le Yer va personnaliser son usage des outils proposés par les NTIC. Nous pouvons parler de conso-acteur. Enfin, les chiffres montrent que les « Twittos » s’intéressent beaucoup à l’art et la culture. Une étude qui comparait les utilisateurs réguliers de Twitter aux non-utilisateurs indiquait que 43% des « Twittos » étaient sensibles à ce domaine contre seulement 16% des autres. Un chiffre que les marketeurs du vin devraient prendre en considération puisque on peut estimer que le vin fait partie intégrante de la culture française. Ainsi, cette caractéristique de la génération Y semble être en parfaite cohérence avec les aspirations de ces jeunes consommateurs de vins : les jeunes veulent de l’information et ils savent comment l’obtenir. La pièce manquante du puzzle est la fourniture de ces informations, de cette pédagogie. C’est ici que réside le travail des marketeurs vinicoles. Pour résumer cette seconde hypothèse en quelques mots, nous pouvons dire que la génération Y est une génération à part entière qui demande un traitement spécifique. Cela ne fait pas de doute. Mais la question à laquelle doit répondre notre étude est la suivante : est-il vraiment d’avantage pertinent de s’adresser à cette génération plutôt qu’aux femmes ? Si oui, quelle est la meilleure méthode pour s’adresser à ces jeunes aux aspirations nouvelles ?
  • 35. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 35 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Partie II – Etude de terrain et préconisations | Les petits producteurs à l’assaut de la génération Y. Afin de confronter nos hypothèses à la réalité du marché et aux réelles attentes des consommateurs nous avons fait le choix de nous adresser directement à ces derniers. Nous avons alors réalisé une étude terrain qui s’est traduit par un sondage. Ainsi nous vous présenterons le contexte et les résultats de cette étude (I) pour ensuite conclure avec nos préconisations déclinées en trois temps (II). I. Contexte et résultats de notre étude terrain. Pour mieux comprendre les résultats de notre étude et lui donner une certaine crédibilité, il est nécessaire de vous la présenter en quelques mots (A). Puis nous vous présenterons les chiffres clés de cette étude (B) pour ensuite confirmer nos hypothèses à l’appui des résultats (C). A. Brève présentation de l’étude terrain. L’étude est un questionnaire composé de 34 questions dont 12 qui sont réservés aux interrogés ayant moins de 30ans, afin de questionner précisément les membres de la génération Y. L’étude a été soumise aux sondés via une Google form posté via mes réseaux sociaux privés (afin que le résultat ne soient pas faussé par mes contacts professionnels qui sont pour la plupart spécialisés dans le vin). 85 personnes ont répondu à ce questionnaire ; un tiers étaient des hommes. D’autre part, 15% des sondés avaient plus de 30 ans tandis que 85% avaient entre 18 et 30ans. Tous les sondés sont français, ainsi il nous faudra nuancer nos propos et limiter nos préconisations au marché français puisque ce qui est vrai en France n’est pas forcément vrai dans un autre pays ou sur un autre continent. Les sondés ont répondu anonymement et après analyse des réponses nous pouvons affirmer que les hypothèses que nous avions émises précédemment étaient fondées.
  • 36. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 36 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . B. Les chiffres significatifs de l’étude. Voici un bref résumé des résultats de notre étude. Nous avons sélectionné les chiffres qui nous paraissent essentiels et faisant écho aux affirmations contenues par nos hypothèses. Les consommateurs actuels sont effectivement des consommateurs qui privilégient la qualité à la quantité puisque 81% préfèrent consommer un vin de grande qualité occasionnellement, plutôt qu’un vin de qualité moyenne plus régulièrement. En outre, les consommateurs associent sans conteste le vin à la gastronomie puisque 70% affirment considérer comme inenvisageable de déguster un repas gastronomique sans vin. Presqu’un tiers aimeraient que des accords met/vin figurent sur toutes les étiquettes et 50% avouent y jeter un coup d’œil. Notons qu’ici il n’y aucun différence entre hommes et femmes ; les genres semblent parfaitement égaux en la matière. Notons toutefois que 66% des interrogés préfèrent se rendre à un cours d’œnologie classique plutôt qu’à un cours d’œnologie où l’on peut apprendre à accorder met et vin. Cela voudrait donc dire que, par-dessus tout, le consommateur est curieux de découvrir le vin à proprement parler. Comme supposé, le consommateur est un néophyte curieux. 70% déclarent connaître que moyennement les vins et apprécier les conseils d’un professionnel tandis que 20% déclarent ne rien y connaître en vin mais voudraient en savoir plus en la matière. L’information est donc de rigueur. En outre, 65% choisissent un vin qu’ils connaissent déjà pour être sûr de ne pas être déçu : le manque de connaissance crée une certaine peur chez le consommateur qui ne veut s’aventurer vers quelque chose d’inconnu. 50% estiment qu’il n’y a pas besoin d’occasion particulière pour déguster du vin : ce qui montre que le consommateur, bien qu’il consomme à intervalles espacés, est ouvert à des instants de consommation nouveau, auxquels on ne pense pas forcément. La fête entre amis, les anniversaires ne sont pas les seuls moments où le vin est consommé. Il faut que le marketeur pense à ces instants de consommation. C’est d’ailleurs la stratégie à adopter pour développer les packagings tels que le verre de vin prêt-à-consommer. Bien qu’un tiers des interrogés affirment être certains de ne jamais acheter ce type de conditionnement, 50% d’entre eux sont indécis et sont des cibles à conquérir.
