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Quel rôle pour le design à
l'heure de
l'Anthropocène/Effondrement ?
Collégiales de Strate Ecole de Design
Alexandre Monnin
En mémoire de Patrick Yeu
Où atterrir ?
Atterrir ?
Quelques rapports
récents
Global warming of 1.5° - 2018
(IPCC/GIEC)
The report finds that limiting global warming to 1.5°C would require “rapid and far-reaching”
transitions in land, energy, industry, buildings, transport, and cities. Global net human-caused
emissions of carbon dioxide (CO2) would need to fall by about 45 percent from 2010 levels
by 2030, reaching ‘net zero’ around 2050. This means that any remaining emissions would
need to be balanced by removing CO2 from the air.
“Limiting warming to 1.5°C is possible within the laws of chemistry and physics but doing so
would require unprecedented changes,” said Jim Skea, Co-Chair of IPCC Working Group III.
Allowing the global temperature to temporarily exceed or ‘overshoot’ 1.5°C would mean a
greater reliance on techniques that remove CO2 from the air to return global temperature to
below 1.5°C by 2100. The effectiveness of such techniques are unproven at large scale and
some may carry significant risks for sustainable development, the report notes.
https://www.ipcc.ch/2018/10/08/summary-for-policymakers-of-ipcc-special-report-on-
global-warming-of-1-5c-approved-by-governments/
Comment s’aligner sur une trajectoire compatible
avec les 1,5°C ? – 2018 (B & L évolution)
Quel est le niveau d’ambition nécessaire pour parvenir à limiter le
réchauffement climatique à une augmentation de 1,5°C ? Qu’est-ce que
ça signifie en France ? Quels types de mesures doivent-être appliquées
pour y parvenir ? Peut-on réellement suivre cette trajectoire ? Et
d’ailleurs que signifie concrètement limiter le réchauffement climatique
à 1,5°C à la surface de la Terre par rapport au niveau préindustriel ?
Autant de questionnements auxquels B&L évolution a décidé de
répondre dans une étude qui s’appuie sur le scénario proposé par le
groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)
en octobre 2018 dans son rapport spécial. Intitulé « Comment s’aligner
sur une trajectoire compatible avec les 1,5°C ? », le document
présenté par notre cabinet de conseil analyse la faisabilité technique de
ce scénario et met en perspective l’ampleur des mesures à mettre en
place pour y arriver.
Pour une sobriété numérique -
2018 (The Shift Project)
La consommation d’énergie du numérique est aujourd’hui en
hausse de 9 % par an. Il est possible de la ramener à 1,5 % par
an en adoptant la « Sobriété numérique » comme principe
d’action. La transition numérique telle qu’elle est actuellement
mise en œuvre participe au dérèglement climatique plus
qu’elle n’aide à le prévenir. Il est urgent d’agir. C’est ce que
conclut le rapport sur l’impact environnemental du numérique
publié le 4 octobre par The Shift Project, think tank de la
transition carbone, quatre jours avant la publication du rapport
spécial du GIEC sur un monde à 1,5°C. Cet impact
environnemental doit être adressé, faute de quoi le numérique
fera davantage partie du problème que de la solution.
Le dangereux déclin de la nature :
Un taux d’extinction des espèces « sans précédent »
et qui s’accélère – 2019 (IPBES)
La réponse mondiale actuelle est insuffisante ;
Des « changements transformateurs» sont nécessaires pour restaurer et
protéger la nature
Les intérêts particuliers doivent être dépassés pour le bien de tous
C’est l’évaluation la plus exhaustive de ce type ;
1.000.000 espèces menacées d'extinction
« La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l'histoire
humaine - et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à
présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier », alerte
le nouveau et historique rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la
biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), dont le résumé a été
approuvé lors de la 7ème session plénière de l'IPBES, qui s’est réunie la semaine
dernière (du 29 Avril au 4 mai) à Paris.
Adaptation de la France aux changements
climatiques à l’horizon 2050 - 2019 (Sénat)
Le réchauffement climatique et ses stigmates sont déjà là. Le niveau des températures
moyennes a fortement augmenté dans toutes les régions françaises depuis trente ans. Les
vagues de chaleur sont plus fréquentes et plus fortes. Le niveau de la mer s’élève et avec lui
le risque de submersion de certaines zones littorales. Le régime des précipitations évolue,
avec des effets perturbants sur les cultures. Les glaciers fondent, la neige se fait moins
abondante, particulièrement en moyenne montagne. L’évapotranspiration s’accroît,
accentuant les pressions sur les ressources hydriques et affectant aussi bien les activités
agricoles ou touristiques que la biodiversité et les milieux aquatiques.
Or, ces premiers stigmates ne sont que les prémisses de bouleversements de plus grande
ampleur. La France doit donc se préparer à absorber un "choc" climatique inévitable.
Avec quels outils, avec quels moyens ? Ce rapport de la Délégation à la prospective du Sénat
formule 17 propositions pour amplifier l’effort d’adaptation de la France face aux défis
sanitaires, économiques et écologiques que pose le changement climatique.
Quand atterrir ?
Temps du progrès
L’accélérationnisme
• Le courant accélérationniste (de gauche) postule qu’il faut désormais accélérer les
évolutions en cours du capitalisme (porté par le numérique et l’automatisation) afin que
ses contradictions obligent à repenser en profondeur le modèle social en vigueur.
• Cet aggiornamento précèderait un second temps, sorte de mise à jour du « logiciel » du
progrès, après quoi ce dernier pourrait reprendre sa marche sans entrave.
• Il s’agit d’une « révolution », au sens étymologique du terme, mais d’une révolution qui
doit tenir compte du passage du temps, assimilable par conséquent à une boucle
davantage qu’à un retour sur soi.
