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La faillite d'entreprise, champ d'application
   privil¶gi¶ des m¶thodes quantitatives en
          e e        e
                      gestion

                           par Didier Van Caillie


Introduction1
    La recherche en matiµre de faillite d'entreprise s'est d¶velopp¶e,
                            e                                  e       e
depuis le tout d¶but du XXµme siµcle d¶jµ, a la frontiµre de la recherche
                e             e        e  ea µ          e
en ¯nance d'entreprise, en strat¶gie et en statistique. Riche de plusieurs
                                    e
centaines d'articles publi¶s et de milliers de contributions non publi¶es,
                           e                                           e
cette recherche, fondamentalement transdisciplinaire, se caract¶rise e
par 3 phases successives :
    - D'abord, elle s'est focalis¶e sur l'identi¯cation d'indicateurs ¯-
                                     e
      nanciers susceptibles de mesurer le risque de d¶faillance d'une
                                                          e
      entreprise et donc de pr¶dire, avec plus ou moins d'acuit¶, sa
                                   e                                 e
      prochaine faillite. La dimension  pr¶diction des faillites " est
                                               e
      alors dominante.
    - Ensuite, elle a cherch¶ a d¶composer la dynamique qui sous-
                                e µ e
      tend tout processus de d¶gradation de la sant¶ d'une entreprise,
                                   e                   e
      en visant µ mettre en ¶vidence non seulement des sympt^mes
                 a               e                                   o
      annonciateurs d'une prochaine d¶faillance, mais surtout les causes
                                         e
      op¶rationnelles ou strat¶giques r¶elles de cette d¶faillance et la
         e                        e       e                 e
      structuration temporelle de ces causes. La dimension " pr¶vention
                                                                   e
      passive des faillites " prend alors le pas sur la simple dimension
      pr¶dictive.
        e
    - En¯n, elle tente µ pr¶sent de mettre en ¶vidence des trajectoires-
                        a e                      e
      types de d¶faillance, dont la connaissance de la dynamique per-
                 e
      mettrait en¯n de mettre r¶ellement et e±cacement en place des
                                     e
      strat¶gies actives de pr¶vention des faillites, permettant ainsi
            e                     e
      v¶ritablement la mise en oeuvre d'une dimension de pr¶vention
       e                                                         e
      active des d¶faillances d'entreprise".
                   e
   1
     Cette recherche constitue le volet th¶orique et conceptuel d'un projet de
                                            e
recherche plus vaste, intitul¶ Approfondissement du concept de `R¶sultat ajout¶'
                             e                                      e           e
en tant qu'indicateur de pr¶vention des d¶faillances d'entreprises" et ¯nanc¶ par-
                             e            e                                 e
tiellement par un subside de recherche octroy¶ par la Banque Nationale de Bel-
                                               e
gique.


                                        1
A chacune de ces phases furent associ¶es une ou plusieurs m¶thodes
                                        e                      e
quantitatives particuliµres, dont l'¶mergence alors r¶cente trouvait
                         e           e                 e
souvent dans le domaine de la faillite d'entreprise un champ d'appli-
cation fertile en donn¶es utilisables et potentiellement riche en en-
                        e
seignements pour des d¶cideurs avides d'¶tayer leur prise de d¶cision
                          e                 e                    e
par une analyse rigoureuse d'un ph¶nomµne hautement complexe.
                                     e      e
Aux modµles essentiellement lin¶aires (discriminants ou logistiques)
           e                      e
caract¶ristiques de la dimension pr¶diction des faillites" ont ainsi
        e                              e
succ¶d¶ des approches non ou moins lin¶aires (modµles factoriels en
     e e                                   e         e
composantes principales ou en correspondances multiples, arbres de
classi¯cation, ensembles °ous, . . .) davantage aptes a faire ¶merger
                                                       µ       e
des facteurs strat¶giques ou organisationnels annonciateurs de fail-
                    e
lite, en exploitant parfois l'expertise accumul¶e par des analystes
                                                  e
de cr¶dit con¯rm¶s (systµmes experts, systµmes d'aides a la d¶cision
      e            e        e                 e           µ      e
multicritµres). Plus r¶cemment, la mise en oeuvre de techniques de
          e            e
logique °oue et de r¶seaux de neurones a en¯n permis, quoique en-
                      e
core trµs partiellement, de faire ¶merger de v¶ritables trajectoires de
        e                         e             e
d¶faillance.
  e
     La pr¶sente contribution poursuit dµs lors 3 buts :
          e                               e
  1. Elle dresse d'abord un panorama structur¶ et critique de l'¶tat
                                               e                e
     de la recherche men¶e (tant dans les contextes anglo-saxons
                          e
     que francophones) en matiµre de faillite d'entreprise et met en
                                e
     ¶vidence les multiples facettes de ce champ de recherche.
     e
  2. Elle dresse ensuite un parallµle entre l'¶mergence de chacune des
                                  e           e
     3 phases de cette recherche et le d¶veloppement d'une ou de
                                            e
     quelques m¶thodes quantitatives particuliµres, montrant ainsi
                 e                                e
     le r^le contingent jou¶ par ces m¶thodes quantitatives sur le
          o                 e             e
     d¶veloppement de ce champ de recherche. Elle montre en cons¶quence
       e                                                           e
     comment cette recherche est pass¶e dµs lors progressivement
                                          e e
     d'une optique de pr¶diction statique du risque de faillite em-
                          e
     preinte du sceau d'une saine gestion du risque de cr¶dit a une
                                                            e   µ
     optique plus dynamique, d'abord r¶active puis proactive, de
                                            e
     pr¶vention de la d¶faillance d'entreprise empreinte de la volont¶
        e               e                                            e
     de g¶rer activement l'¶volution strat¶gique de la vie de l'entre-
           e                e               e
     prise.
  3. Elle met en¯n en ¶vidence des pistes de d¶veloppement futures
                      e                       e
     permettant de combler, µ tout le moins partiellement, les la-
                             a
     cunes ou zones d'ombre encore laiss¶es par la recherche exis-
                                          e

                                  2
tante, extr^mement marqu¶e par les facteurs contingents pe-
                 e               e
     sant sur les multiples chercheurs qui se sont attaqu¶s a cette
                                                            e µ
     probl¶matique. L'accent y est mis sur la n¶cessit¶ d'exploiter
           e                                       e     e
     mieux les outils existants ou d'identi¯er de nouveaux outils
     quantitatifs aptes µ en¯n permettre la mise en oeuvre e®ec-
                         a
     tive de politique de pr¶vention des faillite dµs que les premiers
                            e                      e
     signes d'une ¶volution d'une entreprise vers une trajectoire de
                   e
     d¶faillance type sont identi¯¶s : la focalisation de la recherche
       e                           e
     en matiµre de faillite d'entreprise sur le sous-domaine de l'i-
              e
     denti¯cation de trajectoires types de d¶faillance est en e®et
                                                e
     aujourd'hui devenu une n¶cessit¶, compte tenu a la fois des
                                e      e                 µ
     cons¶quences ¶conomiques, sociales et ¯nanciµres de toute fail-
          e         e                                e
     lite et du contexte ¶conomique turbulent et di±cile dans lequel
                         e
     ¶voluent l'ensemble des ¶conomies r¶gionales et nationales.
     e                        e            e


1    La faillite d'entreprise, un champ de recherche
     aux multiples facettes
    L'importance ¶conomique et sociale du ph¶nomµne de la faillite
                    e                              e    e
d'entreprise est en e®et reconnue depuis fort longtemps, tant dans le
monde anglo-saxon que dans le monde francophone, comme en atteste
par exemple l'¶tude historique men¶e par Marco (1984)[29].
               e                       e
Cette importance, qui se mat¶rialise depuis le d¶but du XXµme siµcle
                               e                   e          e    e
et les travaux de Rosendale (1908)[36] par la publication de plusieurs
centaines d'articles scienti¯ques et la r¶alisation de contributions ou
                                          e
de recherches non publi¶es encore plus nombreuses (Altman [3], 1984)
                          e
(Daubie & Meskens [18], 2001) (Guilhot [25], 2000) (Morris [32],
1997), s'explique fondamentalement par deux ¶l¶ments distincts.
                                                   ee
D'abord, la faillite d'une entreprise signi¯e, au plan micro¶conomique,
                                                            e
l'arr^t des activit¶s ¶conomiques g¶n¶r¶es par la mise en commun
     e              e e                e ee
d'un ensemble unique de ressources rares (humaines, techniques, im-
mat¶rielles et ¯nanciµres), rassembl¶es, agenc¶es et coordonn¶es pen-
     e                 e               e         e              e
dant une p¶riode de temps plus ou moins longue pour permettre
             e
a
µ l'organisation qui en d¶coule de remplir une fonction de concep-
                            e
tion, de production et de distribution de biens et de services (r^le o
¶conomique de l'entit¶  entreprise " cr¶atrice de valeur ¶conomique).
e                       e                 e                e
Elle signi¯e aussi la ¯n d'une aventure entrepreneuriale dans laquelle,
g¶n¶ralement, un ou plusieurs entrepreneurs ont fortement investi leur
  e e

                                  3
pouvoir d'innovation, d'imagination et d'organisation de ressources
rares (r^le entrepreneurial de l'entit¶  entreprise ") et sans laque-
          o                               e
lle, dans une vision schump¶terienne du r^le de l'entrepreneur, il est
                                 e              o
impossible µ une ¶conomie d'esp¶rer survivre et se r¶g¶n¶rer. De ce
               a      e               e                     e e e
fait, la faillite d'une entreprise engendre in¶vitablement un gaspillage
                                                 e
¶conomique de ressources rares (utilis¶es de maniµre non e±ciente
e                                           e             e
avant la d¶claration juridique de faillite, voire non utilis¶es du tout
             e                                                  e
aprµs cette d¶claration) et consacre une r¶duction, ne fut-ce que mar-
     e           e                             e
ginale, du pouvoir d'innovation de l'¶conomie en g¶n¶ral.
                                          e              e e
Ensuite, l'entreprise est aussi assimilable, dans une conception d¶sormais
                                                                    e
classique (Robbins [35], 1990), a un systµme ouvert, ensemble coor-
                                    µ          e
donn¶ et organis¶ de parties interd¶pendantes actif au sein d'un envi-
       e            e                   e
ronnement en constante ¶volution avec lequel il interagit de maniµre
                             e                                          e
permanente. Elle vit de ce fait en ¶troite relation avec les princi-
                                          e
pales composantes de cet environnement (fournisseurs, clients, con-
currents, Pouvoirs Publics, fournisseurs de capitaux et de main d'oeu-
vre) et la rupture de cette relation du fait de la faillite engendre
dµs lors in¶vitablement des cons¶quences indirectes sur le potentiel
  e           e                       e
de cr¶ation de valeur de ces composantes respectives, cons¶quences
       e                                                          e
d'autant plus importantes que l'intensit¶ de cette relation est forte2 .
                                             e
L'impact ¶conomique, social et humain qui d¶coule, directement ou
            e                                       e
indirectement, de la faillite d'une entreprise justi¯e donc largement
l'int¶r^t que nombre de chercheurs ont port¶ a la probl¶matique
      ee                                             e µ          e
g¶n¶rale de la faillite dans le domaine global des sciences de ges-
  e e
tion et dans les domaines particuliers de la ¯nance, de la strat¶gie, e
de la statistique appliqu¶e ou de l'¶conomie industrielle au cours des
                            e           e
derniµres d¶cennies.
       e      e
Cette recherche n'est cependant pas, loin de lµ, uniforme. La multi-
                                                     a
plicit¶ des origines des chercheurs impliqu¶s, leur appr¶hension l¶galiste
       e                                       e            e       e
ou dynamique du concept m^me de la faillite, les deux approches qui
                                  e
en d¶coulent et l'angle d'¶tude du ph¶nomµne de la faillite qu'ils
       e                        e            e     e
privil¶gient conduisent in¶vitablement a peindre le portrait d'une
        e                      e              µ
recherche aux multiples visages, riche d'une multitude de lectures
   2
     L'intensit¶ de cette relation est elle-m^me le r¶sultat de la conjonction de
               e                             e       e
nombreux facteurs contingents, parmi lesquels la taille de l'entreprise (en termes
d'emplois directs g¶n¶r¶s ou en termes de chi®re d'a®aires r¶alis¶), la structure
                    e ee                                      e e
de sa cha^ de valeur, son insertion dans les r¶seaux productifs et commerciaux
          ³ne                                  e
locaux ou son image en tant que levier de l'activit¶ ¶conomique d'une r¶gion ne
                                                    ee                    e
sont pas les moindres.


                                        4
compl¶mentaires possibles3 .
     e

1.1    Des chercheurs en provenance de quatre origines
    A l'analyse, il nous appara^ ainsi que quatre cat¶gories de chercheurs,
                                    ³t                   e
devenus de facto µ la fois observateurs et acteurs du ph¶nomµne de
                      a                                         e     e
la faillite, ont consacr¶ une part substantielle ou marginale de leur
                            e
attention µ la d¶faillance de l'entreprise.
            a      e
D'abord, il y a les chercheurs issus du monde de la ¯nance de march¶       e
ou qui ont fait leurs les paradigmes propres a la ¯nance de march¶.
                                                    µ                     e
L'entreprise y est alors consid¶r¶e comme un actif ¯nancier, dans
                                       ee
lequel il est possible d'investir ou qui adresse au march¶ une de-e
mande de cr¶dit et dont il faut optimiser le couple risque - rende-
                e
mentqui lui est associ¶. Dans cette perspective, l'accent est alors mis
                          e
essentiellement sur la gestion du risque de cr¶dit associ¶ a cette en-
                                                    e          eµ
treprise (µ savoir donc le risque de n'^tre tenu indemne que d'une
            a                                e
partie seulement de la cr¶ance d¶tenue sur l'entreprise) et les outils et
                              e        e
m¶thodes d¶ploy¶s visent essentiellement a mettre en ¶vidence, aussi
  e           e      e                          µ            e
t^t que possible, des signaux (essentiellement d'origine comptable
 o
et/ou ¯nanciµre) annonciateurs d'une d¶faillance potentielle. L'op-
                e                              e
tique  gestion du risque de cr¶dit " domine clairement ce courant de
                                     e
la recherche, qui g¶nµre encore actuellement la majorit¶ du °ux de
                        e e                                    e
recherches publi¶es dans le champ de la faillite d'entreprise.
                   e
Ensuite, il y a les chercheurs actifs dans des domaines de recherche au
caractµre quantitatif marqu¶. Chercheurs dans les champs de la statis-
        e                         e
tique appliqu¶e, de l'analyse des donn¶es, de la recherche op¶rationnelle
                e                          e                      e
ou de l'analyse math¶matique, ils trouvent dans l'¶tude pr¶dictive
                           e                               e        e
des faillites un domaine d'application propice µ l'¶laboration et µ la
                                                      a e               a
validation d'applications statistiques propres ou au test d'outils sta-
tistiques ou math¶matiques particuliers. L'ampleur et la qualit¶ de
                       e                                                e
donn¶es (notamment comptables) disponibles relativement ais¶ment,
      e                                                              e
a
µ moindre co^t et traitables selon un r¶f¶rentiel largement accept¶
                 u                             ee                          e
(largement inspir¶ du champ de l'analyse ¯nanciµre ou de l'analyse
                      e                                 e
de bilans) explique la pr¶sence d'un grand nombre de recherches,
                                e
publi¶es et plus encore non publi¶es, privil¶giant l'application d'une
      e                                  e        e
   3
    A notre sens, un des principaux reproches a adresser a de trop nombreuses
                                               µ            µ
recherches publi¶es en matiµre de pr¶diction de faillite est leur absence de prise
                e           e        e
en compte des autres lectures possibles du problµme analys¶ et leur absence de
                                                 e            e
positionnement clair dans le vaste champ de cette recherche sp¶cialis¶e.
                                                                e     e


                                        5
technique ou d'un outil statistique particulier et mettant en exergue
sa capacit¶ a pr¶dire e®ectivement correctement, avec un d¶lai plus ou
           eµ e                                                 e
moins long, des faillites in¶vitablement pass¶es
                            e                   e 4 . De ce fait, la dimen-

sion gestion du risque de cr¶dit" domine insidieusement ¶galement
                                e                                 e
ce courant de recherche.
Les chercheurs issus du monde du droit ou des milieux juridiques au
sens large (curateurs, juges consulaires, . . .) ont ¶galement fourni un
                                                      e
nombre consid¶rable d'¶tudes, forc¶ment domin¶es par la dimension
                e        e            e              e
juridique de la faillite d'une entreprise. G¶n¶ralement focalis¶es sur
                                              e e                     e
le concept juridique m^me de la faillite et sur ses conditions d'exis-
                         e
tence l¶gales (µ savoir, d'une maniµre quasi unanimement reconnue
        e       a                     e
dans le monde anglo-saxon et francophone, l'absence de liquidit¶ de       e
l'entreprise et l'¶branlement de son cr¶dit et donc de sa solvabilit¶)
                  e                       e                                 e
ces contributions ont cherch¶ le plus souvent a mettre en ¶vidence,
                               e                   µ               e
parfois a contrario, les conditions µ remplir pour permettre un re-
                                      a
dressement de l'entreprise respectueux a la fois des droits de tous ses
                                           µ
cr¶anciers et des int¶r^ts, multiples et souvent divergents, des autres
   e                  ee
acteurs de son environnement (essentiellement son personnel, mais
aussi ses clients, ses partenaires commerciaux ou industriels et les
Pouvoirs Publics au sens large). De ce fait, la dimension gestion
du risque juridique" et, plus encore, les dimensions redressement de
l'entreprise" et pr¶vention de la d¶faillance" dominent ce courant de
                    e                e
recherche.
En¯n, les chercheurs issus du champ de la strat¶gie d'entreprise, de
                                                      e
la th¶orie des organisations et de la ¯nance d'entreprise ont port¶ leur
     e                                                                  e
attention sur les motivations et les causes, strat¶giques, op¶rationnelles
                                                  e            e
ou organisationnelles, a l'origine m^me de la d¶faillance. Ils met-
                         µ              e              e
tent alors souvent l'accent d'abord sur la dynamique et l'agencement
de ces causes profondes et entrouvrent ensuite la voie µ l'identi¯-
                                                               a
cation de trajectoires de d¶faillance" types, jalonn¶es d'¶tapes au
                               e                          e       e
travers desquelles les entreprises en di±cult¶ passeraient et suscepti-
                                                e
bles d'actions correctrices sp¶ci¯ques permettant in ¯ne de pr¶venir et
                              e                                     e
d'emp^cher la d¶faillance ultime de l'entreprise. De ce fait, les dimen-
       e          e
sions redressement de l'entreprise" et pr¶vention de la d¶faillance"
                                              e                  e
dominent elles aussi ce courant de la recherche5 .
   4
     Pour une pr¶sentation exhaustive des recherches r¶alis¶es dans ce domaine,
                e                                      e e
voir par exemple Dimitras e.a. (1995) ou Zopounidis (1998).
   5
     Pour une synthµse int¶ressante des r¶sultats de ce type de recherches, voir
                   e      e              e
Sheppard (1994).


