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Intcollect
- 1. La construction du processus collaboratif dans une
démarche d’intelligence économique et de stimulation
de l’innovation
Un environnement porteur de désordre – ne vise ni plus ni moins qu’à optimiser cette
Depuis la nuit des temps, l’ancrage culturel de nos productivité informationnelle. En d’autres termes,
sociétés impose son implacable logique qui veut la technologie ne crée pas l’usage et la pratique
que l’union fasse la force. collaborative. Elle accompagne l’organisation en
automatisant le processus d’échange, de stockage
L’entreprise est aujourd’hui immergée dans un des données, de maillage des savoirs et de
environnement plus porteur de désordre (certains production de livrables. Et puisque l’intelligence
diront d’opportunités) qu’auparavant : l’ouverture économique consiste, entre autres, à détecter les
des échanges qui engendre une concurrence signaux faibles pour aller lire dans les points
accrue, le développement des normes et aveugles de l’organisation, il est déterminant
réglementations, la crise du système financier, le
passage à une économie post-industrielle.
aujourd’hui de prévoir les processus qui vont
Confrontée à ces perturbations, l’organisation permettre d’effectuer une lecture et une analyse
productive tend à devenir «l’entreprise agile », une qui engagent un groupe et non plus des individus
entreprise engagée dans l’économie de la isolés. Donner du sens à une information, c’est
connaissance, qui s’organise pour anticiper et être en capacité de croiser les diverses données
s’adapter aux nouveaux enjeux, soit une disponibles remontées des capteurs humains et
organisation intelligente à la recherche de autres de l’organisation. Nonobstant, l’information
nouveaux relais de croissance. stratégique ne prend sens que parce qu’elle est
partagée. Le sens vient de l’interprétation qui est
faite de cette information.
Conséquence sur les organisations – Or, la
connaissance n’est pas le fait d’un individu, d’un
service ou encore d’une direction dans l’entreprise. Dès lors, il n’est pas vain de s’interroger sur les
Elle est diluée dans les strates diverses de facteurs de réussite d’une démarche de mise en
l’organisation, qu’elles soient hiérarchiques ou synergie des intelligences individuelles qui
fonctionnelles. composent cette organisation dédiée à la
production de valeur.
On dira, de façon plus prosaïque, que les
entreprises sont soumises de façon croissante à
des contraintes de rentabilité pour faire face à un
environnement concurrentiel plus tendu. Pour y I - DÉFINITION ET CADRAGE DE LA PROBLÉMATIQUE
faire face, elles se sont engagées à optimiser les
ressources internes et pour ce faire, le Qu’est-ce que l’intelligence collective ? – On
développement des pratiques collaboratives est dira qu’elle consiste à agréger les capacités
devenu l’un des enjeux majeurs de l’organisation. cognitives d’une communauté résultant des
Érigée comme nouveau mode de management, interactions entre ses membres en vue de
l’organisation productive réfléchit à la gestion (co)produire un état de la connaissance supérieur
collaborative comme une réponse qui impacte son à celui produit par chaque membre.
environnement proche (son écosystème), soit ce
qu’il est communément appelé l’entreprise Cette définition permet de dresser l’univers
étendue, qui regroupe les clients, les fournisseurs sémantique du concept, où il est fait état de
et les sous-traitants. connaissances, de communautés, d’interactions et
au final de valeur ajoutée. Elle impose aussi la
Surcharge informationnelle – Il s’agit aussi de nécessité de décorréler la notion de pratiques
repositionner l’entreprise dans la dynamique de collaboratives et de plates-formes technologiques.