Temporalité accélérationniste
Temps de la fin et fin du temps
• Cf. ​pour Latour, les fins sont dans le temps, fragiles, difficiles à déterminer... (= Temps de la
fin). A l’inverse, la fin du temps absolutise le temps présent et ce qui le caractérise, i.e. : le
progrès technique et tout ce qui le rend possible par exemple (= Fin du temps).
• Cf. aussi Agamben : il y a une dualité au cœur de l’Eglise (et pas seulement dans la
rencontre entre la modernité scientifique et la religion, comme chez Latour) : « Il y a, dans
l’Eglise, deux éléments inconciliables, qui, cependant, ne cessent de s’enchevêtrer
historiquement : l’oikonomia – l’action salvatrice de Dieu dans le monde et dans le temps.
Quand l’élément eschatologique a été mis de côté, le développement de l’oikonomia
sécularisée s’est perverti et est devenu littéralement sans fin, c’est-à-dire sans but. »
Le temps apocalyptique (= la fin du temps)
chez Latour
=
Temps de la
fin et fin du
temps :
Agamben et
Paul
Retour sur le temps messianique :
• Si l’on distingue le temps linéaire et uniforme du
progrès de la fin du temps, alors on aboutit à deux
temps différent (chronos et eschaton).
• Agamben, dans sa lecture de Paul, nous présente un
troisième temps, un temps du kairos, marqué, dans
la théologie paulinienne, par la venue du messie.
• Temps de la fin = le temps qui a en vue la fin du
temps (l’eschaton, le Royaume, la rédemption – la
catastrophe aussi). Ce temps n’est pas un temps
apocalyptique mais messianique, il faut penser ce
que fait subir au temps présent cette perspective
eschatologique (chez Paul : suspension de la loi, des
vocations - la klesis, etc.).
La figure ternaire du temps (Paul/Agamben) :
chronos, kairos, eschaton.
[ ]
Le présent actuel : un temps « impossible »
Quelques exemples illustreront les paradoxes temporels au cœur des problèmes qui se posent
désormais à nous (le mot « problème » n’étant sans doute plus apte à décrire une situation qui n’est
plus apte à recevoir une « solution »).
1. L’effet-rebond
2. Les résultats du progrès technique (loi de Sevareid : « the chief source of problems is solution »,
1970)
3. L’inertie climatique
4. Les innovations et la chouette de Minerve
Effet-Rebond
https://ecoinfo.cnrs.fr/2015/12
/23/les-effets-rebond-du-
numerique/
L’effet-rebond, aussi connu sous le nom de « paradoxe de
Jevons », postule que l’optimisation ou l’efficience
énergétiques aboutissent toujours à un accroissement global
des dépenses énergétique.
Progrès technique et
« dématérialisation »
• La dématérialisation, comme effet attendu du
progrès technologique et de l’optimisation, est
contredite par les études qui lui opposent un
contre-argument inductif à partir d’études
s’étalant sur plusieurs dizaines d’années : “The
major empirical finding reported here [s that]
direct dematerialization due to technological
progress will no occur”.
• In, Magee, Christopher L., et Tessaleno C.
Devezas. « A Simple Extension of
Dematerialization Theory: Incorporation of
Technical Progress and the Rebound Effect ».
Technological Forecasting and Social Change
117 (avril 2017): 196-205.
https://doi.org/10.1016/j.techfore.2016.12.001.
Inertie climatique
• Le réchauffement (dérèglement) climatique connaît une
inertie d’une quarantaine d’année. Autrement dit, le climat
actuel est la résultante des émissions d’il y a 40 ans. De
même, les émissions actuelle exerceront leurs effets dans
40 ans. Cette latence s’étend donc, en tout et pour tout sur
80 ans (une durée qui excède largement le calendriers
politique et se compare à une vie humaine) !
• Cette articulation entre passé et présent décale le temps de
l’action. Agir aujourd’hui pour le climat revient à en sentir
les effets en 2058…
Les
innovations et
la chouette de
Minerve
• Transition énergétique : de récentes études menées au MIT ont montré qu’au rythme
actuel cette la mise en place de cette transition prendrait 363 ans :
https://www.technologyreview.com/s/610457/at-this-rate-its-going-to-take-nearly-400-
years-to-transform-the-energy-system/ (ce qui est fort insuffisant au rythme actuel).
Dans ce calcul, en outre, le coût d'installation des ER doit être pris en compte. Car ce qui
est visé avec les ER c'est évidemment de diminuer les rejets de CO2 mais les travaux
d'installation amèneront leur lot d'émissions. On compte donc pour cela sur de futures
économies mais ceci nécessite en retour que la fenêtre de tir pour agir doit être
suffisamment grande (cf. 2 ans, 20 ans…).
• Autre exemple : les panneaux solaires, une étude montrait qu’en tenant compte
de la durée de vie des panneaux et du coût écologique de leur production, une
croissance de plus de 12% par ans du secteur accuserait un bilan carbone négatif
(en tenant compte des émissions et des économies).
• La fusion (ITER) : la dernière roadmap d’EUROfusion ne prévoit pas de mise en activité
des démonstrateur de réacteur à fusion nucléaire avant « le début de la deuxième
moitié du XXIe siècle » (2054 selon un autre document – appréciation jugée optimiste
par les experts eux-mêmes. L’un d’eux ajoute « it is vital to demonstrate electricity
generation from fusion "not too far after the middle of the century". Otherwise, there
may no longer be a nuclear industry able to build the commercial fusion plants that
would follow, and the public may lose patience. », http://www.bbc.com/news/science-
environment-40558758).
Défuturation
• Le designer Tony Fry propose le concept de défuturation pour qualifier la situation actuelle. Le
design, selon lui, fait normalement œuvre de futuration, il produit un futur habitable (à l’échelle
de l’espèce). En ce sens, il s’agit d’une activité qui n’est en aucun cas réservé à une profession
déterminée, l’acception retenue est ici beaucoup plus large.