                                       6
1.2    Une conception l¶galiste de la faillite et une con-
                       e
       ception dynamique de la d¶faillance
                                 e
Deux approches di®¶rentes du concept m^me de faillite ¶mergent
                       e                          e                 e
donc implicitement, et assez logiquement, de ces quatre courants de
recherche.
D'une part, nous trouvons les auteurs qui d¶¯nissent le concept de
                                                    e
faillite" sur base de sa seule d¶¯nition l¶gale, faisant de l'appari-
                                    e           e
tion conjointe des deux ¶l¶ments pris en compte par la plupart des
                            ee
l¶gislateurs nationaux pour d¶¯nir la faillite l¶gale d'une entreprise
 e                               e                    e
(µ savoir donc son absence de liquidit¶ et l'¶branlement de son cr¶dit)
 a                                       e      e                          e
la condition qui permet de distinguer les entreprises faillies des entre-
prises non faillies. Ainsi, Beaver (1966) [9], dans un article consid¶r¶     ee
comme a la source m^me du °ux ¶lev¶ de recherches consacr¶es a la
          µ             e             e e                             e µ
pr¶diction des faillites au cours des 3 derniµres d¶cennies, d¶¯nit la
   e                                              e       e           e
faillite comme r¶sultant de l'incapacit¶ d'une entreprise µ faire face
                  e                        e                      a
a
µ ses engagements ¯nanciers une fois ceux-ci arriv¶s a maturit¶. Plus
                                                          e µ           e
prosaÄ ³quement, de nombreux autres auteurs considµrent que la faillite
                                                          e
survient simplement lorsque l'entreprise introduit auprµs des juridic-
                                                                e
tions comp¶tentes le document l¶gal qui ouvre la voie soit a leur
             e                        e                                  µ
liquidation, soit a leur r¶organisation (Collongues [12], 1977 ; Ta²er
                   µ       e
[39], 1982 ; Bryant [11], 1997 ; Gilbert, Menon et Schwartz [?], 1990).
La faillite de l'entreprise est alors d¶¯nie sur base de sa conformit¶,
                                        e                                     e
a
µ un instant donn¶, avec les critµres purement l¶gaux retenus par
                     e                e                   e
les di®¶rents l¶gislateurs pour d¶terminer l'existence ou non d'une
         e      e                   e
situation de faillite l¶gale" d'une entreprise.
                        e
D'autre part, nous trouvons les auteurs qui considµrent l'¶tat de
                                                              e       e
faillite d'une entreprise comme r¶sultant d'un processus progressif
                                      e
de d¶faillance ¶conomique (Argenti [8], 1977) (Koenig [26], 1985)
      e          e
(Ooghe, Van Wymeersch [34], 1996), plus ou moins long selon les cas
et caract¶ris¶ par le fait que, durant tout son d¶roulement, l'entreprise
           e e                                      e
(alors appel¶e entreprise en cours ou en voie de d¶faillance") se voit
             e                                            e
dans l'incapacit¶ de rencontrer de maniµre r¶guliµre les exigences (en
                  e                         e     e     e
termes de cr¶ation de valeur, de rentabilit¶, de service de la dette, . . .)
              e                               e
formul¶es a son encontre par les divers acteurs de son environnement.
        e µ
La faillite de l'entreprise ne constitue de ce fait que l'aboutissement
ultime d'un processus de d¶faillance progressif (parfois aussi r¶f¶renc¶
                             e                                        ee       e
sous le terme spirale de la faillite ou de la d¶faillance") dont il est
                                                      e
possible de sortir moyennant la prise de mesures de gestion correctri-

                                       7
ces judicieuses et elle ne constitue de ce fait que le point ultime d'un
processus de d¶faillance ¶conomique.
               e           e


1.3     Entre pr¶diction et pr¶vention : deux angles d'¶tudes
                e             e                        e
        di®¶rents . . .
           e
     Ces deux approches di®¶rentes du concept m^me de faillite ex-
                               e                      e
pliquent dµs lors quasi naturellement les deux angles d'¶tudes tradi-
             e                                               e
tionnellement pr¶sents dans la litt¶rature et permettent d'expliquer
                    e                   e
les raisons pour lesquelles des recherches sont consacr¶es tant^t µ la
                                                           e     o a
pr¶diction des faillites, tant^t µ leur pr¶vention.
   e                           o a            e
En e®et, les recherches consacr¶es a la pr¶diction des faillites re-
                                     e µ        e
posent trµs largement sur une d¶¯nition purement l¶gale du con-
            e                          e                   e
cept de faillite. Elles visent alors µ identi¯er, sur base d'un cer-
                                          a
tain nombre de donn¶es (essentiellement de nature comptable ou
                         e
¯nanciµre), des signaux dont l'apparition est l'indice d'une proba-
         e
ble prochaine d¶faillance. Bas¶es sur l'analyse statistique compar¶e
                  e               e                                   e
d'¶chantillons (le plus souvent pair¶s6 ) d'entreprises faillies et non
   e                                      e
faillies, ces recherches se fondent dµs lors logiquement sur l'examen
                                         e
ex post d'un certain nombre de donn¶es et mettent l'accent sur l'i-
                                            e
denti¯cation des sympt^mes de faillite qui sont les facteurs les plus
                           o
apparents des di±cult¶s d'une entreprise. Morris (1997) [32] souligne
                         e
dµs lors que les modµles tendent ainsi a identi¯er le plus petit com-
  e                    e                     µ
mun d¶nominateur qui lie des entreprises faillies (tels que de faibles
        e
niveaux de pro¯t, un haut degr¶ d'endettement ou la taille relative-
                                    e
ment peu ¶lev¶e de la plupart des entreprises faillies), se focalisant
              e e
ainsi sur les sympt^mes plut^t que sur les v¶ritables causes sous-
                      o           o                e
jacentes de la d¶faillance.
                  e
Quant aux recherches consacr¶es a la pr¶vention des d¶faillances, elles
                                 e µ          e          e
s'attachent par contre µ mettre en ¶vidence les causes profondes de
                           a              e
la faillite, µ savoir les v¶ritables raisons de l'¶chec d'une entreprise
              a              e                    e
(Daubie, Meskens [18], 2001) qui permettront, si les facteurs qui con-
ditionnent leur apparition sont d¶tect¶s su±samment t^t et si leur
                                      e      e                o
dynamique est comprise et ma^ ee, de mener a des mesures correc-
                                  ³tris¶            µ
   6
      Le fait de construire des ¶chantillons associant, sur base de critµres souvent
                                 e                                         e
objectifs, des entreprises faillites et des entreprises non faillies semblables conduit
en fait µ sur-repr¶senter dans les bases de donn¶es ainsi constitu¶es les entreprises
         a         e                               e                  e
faillies, qui, ¶conomiquement et selon les contextes nationaux ou temporels, ne
               e
repr¶sentent en fait qu'un maximum de 10 % du tissu ¶conomique consid¶r¶.
      e                                                    e                    ee


                                          8
trices e±caces permettant cette fois d'emp^cher la faillite.
                                          e


1.4     . . .et quatre types d'approches di®¶rentes
                                            e
     La prise en compte de l'optique pr¶dictive ou pr¶ventive adopt¶e
                                           e               e             e
par les di®¶rents chercheurs en la matiµre et l'examen de la nature
             e                               e
des analyses men¶es par ces chercheurs conduit en¯n Guilhot (2000)
                     e
[25] a consid¶rer que quatre approches de la d¶faillance d'entreprise
      µ        e                                     e
coexistent actuellement.
Il y a d'abord les approches ¶conomiques, qui s'attachent µ l'¶tude
                                  e                               a e
des facteurs ¶conomiques qui a®ectent l'existence de l'entreprise, avec
               e
un accent mis notamment sur le ph¶nomµne des crises7 et des cycles8 .
                                        e     e
Il y a ensuite les approches ¯nanciµres, qui examinent les facteurs a
                                        e                                  µ
l'origine de la disparition de l'entreprise et formulent l'hypothµse im-
                                                                    e
plicite que les causes d'une faillite potentielle se trouvent in¶vitablement
                                                                e
re°¶t¶es, dans un d¶lai plus ou moins long, dans ses ¶tats ¯nanciers :
    ee                 e                                   e
une interpr¶tation correcte de ces derniers permet alors soit de d¶tecter
             e                                                       e
le risque de faillite, soit d'identi¯er des signaux caract¶ristiques d'une
                                                             e
¶volution µ l'int¶rieur d'une spirale de d¶faillance.
e           a      e                          e
Il y a encore les approches strat¶giques, qui s'attachent µ l'analyse
                                      e                         a
des facteurs qui permettent de situer l'entreprise par rapport µ son  a
environnement, avec un accent particulier plac¶ sur l'analyse de l'en-
                                                    e
vironnement de la ¯rme (et notamment l'analyse de son secteur) et
sur l'analyse concurrentielle.
Il y a en¯n les approches organisationnelles et manag¶riales, focalis¶es
                                                           e            e
sur une vision entrepreneuriale de l'entreprise et qui mettent quant
a
µ elles l'accent sur le r^le du management ou de l'entrepreneur par
                           o
rapport µ la faillite d'une entreprise, en consid¶rant surtout les car-
          a                                           e
act¶ristiques personnelles du chef d'entreprise, sa personnalit¶, ses
    e                                                                 e
comp¶tences et son exp¶rience.
       e                    e
In ¯ne, ces approches d¶bouchent sur la mise en ¶vidence d'un trµs
                            e                           e                 e
grand nombre d'indicateurs annonciateurs, a une ¶ch¶ance plus ou
                                                  µ       e e
   7
     Inspir¶es de la th¶orie des catastrophes ou du chaos", ces recherches con-
           e              e
sidµrent que la faillite d'une entreprise n'est jamais que le r¶sultat d'un ¶v¶nement
   e                                                           e            e e
impr¶visible ou impromptu dont les e®ets conduisent a la disparition de l'entre-
      e                                                    µ
prise en raison de l'¶tat d¶jµ d¶stabilis¶ du systµme entreprise".
                      e     ea e          e        e
   8
     La nature du cycle conjoncturel ou structurel dans lequel l'entreprise est
amen¶e µ ¶voluer d¶termine alors sa capacit¶ µ r¶agir, plus ou moins e±cacement,
       e ae          e                          ea e
aux ¶volutions brutales de son environnement.
     e


                                         9
moins proche, d'une ¶ventuelle d¶faillance de l'entreprise. Le suivi
                        e            e
r¶gulier de ces indicateurs permet alors de d¶tecter l'apparition de
 e                                                e
signaux d'alarme, qui permettent µ leur tour soit de pr¶dire la prob-
                                     a                       e
able faillite prochaine de l'entreprise, soit de mettre en oeuvre des
m¶canismes de pr¶vention de la d¶faillance en r¶action a l'appari-
   e                e                  e             e           µ
tion de ces signaux, ce qui explique la pr¶sence de ces 4 approches
                                              e
a
µ la fois parmi les ¶tudes qui privil¶gient l'angle de la pr¶diction des
                     e                e                        e
faillites (optique essentiellement ¯nanciµre de gestion d'un risque de
                                           e
cr¶dit) et parmi celles qui privil¶gient l'angle de la pr¶vention des
   e                                e                         e
d¶faillances (optique essentiellement manag¶riale de gestion du re-
  e                                             e
dressement d'une entreprise).
Toutefois, leur int¶gration dans une v¶ritable strat¶gie coh¶rente et
                    e                    e              e          e
structur¶e de pr¶vention proactive de la d¶faillance d'une entreprise,
          e       e                          e
inscrite le plus souvent dans une politique macro¶conomique plus
                                                         e
vaste de r¶duction du nombre de faillites d'entreprise et tellement
            e
souhaitable compte tenu des cons¶quences dramatiques de toute d¶faillance
                                   e                                   e
d¶crites ci-avant, implique pr¶alablement de comprendre la dynamique
  e                            e
et les interrelations qui se nouent entre ces facteurs ; or, µ ce jour, trµs
                                                             a            e
peu de recherches envisagent cette approche particuliµre.  e


2    L'¶volution des m¶thodes quantitatives, fac-
       e               e
     teur contingent de l'¶volution de la recherche
                          e
     en matiµre de faillite d'entreprise
             e
    Ayant ainsi dress¶ le portrait g¶n¶ral de la recherche en matiµre
                       e              e e                              e
de faillite d'entreprise, interrogeons-nous µ pr¶sent sur les ¶l¶ments
                                              a e                ee
contingents qui ont contribu¶ au d¶veloppement tout particulier de
                                 e     e
ce champ de recherche.
Fondamentalement, deux facteurs expliquent µ nos yeux essentielle-
                                                   a
ment l'¶volution et le nombre des contributions consacr¶es a ce do-
        e                                                     e µ
maine de recherche.
D'abord, il y a le d¶veloppement de la qualit¶ et du volume des
                        e                            e
donn¶es disponibles, µ savoir essentiellement des ¶tats ¯nanciers tenus
     e                 a                             e
selon des rµgles comptables r¶glement¶es et strictes dans la plupart
            e                     e       e
des pays industrialis¶s et n¶cessairement ¶tablis par des entreprises
                       e       e              e
dont la taille a sans cesse ¶t¶ revue a la baisse selon des exigences d'u-
                            ee        µ
niformit¶ de forme, de publicit¶ et de tenue de plus en plus s¶vµres,
          e                         e                              e e

                                   10
ce qui en rend a la fois la disponibilit¶ de plus en plus ais¶e, la
                 µ                        e                      e
qualit¶ de plus en plus uniforme et la comparabilit¶ de plus en plus
        e                                            e
¶lev¶e. Par ailleurs, au delµ de ces seules donn¶es ¯nanciµres, il y a
e e                         a                    e         e
le d¶veloppement d'approches de recherches plus organisationnelles
     e
et qualitatives, bas¶es sur l'observation compar¶e de cas r¶els et
                     e                             e           e
d¶bouchant sur l'obtention de donn¶es qualitatives qui viennent compl¶ter
  e                                  e                                 e
et enrichir les bases de donn¶es essentiellement ¯nanciµres utilis¶es
                               e                         e         e
le plus fr¶quemment par les chercheurs en ce domaine. L'analyse
            e
d¶taill¶e des contours de ce facteur contingent et des ¶l¶ments qui
  e      e                                               ee
en conditionnent l'¶volution m¶riterait µ elle seule une contribution
                    e            e       a
sp¶ci¯que, raison pour laquelle nous ne l'abordons pas davantage ici.
   e
Ensuite, il y a le d¶veloppement des outils de traitement de ces
                      e
donn¶es, qu'il s'agisse des capacit¶s de traitement informatique des
       e                            e
donn¶es ou, plus encore, des outils statistiques d'analyse de donn¶es
       e                                                           e
d¶velopp¶s initialement par des chercheurs sp¶cialis¶s dans le champ
  e        e                                   e     e
de la statistique et qui ont trouv¶ dans le champ de la faillite d'en-
                                   e
treprise un terreau riche en donn¶es et concret dans lequel tester et
                                   e
appliquer des techniques toujours plus sophistiqu¶es.
                                                   e

2.1   L'analyse univari¶e de ratios ¯nanciers et la mise
                        e
      en ¶vidence du m¶canisme fondamental µ la base
         e               e                     a
      de toute faillite
    Historiquement (Rosendale [36], 1908) (Fitz Patrick [23], 1932),
les premiµres ¶tudes consacr¶es a la probl¶matique de la faillite d'en-
          e     e                e µ          e
treprise partent de l'analyse statistique simple de quelques indicateurs
¯nanciers, parfois exprim¶s sous la forme de ratios, et dont les valeurs
                             e
et le comportement sont ¶tudi¶s tour µ tour, le plus g¶n¶ralement dans
                            e     e     a              e e
une perspective d'¶volution temporelle et sur base des valeurs qu'ils
                       e
a±chent pour un nombre limit¶ d'entreprises faillies et non faillies.
                                    e
Des tests d'¶galit¶ de moyenne et des tests d'¶galit¶ de dispersion
              e       e                            e      e
sont alors calcul¶s, manuellement et sur base d'un nombre trµs limit¶
                   e                                            e       e
de donn¶es.
         e
Dµs 1966 et gr^ce aux travaux essentiels de Beaver, cette approche
  e               a
d¶bouche sur la mise en ¶vidence d'un modµle, dit le modµle du
  e                            e                 e                e
r¶servoir de °ux", qui d¶compose la m¶canique et la dynamique des
 e                         e              e
°ux ¯nanciers qui conduisent une entreprise a la faillite.
                                                µ
Ce modµle, qui sous-tend implicitement l'ensemble des travaux publi¶s
        e                                                              e
par la suite et bas¶s sur l'analyse de donn¶es essentiellement ¯nanciµres,
                     e                      e                        e