l’écosystème informationnel actuel, qui se Il est, en effet, notoire de relever la confusion
caractérise par une accélération du cycle de régulièrement faite entre la pratique collaborative
l’information, l’ubiquité étendue, l’hyperconnectivité et les technologies de l’information. Le
des acteurs de l’organisation. Or, une des développement croissant des réseaux sociaux
conséquences directes revient à faire état de ce entretient cette idée que travail collaboratif et
phénomène – de plus en plus prégnant dans plates-formes numériques se confondent. Ce
l’organisation – de surcharge informationnelle. La faisant, c’est négliger la plupart des préalables
mise en place de plates-formes collaboratives nécessaires à l’émergence du fait collaboratif, soit
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les méthodes pour parvenir à la construction d’un appréhender sa culture, ses « rites » en matière de
environnement favorable à l’éclosion de communication, son organigramme, son mode de
l’intelligence collective. C’est surtout s’élever fonctionnement pour la gestion de projets, ses
contre le sens commun qui tend à faire croire que sphères de compétences, ainsi que la nature de
l’outil crée – systématiquement – l’usage ! ses relations avec son environnement direct
constitué des clients, concurrents, fournisseurs,
Objectif de management – Donc l’intelligence sous-traitants, donneurs d’ordre, etc.
collective ne se réduit pas à l’appréciation d’outils
plus ou moins sophistiqués. Pas plus qu’elle ne se Définir les étapes d’un projet – Le monde de
fond dans un cahier des charges universel qui fixe l’entreprise est pavé de bonnes intentions toutes
les règles de réussite du projet collectif. dédiées au développement des pratiques
L’intelligence collective est inscrite dans un collaboratives. Il l’est tout autant de constats
processus global qui impacte le mode d’échec et de désillusions pour ne pas avoir su
d’organisation de l’entreprise. Elle doit être portée organiser, stimuler et entretenir cette dynamique. Il
par un objectif de management. s’avère donc primordial de définir et d’identifier les
étapes d’un projet réussi et de tenir pour postulat
Intention du projet collaboratif – On peut dès que le résultat de la production initiée dans le cadre
lors s’interroger sur l’intention du projet collaboratif. d’une intelligence collective doit être supérieur à
Pour quoi faire ? celui obtenu en additionnant les intelligences
individuelles concernées.
L’observation des faits dans un environnement
économique en mutation laisse apparaître deux
versions. L’une officielle : il s’agit d’améliorer la Chaînage des actions – Dès lors, il est utile de
performance globale de l’entreprise. Sous cou- circonscrire l’analyse au chaînage des actions
vert de productivité accrue, il s’agit d’optimiser nécessaires à la réalisation du projet collectif :
certaines tâches jugées à faible valeur ajoutée
–la validation de l’objectif commun, sans quoi le
comme la collecte d’informations pour concentrer
groupe ne peut être guidé vers sa réalisation ;
davantage l’effort sur l’analyse. L’autre officieuse :
–la recherche de l’adhésion de chacun ;
il s’agit d’en faire le moteur de changement de
l’acceptation est le requis qui dresse la voie
l’organisation pour qu’elle s’adapte au mieux à son
vers l’objectif assigné au groupe ;
nouvel environnement ou bien qu’elle anticipe les
–la définition des rôles individuels passe par un
enjeux futurs qui pèsent sur son environnement.
balisage précis des forces en présence ;
–la définition des axes de surveillance à déployer
et l’identification des sources d’information ;
À ces deux versions régulièrement avancées par –l’organisation des flux d’information pour le
les dirigeants d’entreprises, on peut – dans une partage, le traitement, l’analyse et la prise de
période récente – envisager une troisième décision ;
motivation qui ne se révèle pas spontanément, –l’optimisation de l’analyse et la stimulation de
mais qui émerge dans l’échelle des la créativité du groupe ;
préoccupations de ces dirigeants comme un enjeu –la résolution des problèmes susceptibles d’inter-
subliminal. Cette motivation repose sur l’impérative venir dans l’avancement du projet collectif ;
nécessité d’organiser le transfert des –l’apport de l’ensemble des paramètres de
connaissances entre les générations pour assurer l’analyse au décideur.
la pérennité des organisations.