• Aujourd’hui, ajoute-t-il, l’innovation et le design ne produisent plus de futur habitable mais son
inverse, ce sont des facteurs de « défuturation ».
• « Trop de futurs et pas assez d’avenir » (A.M.)
• En effet, les innovations à venir proviennent largement d’un passé dans lequel la question
Anthropocénique n’avait aucune place, un passé accouchant d’un futur obsolète, préemptant ce
dernier en l’obérant.
• Production de futurs obsolètes, le futur du passé, futurs d’ores-et-déjà dépassés
Comment atterrir ?
(image proposée par
Office !)
Faire atterrir le
Web (le
numérique, le
monde organisé)
?
Proposition du projet
« Closing Worlds Initiative ».
Infrastructures
L’exemple du
Web et du Web
We Can Afford
Passer du Web We Want au
Web We Can Afford.
Suppose une bonne
connaissance du Web. Pas
forcément un Web éternel, ni
décarbonné, mais un Web de
transition
• https://www.w3.org/community/wwca/
Autres futurs (?) :
Downscaling the Web
• L’initiative « downscaling the Web »
(https://worldwidesemanticweb.org)
• Un Web (y compris un Web sémantique)
sans Internet.
• Low tech ou « mixed tech ».
• Pose par ailleurs beaucoup de questions :
cf. le decolonial computing.
Autres futurs (?) :
low-tech
Autres futurs (?) : les
sites hors-ligne
Autres futurs
(?) : le
sneakernet
Autres futurs (?) :
autres réseaux
• Les réseaux sans-fils communautaires
• Ici un déploiement de réseau MESH à Detroit en
2011.
Set up of a MESH network rooftop antenna #1 - MidTown Detroit,
2011 June (Licence CC BY-SA 2.0 - Preston Rhea)
Autres futurs de la recherche
• S-CHI: Sustainable Human-Computer Interaction
• Crisis Informatics
• ICTD: Information and Communication Technology for Development
• Computing Within Limits Workshops
• Minimal Computing
• Collapse informatics
• Undesign the Internet
• Undesigning Technology
• Defuturing and Destruction
La fin du numérique / du Web ?
• Les futurs : multiples et asynchrones
• L’avenir synchronise les futurs divergents
• Nos révolutions sont temporaires
• Fin du progrès linéaire et cumulatif
• Nos technologies/infrastructures/moyens de recherche ne sont pas durables mais sont là : à
quoi les employer avant que les effets du nouvel âge (l’Anthropocène) ne se fassent
complètement sentir ?
• Renoncer à nos visions d’un avenir tout-numérique au XXIe
siècle, c’est-à-dire aux futurs du passé qui construisent notre
présent (majoritairement) ;
• Se préparer (c’est déjà le cas) à vivre dans les ruines du
numérique - que nous produisons ;
• Penser un avenir Xpunk, entre « high tech », « low tech », alter-
tech (permaculture ?) ou « wild tech », ruines, etc. ;
• C’est déjà le cas en vérité : “The future is already here — it's
just not very evenly distributed” (William Gibson). Ce n’est pas
seulement vrai du progrès mais aussi de l’effondrement.
• Se poser la question « que faire des moyens actuels ? », « quels
modèles encourager/décourager ? »
Organisations
Image : "Droits réservés".
A quel monde s’adresse le design dans
l’Anthropocène? (à partir du travail d’E. Bonnet)
Le monde est un « projet à réaliser »
Une finalité du design serait
« d’améliorer ou au moins de maintenir «
l’habitabilité » du monde dans toutes ses
dimensions : physiques/matérielles,
psychologique/cognitive/émotionnelle,
spirituelle/culturelle/symbolique. »
(Findeli, 2010)
Changer le monde pour le rendre
« désirable » et durable
Sciences de gestion : « Théorie de la
conception innovante » dans le
« capitalisme de l’innovation intensive » ;
passer du connu à l’inconnu : « forcer le
possible » (Hatchuel et al. 2017).
« l’innovation est partout et peut venir
d’où on ne l’attend pas. » y compris en
réponse aux crises écologiques.
Dans tous les cas, et « quel que soit le
problème » : si on force le possible, un
système d’information peut « sauver la
vie des rhinocéros » (SAP)
A quel monde
s’adresse le
design dans
l’Anthropocène?
• Une cosmologie implicite : le monde organisé est devenu le monde
habitable qu’il s’agit de projeter ou de changer en “forçant le
possible”. Couplage Design/Organisation
• Couplage Design/Organisation :
• Présence spectaculaire du design dans le monde organisé
• Les organisations sont « fonctionnellement » conçues pour
résoudre des problèmes deviennent les principes
organisateurs du monde : elles « reprennent » le monde
désorganisé « combines its driving force and action to fuel
the power to recreate the conditions of a world that
matters” (Durand, 2012)
• Une cosmologie alternative :
• « Nous nommons monde l’ensemble mouvant d’êtres
interdépendants avec lesquels nous sommes imbriqués, que nous
composons ou que nous laissons décomposer, que nous faisons
consister ou que nous livrons à l’inconsistance »
• (Pierre Montebello)
Rendre le monde
plus habitable ?
Business as usualou business as unusual?
SAP
Our purpose
“Help the world run better and improve people’s lives.
That’s been our purpose from day one. So when our
customers have the next big idea to save a species,
transform an industry, feed the hungry, support equality, or
provide relief worldwide – we deliver the right technology
to help them run at their best and achieve their vision.”
Why we do what we do ?
“We are fans of the change-makers, the ground-
breakers, the life-savers. We help them get real-
time insights, overcome obstacles, and make great
decisions– so their good ideas can start improving lives
sooner. Watch the video to learn more.”