                                  11
assimile simplement l'entreprise a un r¶servoir de °ux ¯nanciers. Lors
                                    µ      e
de sa cr¶ation, ce r¶servoir est aliment¶ par les fonds propres (le cap-
            e           e                  e
ital social essentiellement) mis a la disposition de l'entreprise par
                                     µ
ses actionnaires et par les fonds (les dettes) mis µ sa disposition par
                                                       a
divers pr^teurs, essentiellement bancaires. En p¶riode d'activit¶ d'-
              e                                        e              e
exploitation, ce r¶servoir est ensuite vid¶ progressivement sous l'-
                       e                       e
e®et des versements (sorties de fonds) faits par l'entreprise pour
acqu¶rir (achats de marchandises, achats de services ou bien divers,
        e
. . .) ou pour r¶mun¶rer r¶ellement l'ensemble des facteurs de produc-
                   e     e     e
tion internes (ressources humaines, outils de production) ou externes
(ressources ¯nanciµres) qu'elle utile. Simultan¶ment, il est rempli par
                       e                            e
l'arriv¶e des °ux de fonds (entr¶es de fonds) vers¶s par les clients de
          e                        e                    e
l'entreprise.
Selon ce modµle, domin¶ par la dimension °ux de fonds" et donc
                   e          e
focalis¶ sur la dimension gestion de la tr¶sorerie de l'entreprise"9 ,
          e                                      e
la faillite juridique d'une entreprise survient lorsque le r¶servoir de
                                                              e
fonds de l'entreprise est ¶puis¶ et la d¶faillance de cette entreprise
                                e e          e
s'amorce dµs que la vitesse avec laquelle le r¶servoir se vide est plus
                 e                                 e
importante que la vitesse avec laquelle il se remplit. Mais au delµ dea
cette simple dynamique de °ux ¯nanciers, ce modµle n'apporte aucun
                                                        e
enseignement quant aux causes, ¯nanciµres ou organisationnelles, ou
                                             e
quant µ l'agencement des causes qui conduisent a ce d¶s¶quilibre de
           a                                           µ    ee
tr¶sorerie.
   e
En fait, Beaver lie la taille de ce r¶servoir de fonds µ la proba-
                                           e                 a
bilit¶ du risque de d¶faillance d'une entreprise : la faillite peut en
       e                    e
e®et provenir soit d'un r¶servoir ¶puis¶ (par manque de cash-°ows
                                e      e     e
ou par suite d'une di®¶rence de vitesse entre le taux de remplis-
                              e
sage du r¶servoir li¶ au niveau des activit¶s et le taux de vidange
               e          e                      e
du r¶servoir, li¶ quant µ lui aux d¶penses d'investissement et aux
       e             e        a          e
d¶penses d'exploitation courantes), soit d'un r¶servoir mal dimen-
  e                                                   e
sionn¶ a l'origine de l'entreprise (en raison de la sous-capitalisation de
         eµ
l'entreprise). A la base, Beaver s¶lectionne un ensemble de 30 ratios,
                                     e
regroup¶s en six groupes (ratios de cash-°ows, ratios li¶s aux revenus
            e                                              e
nets g¶n¶r¶s par l'entreprise, ratios de solvabilit¶, ratios de liquidit¶,
          e ee                                        e                  e
ratios d'¶quilibre ¯nancier et ratios de rotation des activit¶s), et, se
             e                                                  e
   9
     Cette dimension est d'ailleurs la seule prise en compte par le l¶gislateur
                                                                           e
lorsqu'il d¶¯nit la faillite d'une entreprise comme r¶sultant de son incapacit¶ a
            e                                         e                            e µ
faire face µ ses engagements de tr¶sorerie de court terme - crise de liquidit¶ - et de
           a                       e                                         e
son incapacit¶ µ g¶n¶rer des rentr¶es de fonds additionnelles - crise de solvabilit¶.
               ea e e               e                                               e


                                         12
basant sur l'¶volution de leur valeur moyenne durant une p¶riode de
               e                                               e
cinq ans avant la faillite, il conclut a leur d¶gradation croissante au
                                       µ        e
fur et µ mesure que l'ann¶e de la faillite se rapproche. Il arrive ainsi
        a                   e
a
µ la conclusion que les entreprises faillies g¶nµrent des cash-°ows et
                                               e e
des liquidit¶s moindres que les entreprises en activit¶ au cours des
             e                                           e
5 ann¶es pr¶c¶dents la faillite et met en lumiµre le pouvoir pr¶dictif
       e     e e                                  e                e
¶lev¶ des ratios Cash-Flows / Dettes totales" et R¶sultat net / Actif
e e                                                   e
total", ouvrant ainsi une premiµre voie vers l'identi¯cation potentielle
                                 e
de trajectoires de d¶faillance" et soulignant ainsi que, au plan pure-
                       e
ment ¯nancier, la faillite d'une entreprise est l'aboutissement d'un
processus caract¶ris¶ par une insu±sance de rentabilit¶ qui, coupl¶e
                    e e                                   e            e
a
µ une solvabilit¶ d¶t¶rior¶e, engendre une crise de liquidit¶ fatale µ
                   e ee    e                                   e        a
l'entreprise.
Mais ce type d'approche unidimensionnelle, de par sa conception
m^me, ne permet pas d'avoir une vision globale et transversale des
   e
di®¶rents facteurs explicatifs susceptibles d'annoncer l'apparition d'un
     e
processus de d¶faillance, ni d'avoir une vision claire des interrelations
                 e
entre ces facteurs. D'oµ l'¶mergence assez rapide, dans la foul¶e des
                         u e                                       e
travaux de Beaver (1966) [9], d'approches multidimensionnelles sup-
pos¶es lever cette limite m¶thodologique.
     e                        e

2.2   L'analyse ¯nanciµre et la mise en ¶vidence de sympt^mes
                      e                 e                o
      ¯nanciers par des m¶thodes lin¶aires
                          e           e
     Selon Dambolena et Shulman (1988) [17], deux types d'¶tudes    e
se d¶gagent ensuite du courant de recherche focalis¶ sur l'analyse
      e                                                   e
¯nanciµre des entreprises faillies qui se d¶veloppe dµs la ¯n des ann¶es
        e                                   e         e                e
'60 et la parution de la trµs c¶lµbre contribution de Altman (1968)
                              e ee
[2].
D'une part, il y a les ¶tudes qui tentent d'identi¯er des ratios ¯-
                           e
nanciers pertinents, g¶n¶ralement regroup¶s en 4 familles (ratios de
                        e e                    e
liquidit¶, de solvabilit¶, de pro¯tabilit¶ et d'e±cience, allant ainsi des
         e              e                e
indicateurs les plus symptomatiques a court terme aux indicateurs
                                         µ
les plus fondamentaux µ long terme (Ooghe, Van Wymeersch [34],
                           a
1996)), et qui pourraient permettre de pr¶dire la faillite a un hori-
                                               e               µ
zon de temps d¶termin¶, moyennant l'utilisation d'outils statistiques
                 e        e
ou math¶matiques ad¶quats (voir par exemple les ¶tudes typiques de
           e            e                             e
Beaver (1966) [9], Altman (1968) [2], Wilcox (1971) [42], Collongues
(1977) [12] et Dambolena et Khoury (1980) [16]). Les modµles de    e

                                   13
pr¶diction de faillites qui r¶sultent de ce courant de recherche utilisent
  e                          e
alors une multitude de m¶thodes µ pr¶sent multivari¶es, dont les
                               e       a e                  e
plus r¶pandues sont indubitablement l'analyse discriminante, les tech-
      e
niques de r¶gression lin¶aire, les technique de r¶gression logistique, les
           e             e                        e
algorithmes de partitionnement r¶cursif, les analyses de survie ou les
                                    e
systµmes-experts ou les systµmes d'aides a la d¶cision, µ base parfois
    e                           e            µ      e      a
plus qualitative.



Toutefois, l'utilisation de ces m¶thodes et la pertinence des enseigne-
                                  e
ments sur lesquels elles d¶bouchent font alors fr¶quemment l'objet de
                           e                      e
querelles de chercheurs, en raison notamment du fait que nombre de
ces m¶thodes sont appliqu¶es et mises en oeuvre sans syst¶matiquement
      e                     e                               e
v¶ri¯er avec tout le s¶rieux voulu leur applicabilit¶ statistique : Eisen-
  e                    e                            e
beis (1977) [22] souligne ainsi tout particuliµrement sept limites inh¶rentes
                                              e                        e
µ l'utilisation de l'analyse discriminante, µ savoir des contraintes
a                                               a
ou des limites de multi-normalit¶ de la distribution des variables,
                                     e
d'¶galit¶ dans la dispersion des groupes de r¶f¶rence utilis¶s, d'in-
   e    e                                         ee              e
terpr¶tation et de signi¯cation de variables a la multicolin¶arit¶ sou-
      e                                         µ              e    e
vent ¶lev¶e, de r¶duction de la dimension initiale du problµme pos¶,
      e e          e                                            e        e
de d¶¯nitions des groupes de r¶f¶rence, de choix des probabilit¶s µ
     e                            ee                                  e a
priori et d'estimation des taux d'erreurs de classi¯cations. Des ques-
tions telles que la normalit¶ de la distribution des variables utilis¶es,
                              e                                       e
la nature des corrections µ apporter pour traiter de maniµre e±ciente
                           a                                 e
la pr¶sence de donn¶es exceptionnelles ( outliers "), la pertinence
      e                e
de la constitution d'¶chantillons pair¶s, . . .donnent aussi lieu a une
                       e                e                           µ
multitude de remises en cause et de r¶ponses parfois virulentes, qui
                                         e
vont jeter temporairement le discr¶dit sur un pan de recherche alors
                                      e
en pleine expansion.



D'autre part, il y a les recherches, telles que celles de Beaver (1968)
[10] ou de Aharony, Jones et Swary (1980) [1], qui se fondent sur
l'analyse du comportement des titres des entreprises cot¶es a¯n d'en
                                                           e
pr¶dire la d¶faillance ¶ventuelle, se basant ainsi sur le paradigme
   e         e          e
de march¶s parfaitement e±cients dont les acteurs sont capables
          e
d'int¶grer dans leur appr¶ciation des titres d'une entreprise toute l'in-
     e                    e
formation disponible relative µ cette entreprise.
                               a

                                   14
2.2.1    L'analyse du comportement de ratios ¯nanciers per-
         tinents
     Peu aprµs la contribution fondamentale de Beaver (1966) [9], une
              e
autre ¶tude capitale appara^ celle de Altman (1968) [2]. Cet auteur
        e                     ³t,
est en fait le premier a proc¶der µ une analyse multivari¶e (bas¶e
                         µ       e   a                        e      e
sur le recours a une analyse discriminante) d'une batterie de ratios
                 µ
¯nanciers reconnus par la litt¶rature comme pertinents pour juger
                                  e
de la performance ¯nanciµre d'une entreprise ; cette approche, qui
                            e
se distingue de l'approche de Beaver non seulement pas son aspect
multivari¶ mais aussi par le fait qu'elle ne prend pas en compte ex-
            e
plicitement la dynamique du processus de d¶gradation progressive de
                                              e
la sant¶ ¯nanciµre de l'entreprise, a le m¶rite de grouper cinq indi-
         e        e                         e
cateurs ¯nanciers cl¶s dans une fonction lin¶aire simple d'utilisation
                     e                         e
(notamment dans une perspective d'¶valuation du risque de cr¶dit)
                                       e                           e
et d'¶tablir une pond¶ration de ces indicateurs en fonction de leur
      e                e
pouvoir discriminant.
Le modµle de Altman, plusieurs fois r¶vis¶ par la suite (Altman [5],
          e                             e e
1983), a±che d'embl¶e d'excellentes capacit¶s de pr¶diction d¶jµ deux
                     e                        e      e          ea
ans avant la d¶faillance et s'avµrera par la suite d'une extraordinaire
                e                 e
robustesse au ¯l des ans et dans de multiples contextes ¶conomiques
                                                          e
ou ¯nanciers (Altman [3], 1984), devenant ainsi une r¶f¶rence essen-
                                                        ee
tielle ou un point de comparaison incontournable de toute recherche
multivari¶e portant sur la pr¶diction des faillites.
            e                   e
Ce modµle se pr¶sente, dans sa forme la plus g¶n¶rale, comme suit :
          e        e                             e e

        Z = 0:012X1 + 0:014X2 + 0:033X3 + 0:006X4 + 0:999X5
                 fond de roulement net
avec X1      =          actif total
                   r¶serves
                    e
        X2   =   actif total
                 r¶sultat avant charges ¯nanciµres et imp^ts
                  e                               e      o
        X3   =                        actif total
                 valeur de march¶ des fonds propres
                                    e
        X4   =    valeur comptable des dettes totales
                   ventes
        X5   =   actif total
         Z   =   Score discriminant
Chaque entreprise se voit donc attribuer une valeur Z, score pond¶r¶
                                                                   ee
fonction de la valeur prise par ces cinq indicateurs ¯nanciers, et est
class¶e dans le groupe des entreprises en faillite ou en activit¶ en
     e                                                           e

                                      15
fonction d'un seuil critique d¶¯ni sur base de l'analyse du comporte-
                                 e
ment de ce score Z au sein d'un ¶chantillon repr¶sentatif d'entreprises
                                   e               e
faillies appari¶ a un ¶chantillon d'entreprises saines.
                  eµ   e
Au plan ¯nancier, ce modµle sanctionne l'apparition conjointe d'un
                             e
fonds de roulement insu±sant par rapport au volume de l'actif, la
di±cult¶ d'auto¯nancement pass¶e de l'entreprise, la faiblesse de sa
           e                         e
rentabilit¶ ¶conomique, une solvabilit¶ r¶duite (appr¶ci¶e par le bi-
             e e                         e e              e e
ais d'une valeur de march¶ des fonds propres) et une rotation trop
                             e
faible de l'actif (donc un niveau d'activit¶ insu±sant par rapport aux
                                            e
moyens d¶gag¶s par l'entreprise pour ¯nancer ses op¶rations) ; au-
              e   e                                         e
cune indication claire n'en ¶merge toutefois quant µ l'encha^
                               e                        a         ³nement
des ¶l¶ments ¯nanciers susceptibles de conduire une entreprise µ la
      ee                                                              a
faillite.
A la suite des travaux de Altman, une multitude de fonctions multi-
vari¶es, discriminantes ou non, viennent enrichir la litt¶rature.
     e                                                      e
Nous avons choisi d'en retenir quatre, qui toutes pr¶sentent µ nos yeux
                                                     e         a
une innovation m¶thodologique ou conceptuelle majeure par rapport
                     e
au modµle initial de Altman :
           e
     - En 1971, Wilcox ¶labore un modµle stochastique, calqu¶ sur le
                          e               e                        e
        modµle de Beaver, mais qui semble donner de meilleurs r¶sultats
               e                                                   e
        de pr¶diction quatre ans avant la faillite. Son modµle part de
                e                                             e
        l'id¶e qu'une entreprise peut se situer dans di®¶rents ¶tats qui
             e                                            e      e
        repr¶sentent chacun un niveau de bien-^tre ¯nancier. La for-
              e                                   e
        mule suivante permet alors de calculer la probabilit¶ qu'une
                                                                 e
        entreprise ¯nisse dans un ¶tat de d¶faillance :
                                   e         e
                                        ½
                                              1         sip ∙ q
                P (Faillite ultime) =          q
                                            p( p )N   autrement

               N    =    les ¶tats, estim¶s sur base
                             e             e
                         d'une position de tr¶sorerie ajust¶e /¾
                                              e             e
                ¾ = la taille estim¶e de l'intervalle entre les ¶tats
                                         e                         e
      avec               adjacents en termes de tr¶sorerie
                                                    e
                q = la probabilit¶ de passer a N ¡ 1, l'¶tat pr¶c¶dent
                                       e          µ           e      e e
                p = la probabilit¶ de passer a N + 1, l'¶tat suivant
                                       e          µ           e
            p + q = 1.
      Ce modµle fait donc le postulat explicite que la d¶faillance d'une
              e                                         e
      entreprise r¶sulte d'un processus progressif, caract¶ris¶ par un
                  e                                         e e
      certain nombre d'¶tats interm¶diaires caract¶ristiques en ter-
                          e             e             e

                                   16
mes de tr¶sorerie (d'oµ une conception du ph¶nomµne de la
              e           u                         e     e
  faillite r¶duite a une simple dimension de crise de liquidit¶s)
            e      µ                                             e
  par lesquels l'entreprise en voie de d¶faillance (ou, a contrario,
                                        e
  en cours de redressement) va in¶vitablement passer.
                                   e
- En 1972, Edmister (1972) [21] ¶labore ¶galement une fonction
                                   e       e
  discriminante, form¶e par la combinaison de sept ratios :
                       e

 N4 = 9:5¡4:23X1 ¡2:93X2 ¡4:82X3 +2:77X4 ¡4:52X5 ¡3:52X6 ¡9:24X7

 avec        ½                     cash-°ow
                 1   si      dettes a court terme
                                    µ               < 0:05
   X1   =
                 0 sinon
             ½                fonds propres
                 1   si      chi®re d'a®aires   < 0:07
   X2   =
                 0 sinon
             8               fonds de roulement net
             > 1
             <        si             ventes             divis¶ par la
                                                             e
   X3   =                    moyenne sectorielle est < ¡0:02
             >
             :
                 0   sinon
             8               dettes a court terme
                                    µ
             > 1
             <        si        fonds propres       divis¶ par la
                                                         e
   X4   =                    moyenne sectorielle est < 0:48
             >
             :
                 0   sinon
             8               stocks
             > 1
             <        si     ventes    divis¶ par la moyenne sectorielle
                                            e
   X5   =                    a un trend ascendant et est < 0:04
             >
             :
               0     sinon
             8               r¶alisable et disponible
                              e
             > 1
             >        si                                divis¶ par la
                                                             e
             >
             >
                              dettes a court terme
                                     µ
             <
                             moyenne sectorielle a un trend ascendant
   X6   =
             >
             >
             >
             >               et est < 0:34
             :
                 0   sinon
             8               r¶alisable et disponible
                              e
             > 1
             <        si      dettes a court terme
                                      µ                 divis¶ par la moyenne
                                                             e
   X7   =                    sectorielle a un trend ascendant
             >
             :
                 0   sinon
 L'originalit¶ de son approche r¶side d'une part dans le fait
              e                     e
 qu'il utilise pour la premiµre fois des variables explicatives sec-
                            e
 ondaires prenant une forme dichotomique en fonction du fait
 que les variables explicatives primaires qui y sont associ¶es fran-
                                                           e
 chissent certains seuils sp¶ci¯ques, d'autre part dans la prise en
                            e
 compte explicite, dans la d¶¯nition de ces seuils, de comporte-
                              e

                                  17
ments propres au secteur d'activit¶ des entreprises ¶tudi¶es, re-
                                           e                e     e
      connaissant de ce fait implicitement l'importance des facteurs
      structurels et conjoncturels (en l'occurrence, en l'espµce, le com-
                                                             e
      portement moyen au sein du secteur) en tant que facteurs ex-
      plicatifs du risque de faillite d'une entreprise.
    - En 1977, Collongues ¶labore deux fonctions discriminantes, con-
                            e
      struites dans un contexte d'hyper-in°ation rendu hautement in-
      stable en raison des chocs p¶troliers du d¶but des ann¶es '70.
                                      e            e             e
      Ces deux fonctions lin¶aires sont d¶¯nies comme ceci :
                              e             e
        Z=     4:9830X1 + 60:0366X2           Z=     4:6159X4 ¡ 22:0000X5
               ¡11:8348X3                            ¡1:9623X6
       avec                                   avec
                frais de personnel                   frais de personnel
       X1 =       valeur ajout¶e
                              e               X4 =     valeur ajout¶e
                                                                   e
                       frais ¯nanciers                 r¶sultat d'exploitation
                                                        e
       X2 =     chi®re d'a®aires hors taxes   X5 =   chi®re d'a®aires hors taxes
                fonds de roulement net               fonds de roulement net
       X3 =          total du bilan           X6 =            stocks