On verra en fin d’analyse qu’une nouvelle voie L’ensemble de ces séquences s’inscrit dans une
semble se dessiner pour justifier du organisation dédiée et préparée à l’exercice collectif,
développement de la pratique collaborative ce qu’il faut appeler la mise en condition de
notamment en environnement ouvert : celle de la l’organisation « intelligente » pour l’émergence d’un
stimulation de la créativité au niveau des groupes. réseau de savoirs. On notera au passage que
C’est ainsi avancer l’idée que la confrontation des l’ensemble de ces actions ne peut être chaîné qu’à
intelligences individuelles hisse le groupe à un partir du moment où le collectif est porté par la
niveau de créativité supérieur. nécessité de parvenir à un consensus fort à chaque
étape du projet. Ce projet collaboratif ne saurait se
Élargir la réflexion à son écosystème – Pour
limiter à un simple lieu d’expression des
résumer, avant toute approche technologique qui
individualités. La confrontation des idées et des
vise à envisager l’intelligence collective en termes
compétences doit permettre d’atteindre des niveaux
de systèmes d’information, il convient de penser
d’acceptation successifs qui font que l’ensemble est
l’organisation dans son ensemble et d’élargir la
porté vers un objectif final.
réflexion à son écosystème. Ce qui revient à
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II - L’ORGANISATION « INTELLIGENTE » activer l’acquisition de nouvelles compétences,
de nouveaux savoirs et au final de nouveaux
Vécu de l’organisation – L’organisation « modes de partage.
intelligente » ne saurait se limiter à la
représentation d’une construction abstraite qui
s’installerait dans un état de sustentation
permanent, une sorte d’idéal d’organisation qui
III - LES PRÉALABLES REQUIS À L’ÉMERGENCE
n’existe que dans l’esprit. L’organisation DU PROJET COLLABORATIF
«intelligente» telle qu’il faut l’entendre part du
vécu de l’organisation, sa part d’inné et d’acquis. Retours d’expérience – Communiquer sur le
retour d’expérience enregistré sur un projet de
Culture commune – L’organisation productive travail collaboratif est toujours un acte délicat.
est faite d’une culture qui part d’une histoire et L’entreprise doit faire montre de sa capacité à
qui chemine entre un sens donné à son action, activer ses ressources internes. Elle mène ce
une vision de son développement et un objectif faisant un exercice introspectif sur son
de croissance. Cette culture est (a priori) organisation. Il est toujours difficile de mener ce
partagée par l’ensemble des individus qui type d’exercice pour le rendre public. Le peu de
appartiennent à l’organisation dans un système retours d’expérience sur le sujet impose une
de valeurs qui marquent le sentiment stature où la prudence l’emporte sur l’énoncé
d’appartenance. de principes qu’il reste à valider. Les facteurs-
clés de succès de tels projets sont bien sûr très
Rituels de communication – L’organisation est dépendants de l’environnement dans lequel se
aussi faite de rites qui se sont installés avec le situe l’organisation «intelligente» ; on peut
temps. Ces rites peuvent bien sûr évoluer, mais cependant émettre quelques éléments de bon
la rupture est toujours source de perturbations. sens qui sont nécessaires à l’émergence du fait
Elle doit se préparer, s’organiser et être collaboratif. Au titre de ces éléments, on peut
accompagnée. Les rituels de communication penser que certaines conditions s’imposent a
installés dans l’organisation concourent à la minima pour atteindre un niveau de
difficulté d’installer le changement en son sein. Ils collaboration satisfaisant.
consistent à organiser les codes dans la
Facteurs de succès – Parmi ces items, on
communication interpersonnelle au sein de
retiendra :
l’entreprise. Installer des processus collaboratifs
dans l’entreprise suppose ne pas perturber ces –un objectif clair et atteignable ;
schémas de communication. –la construction d’une vision commune ;
–la définition d’un début et d’une fin de mandat
Structure hiérarchique – Toutes les entreprises
au collectif. De ce point de vue, la démarche
se caractérisent, par ailleurs, par une structure
s’apparente à la gestion de projet ;
hiérarchique bien définie représentée dans
–la constitution de l’équipe à partir des compé-
l’organigramme. Cette structure organisationnelle
tences diverses, ce qui impose la nécessité de
dénote a priori de la capacité de l’entreprise à
disposer d’une cartographie des compétences
organiser les processus de production de
internes ;
produits et/ou de connaissance optimisés
–la définition précise des rôles (qui fait quoi ?) ;
(l’entreprise horizontale ou organisation
–l’élaboration des principes et règles pour
transverse) et les processus décisionnels qui
l’entrée dans un projet collectif, étant entendu
relèvent d’une verticalité inscrite dans
que tout le monde n’a pas vocation à être
l’organigramme.