(c’est une
vraie
publicité)
Autres sons
de cloches
« Je peux vous dire,... dans le BOARD on en parle souvent,
on est conscient de l’impératif, ....mais on ne sait pas
comment faire, personne sait faire » (le Vice-Président
d’une grande entreprise française, leader mondial de son
secteur)
« Un monde qui se réchaufferait de plus de 4 degrés n’est
pas assurable. » (Thomas Buberl, DG d’AXA)
« Aujourd’hui, il faut arrêter de construire » (un
entrepreneur de l’immobilier, polytechnicien)
Innovation
intensive
Innovation
neutre
Desinnovation
Sans monde
(acosmie)
Monde à
Reprendre
Fin de
monde /
finitude
Cosmologie /
Prise au sérieux
de l’Anthropocène
Régime d’action /
capacité de
projection
Elon Musk
Patagonia
The North Face
Firmes
Géo Ingénieriales
Ricardo Semler
Trump Corporation
Laurent Alexandre
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en Californie
Business
Accelerationism
(cosmocide)
E. Leclerc
Géo-entrepreunariat
Total
Entreprises des
30 glorieuses
(développement)
Gestion
Business
As Usual
AccélérationS
Vide stratégique
Développement durable RSE
Business
As Unusual
Gore Tex
Faillites, ruines
Limites, conservation
Closing Worlds
Refaire ou Hériter ?
Fermer ?
« Le pire. »
« On pourrait me rétorquer qu'il faut faire ralentir, atténuer ces catastrophes, les éradiquer
à la base, par exemple en nous débarrassant le plus rapidement possible des énergies
fossiles ou des objets techniques contemporains. Mais je ne suis pas sûr que ce soit si
faisable ou efficace. Sans minorer ces nécessités, j'aurai tendance à penser qu'il vaut mieux
d'abord construire des modes de co-existence, et que le reste viendra après. Qu'il faut
d'abord construire des moyens de conceptualiser ces modalités. D'où l'intérêt de la fiction,
des travaux artistiques ou des textes de sciences humaines et sociales dans cette affaire,
pour faire évoluer nos représentations. Et in fine, faire évoluer nos manières de concevoir
les objets techniques ou les politiques publiques. »
(N. Nova, https://laspirale.org/texte-602-nicolas-nova-vers-une-nouvelle-narration-du-21e-
siecle.html)
Position
mélioriste
(mais pas
amélioriste)
Fermer mais pas se débarrasser
Pas se débarrasser mais hériter
Hériter est une manière de construire des modes de co-existence
Ici interviennent les « communs négatifs » dont je parle
hériter c’est aussi hériter de futurs et de récits à fermer, à ne pas laisser
proliférer
La proliférations ne doit pas être « organisée » (« forcer le possible »,
management et design).
Et d’ailleurs elle ne l’est pas : les choses se passent ailleurs (cf. Fry : le
design échappe aux designers ; ex. : de la Pacha Mama, cf. A. Escobar).
« Il n’y a rien de plus innovateur, rien de plus
présent, subtil, technique, artificiel (au bon sens
du mot), rien de moins rustique et campagnard,
rien de plus créateur, rien de plus contemporain
que de négocier l’atterrissage sur un sol »
(Bruno Latour)
• Comment éviter d’être récupéré ? Une seule
stratégie, la fermeture
(= désaffectation/réaffectation).
Avec qui atterrir ?
(Antoine Hennion)
Merci !
Bonus !
L’impératif de
Subsistance
et le Design
La question primordiale devient la question
de la subsistance.
Tony Fry (designer et théoricien australien du
design) pense le design comme futuration.
La production de futur devient le commun primordial, ce qui l’amène à défendre
au plan politique l’impératif du soutenable ou de la subsistance (« sustainment
imperative », « sustain-ability »), à l’aune duquel nos métiers, nos actions, nos
décisions nécessitent d’être repensées radicalement.
Dignifier et
destaurer pour
survivre 1/2
Notre proposition (avec Diego Landivar), pour
penser un agir adapté à la situation que nous
connaissons consiste à articuler instauration et
destauration.
• Instaurer ou dignifier les objets (actuels),
y compris manufacturés, dans la lignée des
discussion qui ont accompagné la
rédaction des constitutions andines. Nous
héritons de ce qui existe dans ce monde :
ses infrastructures, ses objets techniques,
ses déchets, etc.
• Destaurer radicalement les innovations
(et/ou les inventions), le surplus des
œuvres à faire : éviter de les faire passer à
l’état actuel alors que nous n’avons pas
assez de Terres pour les accueillir.
Dignifier et
destaurer pour
survivre 2/2
Articuler instauration et destauration pour désaffecter l’existant
et le réaffecter à autre chose (= le dignifier). Le design est mis à
profit pour opérer des « redirections » (T. Fry).
➔ Vers une ingénierie, un art et un design de la clôture (des
demakers), de la désaffectation/réaffactation (du
« désœuvrement » au sens d’Agamben ou de la « redirection » au
sens de Tony Fry).
 Point de vue géologique : trop de futurs = fuite hors de la
terre (pas assez de terres)
 Point de vue temporel : trop de futurs = fuite hors de
l’avenir (futurs orthogonaux par rapport à l’avenir)
 Dans les deux cas des « mondes alternatifs » (Latour, au
sens des alt-facts)
 Se réapproprier le présent (défuturer la défuturation pour
mieux futurer c’est-à-dire produire un futur synchrone par
rapport à l’avenir).
Les
« communs
négatifs »
Les biens communs à l’avenir, dans un monde de ruines, ne
seront pas seulement des « ressources » positives
(halieutiques, végétales ou autres) mais négatives.
• Ex. des centrale/réacteurs nucléaires :
• Nous n’avons pas les moyens de continuer très
longtemps ;
• Nous n’avons pas les moyens d’arrêter
(démanteler) ;
• Nous n’avons pas le loisir d’arrêter (l’hiver arrive…).