  • 37. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 37 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . C. Nos hypothèses confirmées. Les chiffres tirés de notre étude terrain viennent seulement confortés ceux sur lesquels s’appuyaient nos hypothèses. Effectivement, la cible féminine n’est plus pertinente de nos jours (a). Toutefois l’étude nous dévoile des éléments que nous n’avions pas évoqués jusque là (b). a. Bye-bye la segmentation de genre. S’il y a bien un chiffre que l’on doit retenir de cette étude, un chiffre qui nous permet de répondre sans conteste à notre problématique, c’est celui-ci : 100% ! Oui, 100% des interrogés hommes se déclarent prêts à acheter une bouteille marketée à des femmes. Ce qui démontre le manque de pertinence de la segmentation de genre. Aujourd’hui, d’après les hommes interrogés, ce qui compte c’est ce qu’il y a dans la bouteille, peu importent les préjugés qui peuvent émergés de l’étiquette. Les consommateurs actuels sont avertis des méthodes de marketing et ne se laissent plus influencer par le gender marketing aujourd’hui considéré, au moins sur le marché du vin, comme réducteur et dépassé. Si l’on se place du côté des femmes, nous nous apercevons qu’une étiquette qui leur est destinée n’est pas efficace puisque 71% d’entre elles affirment y faire attention mais cela ne détermine en rien leur choix. Attention ! Ici nous préférons nuancer notre propos. Effectivement, ces affirmations s’appliquent au marché français car les consommateurs français sont habitués à des packagings féminins que nous pourrions qualifier de « raisonnables ». Ainsi, les hommes affirment sans détour pouvoir acheter une bouteille aux couleurs féminines. Pour autant, aux Etats-Unis, où les marketeurs n’ont guère de limites, il arrive que des bouteilles soient marketées pour les femmes et présentent des codes ou des noms extrêmement girly, comme la cuvée « Skinny Girl ». Or, dans ce cas-là, les études ont montré que la cible masculine n’achètera absolument pas la bouteille. Nous pouvons alors conclure qu’en France, les hommes sont insensibles au marketing féminin parce que ce dernier reste « raisonnable ». Mais nous avons un autre chiffre qui prouve que le marketing féminin n’est plus en phase avec la réalité du marché. 44% des couples déclarent avoir les mêmes goûts en termes de vin et ainsi acheter les mêmes bouteilles. Notre hypothèse est confirmée, il n’y a pas de différence notable entre hommes et femmes. D’autant plus que 22% des interrogés ont déclaré
  • 38. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 38 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . que, bien que n’ayant pas les mêmes préférences que leur conjoint, l’un des deux faisaient une concession au moment de l’achat du vin. L’achat est donc plus un achat à deux qu’un achat « égoïste » où la femme pensera qu’à ses propres goûts et à ses envies. Bien sûr, il ne faut pas oublier que grand nombre de consommateurs sont célibataires mais il est quand même important d’avoir cette précision sur les habitudes de consommations en couple. Ces chiffres sont des éléments de réponses que nous considérons essentiels. Ils nous permettent d’affirmer que le marketing féminin est dépassé. Combinés aux chiffres avancés pour illustrer nos hypothèses, les résultats de notre étude montrent que les femmes ont les mêmes goûts que les hommes. Il n’y a plus de doutes à avoir, à nos yeux le marketing féminin ne répond plus aux attentes du marché et la segmentation de genre doit être abandonnée au profit d’une segmentation générationnelle. D’autant plus que notre étude nous a apporté des informations supplémentaires relatives aux jeunes de la génération Y.