dans le collectif. Ce qui suppose aussi que
Projet – Comme envisagé auparavant, le l’organisation pense l’accompagnement des
développement de l’entreprise est inscrit dans un membres pour intégrer le collectif ;
projet qui donne un sens à son action. La –la valorisation des acteurs impliqués dans le
stratégie apporte les éléments qui permettent de projet et la gestion de la motivation ;
scénariser les actions planifiées en vue de –l’organisation de l’apprentissage entre les
remplir sa mission. Là encore, tout changement membres de la communauté ; apprendre à se
sur la feuillede route de l’organisation productive connaître, à communiquer ensemble ;
revient à agir sur l’ensemble des paramètres du –la capacité de l’organisation à renouveler les
projet. effectifs du collectif et donc à intégrer les nou-
veaux membres ;
Organisation apprenante – Étant entendu que –l’aptitude à cerner l’environnement du projet et
l’organisation est soumise à ses propres forces le jeu des contraintes (conflits susceptibles
d’inertie (le poids de l’inné), l’organisation
«intelligente» se définit par sa capacité (il serait
d’ailleurs plus opportun de dire son agilité) à
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d’émerger entre membres, droit de la propriété risques de surcharge informationnelle. Il ne s’agit
intellectuelle, etc.) ; plus dès lors d’apporter l’information, mais de
–la possibilité de juger de la performance du mettre le collectif en position de déterminer ses
groupe à partir d’étapes identifiées. L’analyse besoins informationnels. L’animateur agit comme
des performances du fait collaboratif ne sau- un facilitateur pour porter la vision du groupe et lui
rait se réduire à un agrégat de données statis- permettre d’atteindre ce niveau supérieur de
tiques sur l’utilisation d’outils et de plates- connaissance compte tenu des enjeux. Il modère
formes dédiés. le collectif en définissant et explicitant les règles
de la contribution de chaque partie sans toute-
On l’aura compris, les organisations ne sont pas fois nuire à la spontanéité des échanges.
naturellement prédisposées à fonctionner en
mode collaboratif. Il s’agit d’organiser le collectif Véritable coach au service du collectif, il stimule
de telle façon que les comportements individuels les capacités d’adaptation du groupe, voire
(les savoir-être) soient stimulés pour créer un favorise ses capacités d’anticipation pour faire que
effet positif pour atteindre un nouvel équilibre, le collectif transcende les énergies individuelles.
soit un delta plus par rapport à l’équilibre
antérieur. L’intérêt commun ne saurait se Liste des tâches du « community manager » –
substituer à l’intérêt de chacune des parties, ce Son action recouvre l’ensemble des tâches qui ont
qui impose à l’exercice un impératif de permettre d’impulser la dynamique de groupe :
clarification des objectifs et de valorisation
continue des compétences impliquées dans le –organiser les processus en termes de flux
projet. d’information, de production et de capitalisa-
tion des savoirs ;
–amener l’ensemble des individualités à accepter
ces règles et les responsabiliser sur les tâches
IV - UNE QUESTION DE MÉTHODE
définies. Il ne s’agit pas là de se substituer à la
Repartir des fondamentaux – Il s’agit de hiérarchie qui prévaut dans chaque organisa-
replacer les méthodologies quant à l’animation tion, mais de jouer sur les facteurs qui permet-
des communautés de professionnels en amont tent de lier responsabilisation et valorisation ;
de l’approche technologique, soit repartir des –être le gardien de l’objectif du groupe tout en
fondamentaux pour construire une organisation portant la mémoire de l’ensemble ;
qui agrège les complémentarités des mondes –révéler les enjeux en fonction de l’avancement
physique et virtuel. L’interface homme-machine du projet collectif et identifier les écueils ;
ne saurait à elle seule expliquer le fait –stimuler la communauté pour la recherche de
collaboratif. l’information utile et faire que fournisseurs
« Community manager » – Considérant que le d’information et consommateurs interagissent ;
travail collaboratif est un acte de communication –orienter la réflexion stratégique du groupe en
en premier lieu, il y nécessité de replacer le rôle vue d’atteindre l’objectif initial ;
déterminant d’un acteur central dans –gérer l’apprentissage du collectif pour consti-
l’écosystème de l’organisation productive : celui tuer une mémoire commune sous la forme
d’animateur. Celui que les anglo-saxons d’une base de connaissances pérenne ;
nomment plus justement le «community –valoriser les compétences individuelles ;
manager» –être en capacité de recontextualiser les enjeux
dans le cadre du collectif.