Que faire ? De fait, cela conduit à transformer tout un
ensemble d’agents en communs négatifs.
• Les centrales sont d’ailleurs dignifiés actuellement
comme des agents tabous pour lesquels des langages
ont été et sont conçus afin de recréer des tabous à
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  • 1. Quel rôle pour le design à l'heure de l'Anthropocène/Effondrement ? Collégiales de Strate Ecole de Design Alexandre Monnin
  • 2. En mémoire de Patrick Yeu
  • 6. Global warming of 1.5° - 2018 (IPCC/GIEC) The report finds that limiting global warming to 1.5°C would require “rapid and far-reaching” transitions in land, energy, industry, buildings, transport, and cities. Global net human-caused emissions of carbon dioxide (CO2) would need to fall by about 45 percent from 2010 levels by 2030, reaching ‘net zero’ around 2050. This means that any remaining emissions would need to be balanced by removing CO2 from the air. “Limiting warming to 1.5°C is possible within the laws of chemistry and physics but doing so would require unprecedented changes,” said Jim Skea, Co-Chair of IPCC Working Group III. Allowing the global temperature to temporarily exceed or ‘overshoot’ 1.5°C would mean a greater reliance on techniques that remove CO2 from the air to return global temperature to below 1.5°C by 2100. The effectiveness of such techniques are unproven at large scale and some may carry significant risks for sustainable development, the report notes. https://www.ipcc.ch/2018/10/08/summary-for-policymakers-of-ipcc-special-report-on- global-warming-of-1-5c-approved-by-governments/
  • 7. Comment s’aligner sur une trajectoire compatible avec les 1,5°C ? – 2018 (B & L évolution) Quel est le niveau d’ambition nécessaire pour parvenir à limiter le réchauffement climatique à une augmentation de 1,5°C ? Qu’est-ce que ça signifie en France ? Quels types de mesures doivent-être appliquées pour y parvenir ? Peut-on réellement suivre cette trajectoire ? Et d’ailleurs que signifie concrètement limiter le réchauffement climatique à 1,5°C à la surface de la Terre par rapport au niveau préindustriel ? Autant de questionnements auxquels B&L évolution a décidé de répondre dans une étude qui s’appuie sur le scénario proposé par le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) en octobre 2018 dans son rapport spécial. Intitulé « Comment s’aligner sur une trajectoire compatible avec les 1,5°C ? », le document présenté par notre cabinet de conseil analyse la faisabilité technique de ce scénario et met en perspective l’ampleur des mesures à mettre en place pour y arriver.
  • 8. Pour une sobriété numérique - 2018 (The Shift Project) La consommation d’énergie du numérique est aujourd’hui en hausse de 9 % par an. Il est possible de la ramener à 1,5 % par an en adoptant la « Sobriété numérique » comme principe d’action. La transition numérique telle qu’elle est actuellement mise en œuvre participe au dérèglement climatique plus qu’elle n’aide à le prévenir. Il est urgent d’agir. C’est ce que conclut le rapport sur l’impact environnemental du numérique publié le 4 octobre par The Shift Project, think tank de la transition carbone, quatre jours avant la publication du rapport spécial du GIEC sur un monde à 1,5°C. Cet impact environnemental doit être adressé, faute de quoi le numérique fera davantage partie du problème que de la solution.
  • 9. Le dangereux déclin de la nature : Un taux d’extinction des espèces « sans précédent » et qui s’accélère – 2019 (IPBES) La réponse mondiale actuelle est insuffisante ; Des « changements transformateurs» sont nécessaires pour restaurer et protéger la nature Les intérêts particuliers doivent être dépassés pour le bien de tous C’est l’évaluation la plus exhaustive de ce type ; 1.000.000 espèces menacées d'extinction « La nature décline globalement à un rythme sans précédent dans l'histoire humaine - et le taux d’extinction des espèces s’accélère, provoquant dès à présent des effets graves sur les populations humaines du monde entier », alerte le nouveau et historique rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), dont le résumé a été approuvé lors de la 7ème session plénière de l'IPBES, qui s’est réunie la semaine dernière (du 29 Avril au 4 mai) à Paris.
  • 10. Adaptation de la France aux changements climatiques à l’horizon 2050 - 2019 (Sénat) Le réchauffement climatique et ses stigmates sont déjà là. Le niveau des températures moyennes a fortement augmenté dans toutes les régions françaises depuis trente ans. Les vagues de chaleur sont plus fréquentes et plus fortes. Le niveau de la mer s’élève et avec lui le risque de submersion de certaines zones littorales. Le régime des précipitations évolue, avec des effets perturbants sur les cultures. Les glaciers fondent, la neige se fait moins abondante, particulièrement en moyenne montagne. L’évapotranspiration s’accroît, accentuant les pressions sur les ressources hydriques et affectant aussi bien les activités agricoles ou touristiques que la biodiversité et les milieux aquatiques. Or, ces premiers stigmates ne sont que les prémisses de bouleversements de plus grande ampleur. La France doit donc se préparer à absorber un "choc" climatique inévitable. Avec quels outils, avec quels moyens ? Ce rapport de la Délégation à la prospective du Sénat formule 17 propositions pour amplifier l’effort d’adaptation de la France face aux défis sanitaires, économiques et écologiques que pose le changement climatique.
  • 13. L’accélérationnisme • Le courant accélérationniste (de gauche) postule qu’il faut désormais accélérer les évolutions en cours du capitalisme (porté par le numérique et l’automatisation) afin que ses contradictions obligent à repenser en profondeur le modèle social en vigueur. • Cet aggiornamento précèderait un second temps, sorte de mise à jour du « logiciel » du progrès, après quoi ce dernier pourrait reprendre sa marche sans entrave. • Il s’agit d’une « révolution », au sens étymologique du terme, mais d’une révolution qui doit tenir compte du passage du temps, assimilable par conséquent à une boucle davantage qu’à un retour sur soi.