       Au plan ¯nancier, elles font appara^    ³tre pour la premiµre fois
                                                                    e
       l'importance accord¶e au volume de valeur ajout¶e g¶n¶r¶ par
                                e                             e e ee
       l'entreprise et a la part qui en est attribu¶e au facteur de pro-
                          µ                           e
       duction le plus rigide, a savoir le personnel, lorsque l'entreprise
                                  µ
       traverse une p¶riode d'incertitude conjoncturelle caract¶ris¶e
                          e                                           e e
       par une grande volatilit¶ de son environnement.
                                    e
    - En¯n, en 1980, Dambolena et Khoury d¶veloppent un modµle
                                                    e                    e
       dont la caract¶ristique principale est son int¶gration explicite de
                        e                               e
       la stabilit¶ au ¯l des ans des ratios ¯nanciers ¶tudi¶s (par le biais
                  e                                      e   e
       de la prise en compte de l'¶cart type des ratios sur la p¶riode de
                                      e                           e
       temps ¶tudi¶e, mesure qui s'avµre par ailleurs ^tre la meilleure
               e      e                   e                e
       mesure possible de cette stabilit¶). Il ressort de leur ¶tude qu'il
                                            e                   e
       existe une instabilit¶ assez importante du comportement des
                                e
       ratios ¶tudi¶s, qui s'accro^ au fur et µ mesure que le moment
              e      e                ³t         a
       de la faillite se rapproche.
Au vu de ces diverses ¶tudes, il semble donc bien qu'une analyse
                              e
¯nanciµre a base de plusieurs ratios pertinents permette de pr¶dire
        e µ                                                            e
la faillite d'une entreprise dans un d¶lai de un a cinq ans avant la
                                           e            µ
d¶faillance.
  e
Toutefois, la mise en oeuvre d'une telle approche se heurte µ plusieurs
                                                                a
facteurs µ caractµre m¶thodologique qui en limitent la port¶e :
           a        e       e                                     e

                                        18
Ainsi, Eisenbeis (1976) [22] souligne que, si les ratios ¯nanciers sem-
blent ^tre de bons moyens de pr¶diction ex post, ils ne peuvent
        e                             e
^tre justement calcul¶s qu'a posteriori et donc ce n'est qu'une fois
e                       e
l'entreprise faillie que l'analyste, dans cette optique, peut identi¯er
les causes de la d¶faillance en examinant les changements survenus
                     e
dans la valeur des ratios ¯nanciers de l'entreprise. En fait, comme
le concµde Altman, la question n'est pas tant de savoir si une entre-
         e
prise va tomber en faillite parce qu'elle pr¶sente une valeur donn¶e
                                               e                      e
pour certains ratios ¯nanciers caract¶ristiques, mais si ces sympt^mes
                                        e                           o
sont semblables µ ceux d'autres entreprises qui, dans le pass¶, ont
                   a                                               e
continu¶ a voir leur sant¶ ¯nanciµre se d¶t¶riorer pour ¯nalement
          e µ                e        e       ee
aboutir µ la faillite : en ce sens, les ratios ¯nanciers ne permettent
           a
pas v¶ritablement d'identi¯er les causes de la faillite mais ils peuvent
      e
permettre de mesurer l'¶tendue de la mauvaise performance d'une
                           e
entreprise.
D'autre part, les ratios doivent ^tre compar¶s a un standard, sans quoi
                                 e            e µ
leur analyse n'est pas signi¯cative, mais la question de la d¶termination
                                                             e
de ce standard reste pos¶e.e
En¯n, les ratios mµnent µ une analyse statique, puisque calcul¶s sur
                      e     a                                      e
une p¶riode ¯xe, alors que la faillite appara^ clairement comme le
       e                                         ³t
r¶sultat d'un processus dynamique.
 e

2.2.2   L'analyse du comportement des titres des entreprises
        faillies
     Beaver (1968) est aussi un des premiers chercheurs a utiliser les
                                                            µ
donn¶es de march¶ pour pr¶dire la faillite d'une entreprise : alors
       e            e          e
qu'en 1966, sa premiµre recherche ¶tait destin¶e a analyser la capacit¶
                       e             e            e µ                  e
pr¶dictive, dans une perspective de d¶tection de faillite, d'une s¶rie
   e                                      e                          e
de ratios ¯nanciers, en 1968, il montre que la variation du prix de
march¶ de l'action d'une entreprise permet ¶galement de pr¶dire la
         e                                       e                e
faillite.
En fait, constate-t-il, ces deux moyens de pr¶diction sont li¶s puisque
                                                e             e
les investisseurs utilisent de facto les ratios ¯nanciers pour appr¶cier
                                                                    e
le degr¶ de solvabilit¶ d'une entreprise et que les modi¯cations de
          e              e
prix des actions traduisent le fait que les investisseurs ¶tayent leur
                                                            e
jugement sur base de ces ratios, incorporant de ce fait dans les prix du
march¶ l'information contenue dans la valeur du ratio. Concrµtement,
         e                                                      e
Beaver analyse le lien entre le prix du march¶ et la valeur de certains
                                                 e

                                  19
ratios ¯nanciers au moyen d'une analyse s¶rielle, dont l'objet est de
                                               e
d¶terminer le d¶lai avec lequel des investisseurs, comparativement
  e                e
a
µ la valeur a±ch¶e par quatre ratios ¯nanciers, peuvent pr¶voir la
                     e                                            e
d¶faillance. Concrµtement, l'hypothµse est faite que, a un moment
  e                   e                e                   µ
donn¶, une d¶t¶rioration substantielle de la solvabilit¶ de l'entreprise
      e        ee                                        e
devient ¶vidente au point qu'elle se traduit pas une premiµre chute
           e                                                    e
importante du cours du titre de l'entreprise. Au terme de son ¶tude,e
Beaver constate que le march¶ pr¶dit plus rapidement la faillite que
                                 e e
les ratios ¯nanciers mais que, n¶anmoins, les ratios de Cash-°ow /
                                   e
Dettes" et de Revenu net / Actif total" en arrivent µ une pr¶diction
                                                         a        e
presque aussi bonne.
En 1980, Aharony, Jones et Swary comparent les caract¶ristiques de
                                                             e
risque et de rendement d'entreprises faillies et non faillies une fois
appliqu¶ le modµle du MEDAFE. Ils constatent que la variance to-
          e        e
tale du rendement du titre, mesure du risque total qui pµse sur ce
                                                               e
titre, est plus ¶lev¶e pour les entreprises en faillite sur une p¶riode
                  e e                                               e
allant de 226 semaines avant la faillite a 120 semaines avant, mais
                                            µ
que le risque syst¶matique (mesur¶ par le coe±cient ¯) reste con-
                      e               e
stant sur la p¶riode ¶tudi¶e. Ils constatent ainsi que, lorsqu'on com-
                e       e    e
pare l'¶chantillon d'entreprises faillies et l'¶chantillon de contr^le, il
         e                                     e                     o
appara^ des di®¶rences substantielles dans le comportement des vari-
         ³t        e
ances de la moyenne, tant au niveau global qu'au niveau du risqu¶       e
sp¶ci¯que µ l'entreprise, et ce, jusqu'µ quatre ann¶es avant que la fail-
   e         a                         a            e
lite formelle ne soit annonc¶e. De plus, la performance globale du titre
                              e
est n¶gative environ quatre ans avant la faillite et, sur une p¶riode de
      e                                                         e
4 ann¶es avant la faillite, le rendement moyen du portefeuille d'entre-
       e
prises faillies est signi¯cativement inf¶rieur a celui du portefeuille de
                                        e        µ
contr^le, que qui implique une d¶t¶rioration inattendue importante,
       o                            ee
en moyenne, pour le groupe des entreprises faillies et traduit le fait
que les investisseurs se sont ajust¶s continuellement aux situations de
                                    e
solvabilit¶ d¶clinantes de ces entreprises durant une p¶riode d'environ
            e e                                          e
quatre ans.

2.3   De l'analyse ¯nanciµre µ l'analyse organisationnelle
                         e a
      des causes de d¶faillance gr^ce µ l'¶mergence pro-
                      e            a a e
      gressive de m¶thodes non lin¶aires
                    e               e
   Di®¶rents auteurs (Altman et Loris [6], 1976 ; Vernimmen [41],
       e
1978 ; Collongues [12], 1977, . . .) ont trµs vite soulign¶ que l'ap-
                                           e              e

                                   20
proche purement ¯nanciµre de la d¶faillance d¶bouche certes sur une
                           e          e           e
meilleure compr¶hension des m¶canismes ¯nanciers qui conduisent
                 e                  e
une entreprise µ la faillite, mais que ces modµles pourraient ^tre utile-
               a                                e              e
ment enrichis en tenant compte de variables qualitatives repr¶sentatives
                                                               e
de facteurs endogµnes li¶s au fonctionnement interne de l'entreprise
                   e       e
et de facteurs exogµnes li¶s a la nature de l'environnement concur-
                     e       e µ
rentiel dans lequel elle s'insµre (telles que l'exp¶rience des managers,
                               e                   e
la °exibilit¶ du march¶ ou encore la nature de l'avantage comp¶titif
            e            e                                         e
acquis par l'entreprise). L'int¶gration de telles variables qualitatives
                                 e
permettrait donc de passer d'une analyse a posteriori des sympt^meso
(essentiellement ¯nanciers) annonciateurs d'une ¶ventuelle d¶faillance
                                                    e          e
a
µ une v¶ritable analyse strat¶gique des causes r¶elles de faillite (or-
        e                        e                   e
ganisationnelles, structurelles ou autres).
Argenti (1976) [8] est le premier chercheur a explorer cette voie. Il
                                              µ
¶labore ainsi un modµle, appel¶ le A-score", de nature fondamentale-
e                      e        e
ment organisationnelle. Estimant que les ratios ¯nanciers ne sont que
des sympt^mes ais¶ment manipulables de la faillite d'une entreprise
           o         e
et sont de ce fait incapables d'aider a la compr¶hension du processus
                                      µ         e
de d¶gradation qui mµne a la d¶faillance, Argenti propose un modµle
     e                  e µ       e                                e
dynamique fond¶ sur l'activit¶ de l'entreprise et sur sa structure de
                  e             e
management et qui se veut repr¶sentatif des processus de d¶gradation
                                  e                        e
qui d¶bouchent sur la faillite.
      e
Selon ce modµle, le processus de faillite est bas¶ sur un certain nom-
              e                                  e
bre de d¶fauts inh¶rents µ l'organisation et µ la structure ¯nanciµre
         e         e       a                   a                    e
de l'entreprise. Ces faiblesses et d¶fauts produisent des modi¯cations
                                    e
dans l'environnement macro-¶conomique de l'entreprise et la surve-
                                e
nance de hasards normaux des a®aires" (tels que la perte d'un client
important ou une hausse brutale des taux d'int¶r^ts) conduit µ une
                                                   ee            a
crise susceptible de provoquer la mort de l'entreprise.
Le processus de d¶faillance au sens strict se compose alors de trois
                  e
phases successives :
La premiµre phase se caract¶rise par la rigidit¶ de l'organe de direc-
          e                   e                  e
tion, qui r¶sulte elle-m^me de la combinaison des faiblesses suivantes,
           e             e
le plus souvent d'origine interne, dont chacune a pour cons¶quence de
                                                              e
restreindre la capacit¶ de la direction a recueillir et a traiter conven-
                       e                µ               µ
ablement les informations pertinentes : la pr¶sence, a la t^te de l'en-
                                              e         µ     e
treprise, d'un ou plusieurs autocrates" r¶gissant de main de ma^
                                            e                         ³tre
toute la gestion quotidienne et strat¶gique de l'entreprise, refusant
                                       e

                                   21
tout dialogue et toute aide des travailleurs ou conseillers potentiels
de l'entreprise ; la concentration aux mains d'une seule et m^me per-
                                                                  e
sonne ou de quelques acteurs seulement des pouvoirs de gestion et
des droits de propri¶t¶ de l'entreprise ; la restriction des comp¶tences
                        ee                                          e
a
µ un domaine particulier de la gestion, ce qui conduit potentiellement
a
µ l'absence d'un produit parfaitement adapt¶ aux besoins du march¶
                                                   e                     e
et/ou µ une faible connaissance des questions ¯nanciµres.
       a                                                  e
La deuxiµme phase du processus de d¶faillance est ensuite marqu¶e
          e                                  e                          e
par l'apparition d'erreurs de gestion, strat¶giques et/ou op¶rationnelles,
                                               e               e
telles que la lenteur de r¶action aux modi¯cations de la technologie,
                             e
une mauvaise politique de communication, l'existence de malversa-
tions et de fraudes, la prise en consid¶ration insu±sante des facteurs
                                           e
de co^t (notamment en matiµre de recherche et de d¶veloppement),
      u                           e                        e
un endettement ¯nancier ¶lev¶. e e
Ces erreurs amorcent en¯n la troisiµme phase du processus de d¶faillance,
                                       e                            e
au cours de laquelle les sympt^mes critiques de d¶faillance, qu'ils
                                     o                   e
soient ou non ¯nanciers, apparaissent au grand jour et se mat¶rialisent
                                                                  e
clairement en des signaux rep¶rables par tout observateur externe µ
                                   e                                     a
l'entreprise.
Argenti souligne par ailleurs que la pr¶sence de facteurs externes, tels
                                           e
que le poids des Syndicats et des Pouvoirs Publics ou des ¶v¶nements
                                                               e e
naturels impond¶rables, est susceptible d'acc¶l¶rer le parcours de l'en-
                   e                               ee
treprise au travers de ces trois phases, constitutives d'un processus
progressif, a vitesse d'¶volution non constante, non lin¶aire et idiosyn-
            µ             e                               e
cratique puisque d¶pendant des caract¶ristiques organisationnelles et
                      e                      e
des choix strat¶giques de chaque entreprise et de la personnalit¶ de
                 e                                                    e
ses dirigeants.
Ult¶rieurement, Cormier et al. (1994) [14], Dimitras et al. (1995)
    e
[20], Slowinski et Zopounidis (1995) [38], Greco et al. (1998) [?] et
Zopounidis et Doumpos (1999) [45] vont dµs lors aussi int¶grer, dans
                                                 e              e
leur mod¶lisation du processus de d¶faillance d'une entreprise, des
          e                                e
informations qualitatives relatives a l'exp¶rience des managers, au
                                         µ       e
positionnement de march¶ de l'entreprise, µ la nature de sa tech-
                               e                   a
nologie ou a son infrastructure technique, µ son mode d'organisation,
            µ                                   a
aux avantages comp¶titifs qu'elle d¶veloppe et au niveau de °exibilit¶
                        e              e                                 e
qu'elle acquiert vis-µ-vis de son march¶.
                        a                    e
A l'inverse de Argenti, a la m¶thodologie d'analyse fondamentalement
                           µ     e
empirique et bas¶e sur l'expertise de quelques cas limit¶s consid¶r¶s
                    e                                        e        ee

                                  22
par l'auteur comme typiques, ces auteurs vont toutefois utiliser l'outil
statistique et les m¶thodes quantitatives les plus diverses pour nour-
                     e
rir et ¶tayer leur r¶°exion. Les modµles de probabilit¶ conditionnelle
       e            e                 e                 e
de type logit ou probit (Ohlson [33], 1980) (Zavgren [?], 1985), l'al-
gorithme de partitionnement r¶cursif (Frydman e.a. [?], 1985), les
                                  e
techniques de logique °oue, l'approche par arbres de classi¯cation et
l'incontournable approche par accumulation de r¶gressions logistiques
                                                   e
vont alors ¶merger tour µ tour dans la litt¶rature et donner lieu µ la
            e             a                   e                     a
publication d'un grand nombre de contributions oµ la description de
                                                      u
la technique et de son int¶r^t conceptuel prend souvent le pas, a notre
                          ee                                     µ
sens, sur l'interpr¶tation et l'analyse critique des apports concrets de
                   e
ces techniques a la compr¶hension de la m¶canique de la d¶faillance
                 µ          e                  e               e
de l'entreprise.