Rôle du «community manager» – Le
«community manager» est au centre de la
démarche collaborative. Il agit comme le
révélateur des capacités individuelles pour Rôle déterminant du « community manager » – Il
transcender le collectif ; il gère la mémoire du est essentiel d’insister sur le rôle déterminant que
groupe dans le cadre de la base de joue l’animateur de la communauté. Catalyseur des
connaissance qui doit assurer la pérennité du énergies individuelles, il tire l’ensemble pour
collectif ; il organise les échanges pour atteindre atteindre l’objectif défini. Il sait organiser la
systématiquement le niveau de consensus complémentarité des compétences qu’il a su profiler
nécessaire à la validation de chaque étape du et capitaliser sur la pluridisciplinarité des forces en
projet. présence. Il est à la fois le nœud de communication
de la communauté [cf. Fig. 1], l’impulseur d’une
Il doit faire montre d’une capacité à détecter et dynamique de création et l’activateur des processus
sourcer les informations pour permettre au automatisés qui vont permettre de fluidifier les
groupe de les interpréter, tout comme il doit être échanges par l’intermédiaire des outils.
en mesure de révéler au groupe ses besoins
informationnels et de lutter de la sorte contre les
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faire accepter les règles organiser les processus
porter la mémoire du collectif responsabiliser les acteurs
faire interagir les individualités stimuler la communauté
Community
manager
orienter la réflexion rechercher le consensus
piloter la base de connaissances gérer l’apprentissage du collectif
recontextualiser les enjeux valoriser les compétences individuelles
Fig. 1 – Rôle et missions du « community manager ».
V - LA TECHNOLOGIE, LES OUTILS AU SERVICE Outils de communication – De manière générale,
DE LA MÉTHODE on retrouve dans les plates-formes intégrées un
socle de fonctions commun pour assurer la gestion
Origine des pratiques innovantes – des interactions entre les membres à partir d’outils
L’économie de la connaissance engage dédiés à la communication, qu’elle soit de nature
l’ensemble de la société dans un rapport synchrone avec une mise en relation en temps réel
particulier aux technologies de l’information. Le tels :
fait est que l’inversion des schémas classiques
de diffusion des innovations dans le domaine des –un espace Web conférence ;
usages numériques apporte un éclairage –une messagerie instantanée ;
nouveau à l’appréhension du fait collaboratif. En –une gestion de l’expertise (cartographie et
effet, les pratiques innovantes semblent identification des compétences) et de la mise
aujourd’hui partir d’usages privatifs pour investir en relation.
durablement les environnements professionnels.
ou de nature asynchrone tels :
Traiter l’information – Dresser aujourd’hui une –une messagerie mail ;
typologie des outils et plates-formes dédiés à la –des forums de discussion ;
pratique collaborative en entreprise revient à –une liste de diffusion.