  • 15. Temps de la fin et fin du temps • Cf. ​pour Latour, les fins sont dans le temps, fragiles, difficiles à déterminer... (= Temps de la fin). A l’inverse, la fin du temps absolutise le temps présent et ce qui le caractérise, i.e. : le progrès technique et tout ce qui le rend possible par exemple (= Fin du temps). • Cf. aussi Agamben : il y a une dualité au cœur de l’Eglise (et pas seulement dans la rencontre entre la modernité scientifique et la religion, comme chez Latour) : « Il y a, dans l’Eglise, deux éléments inconciliables, qui, cependant, ne cessent de s’enchevêtrer historiquement : l’oikonomia – l’action salvatrice de Dieu dans le monde et dans le temps. Quand l’élément eschatologique a été mis de côté, le développement de l’oikonomia sécularisée s’est perverti et est devenu littéralement sans fin, c’est-à-dire sans but. »
  • 16. Le temps apocalyptique (= la fin du temps) chez Latour =
  • 17. Temps de la fin et fin du temps : Agamben et Paul Retour sur le temps messianique : • Si l’on distingue le temps linéaire et uniforme du progrès de la fin du temps, alors on aboutit à deux temps différent (chronos et eschaton). • Agamben, dans sa lecture de Paul, nous présente un troisième temps, un temps du kairos, marqué, dans la théologie paulinienne, par la venue du messie. • Temps de la fin = le temps qui a en vue la fin du temps (l’eschaton, le Royaume, la rédemption – la catastrophe aussi). Ce temps n’est pas un temps apocalyptique mais messianique, il faut penser ce que fait subir au temps présent cette perspective eschatologique (chez Paul : suspension de la loi, des vocations - la klesis, etc.).
  • 18. La figure ternaire du temps (Paul/Agamben) : chronos, kairos, eschaton. [ ]
  • 19. Le présent actuel : un temps « impossible » Quelques exemples illustreront les paradoxes temporels au cœur des problèmes qui se posent désormais à nous (le mot « problème » n’étant sans doute plus apte à décrire une situation qui n’est plus apte à recevoir une « solution »). 1. L’effet-rebond 2. Les résultats du progrès technique (loi de Sevareid : « the chief source of problems is solution », 1970) 3. L’inertie climatique 4. Les innovations et la chouette de Minerve
  • 20. Effet-Rebond https://ecoinfo.cnrs.fr/2015/12 /23/les-effets-rebond-du- numerique/ L’effet-rebond, aussi connu sous le nom de « paradoxe de Jevons », postule que l’optimisation ou l’efficience énergétiques aboutissent toujours à un accroissement global des dépenses énergétique.
  • 21. Progrès technique et « dématérialisation » • La dématérialisation, comme effet attendu du progrès technologique et de l’optimisation, est contredite par les études qui lui opposent un contre-argument inductif à partir d’études s’étalant sur plusieurs dizaines d’années : “The major empirical finding reported here [s that] direct dematerialization due to technological progress will no occur”. • In, Magee, Christopher L., et Tessaleno C. Devezas. « A Simple Extension of Dematerialization Theory: Incorporation of Technical Progress and the Rebound Effect ». Technological Forecasting and Social Change 117 (avril 2017): 196-205. https://doi.org/10.1016/j.techfore.2016.12.001.
  • 22. Inertie climatique • Le réchauffement (dérèglement) climatique connaît une inertie d’une quarantaine d’année. Autrement dit, le climat actuel est la résultante des émissions d’il y a 40 ans. De même, les émissions actuelle exerceront leurs effets dans 40 ans. Cette latence s’étend donc, en tout et pour tout sur 80 ans (une durée qui excède largement le calendriers politique et se compare à une vie humaine) ! • Cette articulation entre passé et présent décale le temps de l’action. Agir aujourd’hui pour le climat revient à en sentir les effets en 2058…
  • 23. Les innovations et la chouette de Minerve • Transition énergétique : de récentes études menées au MIT ont montré qu’au rythme actuel cette la mise en place de cette transition prendrait 363 ans : https://www.technologyreview.com/s/610457/at-this-rate-its-going-to-take-nearly-400- years-to-transform-the-energy-system/ (ce qui est fort insuffisant au rythme actuel). Dans ce calcul, en outre, le coût d'installation des ER doit être pris en compte. Car ce qui est visé avec les ER c'est évidemment de diminuer les rejets de CO2 mais les travaux d'installation amèneront leur lot d'émissions. On compte donc pour cela sur de futures économies mais ceci nécessite en retour que la fenêtre de tir pour agir doit être suffisamment grande (cf. 2 ans, 20 ans…). • Autre exemple : les panneaux solaires, une étude montrait qu’en tenant compte de la durée de vie des panneaux et du coût écologique de leur production, une croissance de plus de 12% par ans du secteur accuserait un bilan carbone négatif (en tenant compte des émissions et des économies). • La fusion (ITER) : la dernière roadmap d’EUROfusion ne prévoit pas de mise en activité des démonstrateur de réacteur à fusion nucléaire avant « le début de la deuxième moitié du XXIe siècle » (2054 selon un autre document – appréciation jugée optimiste par les experts eux-mêmes. L’un d’eux ajoute « it is vital to demonstrate electricity generation from fusion "not too far after the middle of the century". Otherwise, there may no longer be a nuclear industry able to build the commercial fusion plants that would follow, and the public may lose patience. », http://www.bbc.com/news/science- environment-40558758).