En 1994, Sheppard propose en¯n une int¶ressante synthµse des fac-
                                            e              e
teurs d'origine organisationnelle ou strat¶gique mis en lumiµre dans la
                                          e                  e
litt¶rature comme pertinents dans la perspective d'une compr¶hension
    e                                                          e
accrue du processus de d¶faillance d'une entreprise.
                          e




Il procµde ainsi a une analyse en 4 niveaux de ces facteurs (niveau de
        e        µ
la strat¶gie globale de l'entreprise, niveau des di®¶rentes strat¶gies
         e                                              e           e
d'activit¶, niveau du d¶veloppement de strat¶gies coop¶ratives et en-
          e               e                     e         e
¯n niveau des strat¶gies ¯nanciµres). Il en ressort qu'aucun ¶l¶ment
                      e           e                              ee
constitutif de la strat¶gie globale de l'entreprise n'appara^ conduire µ
                        e                                   ³t          a
une meilleure compr¶hension du processus de d¶faillance, qu'il existe
                       e                            e
une relation positive entre la part de march¶ relative de l'entreprise et
                                              e
sa survie ainsi qu'entre l'¶volution de la taille de la ¯rme (et donc la
                            e
maniµre dont elle gµre activement sa croissance) et sa survie, que l'ac-
      e              e
croissement de l'expertise manag¶riale disponible dans l'entreprise est
                                   e
clairement associ¶e a une r¶duction du risque de d¶faillance et, sans
                   e µ        e                        e
v¶ritable surprise, l'existence d'une relation signi¯cativement positive
  e
entre le volume des ressources ¯nanciµres a la disposition de l'entre-
                                          e   µ
prise et sa probabilit¶ de survie.
                        e

                                   23
3    Des sympt^mes aux causes : un concept de
                o
     trajectoire de d¶faillance" en qu^te d'outils
                      e                e
     quantitatifs pour ^tre en¯n explor¶ . . .
                        e                e



    Un consensus est donc apparu assez t^t dans la litt¶rature selon
                                                o             e
lequel la faillite d'une entreprise est le r¶sultat d'un processus ¶volutif,
                                            e                      e
lent et progressif, caract¶ris¶ par une multitude d'¶v¶nements. L'en-
                            e e                          e e
cha^³nement de ces ¶vµnements qui, th¶oriquement, se succµdent avant
                      e e                 e                     e
d'aboutir µ la discontinuit¶ de l'entreprise peut, s'il est correctement
            a                 e
identi¯¶, ^tre judicieusement mod¶lis¶ sous la forme d'une ou de
        e e                             e e
plusieurs  trajectoires de d¶faillance ", caract¶ris¶es id¶alement par
                                e                    e e      e
des faits particuliers (concentration du chi®re d'a®aires sur quelques
gros clients, perte signi¯cative de parts de march¶s, retrait d'un ac-
                                                        e
tionnaire important, . . .) dont l'apparition, si elle est d¶tect¶e su®-
                                                               e    e
isamment a temps, peut alors conduire a la prise de mesures correc-
            µ                                 µ
trices e±caces et permettre le d¶ploiement de v¶ritables strat¶gies
                                      e                 e             e
de pr¶vention de faillite, si souvent esp¶r¶es et si rarement mises en
      e                                       ee
oeuvre avec succµs. e


Pourtant, les chercheurs ont ¶tudi¶ assez tardivement, et en nombre
                              e    e
peu important, ces chemins qui semblent mener a la faillite. Parmi
                                                  µ
eux, certains ont toutefois permis un apport conceptuel appr¶ciable.
                                                             e


Ainsi, au terme d'une ¶tude historique et ¶pist¶mologique du con-
                          e                   e    e
cept de faillite et de ses causes et cons¶quences, Marco (1989) [30]
                                          e
propose un modµle th¶orique purement conceptuel et d'inspiration
                   e     e
¶conomique, repr¶sentatif du processus de faillite appel¶ Spirale
e                   e                                        e
d'entr¶e en faillite". Suivant ce modµle, des erreurs de gestion (essen-
       e                              e
tiellement op¶rationnelles) provoquent initialement des d¶s¶quilibres
              e                                             e e
¯nanciers, puis un certain recul sur le march¶ conduit µ une chute
                                                 e         a
s¶vµre des pro¯ts, ce qui renforce les di±cult¶s de tr¶sorerie ; en¯n,
 e e                                            e       e
l'inqui¶tude des cr¶anciers et la m¶¯ance des banquiers qui mettent
       e             e              e
un terme a leur cr¶dit conduit tout droit la ¯rme µ la cessation de
          µ           e                               a
paiements et donc µ sa mise en faillite.
                      a

                                    24
Ce modµle, relativement simple, permet de faire le lien entre le proces-
         e
sus de d¶gradation ¯nanciµre connu dans la litt¶rature sous le nom
          e                  e                     e
de Chemin de la Faillite" (d¶crit ci-aprµs) et les erreurs de gestion
                                 e         e
qui en sont la cause premiµre, un pont ¶tant ainsi dress¶ entre les fac-
                            e            e                e
teurs et indicateurs ¯nanciers les plus symptomatiques et les facteurs
qualitatifs ou de gestion qui en sont la cause v¶ritable. Par ailleurs, il
                                                 e
prend en compte les int¶r^ts des di®¶rents agents int¶ress¶s a la ges-
                         ee           e                 e     e µ
tion de l'entreprise, en int¶grant explicitement dans le processus le
                              e
point de vue des clients, des cr¶anciers et des banquiers et int¶grant
                                   e                              e
ainsi l'aspect contingent li¶ a l'immersion de l'entreprise dans son en-
                            eµ
vironnement. Toutefois, force est de constater que ce modµle n'intµgre
                                                            e       e
encore que trµs partiellement la dynamique d'¶volution de l'entreprise
              e                                 e

                                   25
et l'aspect strat¶gique de sa gestion, dans la mesure oµ il n'envisage
                 e                                         u
pas explicitement les strat¶gies de sortie hors de cette spirale d'entr¶e
                             e                                          e
en faillite.
Ooghe et Van Wymeersch (1985) [34] proposent quant a eux une ap-
                                                            µ
proche synth¶tique du concept de  Chemin ¯nancier de la faillite ".
               e
Consid¶rant l'entreprise en di±cult¶ comme celle qui ne parvient pas
        e                             e
a e
µ r¶aliser de maniµre continue ses objectifs ¶conomiques de cr¶ation
                     e                         e                   e
de valeur et partant du fait que la r¶alisation continue de ces objec-
                                        e
tifs ¶conomiques de l'entreprise suppose une rentabilit¶ et une liq-
     e                                                       e
uidit¶ su±sante, coupl¶e a une solvabilit¶ d¶pendante elle-m^me de
      e                  e µ                 e e                  e
la rentabilit¶ de l'entreprise et in°uen»ant sa liquidit¶, une trajectoire
             e                           c              e
¯nanciµre de faillite peut alors ^tre trac¶e.
        e                          e       e




Figure 2 : Le  Chemin de la D¶faillance " (Source : Ooghe H., Van
                              e
Wymeersch Ch., 1986)
Initialement, un chi®re d'a®aires insu±sant ou des charges trop ¶lev¶es
                                                                e e
d¶t¶riorent la rentabilit¶ de l'entreprise. La capacit¶ d'auto¯nance-
  ee                      e                            e
ment devient alors vite insu±sante par rapport aux investissements
en immobilisations ou en actifs circulants. Il en r¶sulte un manque de
                                                   e
liquidit¶s et les dettes augmentent, entra^
         e                                ³nant un montant de charges
¯nanciµres plus ¶lev¶. La solvabilit¶ de l'entreprise se d¶grade µ son
        e          e e               e                     e     a