  • 39. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 39 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . b. Segmentation générationnelle : ce qu’il faut en retenir. Tout d’abord, bonne nouvelle ! 85% des jeunes de plus de 18 ans interrogés estiment qu’ils seront des amateurs de vin dans les années à venir. En outre, 67% adhèrent au lifestyle « consommer moins mais mieux », ce qui nous donne des pistes non négligeables pour adapter la communication qui leur est destinée. Les chiffres de l’étude confirment les tendances évoquées : les jeunes ont vraiment envie d’en savoir plus sur le vin. 93% se considèrent comme curieux lorsqu’il s’agit de vin et 65% affirment être à la recherche de nouvelles expériences dans le domaine du vin. Toutefois, notre étude révèle des aspects que nous n’avions pas évoqués et qui sont très intéressants ! Seulement 6% des interrogés se renseignent sur Internet lorsqu’ils veulent plus d’informations sur un sujet vinicole ou sur un vin, un producteur ou un cépage. 86% d’entre eux préfèrent un conseil en direct auprès d’un vigneron, un caviste ou sommelier. Un chiffre à garder en tête ! Autre fait intéressant ; 57% des jeunes affirment qu’ils ne likeraient par une page Facebook d’un domaine ou d’une marque vinicole si cela leur était proposé. Un chiffre qui nous surprend au vu de l’importance des réseaux sociaux dans la vie des jeunes de la génération Y. Enfin, il est important de noter que 80% des jeunes affirment s’être déjà rendu dans un domaine viticole et 71% des sondés accepteraient de se rendre aux porte ouvertes d’un domaine dans le but d’y acheter du vin. Ces chiffres sont très importants puisqu’ils montrent que les jeunes s’intéressent à des domaines de petites tailles et non pas seulement aux grandes marques de négoces. D’ailleurs, 50% des interrogés estiment qu’une grande marque à la notoriété mondiale aurait plus de difficultés à les séduire (d’un point de vue marketing), qu’un petit producteur local. En observant ces chiffres nous nous sommes rendus compte que les petits domaines viticoles français avaient leurs carte à jouer ; longtemps restés dans l’ombre des grandes appellations ou des grands noms de la viticulture, il est temps pour les petits domaines de prendre le train du marketing et de la communication en route pour tenter de séduire et fidéliser les jeunes de la génération Y. Nos préconisations iront dans ce sens !
  • 40. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 40 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . II. Préconisations : Domaines familiaux : 3 conseils pour attirer la génération Y. Tout au long de notre réflexion nous avons suivi un cheminement qui nous amené à conclure que la segmentation de genre n’était plus adaptée aux attentes du marché. Les acteurs du milieu vinicole doivent dorénavant préférer une segmentation générationnelle qui permettra de cibler les membres de la génération Y. Une cible qui assurera un avenir heureux pour les producteurs puisque se seront des consommateurs réguliers dont les habitudes perdureront dans le temps. Or, il s’avère que l’étude de terrain a dévoilé que les jeunes de cette génération ont une préférence pour les producteurs locaux, de petites tailles. Ainsi, il nous semble opportun de conclure notre propos en livrant des recommandations en les orientant de manière à ce qu’elles soient bénéfiques aux domaines de petite taille que nous qualifierons de domaines « familiaux ». Pour des professionnels du marketing et de la communication ces recommandations peuvent peut-être paraître simplistes mais il faut garder en tête que beaucoup de domaines viticoles sont totalement novices dans ces domaines. Souvent par manque de budget, le marketing a été mis de côté, ce qui fait qu’aujourd’hui ces domaines familiaux sont très largement en retard. Nous conseillerons alors à ces acteurs d’adopter une réelle identité de marque (A), de prendre la parole sur Internet (B) et d’ouvrir leurs portes au grand public (C). A. Adoptez une réelle identité de marque. En 20 ans beaucoup de petits producteurs ont fait des efforts en termes de qualité du vin mais ces efforts ne sont pas récompensés car ils ne sont pas, ou mal, communiqués auprès du grand public. Nombreux sont les petits domaines qui conservent une image trop traditionnelle, voire ringarde. Par conséquent ces petites structures sont « mangées » par les géants du milieu qui possèdent d’énormes budgets consacrés à l’innovation et au marketing. Il est grand temps pour les petits producteurs de se différencier sur le marché et nous pensons que cela n’est possible qu’à travers une marque ! Bien sûr nous ne parlons pas de consacrer un budget faramineux au marketing mais il faut savoir que de petites choses peuvent être réalisées pour rajeunir l’image d’un domaine et attirer une nouvelle clientèle.
