1. Juliette Lailler, TS1, Stanislas, Novembre 2009 Ethique à Nicomaque , Aristote L’Ecole d’Athènes (1510), Raphaël, fresque de la Chambre de la Signature, Palais du Vatican
2. Aristote (384 - 322 av. J-C) -384 : naissance en Macédoine, à Stagire (époque marquée par le renouveau de l’empire macédonien et le déclin de l’influence de la démocratie athénienne) - 367 : assoiffé de connaissance, intègre l’Académie de Platon à l’âge de 17 ans - 343 : retour en Macédoine, devient le précepteur du prince héritier, le futur Alexandre le Grand -322 : à la mort d’Alexandre le Grand, fuite d’Athènes, mort à Chalcis, sur l'île d'Eubée, d'une maladie d'estomac - 335 : retour à Athènes, soumise par Philippe II de Macédoine et fondation du « Lycée »
3. Ethique à Nicomaque Détail de L’Ecole d’Athènes (1510) : Les attitudes de Platon (à gauche) et d’Aristote, son disciple (à droite), reflètent symboliquement leurs conceptions philosophiques : Platon, le doigt pointé vers le ciel, désigne le monde des idées, tandis qu’Aristote, l’ Ethique sous le bras, pose la main sur le monde sensible. Raphaël oppose ainsi la théorie platonicienne, mystique et contemplative, au rationalisme aristotélicien. L'Éthique à Nicomaque est un ouvrage d'Aristote constitué de dix livres, fondé sur des cours au Lycée. Dédié à son fils Nicomaque, il est avec l'Éthique à Eudème et la Grande Morale , l'un des trois principaux livres exposant la philosophie morale d'Aristote. On peut aujourd’hui le considérer comme l’une des deux bases, avec le message biblique judéo-chrétien, sur lesquelles l’éthique occidentale s’est construite. Cet ouvrage se comprend comme un traité pratique qui doit guider l'homme vers le bonheur (le souverain bien) et le citoyen vers le bien commun de la Cité. Éthique et politique sont en effet inséparables chez Aristote puisque l’éthique est l’étude individuelle du bonheur et la politique en est l’étude commune. Il théorise aussi dans ce livre la justice (livre V), la prudence (livre VI) et l'amitié (livre VIII et IX).
4. La vertu Toute connaissance, toute action, toute délibération tendent nécessairement vers une fin , un but suprême qui nous empêche de nous perdre dans une régression à l’infini. Il s’avère que c’est le bonheur qui est la finalité ( telos) de nos actions. C’est sa recherche qui nous pousse à l’action. On ne peut en effet se demander à quoi sert le bonheur, c’est une question absurde : le bonheur ne sert à rien, puisqu’il est le bien désirable en soi, pour lui-même ; on ne peut le vouloir comme un moyen. Dans le premier livre de l’ Ethique à Nicomaque , Aristote définit le bonheur comme le « souverain Bien » qui consiste dans « une activité de l’âme en accord avec la vertu parfaite » Dès lors, il s’agit d’examiner la nature de la vertu afin d’en déduire la nature même du bonheur. Vertu et plaisir 3
5. I. Vertus intellectuelles et vertus morales Âme appétitive ou désirante (participe au principe raisonnable) végétative (commune à tous les êtres vivants) irrationnelle rationnelle relative à autrui : à l’écoute de la raison au sens propre : qui possède la raison Or, la vertu de l'homme est l'excellence, non pas du corps, mais de l'âme. L’âme doit donc se subdiviser à l’image de la partie rationnelle (vertu intellectuelle) et de la partie irrationnelle (vertu morale) de l'âme. Cf. IV
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7. III. Conditions de l’acte moral Conditions nécessaires au bon accomplissement de l’acte moral : 1. Pleine conscience de ses actes 2. Choix libre, réfléchi et indépendant 3. État d’esprit solide et déterminé ! acte artistique valeur intrinsèque de l’œuvre d’art, inhérente à l’artiste mais indépendante de l’acquisiteur acte moral bon accomplissement de la vertu lié exclusivement à l’agent, mais indépendant des valeurs théoriques #