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  • 1. La faillite d'entreprise, champ d'application privil¶gi¶ des m¶thodes quantitatives en e e e gestion par Didier Van Caillie Introduction1 La recherche en matiµre de faillite d'entreprise s'est d¶velopp¶e, e e e depuis le tout d¶but du XXµme siµcle d¶jµ, a la frontiµre de la recherche e e e ea µ e en ¯nance d'entreprise, en strat¶gie et en statistique. Riche de plusieurs e centaines d'articles publi¶s et de milliers de contributions non publi¶es, e e cette recherche, fondamentalement transdisciplinaire, se caract¶rise e par 3 phases successives : - D'abord, elle s'est focalis¶e sur l'identi¯cation d'indicateurs ¯- e nanciers susceptibles de mesurer le risque de d¶faillance d'une e entreprise et donc de pr¶dire, avec plus ou moins d'acuit¶, sa e e prochaine faillite. La dimension pr¶diction des faillites " est e alors dominante. - Ensuite, elle a cherch¶ a d¶composer la dynamique qui sous- e µ e tend tout processus de d¶gradation de la sant¶ d'une entreprise, e e en visant µ mettre en ¶vidence non seulement des sympt^mes a e o annonciateurs d'une prochaine d¶faillance, mais surtout les causes e op¶rationnelles ou strat¶giques r¶elles de cette d¶faillance et la e e e e structuration temporelle de ces causes. La dimension " pr¶vention e passive des faillites " prend alors le pas sur la simple dimension pr¶dictive. e - En¯n, elle tente µ pr¶sent de mettre en ¶vidence des trajectoires- a e e types de d¶faillance, dont la connaissance de la dynamique per- e mettrait en¯n de mettre r¶ellement et e±cacement en place des e strat¶gies actives de pr¶vention des faillites, permettant ainsi e e v¶ritablement la mise en oeuvre d'une dimension de pr¶vention e e active des d¶faillances d'entreprise". e 1 Cette recherche constitue le volet th¶orique et conceptuel d'un projet de e recherche plus vaste, intitul¶ Approfondissement du concept de `R¶sultat ajout¶' e e e en tant qu'indicateur de pr¶vention des d¶faillances d'entreprises" et ¯nanc¶ par- e e e tiellement par un subside de recherche octroy¶ par la Banque Nationale de Bel- e gique. 1
  • 2. A chacune de ces phases furent associ¶es une ou plusieurs m¶thodes e e quantitatives particuliµres, dont l'¶mergence alors r¶cente trouvait e e e souvent dans le domaine de la faillite d'entreprise un champ d'appli- cation fertile en donn¶es utilisables et potentiellement riche en en- e seignements pour des d¶cideurs avides d'¶tayer leur prise de d¶cision e e e par une analyse rigoureuse d'un ph¶nomµne hautement complexe. e e Aux modµles essentiellement lin¶aires (discriminants ou logistiques) e e caract¶ristiques de la dimension pr¶diction des faillites" ont ainsi e e succ¶d¶ des approches non ou moins lin¶aires (modµles factoriels en e e e e composantes principales ou en correspondances multiples, arbres de classi¯cation, ensembles °ous, . . .) davantage aptes a faire ¶merger µ e des facteurs strat¶giques ou organisationnels annonciateurs de fail- e lite, en exploitant parfois l'expertise accumul¶e par des analystes e de cr¶dit con¯rm¶s (systµmes experts, systµmes d'aides a la d¶cision e e e e µ e multicritµres). Plus r¶cemment, la mise en oeuvre de techniques de e e logique °oue et de r¶seaux de neurones a en¯n permis, quoique en- e core trµs partiellement, de faire ¶merger de v¶ritables trajectoires de e e e d¶faillance. e La pr¶sente contribution poursuit dµs lors 3 buts : e e 1. Elle dresse d'abord un panorama structur¶ et critique de l'¶tat e e de la recherche men¶e (tant dans les contextes anglo-saxons e que francophones) en matiµre de faillite d'entreprise et met en e ¶vidence les multiples facettes de ce champ de recherche. e 2. Elle dresse ensuite un parallµle entre l'¶mergence de chacune des e e 3 phases de cette recherche et le d¶veloppement d'une ou de e quelques m¶thodes quantitatives particuliµres, montrant ainsi e e le r^le contingent jou¶ par ces m¶thodes quantitatives sur le o e e d¶veloppement de ce champ de recherche. Elle montre en cons¶quence e e comment cette recherche est pass¶e dµs lors progressivement e e d'une optique de pr¶diction statique du risque de faillite em- e preinte du sceau d'une saine gestion du risque de cr¶dit a une e µ optique plus dynamique, d'abord r¶active puis proactive, de e pr¶vention de la d¶faillance d'entreprise empreinte de la volont¶ e e e de g¶rer activement l'¶volution strat¶gique de la vie de l'entre- e e e prise. 3. Elle met en¯n en ¶vidence des pistes de d¶veloppement futures e e permettant de combler, µ tout le moins partiellement, les la- a cunes ou zones d'ombre encore laiss¶es par la recherche exis- e 2
  • 3. tante, extr^mement marqu¶e par les facteurs contingents pe- e e sant sur les multiples chercheurs qui se sont attaqu¶s a cette e µ probl¶matique. L'accent y est mis sur la n¶cessit¶ d'exploiter e e e mieux les outils existants ou d'identi¯er de nouveaux outils quantitatifs aptes µ en¯n permettre la mise en oeuvre e®ec- a tive de politique de pr¶vention des faillite dµs que les premiers e e signes d'une ¶volution d'une entreprise vers une trajectoire de e d¶faillance type sont identi¯¶s : la focalisation de la recherche e e en matiµre de faillite d'entreprise sur le sous-domaine de l'i- e denti¯cation de trajectoires types de d¶faillance est en e®et e aujourd'hui devenu une n¶cessit¶, compte tenu a la fois des e e µ cons¶quences ¶conomiques, sociales et ¯nanciµres de toute fail- e e e lite et du contexte ¶conomique turbulent et di±cile dans lequel e ¶voluent l'ensemble des ¶conomies r¶gionales et nationales. e e e 1 La faillite d'entreprise, un champ de recherche aux multiples facettes L'importance ¶conomique et sociale du ph¶nomµne de la faillite e e e d'entreprise est en e®et reconnue depuis fort longtemps, tant dans le monde anglo-saxon que dans le monde francophone, comme en atteste par exemple l'¶tude historique men¶e par Marco (1984)[29]. e e Cette importance, qui se mat¶rialise depuis le d¶but du XXµme siµcle e e e e et les travaux de Rosendale (1908)[36] par la publication de plusieurs centaines d'articles scienti¯ques et la r¶alisation de contributions ou e de recherches non publi¶es encore plus nombreuses (Altman [3], 1984) e (Daubie & Meskens [18], 2001) (Guilhot [25], 2000) (Morris [32], 1997), s'explique fondamentalement par deux ¶l¶ments distincts. ee D'abord, la faillite d'une entreprise signi¯e, au plan micro¶conomique, e l'arr^t des activit¶s ¶conomiques g¶n¶r¶es par la mise en commun e e e e ee d'un ensemble unique de ressources rares (humaines, techniques, im- mat¶rielles et ¯nanciµres), rassembl¶es, agenc¶es et coordonn¶es pen- e e e e e dant une p¶riode de temps plus ou moins longue pour permettre e a µ l'organisation qui en d¶coule de remplir une fonction de concep- e tion, de production et de distribution de biens et de services (r^le o ¶conomique de l'entit¶ entreprise " cr¶atrice de valeur ¶conomique). e e e e Elle signi¯e aussi la ¯n d'une aventure entrepreneuriale dans laquelle, g¶n¶ralement, un ou plusieurs entrepreneurs ont fortement investi leur e e 3
  • 4. pouvoir d'innovation, d'imagination et d'organisation de ressources rares (r^le entrepreneurial de l'entit¶ entreprise ") et sans laque- o e lle, dans une vision schump¶terienne du r^le de l'entrepreneur, il est e o impossible µ une ¶conomie d'esp¶rer survivre et se r¶g¶n¶rer. De ce a e e e e e fait, la faillite d'une entreprise engendre in¶vitablement un gaspillage e ¶conomique de ressources rares (utilis¶es de maniµre non e±ciente e e e avant la d¶claration juridique de faillite, voire non utilis¶es du tout e e aprµs cette d¶claration) et consacre une r¶duction, ne fut-ce que mar- e e e ginale, du pouvoir d'innovation de l'¶conomie en g¶n¶ral. e e e Ensuite, l'entreprise est aussi assimilable, dans une conception d¶sormais e classique (Robbins [35], 1990), a un systµme ouvert, ensemble coor- µ e donn¶ et organis¶ de parties interd¶pendantes actif au sein d'un envi- e e e ronnement en constante ¶volution avec lequel il interagit de maniµre e e permanente. Elle vit de ce fait en ¶troite relation avec les princi- e pales composantes de cet environnement (fournisseurs, clients, con- currents, Pouvoirs Publics, fournisseurs de capitaux et de main d'oeu- vre) et la rupture de cette relation du fait de la faillite engendre dµs lors in¶vitablement des cons¶quences indirectes sur le potentiel e e e de cr¶ation de valeur de ces composantes respectives, cons¶quences e e d'autant plus importantes que l'intensit¶ de cette relation est forte2 . e L'impact ¶conomique, social et humain qui d¶coule, directement ou e e indirectement, de la faillite d'une entreprise justi¯e donc largement l'int¶r^t que nombre de chercheurs ont port¶ a la probl¶matique ee e µ e g¶n¶rale de la faillite dans le domaine global des sciences de ges- e e tion et dans les domaines particuliers de la ¯nance, de la strat¶gie, e de la statistique appliqu¶e ou de l'¶conomie industrielle au cours des e e derniµres d¶cennies. e e Cette recherche n'est cependant pas, loin de lµ, uniforme. La multi- a plicit¶ des origines des chercheurs impliqu¶s, leur appr¶hension l¶galiste e e e e ou dynamique du concept m^me de la faillite, les deux approches qui e en d¶coulent et l'angle d'¶tude du ph¶nomµne de la faillite qu'ils e e e e privil¶gient conduisent in¶vitablement a peindre le portrait d'une e e µ recherche aux multiples visages, riche d'une multitude de lectures 2 L'intensit¶ de cette relation est elle-m^me le r¶sultat de la conjonction de e e e nombreux facteurs contingents, parmi lesquels la taille de l'entreprise (en termes d'emplois directs g¶n¶r¶s ou en termes de chi®re d'a®aires r¶alis¶), la structure e ee e e de sa cha^ de valeur, son insertion dans les r¶seaux productifs et commerciaux ³ne e locaux ou son image en tant que levier de l'activit¶ ¶conomique d'une r¶gion ne ee e sont pas les moindres. 4
  • 5. compl¶mentaires possibles3 . e 1.1 Des chercheurs en provenance de quatre origines A l'analyse, il nous appara^ ainsi que quatre cat¶gories de chercheurs, ³t e devenus de facto µ la fois observateurs et acteurs du ph¶nomµne de a e e la faillite, ont consacr¶ une part substantielle ou marginale de leur e attention µ la d¶faillance de l'entreprise. a e D'abord, il y a les chercheurs issus du monde de la ¯nance de march¶ e ou qui ont fait leurs les paradigmes propres a la ¯nance de march¶. µ e L'entreprise y est alors consid¶r¶e comme un actif ¯nancier, dans ee lequel il est possible d'investir ou qui adresse au march¶ une de-e mande de cr¶dit et dont il faut optimiser le couple risque - rende- e mentqui lui est associ¶. Dans cette perspective, l'accent est alors mis e essentiellement sur la gestion du risque de cr¶dit associ¶ a cette en- e eµ treprise (µ savoir donc le risque de n'^tre tenu indemne que d'une a e partie seulement de la cr¶ance d¶tenue sur l'entreprise) et les outils et e e m¶thodes d¶ploy¶s visent essentiellement a mettre en ¶vidence, aussi e e e µ e t^t que possible, des signaux (essentiellement d'origine comptable o et/ou ¯nanciµre) annonciateurs d'une d¶faillance potentielle. L'op- e e tique gestion du risque de cr¶dit " domine clairement ce courant de e la recherche, qui g¶nµre encore actuellement la majorit¶ du °ux de e e e recherches publi¶es dans le champ de la faillite d'entreprise. e Ensuite, il y a les chercheurs actifs dans des domaines de recherche au caractµre quantitatif marqu¶. Chercheurs dans les champs de la statis- e e tique appliqu¶e, de l'analyse des donn¶es, de la recherche op¶rationnelle e e e ou de l'analyse math¶matique, ils trouvent dans l'¶tude pr¶dictive e e e des faillites un domaine d'application propice µ l'¶laboration et µ la a e a validation d'applications statistiques propres ou au test d'outils sta- tistiques ou math¶matiques particuliers. L'ampleur et la qualit¶ de e e donn¶es (notamment comptables) disponibles relativement ais¶ment, e e a µ moindre co^t et traitables selon un r¶f¶rentiel largement accept¶ u ee e (largement inspir¶ du champ de l'analyse ¯nanciµre ou de l'analyse e e de bilans) explique la pr¶sence d'un grand nombre de recherches, e publi¶es et plus encore non publi¶es, privil¶giant l'application d'une e e e 3 A notre sens, un des principaux reproches a adresser a de trop nombreuses µ µ recherches publi¶es en matiµre de pr¶diction de faillite est leur absence de prise e e e en compte des autres lectures possibles du problµme analys¶ et leur absence de e e positionnement clair dans le vaste champ de cette recherche sp¶cialis¶e. e e 5
  • 6. technique ou d'un outil statistique particulier et mettant en exergue sa capacit¶ a pr¶dire e®ectivement correctement, avec un d¶lai plus ou eµ e e moins long, des faillites in¶vitablement pass¶es e e 4 . De ce fait, la dimen- sion gestion du risque de cr¶dit" domine insidieusement ¶galement e e ce courant de recherche. Les chercheurs issus du monde du droit ou des milieux juridiques au sens large (curateurs, juges consulaires, . . .) ont ¶galement fourni un e nombre consid¶rable d'¶tudes, forc¶ment domin¶es par la dimension e e e e juridique de la faillite d'une entreprise. G¶n¶ralement focalis¶es sur e e e le concept juridique m^me de la faillite et sur ses conditions d'exis- e tence l¶gales (µ savoir, d'une maniµre quasi unanimement reconnue e a e dans le monde anglo-saxon et francophone, l'absence de liquidit¶ de e l'entreprise et l'¶branlement de son cr¶dit et donc de sa solvabilit¶) e e e ces contributions ont cherch¶ le plus souvent a mettre en ¶vidence, e µ e parfois a contrario, les conditions µ remplir pour permettre un re- a dressement de l'entreprise respectueux a la fois des droits de tous ses µ cr¶anciers et des int¶r^ts, multiples et souvent divergents, des autres e ee acteurs de son environnement (essentiellement son personnel, mais aussi ses clients, ses partenaires commerciaux ou industriels et les Pouvoirs Publics au sens large). De ce fait, la dimension gestion du risque juridique" et, plus encore, les dimensions redressement de l'entreprise" et pr¶vention de la d¶faillance" dominent ce courant de e e recherche. En¯n, les chercheurs issus du champ de la strat¶gie d'entreprise, de e la th¶orie des organisations et de la ¯nance d'entreprise ont port¶ leur e e attention sur les motivations et les causes, strat¶giques, op¶rationnelles e e ou organisationnelles, a l'origine m^me de la d¶faillance. Ils met- µ e e tent alors souvent l'accent d'abord sur la dynamique et l'agencement de ces causes profondes et entrouvrent ensuite la voie µ l'identi¯- a cation de trajectoires de d¶faillance" types, jalonn¶es d'¶tapes au e e e travers desquelles les entreprises en di±cult¶ passeraient et suscepti- e bles d'actions correctrices sp¶ci¯ques permettant in ¯ne de pr¶venir et e e d'emp^cher la d¶faillance ultime de l'entreprise. De ce fait, les dimen- e e sions redressement de l'entreprise" et pr¶vention de la d¶faillance" e e dominent elles aussi ce courant de la recherche5 . 4 Pour une pr¶sentation exhaustive des recherches r¶alis¶es dans ce domaine, e e e voir par exemple Dimitras e.a. (1995) ou Zopounidis (1998). 5 Pour une synthµse int¶ressante des r¶sultats de ce type de recherches, voir e e e Sheppard (1994). 6
  • 7. 1.2 Une conception l¶galiste de la faillite et une con- e ception dynamique de la d¶faillance e Deux approches di®¶rentes du concept m^me de faillite ¶mergent e e e donc implicitement, et assez logiquement, de ces quatre courants de recherche. D'une part, nous trouvons les auteurs qui d¶¯nissent le concept de e faillite" sur base de sa seule d¶¯nition l¶gale, faisant de l'appari- e e tion conjointe des deux ¶l¶ments pris en compte par la plupart des ee l¶gislateurs nationaux pour d¶¯nir la faillite l¶gale d'une entreprise e e e (µ savoir donc son absence de liquidit¶ et l'¶branlement de son cr¶dit) a e e e la condition qui permet de distinguer les entreprises faillies des entre- prises non faillies. Ainsi, Beaver (1966) [9], dans un article consid¶r¶ ee comme a la source m^me du °ux ¶lev¶ de recherches consacr¶es a la µ e e e e µ pr¶diction des faillites au cours des 3 derniµres d¶cennies, d¶¯nit la e e e e faillite comme r¶sultant de l'incapacit¶ d'une entreprise µ faire face e e a a µ ses engagements ¯nanciers une fois ceux-ci arriv¶s a maturit¶. Plus e µ e prosaÄ ³quement, de nombreux autres auteurs considµrent que la faillite e survient simplement lorsque l'entreprise introduit auprµs des juridic- e tions comp¶tentes le document l¶gal qui ouvre la voie soit a leur e e µ liquidation, soit a leur r¶organisation (Collongues [12], 1977 ; Ta²er µ e [39], 1982 ; Bryant [11], 1997 ; Gilbert, Menon et Schwartz [?], 1990). La faillite de l'entreprise est alors d¶¯nie sur base de sa conformit¶, e e a µ un instant donn¶, avec les critµres purement l¶gaux retenus par e e e les di®¶rents l¶gislateurs pour d¶terminer l'existence ou non d'une e e e situation de faillite l¶gale" d'une entreprise. e D'autre part, nous trouvons les auteurs qui considµrent l'¶tat de e e faillite d'une entreprise comme r¶sultant d'un processus progressif e de d¶faillance ¶conomique (Argenti [8], 1977) (Koenig [26], 1985) e e (Ooghe, Van Wymeersch [34], 1996), plus ou moins long selon les cas et caract¶ris¶ par le fait que, durant tout son d¶roulement, l'entreprise e e e (alors appel¶e entreprise en cours ou en voie de d¶faillance") se voit e e dans l'incapacit¶ de rencontrer de maniµre r¶guliµre les exigences (en e e e e termes de cr¶ation de valeur, de rentabilit¶, de service de la dette, . . .) e e formul¶es a son encontre par les divers acteurs de son environnement. e µ La faillite de l'entreprise ne constitue de ce fait que l'aboutissement ultime d'un processus de d¶faillance progressif (parfois aussi r¶f¶renc¶ e ee e sous le terme spirale de la faillite ou de la d¶faillance") dont il est e possible de sortir moyennant la prise de mesures de gestion correctri- 7
  • 8. ces judicieuses et elle ne constitue de ce fait que le point ultime d'un processus de d¶faillance ¶conomique. e e 1.3 Entre pr¶diction et pr¶vention : deux angles d'¶tudes e e e di®¶rents . . . e Ces deux approches di®¶rentes du concept m^me de faillite ex- e e pliquent dµs lors quasi naturellement les deux angles d'¶tudes tradi- e e tionnellement pr¶sents dans la litt¶rature et permettent d'expliquer e e les raisons pour lesquelles des recherches sont consacr¶es tant^t µ la e o a pr¶diction des faillites, tant^t µ leur pr¶vention. e o a e En e®et, les recherches consacr¶es a la pr¶diction des faillites re- e µ e posent trµs largement sur une d¶¯nition purement l¶gale du con- e e e cept de faillite. Elles visent alors µ identi¯er, sur base d'un cer- a tain nombre de donn¶es (essentiellement de nature comptable ou e ¯nanciµre), des signaux dont l'apparition est l'indice d'une proba- e ble prochaine d¶faillance. Bas¶es sur l'analyse statistique compar¶e e e e d'¶chantillons (le plus souvent pair¶s6 ) d'entreprises faillies et non e e faillies, ces recherches se fondent dµs lors logiquement sur l'examen e ex post d'un certain nombre de donn¶es et mettent l'accent sur l'i- e denti¯cation des sympt^mes de faillite qui sont les facteurs les plus o apparents des di±cult¶s d'une entreprise. Morris (1997) [32] souligne e dµs lors que les modµles tendent ainsi a identi¯er le plus petit com- e e µ mun d¶nominateur qui lie des entreprises faillies (tels que de faibles e niveaux de pro¯t, un haut degr¶ d'endettement ou la taille relative- e ment peu ¶lev¶e de la plupart des entreprises faillies), se focalisant e e ainsi sur les sympt^mes plut^t que sur les v¶ritables causes sous- o o e jacentes de la d¶faillance. e Quant aux recherches consacr¶es a la pr¶vention des d¶faillances, elles e µ e e s'attachent par contre µ mettre en ¶vidence les causes profondes de a e la faillite, µ savoir les v¶ritables raisons de l'¶chec d'une entreprise a e e (Daubie, Meskens [18], 2001) qui permettront, si les facteurs qui con- ditionnent leur apparition sont d¶tect¶s su±samment t^t et si leur e e o dynamique est comprise et ma^ ee, de mener a des mesures correc- ³tris¶ µ 6 Le fait de construire des ¶chantillons associant, sur base de critµres souvent e e objectifs, des entreprises faillites et des entreprises non faillies semblables conduit en fait µ sur-repr¶senter dans les bases de donn¶es ainsi constitu¶es les entreprises a e e e faillies, qui, ¶conomiquement et selon les contextes nationaux ou temporels, ne e repr¶sentent en fait qu'un maximum de 10 % du tissu ¶conomique consid¶r¶. e e ee 8