  • 41. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 41 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Tout d’abord, comme toute marque, le domaine doit se doter d’une véritable identité, élément incontournable aujourd’hui, même dans le domaine du vin ! Premier travail ; établir une plateforme de marque qui sera en fait une synthèse des valeurs que souhaite dégager le producteur local. Attention ici à ne pas se perdre. Beaucoup sont ceux qui souhaitent s’attribuer une image « haut de gamme » ou « traditionnelle ». Or si ce n’est pas le cas en réalité, mieux vaut bannir ce type de messages. Le consommateur n’est pas dupe, il se rendra compte que l’image que vous renvoyez n’est pas la bonne. D’autant plus que les jeunes de la génération Y aiment avoir une relation de confiance avec les marques qu’ils consomment. Si vous leur mentez, ils ne vous considéreront plus. Votre but n’est pas de ressembler aux grands châteaux bordelais ou aux maisons champenoises. Au contraire, vous devez renvoyer une image différenciante qui attirera le jeune consommateur curieux. Par exemple, si vous êtes dans une démarche écologique (par exemple, certifié Haute Valeur Environnementale) il est important de la retranscrire dans votre plateforme de marque ; le buveur contemporain s’intéresse aux questions d’écologie et de consommation responsable. Par contre, ne communiquez pas sur ces valeurs écologiques avant que vous ayez été certifié ou reconnu comme tel sinon le consommateur pensera que vous lui avez menti et que vos convictions environnementales ne sont que de la poudre aux yeux pour vendre votre vin. Une fois cette plateforme de marque définie il faudra la retranscrire graphiquement à travers une charte graphique qui sera votre UNIQUE référence. Trop souvent les domaines de petite taille ne prêtent pas attention à ces « détails » identitaires, pourtant ils sont essentiels. Aujourd’hui le consommateur est bombardé d’informations et il ne les retiendra que s’il rencontre le même logo et les mêmes codes couleurs à plusieurs reprises. Le mot d’ordre ici est : co-hé-rence. Tous vos moyens de communication doivent porter votre logo et votre baseline si vous en avez une ; publicité, habillages de bouteilles, site Internet, réseaux sociaux, fiches techniques, communiqué de presse, revue de presse, signalétique et même signature e-mail. Il doit y avoir une unité qui, au fil du temps rentrera dans l’inconscient du consommateur. Attention, il faut aussi une unité entre les membres du domaine ; toutes les personnes qui travaillent pour et avec le domaine doivent utiliser les mêmes outils et avoir le même discours. Sinon le consommateur sera perdu. Enfin, les projets que nous avons pu réalisé avec des domaines viticoles de petite taille nous ont permis de tirer un enseignement : l’offre doit être claire. Le consommateur, et plus particulièrement les jeunes, sont déjà suffisamment perdus lorsqu’ils achètent du vin, ce
  • 42. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 42 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . n’est pas la peine de leur compliquer la tâche. Au contraire, vous devez l’aiguiller, lui montrer le chemin. Mais comment clarifier mon offre si j’ai plusieurs cuvées, plusieurs appellations, plusieurs tranches de prix ? A nos yeux, la solution la plus efficace est de créer des gammes simples et lisibles. Souvent nous conseillons une gamme dite « abordable » avec des prix qui ne dépassent pas les 15€/bouteille et une gamme plus « qualitative » avec vos cuvées les plus prestigieuses. Ainsi le jeune consommateur pourra répondre à sa curiosité en achetant une bouteille de la première gamme et lorsqu’il reviendra vers vous, qu’il sera en confiance, son achat se tournera vers la gamme plus qualitative. Une gamme peut bien évidemment comporter plusieurs appellations différentes mais attention à ne pas perdre le consommateur entre AOC, lieux-dits et cépages. Vous devez choisir un seul de ces éléments qui sera la colonne vertébrale de votre gamme. Par exemple : Une gamme de 6 cuvées, toutes de la même appellation mais produites sur des lieux-dits différents. Ici vil faudra mettre en avant les lieux-dits et non pas l’appellation. Attention, les gammes doivent être cohérentes et il ne doit pas y avoir d’interférence d’une gamme à l’autre : vous devez trouver un moyen de les distinguer en un regard. Les étiquettes doivent absolument être différenciantes sinon vous allez perdre le consommateur. De même, créez des fiches techniques afin de guider le consommateur à travers vos gammes. Utilisez les couleurs du domaine, oubliez le langage trop technique qui n’apprendra rien de concret au consommateur. Préférez des fiches techniques au design séduisant, comportant des conseils de consommation et de conservation, des idées d’accords met/vin ou encore une carte schématique qui situe votre vignoble et les appellations que vous commercialisez. N’oubliez pas que le consommateur vient parfois de loin pour visiter votre région et acheter vos produits : il est important de l’informer et de le guider. Une fois votre identité définie, il est important de la retranscrire sur la toile. Ce n’est parce que vous êtes un domaine de petite taille que vous n’avez rien à raconter, bien au contraire.