définir sur la base de besoins exprimés les
couvertures fonctionnelles proposées par ces Fonctions ajoutées aux outils – À ces outils de
solutions. En tout état de cause, ces plates- communication à proprement parler, il faut y ajouter
formes doivent être entendues comme une les fonctions de production, d’édition et de diffusion,
interface qui organise une suite de fonctionnalités telles :
toutes dédiées à fluidifier les flux d’information –une interface de publication et d’édition
collectés, optimiser la diffusion, le traitement, partagée ;
l’analyse et la restitution. On retrouve –un module de recherche pour effectuer des
explicitement l’idée que le développement de la requêtes dans une base de connaissances ou
pratique collaborative participe à l’accroissement sur le Net ;
de la productivité. –un système d’alerte ;
–un système de classement.
Applications en fonction de besoins
spécifiques – Les fonctions proposées par ces Nouvelles fonctionnalités ajoutées – Cependant,
solutions le sont sous forme de briques l’émergence de nouvelles pratiques initiées dans un
fonctionnelles pour répondre à un besoin précis. contexte non professionnel tend à innerver les
Elles peuvent être intégrées dans des suites applications dédiées aux entreprises. Sous le vocable
logicielles. À cela, il faut ajouter des applications « Entreprise 2.0 », on assiste à la convergence entre
métiers qui répondent de par les fonctions pro- des outils dédiés au fait collaboratif et de nouvelles
posées à des besoins métiers spécifiques. attentes en termes
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de consommation et d’usages. Sous couvert de L’émergence et l’arrivée sur le marché du travail
favoriser le partage des données et le processus d’une nouvelle catégorie d’usagers : la génération Y
de co-création, coproduction, les solutions ou « digital natives » (soit la tranche de population
présentes sur le marché intègrent de nouvelles née au-delà de 1983 et qui est en phase d’intégrer
fonctionnalités : une activité professionnelle aujourd’hui) est, en
effet, en passe de modifier radicalement les
–l’annotation, l’amendement et la mise en organisations de par leur aptitude à être à la fois
perspective avec d’autres informations, le des consommateurs et des acteurs du Web qui se
commentaire et l’ouverture d’espaces de dis- construit. Ces nouveaux arrivants qui ont
cussion, l’adjonction de mots-clés et de des- immédiatement été immergés dans un
cripteurs, soit tout processus qui concoure à environnement digital ont des comportements
l’enrichissement des contenus ; d’emblée adaptés aux usages numériques. Ils sont
–l’émergence des connaissances tacites (le non ce faisant déjà engagés dans un processus de
dit) ; socialisation (numérique) avant d’intégrer les
–le social bookmarking intégré au processus de organisations et apportent à celles-ci des modalités
veille collaborative ; d’usage orientées «naturellement» vers le partage
–la classification et la catégorisation des et la coproduction de contenus. C’est aussi
contenus ; reconnaître en cette nouvelle population la capacité
–la cartographie des résultats produits pour de placer l’expérience comme un des éléments qui
optimiser la phase d’analyse. conditionne l’adoption de ces outils.
À noter
Cette tendance s’inscrit dans un nouvel Attrait du Web. 2.0 – À ce stade de l’analyse, il est
environne ment numérique dont le paradigme un fait que l’émergence du fait communautaire
est quelque peu modifié sous l’impact du impulsé par les applications proposées par Internet
développement des réseaux et infrastructures réputé collaboratif (Web 2.0) modifie quelque peu
de communication (haut débit, fibre optique), l’analyse que l’on pouvait porter sur le travail
ainsi que des applications qui permettent collaboratif et constitue davantage une opportunité
d’accéder aux contenus. Il est un fait que pour l’entreprise agile qu’une menace.
l’efficacité des organisations et des individus
passe désormais davantage par leur capacité à
gérer les flux plutôt que des stocks. De ce Importance de l’intelligence humaine – En tout
nouvel environnement, les organisations se état de cause, les plates-formes devraient
doivent de développer de nouveaux savoir-faire, permettre l’optimisation des processus de
voire une nouvelle agilité pour gérer le « traitement des tâches supportées par la
zapping informationnel », le croisement des communauté, mais ne sauraient se substituer à
données, le développement de la réactivité des l’intelligence humaine pour l’organisation de celles-
acteurs dans une culture du temps réel qui ci. La réussite de la mise en place de ces plates-
s’affirme durablement. formes est souvent conditionnée à l’existence de
communautés d’intérêt et de pratiques déjà
Adoption des outils de communication – Tout présentes dans l’entreprise.