  • 24. Défuturation • Le designer Tony Fry propose le concept de défuturation pour qualifier la situation actuelle. Le design, selon lui, fait normalement œuvre de futuration, il produit un futur habitable (à l’échelle de l’espèce). En ce sens, il s’agit d’une activité qui n’est en aucun cas réservé à une profession déterminée, l’acception retenue est ici beaucoup plus large. • Aujourd’hui, ajoute-t-il, l’innovation et le design ne produisent plus de futur habitable mais son inverse, ce sont des facteurs de « défuturation ». • « Trop de futurs et pas assez d’avenir » (A.M.) • En effet, les innovations à venir proviennent largement d’un passé dans lequel la question Anthropocénique n’avait aucune place, un passé accouchant d’un futur obsolète, préemptant ce dernier en l’obérant. • Production de futurs obsolètes, le futur du passé, futurs d’ores-et-déjà dépassés
  • 25. Comment atterrir ? (image proposée par Office !)
  • 26. Faire atterrir le Web (le numérique, le monde organisé) ? Proposition du projet « Closing Worlds Initiative ».
  • 28. L’exemple du Web et du Web We Can Afford Passer du Web We Want au Web We Can Afford. Suppose une bonne connaissance du Web. Pas forcément un Web éternel, ni décarbonné, mais un Web de transition • https://www.w3.org/community/wwca/
  • 29. Autres futurs (?) : Downscaling the Web • L’initiative « downscaling the Web » (https://worldwidesemanticweb.org) • Un Web (y compris un Web sémantique) sans Internet. • Low tech ou « mixed tech ». • Pose par ailleurs beaucoup de questions : cf. le decolonial computing.
  • 30. Autres futurs (?) : low-tech
  • 31. Autres futurs (?) : les sites hors-ligne
  • 32. Autres futurs (?) : le sneakernet
  • 33. Autres futurs (?) : autres réseaux • Les réseaux sans-fils communautaires • Ici un déploiement de réseau MESH à Detroit en 2011. Set up of a MESH network rooftop antenna #1 - MidTown Detroit, 2011 June (Licence CC BY-SA 2.0 - Preston Rhea)
  • 34. Autres futurs de la recherche • S-CHI: Sustainable Human-Computer Interaction • Crisis Informatics • ICTD: Information and Communication Technology for Development • Computing Within Limits Workshops • Minimal Computing • Collapse informatics • Undesign the Internet • Undesigning Technology • Defuturing and Destruction
  • 35. La fin du numérique / du Web ? • Les futurs : multiples et asynchrones • L’avenir synchronise les futurs divergents • Nos révolutions sont temporaires • Fin du progrès linéaire et cumulatif • Nos technologies/infrastructures/moyens de recherche ne sont pas durables mais sont là : à quoi les employer avant que les effets du nouvel âge (l’Anthropocène) ne se fassent complètement sentir ?
  • 36. • Renoncer à nos visions d’un avenir tout-numérique au XXIe siècle, c’est-à-dire aux futurs du passé qui construisent notre présent (majoritairement) ; • Se préparer (c’est déjà le cas) à vivre dans les ruines du numérique - que nous produisons ; • Penser un avenir Xpunk, entre « high tech », « low tech », alter- tech (permaculture ?) ou « wild tech », ruines, etc. ; • C’est déjà le cas en vérité : “The future is already here — it's just not very evenly distributed” (William Gibson). Ce n’est pas seulement vrai du progrès mais aussi de l’effondrement. • Se poser la question « que faire des moyens actuels ? », « quels modèles encourager/décourager ? »
  • 38. A quel monde s’adresse le design dans l’Anthropocène? (à partir du travail d’E. Bonnet) Le monde est un « projet à réaliser » Une finalité du design serait « d’améliorer ou au moins de maintenir « l’habitabilité » du monde dans toutes ses dimensions : physiques/matérielles, psychologique/cognitive/émotionnelle, spirituelle/culturelle/symbolique. » (Findeli, 2010) Changer le monde pour le rendre « désirable » et durable Sciences de gestion : « Théorie de la conception innovante » dans le « capitalisme de l’innovation intensive » ; passer du connu à l’inconnu : « forcer le possible » (Hatchuel et al. 2017). « l’innovation est partout et peut venir d’où on ne l’attend pas. » y compris en réponse aux crises écologiques. Dans tous les cas, et « quel que soit le problème » : si on force le possible, un système d’information peut « sauver la vie des rhinocéros » (SAP)
  • 39. A quel monde s’adresse le design dans l’Anthropocène? • Une cosmologie implicite : le monde organisé est devenu le monde habitable qu’il s’agit de projeter ou de changer en “forçant le possible”. Couplage Design/Organisation • Couplage Design/Organisation : • Présence spectaculaire du design dans le monde organisé • Les organisations sont « fonctionnellement » conçues pour résoudre des problèmes deviennent les principes organisateurs du monde : elles « reprennent » le monde désorganisé « combines its driving force and action to fuel the power to recreate the conditions of a world that matters” (Durand, 2012) • Une cosmologie alternative : • « Nous nommons monde l’ensemble mouvant d’êtres interdépendants avec lesquels nous sommes imbriqués, que nous composons ou que nous laissons décomposer, que nous faisons consister ou que nous livrons à l’inconsistance » • (Pierre Montebello)
  • 40. Rendre le monde plus habitable ? Business as usualou business as unusual?
  • 41.
  • 42. SAP Our purpose “Help the world run better and improve people’s lives. That’s been our purpose from day one. So when our customers have the next big idea to save a species, transform an industry, feed the hungry, support equality, or provide relief worldwide – we deliver the right technology to help them run at their best and achieve their vision.” Why we do what we do ? “We are fans of the change-makers, the ground- breakers, the life-savers. We help them get real- time insights, overcome obstacles, and make great decisions– so their good ideas can start improving lives sooner. Watch the video to learn more.”
  • 43.