  • 9. trices e±caces permettant cette fois d'emp^cher la faillite. e 1.4 . . .et quatre types d'approches di®¶rentes e La prise en compte de l'optique pr¶dictive ou pr¶ventive adopt¶e e e e par les di®¶rents chercheurs en la matiµre et l'examen de la nature e e des analyses men¶es par ces chercheurs conduit en¯n Guilhot (2000) e [25] a consid¶rer que quatre approches de la d¶faillance d'entreprise µ e e coexistent actuellement. Il y a d'abord les approches ¶conomiques, qui s'attachent µ l'¶tude e a e des facteurs ¶conomiques qui a®ectent l'existence de l'entreprise, avec e un accent mis notamment sur le ph¶nomµne des crises7 et des cycles8 . e e Il y a ensuite les approches ¯nanciµres, qui examinent les facteurs a e µ l'origine de la disparition de l'entreprise et formulent l'hypothµse im- e plicite que les causes d'une faillite potentielle se trouvent in¶vitablement e re°¶t¶es, dans un d¶lai plus ou moins long, dans ses ¶tats ¯nanciers : ee e e une interpr¶tation correcte de ces derniers permet alors soit de d¶tecter e e le risque de faillite, soit d'identi¯er des signaux caract¶ristiques d'une e ¶volution µ l'int¶rieur d'une spirale de d¶faillance. e a e e Il y a encore les approches strat¶giques, qui s'attachent µ l'analyse e a des facteurs qui permettent de situer l'entreprise par rapport µ son a environnement, avec un accent particulier plac¶ sur l'analyse de l'en- e vironnement de la ¯rme (et notamment l'analyse de son secteur) et sur l'analyse concurrentielle. Il y a en¯n les approches organisationnelles et manag¶riales, focalis¶es e e sur une vision entrepreneuriale de l'entreprise et qui mettent quant a µ elles l'accent sur le r^le du management ou de l'entrepreneur par o rapport µ la faillite d'une entreprise, en consid¶rant surtout les car- a e act¶ristiques personnelles du chef d'entreprise, sa personnalit¶, ses e e comp¶tences et son exp¶rience. e e In ¯ne, ces approches d¶bouchent sur la mise en ¶vidence d'un trµs e e e grand nombre d'indicateurs annonciateurs, a une ¶ch¶ance plus ou µ e e 7 Inspir¶es de la th¶orie des catastrophes ou du chaos", ces recherches con- e e sidµrent que la faillite d'une entreprise n'est jamais que le r¶sultat d'un ¶v¶nement e e e e impr¶visible ou impromptu dont les e®ets conduisent a la disparition de l'entre- e µ prise en raison de l'¶tat d¶jµ d¶stabilis¶ du systµme entreprise". e ea e e e 8 La nature du cycle conjoncturel ou structurel dans lequel l'entreprise est amen¶e µ ¶voluer d¶termine alors sa capacit¶ µ r¶agir, plus ou moins e±cacement, e ae e ea e aux ¶volutions brutales de son environnement. e 9
  • 10. moins proche, d'une ¶ventuelle d¶faillance de l'entreprise. Le suivi e e r¶gulier de ces indicateurs permet alors de d¶tecter l'apparition de e e signaux d'alarme, qui permettent µ leur tour soit de pr¶dire la prob- a e able faillite prochaine de l'entreprise, soit de mettre en oeuvre des m¶canismes de pr¶vention de la d¶faillance en r¶action a l'appari- e e e e µ tion de ces signaux, ce qui explique la pr¶sence de ces 4 approches e a µ la fois parmi les ¶tudes qui privil¶gient l'angle de la pr¶diction des e e e faillites (optique essentiellement ¯nanciµre de gestion d'un risque de e cr¶dit) et parmi celles qui privil¶gient l'angle de la pr¶vention des e e e d¶faillances (optique essentiellement manag¶riale de gestion du re- e e dressement d'une entreprise). Toutefois, leur int¶gration dans une v¶ritable strat¶gie coh¶rente et e e e e structur¶e de pr¶vention proactive de la d¶faillance d'une entreprise, e e e inscrite le plus souvent dans une politique macro¶conomique plus e vaste de r¶duction du nombre de faillites d'entreprise et tellement e souhaitable compte tenu des cons¶quences dramatiques de toute d¶faillance e e d¶crites ci-avant, implique pr¶alablement de comprendre la dynamique e e et les interrelations qui se nouent entre ces facteurs ; or, µ ce jour, trµs a e peu de recherches envisagent cette approche particuliµre. e 2 L'¶volution des m¶thodes quantitatives, fac- e e teur contingent de l'¶volution de la recherche e en matiµre de faillite d'entreprise e Ayant ainsi dress¶ le portrait g¶n¶ral de la recherche en matiµre e e e e de faillite d'entreprise, interrogeons-nous µ pr¶sent sur les ¶l¶ments a e ee contingents qui ont contribu¶ au d¶veloppement tout particulier de e e ce champ de recherche. Fondamentalement, deux facteurs expliquent µ nos yeux essentielle- a ment l'¶volution et le nombre des contributions consacr¶es a ce do- e e µ maine de recherche. D'abord, il y a le d¶veloppement de la qualit¶ et du volume des e e donn¶es disponibles, µ savoir essentiellement des ¶tats ¯nanciers tenus e a e selon des rµgles comptables r¶glement¶es et strictes dans la plupart e e e des pays industrialis¶s et n¶cessairement ¶tablis par des entreprises e e e dont la taille a sans cesse ¶t¶ revue a la baisse selon des exigences d'u- ee µ niformit¶ de forme, de publicit¶ et de tenue de plus en plus s¶vµres, e e e e 10
  • 11. ce qui en rend a la fois la disponibilit¶ de plus en plus ais¶e, la µ e e qualit¶ de plus en plus uniforme et la comparabilit¶ de plus en plus e e ¶lev¶e. Par ailleurs, au delµ de ces seules donn¶es ¯nanciµres, il y a e e a e e le d¶veloppement d'approches de recherches plus organisationnelles e et qualitatives, bas¶es sur l'observation compar¶e de cas r¶els et e e e d¶bouchant sur l'obtention de donn¶es qualitatives qui viennent compl¶ter e e e et enrichir les bases de donn¶es essentiellement ¯nanciµres utilis¶es e e e le plus fr¶quemment par les chercheurs en ce domaine. L'analyse e d¶taill¶e des contours de ce facteur contingent et des ¶l¶ments qui e e ee en conditionnent l'¶volution m¶riterait µ elle seule une contribution e e a sp¶ci¯que, raison pour laquelle nous ne l'abordons pas davantage ici. e Ensuite, il y a le d¶veloppement des outils de traitement de ces e donn¶es, qu'il s'agisse des capacit¶s de traitement informatique des e e donn¶es ou, plus encore, des outils statistiques d'analyse de donn¶es e e d¶velopp¶s initialement par des chercheurs sp¶cialis¶s dans le champ e e e e de la statistique et qui ont trouv¶ dans le champ de la faillite d'en- e treprise un terreau riche en donn¶es et concret dans lequel tester et e appliquer des techniques toujours plus sophistiqu¶es. e 2.1 L'analyse univari¶e de ratios ¯nanciers et la mise e en ¶vidence du m¶canisme fondamental µ la base e e a de toute faillite Historiquement (Rosendale [36], 1908) (Fitz Patrick [23], 1932), les premiµres ¶tudes consacr¶es a la probl¶matique de la faillite d'en- e e e µ e treprise partent de l'analyse statistique simple de quelques indicateurs ¯nanciers, parfois exprim¶s sous la forme de ratios, et dont les valeurs e et le comportement sont ¶tudi¶s tour µ tour, le plus g¶n¶ralement dans e e a e e une perspective d'¶volution temporelle et sur base des valeurs qu'ils e a±chent pour un nombre limit¶ d'entreprises faillies et non faillies. e Des tests d'¶galit¶ de moyenne et des tests d'¶galit¶ de dispersion e e e e sont alors calcul¶s, manuellement et sur base d'un nombre trµs limit¶ e e e de donn¶es. e Dµs 1966 et gr^ce aux travaux essentiels de Beaver, cette approche e a d¶bouche sur la mise en ¶vidence d'un modµle, dit le modµle du e e e e r¶servoir de °ux", qui d¶compose la m¶canique et la dynamique des e e e °ux ¯nanciers qui conduisent une entreprise a la faillite. µ Ce modµle, qui sous-tend implicitement l'ensemble des travaux publi¶s e e par la suite et bas¶s sur l'analyse de donn¶es essentiellement ¯nanciµres, e e e 11
  • 12. assimile simplement l'entreprise a un r¶servoir de °ux ¯nanciers. Lors µ e de sa cr¶ation, ce r¶servoir est aliment¶ par les fonds propres (le cap- e e e ital social essentiellement) mis a la disposition de l'entreprise par µ ses actionnaires et par les fonds (les dettes) mis µ sa disposition par a divers pr^teurs, essentiellement bancaires. En p¶riode d'activit¶ d'- e e e exploitation, ce r¶servoir est ensuite vid¶ progressivement sous l'- e e e®et des versements (sorties de fonds) faits par l'entreprise pour acqu¶rir (achats de marchandises, achats de services ou bien divers, e . . .) ou pour r¶mun¶rer r¶ellement l'ensemble des facteurs de produc- e e e tion internes (ressources humaines, outils de production) ou externes (ressources ¯nanciµres) qu'elle utile. Simultan¶ment, il est rempli par e e l'arriv¶e des °ux de fonds (entr¶es de fonds) vers¶s par les clients de e e e l'entreprise. Selon ce modµle, domin¶ par la dimension °ux de fonds" et donc e e focalis¶ sur la dimension gestion de la tr¶sorerie de l'entreprise"9 , e e la faillite juridique d'une entreprise survient lorsque le r¶servoir de e fonds de l'entreprise est ¶puis¶ et la d¶faillance de cette entreprise e e e s'amorce dµs que la vitesse avec laquelle le r¶servoir se vide est plus e e importante que la vitesse avec laquelle il se remplit. Mais au delµ dea cette simple dynamique de °ux ¯nanciers, ce modµle n'apporte aucun e enseignement quant aux causes, ¯nanciµres ou organisationnelles, ou e quant µ l'agencement des causes qui conduisent a ce d¶s¶quilibre de a µ ee tr¶sorerie. e En fait, Beaver lie la taille de ce r¶servoir de fonds µ la proba- e a bilit¶ du risque de d¶faillance d'une entreprise : la faillite peut en e e e®et provenir soit d'un r¶servoir ¶puis¶ (par manque de cash-°ows e e e ou par suite d'une di®¶rence de vitesse entre le taux de remplis- e sage du r¶servoir li¶ au niveau des activit¶s et le taux de vidange e e e du r¶servoir, li¶ quant µ lui aux d¶penses d'investissement et aux e e a e d¶penses d'exploitation courantes), soit d'un r¶servoir mal dimen- e e sionn¶ a l'origine de l'entreprise (en raison de la sous-capitalisation de eµ l'entreprise). A la base, Beaver s¶lectionne un ensemble de 30 ratios, e regroup¶s en six groupes (ratios de cash-°ows, ratios li¶s aux revenus e e nets g¶n¶r¶s par l'entreprise, ratios de solvabilit¶, ratios de liquidit¶, e ee e e ratios d'¶quilibre ¯nancier et ratios de rotation des activit¶s), et, se e e 9 Cette dimension est d'ailleurs la seule prise en compte par le l¶gislateur e lorsqu'il d¶¯nit la faillite d'une entreprise comme r¶sultant de son incapacit¶ a e e e µ faire face µ ses engagements de tr¶sorerie de court terme - crise de liquidit¶ - et de a e e son incapacit¶ µ g¶n¶rer des rentr¶es de fonds additionnelles - crise de solvabilit¶. ea e e e e 12
  • 13. basant sur l'¶volution de leur valeur moyenne durant une p¶riode de e e cinq ans avant la faillite, il conclut a leur d¶gradation croissante au µ e fur et µ mesure que l'ann¶e de la faillite se rapproche. Il arrive ainsi a e a µ la conclusion que les entreprises faillies g¶nµrent des cash-°ows et e e des liquidit¶s moindres que les entreprises en activit¶ au cours des e e 5 ann¶es pr¶c¶dents la faillite et met en lumiµre le pouvoir pr¶dictif e e e e e ¶lev¶ des ratios Cash-Flows / Dettes totales" et R¶sultat net / Actif e e e total", ouvrant ainsi une premiµre voie vers l'identi¯cation potentielle e de trajectoires de d¶faillance" et soulignant ainsi que, au plan pure- e ment ¯nancier, la faillite d'une entreprise est l'aboutissement d'un processus caract¶ris¶ par une insu±sance de rentabilit¶ qui, coupl¶e e e e e a µ une solvabilit¶ d¶t¶rior¶e, engendre une crise de liquidit¶ fatale µ e ee e e a l'entreprise. Mais ce type d'approche unidimensionnelle, de par sa conception m^me, ne permet pas d'avoir une vision globale et transversale des e di®¶rents facteurs explicatifs susceptibles d'annoncer l'apparition d'un e processus de d¶faillance, ni d'avoir une vision claire des interrelations e entre ces facteurs. D'oµ l'¶mergence assez rapide, dans la foul¶e des u e e travaux de Beaver (1966) [9], d'approches multidimensionnelles sup- pos¶es lever cette limite m¶thodologique. e e 2.2 L'analyse ¯nanciµre et la mise en ¶vidence de sympt^mes e e o ¯nanciers par des m¶thodes lin¶aires e e Selon Dambolena et Shulman (1988) [17], deux types d'¶tudes e se d¶gagent ensuite du courant de recherche focalis¶ sur l'analyse e e ¯nanciµre des entreprises faillies qui se d¶veloppe dµs la ¯n des ann¶es e e e e '60 et la parution de la trµs c¶lµbre contribution de Altman (1968) e ee [2]. D'une part, il y a les ¶tudes qui tentent d'identi¯er des ratios ¯- e nanciers pertinents, g¶n¶ralement regroup¶s en 4 familles (ratios de e e e liquidit¶, de solvabilit¶, de pro¯tabilit¶ et d'e±cience, allant ainsi des e e e indicateurs les plus symptomatiques a court terme aux indicateurs µ les plus fondamentaux µ long terme (Ooghe, Van Wymeersch [34], a 1996)), et qui pourraient permettre de pr¶dire la faillite a un hori- e µ zon de temps d¶termin¶, moyennant l'utilisation d'outils statistiques e e ou math¶matiques ad¶quats (voir par exemple les ¶tudes typiques de e e e Beaver (1966) [9], Altman (1968) [2], Wilcox (1971) [42], Collongues (1977) [12] et Dambolena et Khoury (1980) [16]). Les modµles de e 13
  • 14. pr¶diction de faillites qui r¶sultent de ce courant de recherche utilisent e e alors une multitude de m¶thodes µ pr¶sent multivari¶es, dont les e a e e plus r¶pandues sont indubitablement l'analyse discriminante, les tech- e niques de r¶gression lin¶aire, les technique de r¶gression logistique, les e e e algorithmes de partitionnement r¶cursif, les analyses de survie ou les e systµmes-experts ou les systµmes d'aides a la d¶cision, µ base parfois e e µ e a plus qualitative. Toutefois, l'utilisation de ces m¶thodes et la pertinence des enseigne- e ments sur lesquels elles d¶bouchent font alors fr¶quemment l'objet de e e querelles de chercheurs, en raison notamment du fait que nombre de ces m¶thodes sont appliqu¶es et mises en oeuvre sans syst¶matiquement e e e v¶ri¯er avec tout le s¶rieux voulu leur applicabilit¶ statistique : Eisen- e e e beis (1977) [22] souligne ainsi tout particuliµrement sept limites inh¶rentes e e µ l'utilisation de l'analyse discriminante, µ savoir des contraintes a a ou des limites de multi-normalit¶ de la distribution des variables, e d'¶galit¶ dans la dispersion des groupes de r¶f¶rence utilis¶s, d'in- e e ee e terpr¶tation et de signi¯cation de variables a la multicolin¶arit¶ sou- e µ e e vent ¶lev¶e, de r¶duction de la dimension initiale du problµme pos¶, e e e e e de d¶¯nitions des groupes de r¶f¶rence, de choix des probabilit¶s µ e ee e a priori et d'estimation des taux d'erreurs de classi¯cations. Des ques- tions telles que la normalit¶ de la distribution des variables utilis¶es, e e la nature des corrections µ apporter pour traiter de maniµre e±ciente a e la pr¶sence de donn¶es exceptionnelles ( outliers "), la pertinence e e de la constitution d'¶chantillons pair¶s, . . .donnent aussi lieu a une e e µ multitude de remises en cause et de r¶ponses parfois virulentes, qui e vont jeter temporairement le discr¶dit sur un pan de recherche alors e en pleine expansion. D'autre part, il y a les recherches, telles que celles de Beaver (1968) [10] ou de Aharony, Jones et Swary (1980) [1], qui se fondent sur l'analyse du comportement des titres des entreprises cot¶es a¯n d'en e pr¶dire la d¶faillance ¶ventuelle, se basant ainsi sur le paradigme e e e de march¶s parfaitement e±cients dont les acteurs sont capables e d'int¶grer dans leur appr¶ciation des titres d'une entreprise toute l'in- e e formation disponible relative µ cette entreprise. a 14
  • 15. 2.2.1 L'analyse du comportement de ratios ¯nanciers per- tinents Peu aprµs la contribution fondamentale de Beaver (1966) [9], une e autre ¶tude capitale appara^ celle de Altman (1968) [2]. Cet auteur e ³t, est en fait le premier a proc¶der µ une analyse multivari¶e (bas¶e µ e a e e sur le recours a une analyse discriminante) d'une batterie de ratios µ ¯nanciers reconnus par la litt¶rature comme pertinents pour juger e de la performance ¯nanciµre d'une entreprise ; cette approche, qui e se distingue de l'approche de Beaver non seulement pas son aspect multivari¶ mais aussi par le fait qu'elle ne prend pas en compte ex- e plicitement la dynamique du processus de d¶gradation progressive de e la sant¶ ¯nanciµre de l'entreprise, a le m¶rite de grouper cinq indi- e e e cateurs ¯nanciers cl¶s dans une fonction lin¶aire simple d'utilisation e e (notamment dans une perspective d'¶valuation du risque de cr¶dit) e e et d'¶tablir une pond¶ration de ces indicateurs en fonction de leur e e pouvoir discriminant. Le modµle de Altman, plusieurs fois r¶vis¶ par la suite (Altman [5], e e e 1983), a±che d'embl¶e d'excellentes capacit¶s de pr¶diction d¶jµ deux e e e ea ans avant la d¶faillance et s'avµrera par la suite d'une extraordinaire e e robustesse au ¯l des ans et dans de multiples contextes ¶conomiques e ou ¯nanciers (Altman [3], 1984), devenant ainsi une r¶f¶rence essen- ee tielle ou un point de comparaison incontournable de toute recherche multivari¶e portant sur la pr¶diction des faillites. e e Ce modµle se pr¶sente, dans sa forme la plus g¶n¶rale, comme suit : e e e e Z = 0:012X1 + 0:014X2 + 0:033X3 + 0:006X4 + 0:999X5 fond de roulement net avec X1 = actif total r¶serves e X2 = actif total r¶sultat avant charges ¯nanciµres et imp^ts e e o X3 = actif total valeur de march¶ des fonds propres e X4 = valeur comptable des dettes totales ventes X5 = actif total Z = Score discriminant Chaque entreprise se voit donc attribuer une valeur Z, score pond¶r¶ ee fonction de la valeur prise par ces cinq indicateurs ¯nanciers, et est class¶e dans le groupe des entreprises en faillite ou en activit¶ en e e 15
  • 16. fonction d'un seuil critique d¶¯ni sur base de l'analyse du comporte- e ment de ce score Z au sein d'un ¶chantillon repr¶sentatif d'entreprises e e faillies appari¶ a un ¶chantillon d'entreprises saines. eµ e Au plan ¯nancier, ce modµle sanctionne l'apparition conjointe d'un e fonds de roulement insu±sant par rapport au volume de l'actif, la di±cult¶ d'auto¯nancement pass¶e de l'entreprise, la faiblesse de sa e e rentabilit¶ ¶conomique, une solvabilit¶ r¶duite (appr¶ci¶e par le bi- e e e e e e ais d'une valeur de march¶ des fonds propres) et une rotation trop e faible de l'actif (donc un niveau d'activit¶ insu±sant par rapport aux e moyens d¶gag¶s par l'entreprise pour ¯nancer ses op¶rations) ; au- e e e cune indication claire n'en ¶merge toutefois quant µ l'encha^ e a ³nement des ¶l¶ments ¯nanciers susceptibles de conduire une entreprise µ la ee a faillite. A la suite des travaux de Altman, une multitude de fonctions multi- vari¶es, discriminantes ou non, viennent enrichir la litt¶rature. e e Nous avons choisi d'en retenir quatre, qui toutes pr¶sentent µ nos yeux e a une innovation m¶thodologique ou conceptuelle majeure par rapport e au modµle initial de Altman : e - En 1971, Wilcox ¶labore un modµle stochastique, calqu¶ sur le e e e modµle de Beaver, mais qui semble donner de meilleurs r¶sultats e e de pr¶diction quatre ans avant la faillite. Son modµle part de e e l'id¶e qu'une entreprise peut se situer dans di®¶rents ¶tats qui e e e repr¶sentent chacun un niveau de bien-^tre ¯nancier. La for- e e mule suivante permet alors de calculer la probabilit¶ qu'une e entreprise ¯nisse dans un ¶tat de d¶faillance : e e ½ 1 sip ∙ q P (Faillite ultime) = q p( p )N autrement N = les ¶tats, estim¶s sur base e e d'une position de tr¶sorerie ajust¶e /¾ e e ¾ = la taille estim¶e de l'intervalle entre les ¶tats e e avec adjacents en termes de tr¶sorerie e q = la probabilit¶ de passer a N ¡ 1, l'¶tat pr¶c¶dent e µ e e e p = la probabilit¶ de passer a N + 1, l'¶tat suivant e µ e p + q = 1. Ce modµle fait donc le postulat explicite que la d¶faillance d'une e e entreprise r¶sulte d'un processus progressif, caract¶ris¶ par un e e e certain nombre d'¶tats interm¶diaires caract¶ristiques en ter- e e e 16