ceci pose avec acuité la question de
l’accompagnement des individualités pour
intégrer le collectif, soit l’organisation du
processus d’accompagnement du changement et VI - LA PRATIQUE COLLABORATIVE APPLIQUÉE
donc des méthodes. Cependant, force est de DANS UN ENVIRONNEMENT OUVERT
constater que la dynamique des organisations
n’est pas inscrite dans un processus figé et
prévisible. Divers facteurs viennent perturber les A - Descriptif d’un environnement
schémas classiques. On l’a vu précédemment ouvert
avec le développement des technologies de Définition – Si la question est de savoir comment
l’information qui favorisent de nouveaux usages, mettre en place une dynamique participative dans
celui de nouvelles pratiques numériques, de l’organisation productive, on peut aussi la poser dans
nouveaux modes de consommation de le cas où cette organisation est ouverte sur son
l’information, de nouvelles modalités d’accès aux environnement ; ce à quoi il était fait référence sous
contenus et qui – au final – reformatent les le vocable d’« entreprise étendue ». L’organisation
besoins des utilisateurs. des territoires qui se construit autour des
regroupements d’organisations
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productives tels les clusters, les pôles de B - Le secteur du numérique
compétitivité, si on y intègre les centres de
recherche, nous invite à penser l’organisation et Secteur en pointe – À bien des égards, il est
l’animation de communautés de pratiques à intéressant de faire un focus sur l’innovation
l’échelon d’un territoire, de communautés d’intérêt, ouverte appliquée au secteur du numérique pour
de filières. illustrer le principe de collaboration ouverte au-
Des initiatives menées – Dans ce contexte, delà des limites de l’organisation productive.
nombre d’initiatives ont été menées dans un passé C’est aussi l’opportunité de trouver le liant entre
récent sur ces nouvelles organisations « la pratique collaborative dans un but clairement
intelligentes ». Les plus médiatiquement exposées défini et les plates-formes de coproduction.
l’ont été sur les pôles de compétitivité avec le
développement de plates-formes d’échanges, voire Stratégie globale – On y observe, en effet, une
d’intelligence économique dont les principales porosité certaine entre les acteurs du secteur et
fonctionnalités sont orientées vers la veille, les leur environnement. Le fait est que cette industrie
processus d’alertes et l’analyse. des services et contenus numériques est par
nature ouverte sur le monde. On parlera de
marché global. Il est, par conséquent, dans
Rupture dans l’approche traditionnelle – l’ordre naturel des choses que cette ouverture ne
L’émergence du fait collaboratif sous l’impulsion se limite pas exclusivement à une logique de
des nouvelles applications réputées participatives marché. L’innovation ouverte embrasse une
marque aussi un point de rupture dans l’approche stratégie qui modifie l’approche classique
traditionnelle des réseaux de compétences d’intégration verticale. Elle agrège des savoirs,
ouverts. L’écosystème informationnel a évolué des compétences et des savoir-faire pour créer
sous la conjonction de divers événements : les conditions d’un marché nouveau. De ce
marché, chaque entité contributrice doit y trouver
une source de revenus qu’elle n’aurait pas été en
mesure de développer seule. C’est un marché
–l’accessibilité simplifiée aux données produites
gagnant-gagnant qui installe un nouveau rapport
notamment dans le domaine de la recherche
entre les participants.