  • 45. Autres sons de cloches « Je peux vous dire,... dans le BOARD on en parle souvent, on est conscient de l’impératif, ....mais on ne sait pas comment faire, personne sait faire » (le Vice-Président d’une grande entreprise française, leader mondial de son secteur) « Un monde qui se réchaufferait de plus de 4 degrés n’est pas assurable. » (Thomas Buberl, DG d’AXA) « Aujourd’hui, il faut arrêter de construire » (un entrepreneur de l’immobilier, polytechnicien)
  • 46. Innovation intensive Innovation neutre Desinnovation Sans monde (acosmie) Monde à Reprendre Fin de monde / finitude Cosmologie / Prise au sérieux de l’Anthropocène Régime d’action / capacité de projection Elon Musk Patagonia The North Face Firmes Géo Ingénieriales Ricardo Semler Trump Corporation Laurent Alexandre Compagnie d’Assurances en Californie Business Accelerationism (cosmocide) E. Leclerc Géo-entrepreunariat Total Entreprises des 30 glorieuses (développement) Gestion Business As Usual AccélérationS Vide stratégique Développement durable RSE Business As Unusual Gore Tex Faillites, ruines Limites, conservation Closing Worlds
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  • 51. « On pourrait me rétorquer qu'il faut faire ralentir, atténuer ces catastrophes, les éradiquer à la base, par exemple en nous débarrassant le plus rapidement possible des énergies fossiles ou des objets techniques contemporains. Mais je ne suis pas sûr que ce soit si faisable ou efficace. Sans minorer ces nécessités, j'aurai tendance à penser qu'il vaut mieux d'abord construire des modes de co-existence, et que le reste viendra après. Qu'il faut d'abord construire des moyens de conceptualiser ces modalités. D'où l'intérêt de la fiction, des travaux artistiques ou des textes de sciences humaines et sociales dans cette affaire, pour faire évoluer nos représentations. Et in fine, faire évoluer nos manières de concevoir les objets techniques ou les politiques publiques. » (N. Nova, https://laspirale.org/texte-602-nicolas-nova-vers-une-nouvelle-narration-du-21e- siecle.html)
  • 52. Position mélioriste (mais pas amélioriste) Fermer mais pas se débarrasser Pas se débarrasser mais hériter Hériter est une manière de construire des modes de co-existence Ici interviennent les « communs négatifs » dont je parle hériter c’est aussi hériter de futurs et de récits à fermer, à ne pas laisser proliférer La proliférations ne doit pas être « organisée » (« forcer le possible », management et design). Et d’ailleurs elle ne l’est pas : les choses se passent ailleurs (cf. Fry : le design échappe aux designers ; ex. : de la Pacha Mama, cf. A. Escobar).
  • 53. « Il n’y a rien de plus innovateur, rien de plus présent, subtil, technique, artificiel (au bon sens du mot), rien de moins rustique et campagnard, rien de plus créateur, rien de plus contemporain que de négocier l’atterrissage sur un sol » (Bruno Latour) • Comment éviter d’être récupéré ? Une seule stratégie, la fermeture (= désaffectation/réaffectation).
  • 54. Avec qui atterrir ? (Antoine Hennion)
  • 57. L’impératif de Subsistance et le Design La question primordiale devient la question de la subsistance. Tony Fry (designer et théoricien australien du design) pense le design comme futuration. La production de futur devient le commun primordial, ce qui l’amène à défendre au plan politique l’impératif du soutenable ou de la subsistance (« sustainment imperative », « sustain-ability »), à l’aune duquel nos métiers, nos actions, nos décisions nécessitent d’être repensées radicalement.
  • 58. Dignifier et destaurer pour survivre 1/2 Notre proposition (avec Diego Landivar), pour penser un agir adapté à la situation que nous connaissons consiste à articuler instauration et destauration. • Instaurer ou dignifier les objets (actuels), y compris manufacturés, dans la lignée des discussion qui ont accompagné la rédaction des constitutions andines. Nous héritons de ce qui existe dans ce monde : ses infrastructures, ses objets techniques, ses déchets, etc. • Destaurer radicalement les innovations (et/ou les inventions), le surplus des œuvres à faire : éviter de les faire passer à l’état actuel alors que nous n’avons pas assez de Terres pour les accueillir.
  • 59. Dignifier et destaurer pour survivre 2/2 Articuler instauration et destauration pour désaffecter l’existant et le réaffecter à autre chose (= le dignifier). Le design est mis à profit pour opérer des « redirections » (T. Fry). ➔ Vers une ingénierie, un art et un design de la clôture (des demakers), de la désaffectation/réaffactation (du « désœuvrement » au sens d’Agamben ou de la « redirection » au sens de Tony Fry).  Point de vue géologique : trop de futurs = fuite hors de la terre (pas assez de terres)  Point de vue temporel : trop de futurs = fuite hors de l’avenir (futurs orthogonaux par rapport à l’avenir)  Dans les deux cas des « mondes alternatifs » (Latour, au sens des alt-facts)  Se réapproprier le présent (défuturer la défuturation pour mieux futurer c’est-à-dire produire un futur synchrone par rapport à l’avenir).
  • 60. Les « communs négatifs » Les biens communs à l’avenir, dans un monde de ruines, ne seront pas seulement des « ressources » positives (halieutiques, végétales ou autres) mais négatives. • Ex. des centrale/réacteurs nucléaires : • Nous n’avons pas les moyens de continuer très longtemps ; • Nous n’avons pas les moyens d’arrêter (démanteler) ; • Nous n’avons pas le loisir d’arrêter (l’hiver arrive…). Que faire ? De fait, cela conduit à transformer tout un ensemble d’agents en communs négatifs. • Les centrales sont d’ailleurs dignifiés actuellement comme des agents tabous pour lesquels des langages ont été et sont conçus afin de recréer des tabous à destination des humains de l’avenir.