8. IV. La vertu est une habitude (définition générique) Aristote remarque que rien de ce qui est naturel ne peut être changé par une habitude. On n ’est donc pas vertueux naturellement mais la nature nous donne la capacité de recevoir des vertus et de les développer au mieux, et ceci grâce à un entraînement rigoureux. ex : on ne naît pas cithariste mais c’est la pratique assidue qui permettra d’exceller en tant que cithariste VERTUS INTELLECTUELLES : enseignées ex : sagesse, intelligence, prudence MORALES : produits de l’habitude, reflets de choix répétés ex : libéralité, modération, magnanimité
9. V. La vertu est une médiété (définition spécifique) Une vertu morale est toujours le moyen terme entre deux extrêmes moins désirables. Cependant, ce n’est pas un compromis mais une perfection, un sommet entre le défaut et l’excès ! Les vertus intellectuelles ne sont pas sujettes à cette doctrine du moyen terme, dans la mesure où elles ne dépendent ni d'affections ni d’actions. La vertu d’une chose est de réaliser excellemment sa fonction propre . Pour connaître la fin suprême d’une chose, il faut donc partir de sa fonction spécifique . ex : le but dernier d’un couteau est de bien couper, ce qui le différencie d’une fourchette On peut alors appliquer cette définition à l’homme : il peut éprouver des plaisirs sensuels, exercer sa force, mais ce ne sont pas ses fonctions propres puisqu’il les partage avec les animaux. Sa différence spécifique, c’est l’âme rationnelle . Sa fin suprême sera donc l’activité rationnelle , exercée selon l’ excellence ( aretè). médiété vertu défaut excès discernement
10. VI. Définition complète de la vertu morale et précisions supplémentaires Vertu * : « disposition à agir d’une façon délibérée consistant en une médiété relative » ingratitude flatterie affabilité sympathie rusticité bouffonerie enjouement humour dissimulation jactence franchise vérité relations sociales pusillanimité vantardise magnanimité honneurs avarice prodigalité libéralité richesses biens matériels apathie irascibilité sang-froid colère inconscience lâcheté courage peur insensibilité débauche tempérance plaisir passions défauts excès vertus (médiétés) domaines
11. Conclusion Aristote, dans le deuxième livre de l’Ethique à Nicomaque , distingue deux vertus : les vertus morales, perfectionnant le désir (qui se soumet à la raison) en vue de l’action, et les vertus intellectuelles, perfectionnant l’intelligence seule, en vue de la contemplation. Il en arrive à la conclusion que la vertu est une disposition permanente, acquise par habitude, qui porte une chose à sa perfection. Chaque vertu est une excellence consistant en une «médiété», c'est-à-dire une juste mesure entre un excès et un défaut. Mais plus qu’un juste milieu entre deux extrêmes, la vertu est un sommet que le discernement permet d’atteindre. Ainsi, la prudence (du latin « prudentia ») ou la « phronesis » devient alors un critère : c'est la sagesse pratique de l'homme raisonnable qui lui permet d’adapter son action à la particularité d’une situation. Conformément à cette sagesse concrète, l'action humaine atteint la perfection qui lui est propre. Elle affirme que le bonheur est l'équilibre harmonieux et humainement accessible de toutes les fonctions de l'âme et du corps, au sein d'une cité juste et dans des circonstances où puissent régner liberté, bien-être et amitié. L’homme vraiment vertueux n’éprouve nulle contrainte à parfaire ses vertus, il l’est joyeusement, conscient de s’accomplir en tant qu’homme. Aristote réussit donc à concilier, dans l’action même, les vertus et le plaisir. Mais le bonheur des sages est ailleurs : dans le plaisir pur qu’offre la contemplation du divin et dans la quête de l’immortalité.