1. CONFEDERATION GENERALE TUNISIENNE
DU TRAVAIL – CGTT
Séminaire :
Relance économique et responsabilité sociale des entreprises :
un an après le déclenchement de la révolution tunisienne
Tunis, le jeudi 19 janvier 2012
Hôtel Belvédère
Hafedh Ben Abdennebi, HEC Carthage
2. Diagnostic de l’activité socio-économique durant l’année 2011 :
La Tunisie a enregistré les résultats socio-économiques
suivants :
Le nombre des sit-in a dépassé 500, selon l’INS.
Un nombre élevé d’entreprises en difficulté.
Une perte additionnelle d’à peu près 100 000 postes d’emploi résultant
directement de ces sit-in, l’arrivée sur le marché de l’emploi d’à peu près
80 000 nouveaux diplômés de l’enseignement supérieur, ce qui a entraîné
un nombre de chômeurs dépassant le seuil des 800 000
individus, soit 18 % de la population active serait au chômage.
Un taux de croissance économique négatif, estimé à -0,8 % par la BCT.
3. Le budget de l’Etat pour l’exercice 2012, adopté par l’ANC
fin décembre 2011, prévoit :
Un taux de croissance de l’activité économique de 4,5 %.
Une création de 70 000 à 80 000 nouveaux postes d’emploi.
Soit chaque point de pourcentage de croissance permettrait de créer
17 000 à 18 000 nouveaux postes d’emploi.
4. Ces prévisions de croissance correspondent à l’identique aux
réalisations, en termes de performances économiques, de la Tunisie
durant les deux dernières décennies.
En dépit du problème de la répartition des richesses créées, ce
modèle de croissance économique a présenté ses limites, en termes de
convergence vis à vis des pays développés (OCDE), de création de
nouveaux postes d’emploi et d’absorption des diplômés chômeurs.
Inefficacité de l’absorption des connaissances et de l’acquisition
d’une capacité technologique performante conduisant à une sous
utilisation du potentiel de capacité sociale, en particulier le capital
humain, et occasionnant la lenteur relative du processus de rattrapage
de la Tunisie.
5. Selon la Banque Mondiale, ces deux objectifs (convergence et
emploi) auraient été atteints si les conditions de bonne gouvernance
étaient respectées, ce qui aurait permis à l’économie de croitre à un
taux de 8 %. Or ce taux a atteint un niveau moyen de 5,2 % sur la
période considérée, avec un seuil maximal n’ayant jamais dépassé
les 6,5 %.
L’ancien modèle de développement ne peut plus se maintenir dans
un contexte socio-économique et politique en transition, faisant suite
à une révolution menée par les jeunes opprimés des régions
déshérités. Cette révolution a complètement bouleversé
l’organisation sociétale de la Tunisie postrévolutionnaire.
6. Le nouveau modèle de développement qui servirait à asseoir
la relance de l’activité économique, durant les années à venir,
aurait trois piliers :
Innovation.
Internationalisation.
Investissement.
7. La conjonction de ces trois piliers génèrerait une croissance
économique soutenue et stable permettant d’absorber,
progressivement, la main d’œuvre au chômage.
L’adoption d’une politique industrielle fondée sur des stratégies
de montée en gammes des activités. Les alliances et le partenariat
avec les étrangers doivent être accompagnés par un transfert de
technologies, de savoir et de savoir-faire de grandes factures,
générant des valeurs ajoutées conséquentes.
L’instauration d’une gestion publique des affaires de l’Etat
fondée sur la bonne gouvernance, la transparence et la crédibilité,
afin de donner l’exemple au secteur privé et rassurer, voire
favoriser l’attrait des IDE.
8. Afin d’étayer la relation complexe entre la croissance de
l’activité économique et la RSE, nous suggérons :
Un processus de relance de l’activité économique qui tient compte
des exigences de l’intérêt général. Ce processus aurait deux pré-
requis :
Offrir des incitations particulières aux jeunes promoteurs, issus
des régions défavorisées, afin d’amorcer l’instauration d’un climat
de confiance entre les acteurs économiques, l’administration et les
citoyens dans ces territoires.
Entamer l’exécution des projets d’amélioration de
l’infrastructure dans les régions déshérités.
9. Ces pré-requis permettraient de réhabiliter le capital-confiance
et la motivation des différents opérateurs économiques, locaux et
étrangers, afin d’investir dans des projets, à la fois, innovants et
créateurs de nouveaux postes d’emploi.
Le rétablissement du climat de confiance fait partie des
prérogatives de l’Etat. Il s’agit du meilleur moyen pour amorcer
les grandes réformes et gérer les grands chantiers, nécessaires au
déclenchement de la relance de l’activité économique.
10. Concrètement, la relance économique prendrait
la forme suivante :
Doter le pays d’une infrastructure routière, ferroviaire et
maritime digne d’une économie émergente. La priorité réside dans
la construction de routes transversales permettant de relier les
régions de l’ouest aux régions côtières, afin d’y créer de nouvelles
zones industrielles. Il faudrait réaménager les réseaux ferroviaires
et maritimes pour accélérer le rythme des échanges et attirer les
investisseurs et les bailleurs de fonds vers les territoires jadis
marginalisés.
Assainir la gestion des grandes firmes publiques qui ont une
position socio-économique de grande importance en Tunisie.
11. Continuer à honorer le paiement du service de la dette
extérieure, afin d’assurer sa crédibilité auprès des bailleurs de
fonds. Cette attitude faciliterait le financement des futurs projets
économiques et sociaux sur des lignes de crédits privés et publics
étrangers.
Consolider la position des branches d’activité où la Tunisie
dispose d’avantages comparatifs, comme les différents secteurs de
l’IEEE, l’IC, l’IME, etc. Ils créent une forte valeur ajoutée, offrent
des opportunités d’emplois qualifiés et drainent des capitaux
étrangers importants.
12. Les principales perspectives de la relance économique :
Une fois la stabilité sociale et politique bien consolidée, l’économie
tunisienne présentera tous les ingrédients nécessaires à une
expansion de long terme soutenue et stable. Le potentiel de
rattrapage des pays développés existe. Il faudrait bien réussir la
période de transition contemporaine, qui ne devrait pas dépasser les
années 2015/2016, de manière à atteindre, progressivement dans
quatre à cinq ans, un taux de croissance annuel moyen de 8 à 10
%, véhicule d’une convergence de développement régional et d’une
réduction du chômage, essentiellement des jeunes.