  • 17. mes de tr¶sorerie (d'oµ une conception du ph¶nomµne de la e u e e faillite r¶duite a une simple dimension de crise de liquidit¶s) e µ e par lesquels l'entreprise en voie de d¶faillance (ou, a contrario, e en cours de redressement) va in¶vitablement passer. e - En 1972, Edmister (1972) [21] ¶labore ¶galement une fonction e e discriminante, form¶e par la combinaison de sept ratios : e N4 = 9:5¡4:23X1 ¡2:93X2 ¡4:82X3 +2:77X4 ¡4:52X5 ¡3:52X6 ¡9:24X7 avec ½ cash-°ow 1 si dettes a court terme µ < 0:05 X1 = 0 sinon ½ fonds propres 1 si chi®re d'a®aires < 0:07 X2 = 0 sinon 8 fonds de roulement net > 1 < si ventes divis¶ par la e X3 = moyenne sectorielle est < ¡0:02 > : 0 sinon 8 dettes a court terme µ > 1 < si fonds propres divis¶ par la e X4 = moyenne sectorielle est < 0:48 > : 0 sinon 8 stocks > 1 < si ventes divis¶ par la moyenne sectorielle e X5 = a un trend ascendant et est < 0:04 > : 0 sinon 8 r¶alisable et disponible e > 1 > si divis¶ par la e > > dettes a court terme µ < moyenne sectorielle a un trend ascendant X6 = > > > > et est < 0:34 : 0 sinon 8 r¶alisable et disponible e > 1 < si dettes a court terme µ divis¶ par la moyenne e X7 = sectorielle a un trend ascendant > : 0 sinon L'originalit¶ de son approche r¶side d'une part dans le fait e e qu'il utilise pour la premiµre fois des variables explicatives sec- e ondaires prenant une forme dichotomique en fonction du fait que les variables explicatives primaires qui y sont associ¶es fran- e chissent certains seuils sp¶ci¯ques, d'autre part dans la prise en e compte explicite, dans la d¶¯nition de ces seuils, de comporte- e 17
  • 18. ments propres au secteur d'activit¶ des entreprises ¶tudi¶es, re- e e e connaissant de ce fait implicitement l'importance des facteurs structurels et conjoncturels (en l'occurrence, en l'espµce, le com- e portement moyen au sein du secteur) en tant que facteurs ex- plicatifs du risque de faillite d'une entreprise. - En 1977, Collongues ¶labore deux fonctions discriminantes, con- e struites dans un contexte d'hyper-in°ation rendu hautement in- stable en raison des chocs p¶troliers du d¶but des ann¶es '70. e e e Ces deux fonctions lin¶aires sont d¶¯nies comme ceci : e e Z= 4:9830X1 + 60:0366X2 Z= 4:6159X4 ¡ 22:0000X5 ¡11:8348X3 ¡1:9623X6 avec avec frais de personnel frais de personnel X1 = valeur ajout¶e e X4 = valeur ajout¶e e frais ¯nanciers r¶sultat d'exploitation e X2 = chi®re d'a®aires hors taxes X5 = chi®re d'a®aires hors taxes fonds de roulement net fonds de roulement net X3 = total du bilan X6 = stocks Au plan ¯nancier, elles font appara^ ³tre pour la premiµre fois e l'importance accord¶e au volume de valeur ajout¶e g¶n¶r¶ par e e e ee l'entreprise et a la part qui en est attribu¶e au facteur de pro- µ e duction le plus rigide, a savoir le personnel, lorsque l'entreprise µ traverse une p¶riode d'incertitude conjoncturelle caract¶ris¶e e e e par une grande volatilit¶ de son environnement. e - En¯n, en 1980, Dambolena et Khoury d¶veloppent un modµle e e dont la caract¶ristique principale est son int¶gration explicite de e e la stabilit¶ au ¯l des ans des ratios ¯nanciers ¶tudi¶s (par le biais e e e de la prise en compte de l'¶cart type des ratios sur la p¶riode de e e temps ¶tudi¶e, mesure qui s'avµre par ailleurs ^tre la meilleure e e e e mesure possible de cette stabilit¶). Il ressort de leur ¶tude qu'il e e existe une instabilit¶ assez importante du comportement des e ratios ¶tudi¶s, qui s'accro^ au fur et µ mesure que le moment e e ³t a de la faillite se rapproche. Au vu de ces diverses ¶tudes, il semble donc bien qu'une analyse e ¯nanciµre a base de plusieurs ratios pertinents permette de pr¶dire e µ e la faillite d'une entreprise dans un d¶lai de un a cinq ans avant la e µ d¶faillance. e Toutefois, la mise en oeuvre d'une telle approche se heurte µ plusieurs a facteurs µ caractµre m¶thodologique qui en limitent la port¶e : a e e e 18
  • 19. Ainsi, Eisenbeis (1976) [22] souligne que, si les ratios ¯nanciers sem- blent ^tre de bons moyens de pr¶diction ex post, ils ne peuvent e e ^tre justement calcul¶s qu'a posteriori et donc ce n'est qu'une fois e e l'entreprise faillie que l'analyste, dans cette optique, peut identi¯er les causes de la d¶faillance en examinant les changements survenus e dans la valeur des ratios ¯nanciers de l'entreprise. En fait, comme le concµde Altman, la question n'est pas tant de savoir si une entre- e prise va tomber en faillite parce qu'elle pr¶sente une valeur donn¶e e e pour certains ratios ¯nanciers caract¶ristiques, mais si ces sympt^mes e o sont semblables µ ceux d'autres entreprises qui, dans le pass¶, ont a e continu¶ a voir leur sant¶ ¯nanciµre se d¶t¶riorer pour ¯nalement e µ e e ee aboutir µ la faillite : en ce sens, les ratios ¯nanciers ne permettent a pas v¶ritablement d'identi¯er les causes de la faillite mais ils peuvent e permettre de mesurer l'¶tendue de la mauvaise performance d'une e entreprise. D'autre part, les ratios doivent ^tre compar¶s a un standard, sans quoi e e µ leur analyse n'est pas signi¯cative, mais la question de la d¶termination e de ce standard reste pos¶e.e En¯n, les ratios mµnent µ une analyse statique, puisque calcul¶s sur e a e une p¶riode ¯xe, alors que la faillite appara^ clairement comme le e ³t r¶sultat d'un processus dynamique. e 2.2.2 L'analyse du comportement des titres des entreprises faillies Beaver (1968) est aussi un des premiers chercheurs a utiliser les µ donn¶es de march¶ pour pr¶dire la faillite d'une entreprise : alors e e e qu'en 1966, sa premiµre recherche ¶tait destin¶e a analyser la capacit¶ e e e µ e pr¶dictive, dans une perspective de d¶tection de faillite, d'une s¶rie e e e de ratios ¯nanciers, en 1968, il montre que la variation du prix de march¶ de l'action d'une entreprise permet ¶galement de pr¶dire la e e e faillite. En fait, constate-t-il, ces deux moyens de pr¶diction sont li¶s puisque e e les investisseurs utilisent de facto les ratios ¯nanciers pour appr¶cier e le degr¶ de solvabilit¶ d'une entreprise et que les modi¯cations de e e prix des actions traduisent le fait que les investisseurs ¶tayent leur e jugement sur base de ces ratios, incorporant de ce fait dans les prix du march¶ l'information contenue dans la valeur du ratio. Concrµtement, e e Beaver analyse le lien entre le prix du march¶ et la valeur de certains e 19
  • 20. ratios ¯nanciers au moyen d'une analyse s¶rielle, dont l'objet est de e d¶terminer le d¶lai avec lequel des investisseurs, comparativement e e a µ la valeur a±ch¶e par quatre ratios ¯nanciers, peuvent pr¶voir la e e d¶faillance. Concrµtement, l'hypothµse est faite que, a un moment e e e µ donn¶, une d¶t¶rioration substantielle de la solvabilit¶ de l'entreprise e ee e devient ¶vidente au point qu'elle se traduit pas une premiµre chute e e importante du cours du titre de l'entreprise. Au terme de son ¶tude,e Beaver constate que le march¶ pr¶dit plus rapidement la faillite que e e les ratios ¯nanciers mais que, n¶anmoins, les ratios de Cash-°ow / e Dettes" et de Revenu net / Actif total" en arrivent µ une pr¶diction a e presque aussi bonne. En 1980, Aharony, Jones et Swary comparent les caract¶ristiques de e risque et de rendement d'entreprises faillies et non faillies une fois appliqu¶ le modµle du MEDAFE. Ils constatent que la variance to- e e tale du rendement du titre, mesure du risque total qui pµse sur ce e titre, est plus ¶lev¶e pour les entreprises en faillite sur une p¶riode e e e allant de 226 semaines avant la faillite a 120 semaines avant, mais µ que le risque syst¶matique (mesur¶ par le coe±cient ¯) reste con- e e stant sur la p¶riode ¶tudi¶e. Ils constatent ainsi que, lorsqu'on com- e e e pare l'¶chantillon d'entreprises faillies et l'¶chantillon de contr^le, il e e o appara^ des di®¶rences substantielles dans le comportement des vari- ³t e ances de la moyenne, tant au niveau global qu'au niveau du risqu¶ e sp¶ci¯que µ l'entreprise, et ce, jusqu'µ quatre ann¶es avant que la fail- e a a e lite formelle ne soit annonc¶e. De plus, la performance globale du titre e est n¶gative environ quatre ans avant la faillite et, sur une p¶riode de e e 4 ann¶es avant la faillite, le rendement moyen du portefeuille d'entre- e prises faillies est signi¯cativement inf¶rieur a celui du portefeuille de e µ contr^le, que qui implique une d¶t¶rioration inattendue importante, o ee en moyenne, pour le groupe des entreprises faillies et traduit le fait que les investisseurs se sont ajust¶s continuellement aux situations de e solvabilit¶ d¶clinantes de ces entreprises durant une p¶riode d'environ e e e quatre ans. 2.3 De l'analyse ¯nanciµre µ l'analyse organisationnelle e a des causes de d¶faillance gr^ce µ l'¶mergence pro- e a a e gressive de m¶thodes non lin¶aires e e Di®¶rents auteurs (Altman et Loris [6], 1976 ; Vernimmen [41], e 1978 ; Collongues [12], 1977, . . .) ont trµs vite soulign¶ que l'ap- e e 20
  • 21. proche purement ¯nanciµre de la d¶faillance d¶bouche certes sur une e e e meilleure compr¶hension des m¶canismes ¯nanciers qui conduisent e e une entreprise µ la faillite, mais que ces modµles pourraient ^tre utile- a e e ment enrichis en tenant compte de variables qualitatives repr¶sentatives e de facteurs endogµnes li¶s au fonctionnement interne de l'entreprise e e et de facteurs exogµnes li¶s a la nature de l'environnement concur- e e µ rentiel dans lequel elle s'insµre (telles que l'exp¶rience des managers, e e la °exibilit¶ du march¶ ou encore la nature de l'avantage comp¶titif e e e acquis par l'entreprise). L'int¶gration de telles variables qualitatives e permettrait donc de passer d'une analyse a posteriori des sympt^meso (essentiellement ¯nanciers) annonciateurs d'une ¶ventuelle d¶faillance e e a µ une v¶ritable analyse strat¶gique des causes r¶elles de faillite (or- e e e ganisationnelles, structurelles ou autres). Argenti (1976) [8] est le premier chercheur a explorer cette voie. Il µ ¶labore ainsi un modµle, appel¶ le A-score", de nature fondamentale- e e e ment organisationnelle. Estimant que les ratios ¯nanciers ne sont que des sympt^mes ais¶ment manipulables de la faillite d'une entreprise o e et sont de ce fait incapables d'aider a la compr¶hension du processus µ e de d¶gradation qui mµne a la d¶faillance, Argenti propose un modµle e e µ e e dynamique fond¶ sur l'activit¶ de l'entreprise et sur sa structure de e e management et qui se veut repr¶sentatif des processus de d¶gradation e e qui d¶bouchent sur la faillite. e Selon ce modµle, le processus de faillite est bas¶ sur un certain nom- e e bre de d¶fauts inh¶rents µ l'organisation et µ la structure ¯nanciµre e e a a e de l'entreprise. Ces faiblesses et d¶fauts produisent des modi¯cations e dans l'environnement macro-¶conomique de l'entreprise et la surve- e nance de hasards normaux des a®aires" (tels que la perte d'un client important ou une hausse brutale des taux d'int¶r^ts) conduit µ une ee a crise susceptible de provoquer la mort de l'entreprise. Le processus de d¶faillance au sens strict se compose alors de trois e phases successives : La premiµre phase se caract¶rise par la rigidit¶ de l'organe de direc- e e e tion, qui r¶sulte elle-m^me de la combinaison des faiblesses suivantes, e e le plus souvent d'origine interne, dont chacune a pour cons¶quence de e restreindre la capacit¶ de la direction a recueillir et a traiter conven- e µ µ ablement les informations pertinentes : la pr¶sence, a la t^te de l'en- e µ e treprise, d'un ou plusieurs autocrates" r¶gissant de main de ma^ e ³tre toute la gestion quotidienne et strat¶gique de l'entreprise, refusant e 21
  • 22. tout dialogue et toute aide des travailleurs ou conseillers potentiels de l'entreprise ; la concentration aux mains d'une seule et m^me per- e sonne ou de quelques acteurs seulement des pouvoirs de gestion et des droits de propri¶t¶ de l'entreprise ; la restriction des comp¶tences ee e a µ un domaine particulier de la gestion, ce qui conduit potentiellement a µ l'absence d'un produit parfaitement adapt¶ aux besoins du march¶ e e et/ou µ une faible connaissance des questions ¯nanciµres. a e La deuxiµme phase du processus de d¶faillance est ensuite marqu¶e e e e par l'apparition d'erreurs de gestion, strat¶giques et/ou op¶rationnelles, e e telles que la lenteur de r¶action aux modi¯cations de la technologie, e une mauvaise politique de communication, l'existence de malversa- tions et de fraudes, la prise en consid¶ration insu±sante des facteurs e de co^t (notamment en matiµre de recherche et de d¶veloppement), u e e un endettement ¯nancier ¶lev¶. e e Ces erreurs amorcent en¯n la troisiµme phase du processus de d¶faillance, e e au cours de laquelle les sympt^mes critiques de d¶faillance, qu'ils o e soient ou non ¯nanciers, apparaissent au grand jour et se mat¶rialisent e clairement en des signaux rep¶rables par tout observateur externe µ e a l'entreprise. Argenti souligne par ailleurs que la pr¶sence de facteurs externes, tels e que le poids des Syndicats et des Pouvoirs Publics ou des ¶v¶nements e e naturels impond¶rables, est susceptible d'acc¶l¶rer le parcours de l'en- e ee treprise au travers de ces trois phases, constitutives d'un processus progressif, a vitesse d'¶volution non constante, non lin¶aire et idiosyn- µ e e cratique puisque d¶pendant des caract¶ristiques organisationnelles et e e des choix strat¶giques de chaque entreprise et de la personnalit¶ de e e ses dirigeants. Ult¶rieurement, Cormier et al. (1994) [14], Dimitras et al. (1995) e [20], Slowinski et Zopounidis (1995) [38], Greco et al. (1998) [?] et Zopounidis et Doumpos (1999) [45] vont dµs lors aussi int¶grer, dans e e leur mod¶lisation du processus de d¶faillance d'une entreprise, des e e informations qualitatives relatives a l'exp¶rience des managers, au µ e positionnement de march¶ de l'entreprise, µ la nature de sa tech- e a nologie ou a son infrastructure technique, µ son mode d'organisation, µ a aux avantages comp¶titifs qu'elle d¶veloppe et au niveau de °exibilit¶ e e e qu'elle acquiert vis-µ-vis de son march¶. a e A l'inverse de Argenti, a la m¶thodologie d'analyse fondamentalement µ e empirique et bas¶e sur l'expertise de quelques cas limit¶s consid¶r¶s e e ee 22
  • 23. par l'auteur comme typiques, ces auteurs vont toutefois utiliser l'outil statistique et les m¶thodes quantitatives les plus diverses pour nour- e rir et ¶tayer leur r¶°exion. Les modµles de probabilit¶ conditionnelle e e e e de type logit ou probit (Ohlson [33], 1980) (Zavgren [?], 1985), l'al- gorithme de partitionnement r¶cursif (Frydman e.a. [?], 1985), les e techniques de logique °oue, l'approche par arbres de classi¯cation et l'incontournable approche par accumulation de r¶gressions logistiques e vont alors ¶merger tour µ tour dans la litt¶rature et donner lieu µ la e a e a publication d'un grand nombre de contributions oµ la description de u la technique et de son int¶r^t conceptuel prend souvent le pas, a notre ee µ sens, sur l'interpr¶tation et l'analyse critique des apports concrets de e ces techniques a la compr¶hension de la m¶canique de la d¶faillance µ e e e de l'entreprise. En 1994, Sheppard propose en¯n une int¶ressante synthµse des fac- e e teurs d'origine organisationnelle ou strat¶gique mis en lumiµre dans la e e litt¶rature comme pertinents dans la perspective d'une compr¶hension e e accrue du processus de d¶faillance d'une entreprise. e Il procµde ainsi a une analyse en 4 niveaux de ces facteurs (niveau de e µ la strat¶gie globale de l'entreprise, niveau des di®¶rentes strat¶gies e e e d'activit¶, niveau du d¶veloppement de strat¶gies coop¶ratives et en- e e e e ¯n niveau des strat¶gies ¯nanciµres). Il en ressort qu'aucun ¶l¶ment e e ee constitutif de la strat¶gie globale de l'entreprise n'appara^ conduire µ e ³t a une meilleure compr¶hension du processus de d¶faillance, qu'il existe e e une relation positive entre la part de march¶ relative de l'entreprise et e sa survie ainsi qu'entre l'¶volution de la taille de la ¯rme (et donc la e maniµre dont elle gµre activement sa croissance) et sa survie, que l'ac- e e croissement de l'expertise manag¶riale disponible dans l'entreprise est e clairement associ¶e a une r¶duction du risque de d¶faillance et, sans e µ e e v¶ritable surprise, l'existence d'une relation signi¯cativement positive e entre le volume des ressources ¯nanciµres a la disposition de l'entre- e µ prise et sa probabilit¶ de survie. e 23
  • 24. 3 Des sympt^mes aux causes : un concept de o trajectoire de d¶faillance" en qu^te d'outils e e quantitatifs pour ^tre en¯n explor¶ . . . e e Un consensus est donc apparu assez t^t dans la litt¶rature selon o e lequel la faillite d'une entreprise est le r¶sultat d'un processus ¶volutif, e e lent et progressif, caract¶ris¶ par une multitude d'¶v¶nements. L'en- e e e e cha^³nement de ces ¶vµnements qui, th¶oriquement, se succµdent avant e e e e d'aboutir µ la discontinuit¶ de l'entreprise peut, s'il est correctement a e identi¯¶, ^tre judicieusement mod¶lis¶ sous la forme d'une ou de e e e e plusieurs trajectoires de d¶faillance ", caract¶ris¶es id¶alement par e e e e des faits particuliers (concentration du chi®re d'a®aires sur quelques gros clients, perte signi¯cative de parts de march¶s, retrait d'un ac- e tionnaire important, . . .) dont l'apparition, si elle est d¶tect¶e su®- e e isamment a temps, peut alors conduire a la prise de mesures correc- µ µ trices e±caces et permettre le d¶ploiement de v¶ritables strat¶gies e e e de pr¶vention de faillite, si souvent esp¶r¶es et si rarement mises en e ee oeuvre avec succµs. e Pourtant, les chercheurs ont ¶tudi¶ assez tardivement, et en nombre e e peu important, ces chemins qui semblent mener a la faillite. Parmi µ eux, certains ont toutefois permis un apport conceptuel appr¶ciable. e Ainsi, au terme d'une ¶tude historique et ¶pist¶mologique du con- e e e cept de faillite et de ses causes et cons¶quences, Marco (1989) [30] e propose un modµle th¶orique purement conceptuel et d'inspiration e e ¶conomique, repr¶sentatif du processus de faillite appel¶ Spirale e e e d'entr¶e en faillite". Suivant ce modµle, des erreurs de gestion (essen- e e tiellement op¶rationnelles) provoquent initialement des d¶s¶quilibres e e e ¯nanciers, puis un certain recul sur le march¶ conduit µ une chute e a s¶vµre des pro¯ts, ce qui renforce les di±cult¶s de tr¶sorerie ; en¯n, e e e e l'inqui¶tude des cr¶anciers et la m¶¯ance des banquiers qui mettent e e e un terme a leur cr¶dit conduit tout droit la ¯rme µ la cessation de µ e a paiements et donc µ sa mise en faillite. a 24
  • 25. Ce modµle, relativement simple, permet de faire le lien entre le proces- e sus de d¶gradation ¯nanciµre connu dans la litt¶rature sous le nom e e e de Chemin de la Faillite" (d¶crit ci-aprµs) et les erreurs de gestion e e qui en sont la cause premiµre, un pont ¶tant ainsi dress¶ entre les fac- e e e teurs et indicateurs ¯nanciers les plus symptomatiques et les facteurs qualitatifs ou de gestion qui en sont la cause v¶ritable. Par ailleurs, il e prend en compte les int¶r^ts des di®¶rents agents int¶ress¶s a la ges- ee e e e µ tion de l'entreprise, en int¶grant explicitement dans le processus le e point de vue des clients, des cr¶anciers et des banquiers et int¶grant e e ainsi l'aspect contingent li¶ a l'immersion de l'entreprise dans son en- eµ vironnement. Toutefois, force est de constater que ce modµle n'intµgre e e encore que trµs partiellement la dynamique d'¶volution de l'entreprise e e 25
  • 26. et l'aspect strat¶gique de sa gestion, dans la mesure oµ il n'envisage e u pas explicitement les strat¶gies de sortie hors de cette spirale d'entr¶e e e en faillite. Ooghe et Van Wymeersch (1985) [34] proposent quant a eux une ap- µ proche synth¶tique du concept de Chemin ¯nancier de la faillite ". e Consid¶rant l'entreprise en di±cult¶ comme celle qui ne parvient pas e e a e µ r¶aliser de maniµre continue ses objectifs ¶conomiques de cr¶ation e e e de valeur et partant du fait que la r¶alisation continue de ces objec- e tifs ¶conomiques de l'entreprise suppose une rentabilit¶ et une liq- e e uidit¶ su±sante, coupl¶e a une solvabilit¶ d¶pendante elle-m^me de e e µ e e e la rentabilit¶ de l'entreprise et in°uen»ant sa liquidit¶, une trajectoire e c e ¯nanciµre de faillite peut alors ^tre trac¶e. e e e Figure 2 : Le Chemin de la D¶faillance " (Source : Ooghe H., Van e Wymeersch Ch., 1986) Initialement, un chi®re d'a®aires insu±sant ou des charges trop ¶lev¶es e e d¶t¶riorent la rentabilit¶ de l'entreprise. La capacit¶ d'auto¯nance- ee e e ment devient alors vite insu±sante par rapport aux investissements en immobilisations ou en actifs circulants. Il en r¶sulte un manque de e liquidit¶s et les dettes augmentent, entra^ e ³nant un montant de charges ¯nanciµres plus ¶lev¶. La solvabilit¶ de l'entreprise se d¶grade µ son e e e e e a 26