  • 43. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 43 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . B. Vous avez des choses à dire sur la toile. Vous avez créé un site Internet il y a dix ans parce que l’on vous a dit que c’était la mode et qu’il fallait en avoir un mais vous ne l’avez jamais alimenté ? Vous avez tors ! Trop de vignobles de petites tailles ne saisissent pas leur chance sur la toile. En surfant sur Internet on se rend vite compte que trop de domaines possèdent encore un site au design peu attractif, rempli de clichés dont le monde viticole veut aujourd’hui se débarrasser. Instinctivement, vers quel site iriez-vous en premier ? C. Aller à la rencontre du consommateur.
  • 44. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 44 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Soyons honnêtes, le second site est beaucoup plus attractif que le premier alors que les informations y sont presque les mêmes. Le site Internet est un lieu où vous pouvez prendre librement la parole et vous adressez à un consommateur qui recherche de l’information. Un consommateur qui a accepté que vous preniez la parole puisqu’il est venu de lui-même sur votre site. Alors, voici quelques conseils pour un site Internet efficace qui remplira cette mission d’information : - Définissez un nombre limiter de « rubriques » principales : 6 au maximum, sinon l’internaute se lassera et ne trouvera pas ses réponses aussi facilement qu’il le souhaite. La home page doit être la plus lisible et épurée possible. - Utilisez des visuels valorisants. Eviter les couleurs sombres et les clichés cheap qui pourraient renvoyer une image ringarde et négative du domaine. Il vaut mieux un petit nombre de visuels de qualité plutôt que beaucoup de visuels sans grand intérêt esthétique. - N’oubliez pas que l’internaute est à la recherche d’informations dans un domaine qu’il avoue ne pas très bien connaître. Ainsi, utilisez un champ lexical simple et décontracté, faites des textes courts et n’hésitez pas à donner des conseils à l’internaute. Par exemple : température de service d’un vin ou des conseils pratiques pour déguster dans les meilleures conditions. - N’oubliez pas de l’inviter à venir vous rendre visite, notamment avec un onglet contact qui lui procure toutes les informations nécessaires pour se rendre au domaine. Mais aussi avec des informations relatives à la vie du domaine ; les évènements que vous organisez, des photos de la vigne au fil des saisons, etc. - Faites le lien avec vos réseaux sociaux : permettez à l’internaute de partage vos articles et faites des rappels grâce à des liens qui renvoient sur votre page Facebook. N’oubliez pas que les réseaux sociaux font partie intégrante de la vie des jeunes… En résumé, lorsque vous pensez votre site Internet, placez le consommateur au cœur du processus et de la stratégie. Pourquoi se rend-t-il sur mon site ? Que cherche –t-il ? A quoi mon site peut-il lui servir ? En combien de clic pourra-t-il trouver l’information souhaitée ?
  • 45. M a t h i l d e C h e v a l i e r - M a s t e r 1 s t r a t é g i e d e s m a r q u e s S u p d e P u b L y o n 45 L e s f e m m e s , l e v i n e t l a s e g m e n t a t i o n d u m a r c h é . Concernant vos réseaux sociaux, si vous n’en avez pas, nous vous conseillons de privilégier une page Facebook dont l’utilisation sera plus en phase avec votre activité que des réseaux tels que Twitter ou Pinterest. Lancez-vous sur Facebook avant de vous lancez ailleurs. Bien que notre étude nous ait montré que très peu de jeunes sont prêts à liker une page d’un domaine, il est important de les inciter à garder le lien avec vous et Facebook est un bon moyen. Nous conseillons souvent à nos clients de partager des infos un peu plus « décontractées » que celles diffusées sur les autres médias. On parle d’une « communication de proximité ». Notre étude a montré que ce que veulent prioritairement les consommateurs ce sont des informations de type commerciales et des conseils de consommation. Attention à ne pas être centré sur vous et votre marque ! Le monde viticole est un monde de partage, d’entraide et de convivialité et cela doit se ressentir à travers vos réseaux sociaux. N’hésitez pas à parler d’autres domaines, de vins que vous avez pu déguster, d’évènements autres que ceux qui vous concernent directement. Evidemment votre page doit aussi (et même principalement) relayer les informations liées aux actions que vous menez au quotidien ! Le but ultime étant d’attirer le fan à vous rencontrer au domaine ou sur des salons prévus à cet effet.