publique (ce thème est régulièrement repris
sous l’intitulé « open access ») ;
–le développement des réseaux sociaux et de Développement de nouveaux services – Il est
l’adhésion aux communautés de pratiques et opportun d’observer la tendance qui se dessine
d’intérêts ; dans le domaine des services Web autour des
–le fait de délocaliser l’intelligence de la station logiques recombinatoires qui prévalent avec les
de travail (l’ordinateur) vers le réseau des mashups. Le principe est de créer des
réseaux avec le développement des modalités applications composites par un assemblage de
d’accès aux fonctions intelligentes (le logiciel) contenus provenant de diverses sources. Au
en Web service ; 1 final, de nouvelles applications et services
–l’effacement progressif des sphères privées et d’information sont proposés au marché. Pour
professionnelles ; illustrer cette nouvelle tendance au
–l’accélération du cycle de l’information qui développement de nouveaux services
modifie le rapport à celle-ci, soit le raccourcis- d’information, on citera le cas des sites de
sement du délai entre l’identification de la géolocalisation produits à partir des interfaces de
source, la capture de l’information et sa programmation ouvertes (API) de Google.
diffusion ;
–l’excroissance des contenus produits par les Cas de l’AppStore d’Apple – Tout aussi
utilisateurs (User Generated content – UGC). représentatif de la dynamique d’innovation
ouverte dans le secteur du numérique est le cas
Cette évolution stimule l’émergence de nouveaux de l’AppStore d’Apple ou espace de distribution
usages numériques et participe au développement des applications mobiles dédiées au marché de
des pratiques collaboratives notamment dans un l’iPhone. Le principe : Apple ouvre l’accès de son
environnement ouvert, au-delà des limites de centre de développement de l’iPhone aux
l’entreprise. développeurs. Ces développeurs produisent les
applications susceptibles d’êtres hébergées par
le terminal produit par Apple (75 000 applica-
tions disponibles en septembre 2009).
(1) La littérature se réfère aujourd’hui à ce thème du transfert de l’intelligence de la machine vers le réseau sous le vocable de nuage informatique (clo ud
computing), soit l’espace qui accueille à la fois l’intelligence et les contenus.
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Apple organise la diffusion et la monétisation de ces
applications produites par des tiers depuis son
interface de distribution : l’AppStore. Les revenus
générés sur les ventes réalisées sont ensuite répartis
entre le distributeur et l’éditeur. On notera cependant
que la collaboration se limite dans les deux cas
présentés à une addition de compétences pour
produire un service éventuellement monétisable. En
l’occurrence, il ne s’agit pas de co-création au sens
où un projet collectif est porté par des équipes. La
démarche n’en reste pas moins novatrice, puisqu’il
s’agit d’envisager ensemble des voies de partenariat
pour amener sur le marché des services nouveaux.
Dans ce sens, la collaboration est davantage le fait de
rétroactions (feedback) entre les partenaires que de
travail collectif à proprement parler.
Logiciel libre – Dans ce contexte d’innovation ouverte,
il est opportun de lier l’analyse de la pratique
collaborative avec l’observation des faits et évolutions
constatés dans le domaine du logiciel libre. En effet, il
est intéressant de souligner le dynamisme des
innovations dans ce secteur en insistant sur l’agilité de
ces communautés à organiser la coopération autour de
projets innovants. C’est reconnaître à ces
communautés la capacité à lier usages et
développement, à structurer l’espace de
développement autour d’un système de gouvernance
sur des procédures décrites et acceptées, la pérennité
de ces espaces communautaires étant assurée par une
description précise des tâches autour d’un centre qui
veille au respect des règles communes, qui organise
les discussions et échanges et gère l’apprentissage
collectif. Les contributeurs y trouvent, quant à eux, les
moyens de valoriser leurs compétences, de confronter
le résultat de leurs travaux à la communauté et de les
diffuser afin d’y trouver des voies d’amélioration. Ce
processus coopératif d’innovation qui mêle usages,
créativité et développements ne peut assurer sa
pérennité qu’à partir du moment où son environnement
est normé et balisé pour engager l’ensemble des
acteurs de la communauté dans une dynamique
impliquante. Après, c’est affaire de méthode…
© Ludovic Bour - septembre 2010 - http://www.wmaker.net/lamachineacafe/